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10/01/2008 | FRANCE | N°13

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre civile 1, 10 janvier 2008, 13


RG N : 05/01509
AFFAIRE :
S.A.R.L. CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE
C/
S.A. COM. EXPERTISE CENTRE
responsabilité professionnelle - dommages et intérêts
grosse délivrée à maître JUPILE-BOISVERD, avoué
COUR D'APPEL DE LIMOGESCHAMBRE CIVILE PREMIERE SECTION---==oOo==---ARRET DU 10 JANVIER 2008---===oOo===---

A l'audience publique de la CHAMBRE CIVILE PREMIERE SECTION DE LA COUR D'APPEL DE LIMOGES, le DIX JANVIER DEUX MILLE HUIT a été rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
S.A.R.L. CORREZE ELECTRONIQUE SERVICEdont le siège social est 44 bis, avenue Vi

ctor Hugo - 19000 TULLE

représentée par Me Erick JUPILE-BOISVERD, avoué à la Courassistée d...

RG N : 05/01509
AFFAIRE :
S.A.R.L. CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE
C/
S.A. COM. EXPERTISE CENTRE
responsabilité professionnelle - dommages et intérêts
grosse délivrée à maître JUPILE-BOISVERD, avoué
COUR D'APPEL DE LIMOGESCHAMBRE CIVILE PREMIERE SECTION---==oOo==---ARRET DU 10 JANVIER 2008---===oOo===---

A l'audience publique de la CHAMBRE CIVILE PREMIERE SECTION DE LA COUR D'APPEL DE LIMOGES, le DIX JANVIER DEUX MILLE HUIT a été rendu l'arrêt dont la teneur suit :
ENTRE :
S.A.R.L. CORREZE ELECTRONIQUE SERVICEdont le siège social est 44 bis, avenue Victor Hugo - 19000 TULLE

représentée par Me Erick JUPILE-BOISVERD, avoué à la Courassistée de la SCP M. GOUT- E. DIAS INTER BARREAU TULLE BRIVE, avocats au barreau de TULLE représentée par Me DIAS, avocat.

APPELANTE d'un jugement rendu le 14 OCTOBRE 2005 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE BRIVE
ET :
S.A. COM. EXPERTISE CENTREdont le siège social est Rue Ernest Comte - La Marquisie - 19100 BRIVE-LA-GAILLARDE

représentée par la SCP COUDAMY, avoués à la Courassistée de Me MAISONNEUVE, avocat au barreau de

INTIMEE
---==oO§Oo==---
L'affaire a été fixée à l'audience du 22 Novembre 2007, après ordonnance de clôture rendue le 10 octobre 2007 la Cour étant composée de Madame Martine JEAN, Président de chambre, de Madame Christine MISSOUX-SARTRAND et de Monsieur Gérard SOURY, Conseillers, assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier. A cette audience, Madame Christine MISSOUX-SARTRAND, conseiller a été entendu en son rapport, Maîtres DIAS et MAISONNEUVE, avocats, ont été entendus en leurplaidoirie.

Puis Madame Martine JEAN, Président de chambre, a renvoyé le prononcé de l'arrêt, pour plus ample délibéré, à l'audience du 10 Janvier 2008.
A l'audience ainsi fixée, l'arrêt qui suit a été prononcé, ces mêmes magistrats en ayant délibéré.
---==oO§Oo==---LA COUR---==oO§Oo==---

La SARL CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE (CES) a conclu un contrat avec la société @COM.EXPERTISE qui a pris fin à l'initiative de la société CES à la fin de l'année 2001.
Le 14 novembre 2002 la SARL CES a été destinataire d'un avis de vérification de comptabilité à l'initiative de l'Administration fiscale.
A l'occasion de ce contrôle portant sur la période du 1er avril 1998 au 31 mars 2002, l'inspectrice a sollicité la production du grand livre ainsi que des journaux pour l'exercice 1995-1996 afin de vérifier la validité des amortissements réputés différés.
N'étant plus en possession des dits documents qui étaient restés entre les mains de la société @COM.EXPERTISE, la société CES est intervenue téléphoniquement à plusieurs reprises afin que ces derniers lui soient remis.
Malgré ce, à la date de la nouvelle visite de l'inspecteur des Impôts fixée au19 décembre 2002, ces documents n'avaient toujours pas été transmis à la société CES, de sorte que l'administration fiscale a refusé de considérer comme valable les amortissements réputés différés (A.R.D) qui avaient été retenus à l'époque par la société CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE, au motif que celle-ci n'avait pu présenter de comptabilité complète pour l'exercice clos le 31 janvier 1996, et plus particulièrement le grand livre relatif à cet exercice.
Cette situation s'est traduite par un premier redressement d'un montant de 2.785 euros au titre de l'exercice clos en 1999 pour les amortissements réputés différés, ainsi que par un deuxième, d'un montant de 1.021 euros au titre de l'impôt sur les sociétés.
En outre, la Société d'expertise comptable a omis de déclarer pour l'année 2001 deux véhicules qui étaient en crédit bail, de sorte qu'un troisième redressement à l'encontre de la société CES intervenait au titre de la taxe professionnelle pour l'année 2001, d'un montant de 1.288 euros.
La SARL CES estime que par ses carences, la société @COM.EXPERTISE a commis une faute car elle n'a pas accompli avec une diligence normale les obligations qui lui incombaient et qui est par nature une obligation de résultat (voir notamment Tribunal de commerce de BOBIGNY 28 septembre 1989) .
Par ailleurs la société @COM.EXPERTISE a commis une seconde erreur en ne procédant pas à la déclaration des deux véhicules en crédit bail, et ce alors même que ces éléments étaient à la disposition de cette société à la date d'établissement de la déclaration, et ce en violation de son obligation au terme de laquelle l'expert comptable est chargé d'une mission d'investigation et d'alerte pour les tâches qui lui sont confiées par ses clients, c'est à dire qu'elle doit recenser, et investiguer sur l'ensemble des éléments d'actifs susceptibles de pouvoir entrer dans la base des calculs de la taxe litigieuse .
En s'abstenant de le faire, et en omettant ainsi de procéder à la déclaration d'un certain nombre d'actifs, ce qui s'est traduit par un redressement à la charge de sa cliente, la société @COM.EXPERTISE a commis également une faute de nature à engager sa responsabilité, dont il est résulté pour sa cliente un préjudice, dans la mesure où elle a du assumer un redressement fiscal d'un montant total de 5.094 euros, au paiement duquel elle a sollicité devant les premiers juges sur le fondement de l'article 1147 du Code civil, la condamnation de la société @COM.EXPERTISE.
Elle a également sollicité la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts et 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
En réponse la société @COM.EXPERTISE a conclu au principal au débouté de la société CES, à titre subsidiaire qu'il soit constaté que le préjudice subi par la société CES se limiterait aux pénalités imposées par l'administration fiscale, et en tout état de cause, à la condamnation de la société CES à lui payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du NCPC.
La société @COM.EXPERTISE conteste en effet avoir commis les fautes qui lui sont reprochées, à savoir un défaut de diligence en ne fournissant pas certains documents comptables dans un délai raisonnable, et une négligence en omettant de déclarer deux véhicules en crédit bail.
Elle a soutenu en effet qu'il lui était impossible matériellement de fournir ces documents le jour de la visite de l'inspecteur des Impôts fixée au 19 décembre 2002 dans la mesure où la société CES les lui avait seulement demandés ce jour là, alors que cette dernière avait reçu un avis de vérification de comptabilité depuis le 14 novembre 2002 l'avertissant qu'un contrôle au siège de la société serait effectué le 26 novembre 2002 portant sur la période du ler avril 1998 au 31 mars 2002.
Et la société CES savait depuis le 3 décembre 2002 que Mme D..., inspecteur en charge du redressement, sollicitait la production du grand livre et des journaux pour l'exercice 1995-96.
Elle estime que c'est donc uniquement en raison de la négligence de la société CES que les documents comptables n'ont pu être présentés dans les délais à l'administration fiscale, et qu'en conséquence, celle-ci doit être déboutée de ses demandes tendant en mettre en oeuvre sa responsabilité.
En tout état de cause, la société @COM.EXPERTISE soutient qu'il n'existerait aucun lien de causalité entre le redressement notifié au titre des A.R.D portant sur l'exercice 1999 et la non production du grand livre comptable qui concerne l'exercice 96.
En effet le grand livre ne concerne aucunement les A.R.D, ces derniers figurant sur la liasse fiscale, document que Monsieur E... avait en sa possession.
Par ailleurs, Corrèze Electronique Service s'abstient de communiquer copie du courrier de contestation adressée à l'Administration fiscale, et elle estime qu'elle est en droit de se demander si les pièces comptables dont disposaient la société CES à compter du 7 janvier 2003 ont bien été transmises aux services fiscaux, et si en outre, cette dernière a bien exercé ses recours sur cette base.
En aucun cas un reproche ne pourrait donc être formulé à son encontre.
La SARL CES prétend en outre que le redressement au titre des ARD aurait entraîné un redressement de l'administration au titre de l'impôt sur les sociétés d'un montant de 1.021 euros; que toutefois, estimant que ce redressement ne pouvant lui être imputable, ce poste de préjudice invoqué par CES ne saurait être retenu.
A titre surabondant, elle fait observer que la preuve du lien de causalité entre le refus de prise en compte des amortissements réputés différés, et le redressement au titre de l'impôt sur les sociétés, n'est pas rapportée.
Enfin aucun redressement d'un montant de 1.021 euros n'a été notifié à la société CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE au titre de l'impôt sur les sociétés consécutivement au redressement notifié au titre des ARD.
Enfin la société @COM.EXPERTISE note qu'il résulte du courrier adressé à l'Administration fiscale le 29 janvier 2003 par la société CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE qu'elle a fait l'objet d'un redressement à hauteur de 4.773 euros au niveau de L'IS "provision des comptes clients", et l'Administration fiscale confirme en réponse aux observations du contribuable en date du 27 mars 2003, que le redressement notifié à la société CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE au titre de l'IS est consécutif aux reprises opérées au titre des provisions effectués sur créance douteuse et litigieuse, et non sur une modification des amortissements réputés différés.
Et à cet égard, elle constate que dans son courrier recommandé en date du 3 juillet 2003 la société JURIDICA mandatée par la société CES, a sollicité uniquement le paiement d'une somme de 2.785 euros au titre du redressement sur les amortissements réputés différés sans faire référence à la prise en charge d'un quelconque redressement au titre de l'IS.
En second lieu, la société CES sera également déboutée de sa demande d'indemnisation à hauteur de 1.288 euros correspondant à une redressement au titre de la taxe professionnelle 2001 au motif qu'elle aurait omis de déclarer certains véhicules ce qui aurait donc provoqué un redressement, car la société CES ne verse à l'appui de ses prétentions aucune pièce justificative autre que la fiche d'imposition supplémentaire qu'elle a reçue le 14 octobre 2003. Or, l'examen attentif de ce document ne permet nullement de mettre en évidence le fait que le redressement de l'Administration fiscale aurait été opéré en raison d'une omission de déclaration de deux véhicules en crédit bail, de sorte qu'elle sera déboutée de cette seconde demande.
En outre, elle tient à faire observer qu'un cabinet d'expertise comptable n'est tenu qu'à une obligation de moyen et à ce titre, il n'a aucune obligation de vérifier sur place les informations fournies par son client. La jurisprudence étant constante sur ce point.
Statuant dans cette instance, le Tribunal de commerce de BRIVE, par décision du 14 octobre 2005, a débouté la SARL CES de ses demandes, ainsi que la SA @.COM EXPERTISE de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive, et a condamné la SARL CES aux entiers dépens de l'instance.
Les premiers juges ont estimé qu'il résultait des pièces du dossier que c'était effectivement à cause de l'absence de production du grand livre que l'Administration fiscale avait procédé à un redressement de la SARL CES, et que la SA @.COM EXPERTISE ne prouvait pas la remise de ce document à son client.
Toutefois les premiers juges ont constaté qu'à l'appui de son action, la SARL CES ne fournissait :
- ni la notification du redressement qui lui avait été adressée à la suite du contrôle,
- ni l'avis de mise en recouvrement, qui lui permettrait de façon indiscutable de quantifier le montant du redressement et son incidence pour elle,
- ni enfin la preuve du règlement effectué,
de sorte que la SARL CES ne pouvait réclamer à son cabinet comptable une indemnisation pour un préjudice dont elle ne justifiait, ni dans sa réalité, ni dans son montant.
Concernant la taxe professionnelle, les premiers juges ont estimé que la SARL CES ne fournissait aucun élément au dossier qui prouvait que son cabinet comptable avait omis de déclarer les deux véhicules en crédit bail, car ils ont estimé que les deux pièces émanant de l'Administration fiscale produites au dossier ne permettaient pas d'établir la cause du redressement et donc, de rechercher la responsabilité de la SA @.COM EXPERTISE.
La SARL CES a régulièrement interjeté appel de cette décision.
Par conclusions déposées au secrétariat greffe de la Cour le 9 octobre 2006 auxquelles il est expressément et plus amplement référé pour les moyens de droit et de fait y exposés, la SARL CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE sollicite voir
" déclarer recevable et bien fondé son appel,
- réformer le jugement entrepris,
- condamner en conséquence la société @COM.EXPERTISE à lui payer la somme de 5.094 euros au titre du préjudice matériel subi, outre celle de 3.000 euros au titre du préjudice moral, majorées des intérêts à compter de la décision à intervenir,
- condamner enfin @.COM EXPERTISE à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance que Me Jupile Boisverd pourra recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du NCPC."
Au soutien de son appel, la société CES sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit que le redressement fiscal qu'elle avait subi était imputable à la société d'expertise comptable mais en revanche, elle considère que c'est à tort que la juridiction de première instance a cru pouvoir la débouter aux motifs qu'elle était dans l'incapacité de justifier de la notification du redressement qui lui avait été adressé, de l'avis de mise en recouvrement, ainsi que de la preuve du règlement effectué.
Elle expose en effet qu'il résulte des pièces qu'elle a versées aux débats, qu'elle justifie de la notification de redressement au titre de l'impôt sur les sociétés et de la taxe professionnelle ainsi que l'émission d'avis supplémentaire au titre des impositions sus-rappelées et qu'enfin, elle justifie également des règlements effectués à travers les délais de paiement sollicités auprès de l'Administration fiscale par la production de ses relevés de compte qui font ressortir que l'ensemble des impositions complémentaires imputables au manquement de la société @COM.EXPERTISE a bien été acquitté, de sorte qu'elle sollicite la condamnation de la société @COM.EXPERTISE sur le fondement de l'article 1537 du Code civil à lui rembourser la somme de 5.094 euros exposés du fait des manquements à ses obligations professionnelles.
Par ailleurs la société @COM.EXPERTISE ne saurait soutenir qu'elle n'a pu être en mesure matériellement de fournir à la SARL CES les documents comptables sollicités car elle rapporte la preuve que si certes, elle ne les lui a expressément demandé par courrier recommandé que le 19 décembre 2002 en revanche, elle justifie par les factures de téléphone que pas moins de cinq communication téléphoniques ont été passés à la société @COM.EXPERTISE pendant la période correspondant au redressement fiscal en cours, et plus particulièrement entre le 5 décembre 2002 et 17 décembre 2002, alors qu'il est établi par ailleurs que ce n'est que le 3 décembre 2002 que l'inspecteur en charge du redressement en l'occurrence Mme D... sollicitait la production du grand livre et des journaux pour l'exercice 95-96.
Or, n'ayant plus de relations contractuelles avec ce cabinet d'expertise comptable depuis 2001, elle n'avait aucune raison d'entretenir en 2002 des communications avec cette société à raison de 5 fois en 10 jours, si ce n'est pour solliciter les documents qui avaient été demandés par l'Administration fiscale.
En outre, le courrier qu'elle lui a adressé le 19 décembre 2002 faisait état notamment de ce grand livre et de ces journaux qui étaient en possession de la société d'expertises comptables et lui rappelait qu'après plusieurs appels dans ses services cette société avait retrouvé les journaux pour cette période (message téléphonique du 18 décembre 2002) or le contenu de cette correspondance n'a jamais été contesté par la société @COM.EXPERTISE, de sorte que la société expertise comptable sera déboutée dans ses moyens de défense.
Par ailleurs elle tient à faire observer que de jurisprudence constante, la société d'expertise comptable est soumise à une obligation de résultat lorsqu'il s'agit d'un acte simple tel que par exemple tenir à la disposition de son client les documents comptables qui ont été établis pour le compte de celui-ci.
Enfin ces documents ont finalement été communiquées par l'expert comptable le 7 janvier 2003, soit plus de 20 mois après la première réquisition ce qui paraît totalement déraisonnable, y compris en période de fin d'année.
Par ailleurs, la société CES estime que la société @COM.EXPERTISE ne peut raisonnablement contester le lien de causalité qui peut exister entre les redressements opérés par l'Administration fiscale et l'absence de fourniture du grand livre, dès lors qu'il résulte expressément des observations que lui a faites en réponse l'administration fiscale, à ses contestations tirées de la responsabilité son ancien cabinet comptable :
- "Au cas particulier, vous n'avez pu présenter la comptabilité complète pour l'exercice clos le 31 janvier 1996 (voir procès-verbal du 19 décembre 2002 contresigné par Monsieur E..., gérant de la société) à savoir le grand livre relatif à cet exercice, en conséquence l'administration n'a pu contrôler l'existence et le montant des amortissements réputés différés créés par l'entreprise.
Dès lors les amortissements réputés différés reportés sur l'exercice clos en 1999 au titre des exercices antérieurs ne peuvent être admis.
Le redressement de 18.272 francs soit 2.785 euros opéré au titre de l'exercice clos en 1999, est donc maintenu et en conséquence, les conséquences financières notifiées le 20 décembre 2002 resteront inchangé".
Ce courrier de l'administration fiscale démontre clairement que c'est bien l'absence de fourniture du grand livre comptable pour l'exercice concerné qui est directement à l'origine du redressement fiscale querellé, contrairement à ce que soutient de mauvaise foi la société @COM.EXPERTISE.
Par ailleurs elle justifie devant la Cour d'appel l'intégralité du montant des sommes réglées à l'administration fiscale qui se trouve justifiée par les documents versés aux débats par la société CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE.
Enfin, et de manière surabondante il résulte également d'une attestation établie par la société KPMG que l'absence de communication du grand livre comptable est bien directement à l'origine du redressement fiscale querellé.
Et c'est par une totale méconnaissance des règles régissant la matière que la société @ COM.EXPERTISE tente de soutenir que l'absence de ces documents n'est pas à l'origine du redressement fiscal.
Il convient en effet de rappeler en vertu des dispositions de l'article 39-2 2ème alinéa et 209-1 3ème et 4ème alinéas du Code général des Impôts, que pour ouvrir droit au régime des amortissements réputés différés, les amortissements doivent être en premier lieu effectivement constatés en comptabilité, et en matière déficitaire. C'est en effet cette inscription qui matérialise la décision prise par l'entreprise pour bénéficier du régime des amortissements réputés différés, lesdits amortissements bénéficiant alors d'un régime de report limité.
Il résulte donc des constatations effectuées par l'administration fiscale qu'au cas particulier la société CES n'a pu présenter de comptabilité complète pour l'exercice clos le 31 janvier 1996 à savoir le grand livre relatif à cet exercice, qu'en conséquence l'administration n'a pu contrôler l'existence et le montant des amortissements réputés différés créé par les entreprises.
Or il résulte d'une jurisprudence constante qu'un contribuable qui entend imputer sur les résultats d'un exercice le montant des déficits d'exercices prescrits et d'amortissements réputés différés au cours de tel exercice doit justifier de la réalité ainsi que de la réunion des conditions auxquelles le report est subordonné, et une telle preuve ne peut être apportée que par la présentation de la comptabilité complète des exercices antérieurs concernés accompagnée des pièces justificatives correspondantes et une comptabilité incomplète ne permet pas de dégager les résultats des opérations effectuées par l'entreprise tel qu'elle est défini par l'article 38 du Code général des impôts et ne suffit donc pas à établir l'existence et le montant des déficits allégués (en ce sens notamment : Conseil d'Etat 6 novembre 1985 no 41-290, Conseil d'Etat 13 novembre 1987 no 56- 447, ou encore Tribunal administratif de Toulouse 30 novembre 1999 no 95-1226 et 95- 2227).
Ainsi, tant en droit qu'en fait, la preuve du lien de causalité entre la carence de l'expert comptable et le redressement fiscale, est bien établie.
Enfin, sur la négligence de la société @COM.EXPERTISE dont l'établissement de la déclaration de taxe professionnelle pour l'exercice 2001, celle-ci ne peut sérieusement qu'elle a omis de faire figurer dans la déclaration litigieuse un certain nombre d'éléments d'actifs, et plus particulièrement des véhicules dont elle connaissait l'existence pour avoir établi pour le même exercice, le bilan de la société CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE. Or, c'est cette omission qui a entraîné un redressement au titre de la taxe professionnelle et un certain nombre de pénalités supplémentaires, qu'il serait inéquitable qu'elle conserve à sa charge.
Par ailleurs, il est important de noter que sur la période de contrôle effectué par l'administration fiscale, si bien des difficultés ont été découvertes sur la période gérée par la société @COM.EXPERTISE, aucune remarque en revanche n'a été formulée sur la gestion de la comptabilité, et des déclarations subséquentes, effectuée par la société KPMG.
La société CES estime que la responsabilité de cette société d'expertise comptable est démontrée, et l'action engagée parfaitement justifiée. Elle sera en outre condamnée à lui verser des dommages et intérêts pour avoir tardé délibérément à ne pas lui remettre les documents comptables qui ont conduit à ce redressement.
Par conclusions en réponse déposées au secrétariat greffe de la Cour le 13 avril 2007, auxquelles il est expressément et plus amplement référé pour les moyens de droit et de fait y exposés, la SA COM EXPERTISE CENTRE sollicite voir confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, et condamner la société CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du NCPC, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel et pour ces derniers en accordant à la SCP Coudamy, avoué, le bénéfice de l'article 699 du NCPC.
Elle expose que fin 2001 Monsieur E... gérant de la société CES lui a fait part de sa volonté de mettre fin à la relation contractuelle au profit du cabinet d'expertise comptable KPMG ; que le 4 décembre 2001 elle lui a donc adressé un courrier en réponse au terme duquel elle prenait acte de la volonté de départ de Monsieur E... et sollicitait le paiement des honoraires lui restant dus ; que le 11 décembre 2001 la société CORREZE ELECTRONIQUE a réclamé le détail de la somme demandée et le 18 décembre 2001, elle lui a retourné une facture détaillée d'un montant de 13.042,40 francs soit 1.988,30 euros, de sorte qu'elle a conservé par devers elle les documents comptables de sa cliente conformément aux règles de déontologie régissant la profession d'expert comptable, qu'elle n'a remis que le 7 janvier 2003 à la société CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE.
Par ailleurs elle ne peut que maintenir devant la Cour, qu'elle n'a été informée que tardivement du redressement fiscal, soit le19 décembre 2002, jour où l'inspecteur des impôts dressait son procès-verbal au terme duquel celui-ci constatait l'absence du grand livre et des journaux auxiliaires relatif à l'exercice clos en 1996, de sorte qu'en les sollicitant seulement le jour même du contrôle il lui était impossible de les mettre à la disposition de la société CES le jour de la visite de l'inspecteur des impôts.
En outre, le relevé des communications téléphoniques versées aux débats devant la Cour que la société CES lui aurait adressées, ne démontre rien si ce n'est l'incapacité de la partie adverse de rapporter la preuve des prétendus faits qu'elle invoque.
Par ailleurs, elle maintient qu'il n'existe aucun lien de causalité entre le redressement notifié au titre des ARD qui concerne l'exercice 99, et la non production du grand livre comptable qui concerne l'exercice 96, lequel en outre, ne concerne aucunement les ARD qui figurent sur la liasse fiscale, document que Monsieur E... avait en sa possession.
Enfin, les pièces nouvelles qu'a versées la société CES en cause d'appel ne correspondent aucunement à ses demandes chiffrées au titre de son préjudice, puisque celle-ci verse un courrier de l'administration fiscale en date du 18 août 2003 lui octroyant un échéancier pour le règlement d'une somme de 1.436,15 euros sans préciser en quoi correspond ce montant, et aucun élément ne permet d'affirmer qu'il correspond en tout ou partie au redressement qui lui a été notifié.
En tout état de cause, celle-ci ne justifie avoir réglé au Trésor Public qu'une somme de 1.436 euros au moyen de quatre chèques de 359 euros en date du 18 septembre 2003, 20 octobre 2003, 3 décembre 2003 et 17 décembre 2003, somme qui est très nettement inférieure aux demandes indemnitaires de la société CES, et elle n'est donc pas fondée à demander le remboursement des sommes dont elle ne justifie pas avoir effectué le règlement.
Par ailleurs celle-ci ne verse aucun justificatif de la fiche d'imposition supplémentaire qu'elle a reçue le 14 octobre 2003 et qui serait liée à l'absence de déclaration des deux véhicules en crédit bail au titre de la taxe professionnelle, et l'examen attentif de ce document ne permet nullement de mettre en évidence ce fait, c'est ce qu'a exactement constaté le Tribunal de commerce, et il sera confirmé en cela.
Enfin un cabinet d'expertise comptable n'a aucunement l'obligation de vérifier sur place les informations fournies par son client, la jurisprudence est constante sur ce point.
Elle sollicite donc la confirmation pure et simple du jugement entrepris.
MOTIFS DE L'ARRET
Attendu qu'il est établi que la société CES a fait l'objet d'un contrôle fiscal en décembre 2002 portant sur la période du 1er avril 1998 au 31 mars 1999, suite auquel elle a été soumise à un redressement fiscal car l'administration n'a pu contrôler la pertinence des amortissements réputés différés créés par l'entreprise, pour défaut de présentation du grand livre comptable et des journaux auxiliaires relatifs à l'exercice clos 1996 restés entre les mains du cabinet comptable, ce qui a été constaté par procès verbal dressé le 19 décembre 2002 par l'inspectrice chargée du contrôle fiscal.
Attendu que les premiers juges après avoir dit à juste raison que le redressement fiscal était imputable au défaut de présentation de ce document, ont estimé qu'il ne pouvait être fait aucun reproche à la société @COM.EXPERTISE, qui avisée seulement le 19 décembre 2002, soit concomitamment à la visite de l'inspectrice des impôts en charge du contrôle, ne pouvait matériellement le remettre à temps à la société CES.
Attendu que s'il est effectivement établi que la société CES n'a adressé à la société @COM.EXPERTISE un courrier de réclamation concernant notamment le grand livre que le 19 décembre 2002, jour où l'administration avait demandé de le consulter, il est également établi par les relevés téléphoniques versés en cause d'appel, que la société CES a entretenu des relations téléphoniques avec ce cabinet comptable le 5 décembre à 2 reprises, le 10 décembre à 2 reprises, ainsi que le 17 décembre auxquelles fait allusion le courrier adressé le 19, or la société CES n'avait aucun motif autre que de réclamer les documents restés en possession de ce cabinet comptable, dès lors que ces appels se situent précisément dans cette courte période du redressement et qu'il est établi que ces deux sociétés n'avaient plus de relations contractuelles depuis la fin de l'année 2001, date à laquelle la société CES avait mis un terme à leur contrat;
Qu'en tout état de cause, il convient de relever que si ce cabinet comptable avait quelque raison, selon elle, de conserver provisoirement entre ses mains la comptabilité de la société CES jusqu'au 18 décembre 2001, date à laquelle celle-ci adressait en réponse à la société CES une facture détaillée de ses honoraires dont il n'est pas prétendu qu'ils n'auraient pas été réglés, celle-ci n'avait ensuite plus aucun motif de la retenir par devers elle, et c'est sans droit que néanmoins elle ne les a pas restitués dès le paiement de ses honoraires, mettant ainsi en difficulté la société CES qui n'a pu les présenter ; qu'enfin, malgré les demandes qui lui ont été faites, il est établi que la société @COM.EXPERTISE n'a remis les journaux, mais pas le grand livre comptable, que le 7 janvier 2003, tel qu'en atteste le reçu co-signé par les deux sociétés.
Attendu que ce manquement constitue manifestement une faute imputable à la société @COM.EXPERTISE, directement à l'origine du redressement fiscal subi par la société CES lié à la seule non présentation du grand livre journal, tel que cela résulte expressément du courrier qui a été adressé à cette société le 23 mars 2003 par l'agent verbalisateur de l'administration fiscale;
Qu'en conséquences, le jugement entrepris sera réformé sur ce point et la société @COM.EXPERTISE, déclarée responsable subi du préjudice subi de ce chef par la société CES.
Attendu par ailleurs, qu'il est établi également par deux courriers de l'administration fiscale en date du 13 février 2003 et du 14 octobre 2003, que la société @COM.EXPERTISE a omis de déclarer pour l'exercice 2001, la valeur locative de deux véhicules pris en crédit bail selon contrats du 23 avril et 21 mai 1996, dont l'année d'imposition se situait en 2001, entraînant pour la société CES un redressement fiscal au titre de la taxe professionnelle 2001 due par la société ;
Que dès lors sont inopérants les moyens opposés par la société @COM.EXPERTISE selon lequel il ne lui appartient pas de vérifier les informations fournies par son client et qu'aucune pièce attestant de ce redressement n'aurait été versé aux débats, dès lors que cette société comptable a déclaré ces contrats de location en 1996 et qu'il lui appartenait en tant que société comptable chargée du suivi de la comptabilité de la société CES de ne pas oublier de déclarer en 2001 leur valeur locative qui allait servir d'assiette au calcul de l'impôt;
Qu'enfin, la société CES justifie de ce redressement tel que cela résulte des courriers et de la fiche d'imposition supplémentaire adressés le 13 février et 14 octobre 2003 par l'administration fiscale à la société CES.
Attendu par ailleurs, qu'il résulte du courrier adressé le 27 mars 2003 par la direction générale des impôts à la société CES que malgré ses réclamations, le redressement est maintenu au titre des amortissements réputés différés à hauteur de 4 773 €, et de la "situation récapitulative" et de l'avis d'imposition supplémentaire adressés par l'administration fiscale que le redressement maintenu au titre de la taxe professionnelle s'élève à la somme de 1 288 €.
Attendu qu'il en résulte que le préjudice subi par la société CES est réel, justifié et il importe peu que celle-ci ait pu obtenir des délais de paiement dès lors qu'elle devra s'en acquitter, ce dont d'ailleurs elle justifie par ses relevés bancaires qui concordent avec l'échéancier de l'administration fiscale.
Attendu en conséquences que la société @COM.EXPERTISE sera condamnée à indemniser la société CES de ses préjudices nés de ses manquements à concurrence de :
* 2 785 € au titre du redressement des amortissements réputés différés,* 1 021 € au titre du redressement de l'impôt sur les sociétés* 1 288 € au titre du redressement de la taxe professionnelle,

soit la somme totale de 5 094 €.
Attendu par ailleurs, que la société CES sollicite dans le dispositif de ses conclusions la somme de 3 000 € au titre de son préjudice moral ; que toutefois, n'ayant pas conclu sur ce point, elle ne met pas en mesure la Cour de connaître la nature et l'étendue de ce préjudice moral allégué et ne justifie donc pas de préjudices autres que celui qui sera réparé par le remboursement du montant du redressement fiscal, et de ses frais irrépétibles pour lesquelles il lui sera alloué la somme de 1 500 €.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant en audience publique et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
INFIRME le jugement entrepris,
ET STATUANT à nouveau,
DIT que la société @COM.EXPERTISE a commis des manquements professionnels constituant des fautes directement à l'origine des préjudices subis par la SARL CORREZE ELECTRONIQUE SERVICE,
En conséquences,
CONDAMNE la société @COM.EXPERTISE à lui payer en réparation la somme totale de 5 094 €.
La CONDAMNE également à lui payer la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du NCPC,
DEBOUTE la société @COM.EXPERTISE de sa demande de dommages et intérêts,
LA CONDAMNE aux entiers dépens de première instance et d'appel, et pour ces derniers en accordant à Me JUPILE- BOISVERD le bénéfice de l'article 699 du NCPC.
CET ARRET A ETE PRONONCE A L'AUDIENCE PUBLIQUE DE LA CHAMBRE CIVILE PREMIERE SECTION DE LA COUR D'APPEL DE LIMOGES EN DATE DU DIX JANVIER DEUX MILLE HUIT PAR MADAME JEAN, PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 13
Date de la décision : 10/01/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Brive-la-Gaillarde, 14 octobre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2008-01-10;13 ?
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