RG N : 07 / 00897
AFFAIRE :
Le G. F. A. de LABROUSSE, pris en la personne de Monsieur Z... Charles, gérant, C / Gilles X...,
Cécile Y... épouse X...
Demandes relatives à un bail rural
COUR D' APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 04 MARS 2008
A l' audience publique de la Chambre sociale de la cour d' appel de LIMOGES, le quatre mars deux mille huit a été rendu l' arrêt dont la teneur suit ;
ENTRE :
Le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE (G. F. A.) DE LABROUSSE, pris en la personne de Monsieur Z... Charles, gérant, dont le siège social est Lavergne- 87260 ST PRIEST LIGOURE
APPELANT d' un jugement rendu le 25 juin 2007 par le tribunal paritaire des baux ruraux de LIMOGES
Représenté par Maître Bertrand VILLETTE, avocat au barreau de LIMOGES
ET :
- Gilles X...,
- Cécile Y... épouse X...,
demeurant ensemble ...
Intimés au principal, appelants incidents
Représentés par Maître Philippe PASTAUD, avocat au barreau de LIMOGES
--- = = oO § Oo = =---
A l' audience publique du 05 février 2008, la Cour étant composée de Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre, de Monsieur Philippe NERVE et de Madame Anne- Marie DUBILLOT- BAILLY, Conseillers, assistés de Madame Geneviève BOYER, Greffier, Maître Bertrand VILLETTE et Maître Philippe PASTAUD, avocats, ont été entendus en leur plaidoirie.
Puis, Monsieur Jacques LEFLAIVE, Président de chambre a renvoyé le prononcé de l' arrêt, pour plus ample délibéré, à l' audience du 04 mars 2008 ;
A l' audience ainsi fixée, l' arrêt qui suit a été prononcé, ces mêmes magistrats en ayant délibéré.
LA COUR
Par acte notarié en date du 27 avril 2001, le C. F. A. de LABROUSSE a donné un bail à ferme à Monsieur et Madame Gilles X... un ensemble de parcelles à vocation agricole, situées sur le territoire de la commune de SAINT JEAN LIGOURE, ...
Le bail à ferme conclu pour une durée de 25 ans à compter du 18 avril 1995 incluait divers bâtiments dont une grange " auvergnate " utilisée pour abriter des ovins et stoker du fourrage.
Un incendie survenu le 24 décembre 2001 a entraîné la destruction totale du bâtiment ainsi loué.
Par demande enregistrée au greffe le 6 juin 2006, Monsieur et Madame Gilles X... ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de LIMOGES d' une demande tendant à obtenir :
la reconstruction du bâtiment détruit sur le fondement de l' article L. 411- 30 du code rural,
la minoration du fermage dans l' attente de la reconstruction par application de l' article 1722 du code civil,
des délais de paiement pour s' acquitter des fermages restant dus après minoration.
Après tentative infructueuse de conciliation en date du 25 septembre 2006, le tribunal paritaire des baux ruraux de LIMOGES a, par jugement en date du 25 juin 2007 :
débouté Monsieur et Madame Gilles X... de leur demande de reconstruction du bâtiment détruit,
dit que les loyers restant dus à hauteur de 39 069, 13 € et de 8 144, 11 € par Madame X... se compenseront avec le préjudice résultant, pour les époux X..., de la non reconstruction du bâtiment détruit,
débouté les parties de tous autres chefs de demande,
partagé les dépens par moitié entre les parties.
Suivant lettre recommandée avec accusé réception en date du 2 juillet 2007, le G. F. A. de LABROUSSE a régulièrement interjeté appel du jugement ainsi rendu.
Aux termes de conclusions déposées le 6 juillet 2007 et oralement soutenues à l' audience, le G. F. A. de LABROUSSE conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu' il a débouté les époux X... de leur demande de reconstruction du bâtiment détruit.
Par ailleurs, l' appelant conclut à la réformation du jugement entrepris en ce qu' il a rejeté ces demandes de paiement d' arriéré de fermages.
En conséquence, le G. F. A. de LABROUSSE demande à la cour de :
condamner Monsieur et Madame X... au paiement d' une somme de 39 069, 13 € correspondant aux échéances impayées dues au titre du bail conclu le 27 avril 2001,
condamner Madame X... à payer la somme principale de 8 144, 11 € due au titre du bail conclu le 16 octobre 2003,
condamner Monsieur et Madame X... au paiement d' une somme de 2 000 € sur le fondement de l' article 700 du nouveau code de procédure civile.
Aux termes de conclusions déposées le 11 décembre 2007 et oralement soutenues à l' audience, Monsieur et Madame Gilles X..., intimés au principal et appelants incidents, concluent à la réformation du jugement entrepris en demandant à la cour de :
condamner la G. F. A. de LABROUSSE à procéder à la reconstruction du bâtiment détruit (dans la limite des sommes versées par la compagnie GAN) dans les six mois à compter de la signification de l' arrêt à intervenir,
dire que passé ce délai, le G. F. A. de LABROUSSE y sera contraint sous peine d' astreinte de 200 € par jour de retard,
dire que le G. F. A. de LABROUSSE est responsable du préjudice souffert par les époux Gilles X... du fait de l' absence de reconstruction du bâtiment litigieux,
le condamner d' ores et déjà à lui verser une provision de 53 284 € et réserver les droits des époux X... dans l' attente de la fixation de leur préjudice par expertise comptable officieuse à la date la plus proche à laquelle la Cour examinera le dossier,
subsidiairement, ordonner une mesure d' expertise comptable en confiant à l' expert la mission sus décrite,
condamner le G. F. A. de LABROUSSE à verser aux époux Gilles X... une indemnité de 2 500 € sur le fondement de l' article 700 du nouveau code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d' appel.
MOTIFS DE L' ARRÊT
- Sur la demande de reconstruction du bâtiment :
ATTENDU qu' il est établi que le bâtiment à usage de grange et de bergerie, inclus dans le bail, a été détruit totalement par suite d' un incendie survenu le 24 décembre 2001 ;
Qu' il résulte des débats et de l' enquête de gendarmerie diligentée que l' origine de l' incendie réside dans les agissements de Monsieur Henri C..., ouvrier agricole travaillant pour le compte des époux X... ;
ATTENDU qu' aux termes de l' article L. 411- 30 du code rural :
" Lorsque la totalité des biens compris dans le bail sont détruits intégralement par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit. II- lorsqu' un bien compris dans le bail est détruit, en partie ou en totalité, par cas fortuit et que cette destruction compromet gravement l' équilibre économique de l' exploitation, le bailleur est tenu, si le preneur le demande, de reconstruire, à due concurrence des sommes versées par les compagnies d' assurance, ce bâtiment ou un bâtiment équivalent, Si la dépense excède le montant des sommes ainsi versées, le bailleur peut prendre à sa charge la totalité des frais engagés par la reconstruction et proposer au preneur une augmentation du prix du bail. Dans le cas où le preneur n' accepte pas l' augmentation proposée, le tribunal paritaire des baux ruraux, sur saisine de la partie la plus diligente, fixe le nouveau montant du bail. III- Dans le cas où le preneur participe au financement des dépenses de et reconstruction, il est fait application des dispositions des articles L. 411- 69, L. 411 – 71. Si le bien n' est pas reconstruit, le preneur peut demander la résiliation du bail. "
ATTENDU que les époux X... ne sauraient invoquer le bénéfice des dispositions de l' article L. 411- 30 du code rural pour exiger la reconstruction du bâtiment, dans la mesure où la destruction de celui- ci ne résulte pas d' un cas fortuit mais des agissements fautifs d' un préposé du preneur ;
ATTENDU, par ailleurs, que les époux X... invoquent au soutien de leur demande de reconstruction, une clause du bail en date du 27 avril 2001 (page 6, 6o) ainsi libellée :
" En cas de destruction d' un bâtiment loué, compromettant gravement l' équilibre économique de l' exploitation, en application de l' article L. 411- 30 du code rural, les bailleurs sont tenus si les preneurs le demandent, de reconstruire le bâtiment détruit ou un bâtiment équivalent, à due concurrence des sommes versées par les compagnies d' assurance.... " ;
ATTENDU qu' il résulte des termes ci- dessus rapportés que les parties ont fait une référence expresse aux dispositions de l' article L. 411- 30 du code rural ;
Que les parties n' ont pas, par ces termes, entendu déroger aux dispositions de l' article L. 411- 30 du code rural ;
ATTENDU, enfin, que les époux X... invoquent le bénéfice des dispositions de l' article L. 415- 3 du code rural aux termes duquel :
" Le paiement des primes d' assurance contre l' incendie des bâtiments loués, celui des grosses réparations et de l' impôt foncier, sont à la charge exclusive du propriétaire. EN cas de sinistre, ni le bailleur ni les compagnies d' assurance, ne peuvent invoquer un recours contre le preneur, s' il n' y a pas faute grave de sa part " ;
ATTENDU que les dispositions du dit article régissent l' obligation d' assurance du bailleur et le recours de celui- ci ou des compagnies d' assurance de celui- ci en cas de faute grave du preneur ;
ATTENDU que ces dispositions ne prévoient pas une obligation de reconstruction à la charge du bailleur ;
ATTENDU en définitive, qu' au vu des éléments qui précèdent, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu' il a débouté les époux X... de leur demande de reconstruction du bâtiment détruit, demande qui ne repose sur aucun fondement juridique ;
- Sur la demande au titre de l' arriéré de fermages et du préjudice d' exploitation :
ATTENDU que le montant de l' arriéré de fermages réclamé par le G. F. A. de LABROUSSE n' est pas discuté dans son mode de calcul ;
Que les décomptes produits font apparaître qu' à compter de l' année 2002, le loyer afférent aux bâtiments loués a été diminué des deux tiers ;
ATTENDU, par ailleurs, qu' il est établi que le G. F. A. de LABROUSSE a mis à la disposition des époux X... des bâtiments agricoles de remplacement ;
ATTENDU que la corrélation entre la destruction du bâtiment loué et le préjudice d' exploitation allégué par les époux X... n' apparaît pas établie ;
ATTENDU qu' au vu des éléments qui précèdent, il y a lieu de condamner les époux X... à régler l' arriéré de fermages restant dû ;
Que le jugement entrepris sera réformé de ce chef ;
- Sur l' article 700 du nouveau code de procédure :
ATTENDU qu' eu égard aux éléments de l' espèce et à la situation économique respective des parties, il n' y a pas lieu de faire application des dites dispositions ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement entrepris en ce qu' il a débouté les époux X... de la demande de reconstruction du bâtiment litigieux ;
Réformant pour le surplus et statuant à nouveau,
Condamne Monsieur et Madame Gilles X... au paiement de la somme de TRENTE NEUF MILLE SOIXANTE NEUF EUROS TREIZE (39 069, 13 €) au titre de l' arriéré de fermage afférent au bail notarié du 27 avril 2001 ;
Condamne Monsieur et madame Gilles X... au paiement de la somme de HUIT MILLE CENT QUARANTE QUATRE EUROS ONZE (8 144, 11 €) au titre de l' arriéré de fermage afférent au bail notarié du 16 octobre 2003 ;
Déboute les parties de tous autres chefs de demande ;
Condamne les époux X... aux entiers dépens, y compris les frais de sommation.
Cet arrêt a été prononcé à l' audience publique de la Chambre sociale de la cour d' appel de LIMOGES en date du quatre mars deux mille huit par Monsieur Jacques LEFLAIVE, président de chambre.