La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006949069

France | France, Cour d'appel de Limoges, Ct0074, 03 février 2006, JURITEXT000006949069


ARRÊT N : N du Parquet : P 05/00497 ER/MD X... Y... C/ PARTIE CIVILE Z... A... Contradictoire

COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE CORRECTIONNELLE

=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=

ARRÊT DU 03 FÉVRIER 2006

=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=

A l'audience du TROIS FÉVRIER DEUX MILLE SIX l'arrêt suivant a été prononcé publiquement, sur appel d'un jugement rendu par le Tribunal Correctionnel de GUÉRET en date du 19 Mai 2005 ;

--===oOOEOo===--

COMPOSITION DE LA COUR

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ PRÉSIDENT : Robert JAOUEN CONSEILLERS : Elia

ne RENON, Christine MISSOUX-SARTRAND MINISTÈRE PUBLIC : Lionel CHASSIN, Substitut Général

GREFFIER : Catherine CO...

ARRÊT N : N du Parquet : P 05/00497 ER/MD X... Y... C/ PARTIE CIVILE Z... A... Contradictoire

COUR D'APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE CORRECTIONNELLE

=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=

ARRÊT DU 03 FÉVRIER 2006

=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=:=

A l'audience du TROIS FÉVRIER DEUX MILLE SIX l'arrêt suivant a été prononcé publiquement, sur appel d'un jugement rendu par le Tribunal Correctionnel de GUÉRET en date du 19 Mai 2005 ;

--===oOOEOo===--

COMPOSITION DE LA COUR

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ PRÉSIDENT : Robert JAOUEN CONSEILLERS : Eliane RENON, Christine MISSOUX-SARTRAND MINISTÈRE PUBLIC : Lionel CHASSIN, Substitut Général

GREFFIER : Catherine COUDOUR

Le Président et les Conseillers sus-désignés en ayant seuls délibéré conformément à la loi ;

--===oOOEOo===--

PARTIES DEVANT LA COUR

ENTRE :

Monsieur le PROCUREUR GÉNÉRAL

APPELANT ;

E T :

X... Y... né le 15 Décembre 1939 à GARCHES (92), fils de et de X... Madeleine, de nationalité française, divorcé, retraité, jamais condamné, demeurant Résidence du Vieux chêne Bâtiment A 46 rue de

Nerdre 03100 MONTLUCON

PRÉVENU d' OUTRAGE A UNE PERSONNE DÉPOSITAIRE DE L'AUTORITÉ PUBLIQUE, faits commis courant 2002, à GUERET (23)

INTIME,

Comparant en personne, assisté de Maître ASTIER Jean Lucien, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND ;

E T E N C O R E :

Z... A... Le Bourg 82440 MIRABEL ;

PARTIE CIVILE,

Non comparante, représenté par Maître GUITARD Marie Claude, avocat ; DÉCISION DONT APPEL

Sur l'action publique :

Par jugement no407/2005 en date du 19 mai 2005, le Tribunal Correctionnel de GUERET a relaxé X... Y... et renvoyé des fins de la poursuite sans peine ni dépens

Sur l'action civile :

Le Tribunal a reçu Monsieur Z... A... en sa constitution de partie civile, l'a débouté de sa demande après l'avoir déclarée mal fondée. A P P E L B...

Appel de cette décision a été interjeté par :

M. le Procureur de la République, le 25 Mai 2005

Monsieur Z... A..., le 30 Mai 2005 DÉROULEMENT DES DÉBATS

A l'audience publique du 13 Janvier 2006,

Le prévenu a comparu en personne, assisté de Maître Jean-Louis ASTIER, avocat, et son identité a été constatée ;

Madame le Conseiller RENON a été entendue en son rapport ;

Monsieur X... Y... a été interrogé ;

Maître GUITARD, Avocat, a présenté les moyens d'appel de la partie civile ;

Monsieur le Substitut Général a été entendu en ses réquisitions ;

Maître ASTIER Jean Lucien, Avocat, a présenté les moyens de défense du prévenu ;

Puis l'affaire a été mise en délibéré à l'audience du 03 FÉVRIER 2006, Monsieur le Président en ayant avisé les parties ;

--===oOOEOo===--

L A C O U R

François X... a été embauché le 26 juillet 1994 par la SA MEUBLES SAUTHON en qualité d'attaché de direction expert ; après avoir été suspendu de ses fonctions, il a été licencié pour faute grave le 10 mars 1997 ;

Il a saisi le Conseil des Prud'hommes de GUÉRET qui, par jugement du 15 décembre 1997 l'a débouté de ses demandes ; cette décision a été confirmée par arrêt de la Cour d'Appel en date du 14 février 2000 laquelle l'a condamné à payer à son ex employeur la somme de 100 000 francs à titre de dommages et intérêts, condamnation qui sera annulée par la Cour de Cassation le 12 juin 2002 ;

Parallèlement à cette procédure juridictionnelle, diverses plaintes pénales étaient déposées par Monsieur X... qui le 28 octobre 1998 adressait au Procureur de la République de GUÉRET une lettre dans laquelle il affirmait que le PDG de la SA MEUBLES SAUTHON, François C... en arrivait à des extrémités dont on ne sait où elles peuvent s'arrêter, essayait de faire jouer de puissantes relations et avait pour objectif d'éviter les tribunaux pour les raisons exposées dans le tract distribué au personnel de SAUTHON et dont une copie était jointe pour replacer la manoeuvre dans son contexte d'origine ;

Il était notamment indiqué que dans ce document que le dirigeant des

MEUBLES SAUTHON avait saigné à blanc la société pour s'enrichir personnellement, en grande partie avec de l'argent public ;

Le 26 novembre 1998 le Procureur de la République de GUÉRET saisissait par soit transmis le SRPJ de LIMOGES aux fins d'enquête ; Celle-ci était initialement confiée au capitaine de Police Guy D... auquel succédait le capitaine de police A... Z... ; Ce dernier établissait le 27 décembre 2000 un rapport de synthèse se concluant ainsi : "L'enquête diligentée n'a pas permis d'établir si les faits dénoncés par Monsieur X... sont bien fondés, au contraire Monsieur C... a pu justifier point par point les actions contestées. Ainsi faut-il voir dans cette affaire un règlement de compte entre un pervers narcissique et un chef d'entreprise qui a seulement eu le mérite de réussir grâce à son travail";

Le 18 janvier 2001 le Procureur de la République de GUÉRET prenait une décision de classement sans suite au motif que les infractions étaient insuffisamment caractérisées ;

Courant 2002 Monsieur X... adressait à des élus creusois des courriers mettant notamment en cause l'enquête diligentée par le capitaine de police Monsieur Z... lequel déposait plainte avec constitution de partie civile le 25 juin 2002, des chefs de diffamation publique, outrage envers un dépositaire de l'autorité publique et violation d'un secret de l'instruction ; il mentionnait expressément dans sa plainte que ces courriers avaient fait l'objet d'une large diffusion à deux municipalités différentes ne pouvant être considérés comme liées par une communauté d'intérêts ;

Le premier de ces écrits daté du 13 mai 2002 adressé à Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les conseillers municipaux de GUÉRET contenait les propos suivants : "Combien de creusois savent que

l'enquête du SRPJ de LIMOGES concernant la recherche d'abus de biens sociaux de C... a été totalement truquéeä Le fait même d'avoir dû effectuer un travail de maquillage et de contrefaçon aussi énorme pour arriver au constat que "l'infraction a été insuffisamment caractérisée" prouve à quel point cette enquête était motivée..."

"Combien de Guérétois savent que Monsieur Z... le lieutenant de police qui a réalisé l'enquête truquée du SRPJ de LIMOGES a été promu en fin de carrière commissaire à la remise de son rapport ä Rapport qui, grâce à un nombre incroyable d'irrégularités voire de falsifications vise à blanchir intégralement C..."

Le 10 juin 2002 le Maire et les conseillers municipaux de SAINTE FEYRE étaient destinataires d'une lettre comportant des termes sensiblement identiques :

"Combien de Guérétois savent que Monsieur Z... le lieutenant de police qui a réalisé l'enquête truquée du SRPJ de LIMOGES a été promu en fin de carrière commissaire à la remise de son rapport ä Rapport qui, grâce à un nombre incroyable d'irrégularités voire de falsifications vise à blanchir intégralement C..."

Le 18 septembre 2002 le conseil de la partie civile faisait connaître au magistrat instructeur qu'un nouveau document outrageant était en circulation ;

Il apparaissait que Monsieur X... avait réécrit à sa façon une lettre rédigée en février 2000 par Monsieur C... pour informer les Guérétois du résultat tant de la procédure prud'hommale que de l'instance en diffamation l'ayant opposé à Monsieur X... ; dans la mouture de celui-ci figurait la phrase suivante : "Je remercie très sincèrement l'officier de police A... Z... qui a truqué l'enquête du SRPJ de LIMOGES pour tenter de me blanchir".

Mis en examen pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique et violation du décret de l'instruction, Monsieur X... n'a

pas contesté être l'auteur des écrits litigieux mais considéré qu'il ne pouvaient être qualifiés d'outrages dès lors qu'ils correspondaient à la vérité, ajoutant que s'il devait y avoir outrage c'était Monsieur Z... lui-même qui l'avait fait à sa profession ;

L'instruction, face à la passivité du magistrat instructeur a surtout été menée par la mise en examen qui a cherché à faire jouer l'exception de vérité en procédant à un examen critique de l'enquête menée par le capitaine de police Z...

- non exploitation de nombreuses pistes,

- disparition de pièces annexées à des procès-verbaux d'audition effectués par Monsieur D...,

- enquête fondée sur des à priori avec mise en cause personnelle de Monsieur X... alors même qu'il ne l'a jamais rencontré ;

Les quelques investigations tardivement ordonnées par le magistrat instructeur ont établi que les renseignements généraux n'avaient transmis au Procureur de la République de GUÉRET aucun rapport sur Monsieur C... et ses activités et que Monsieur Z..., inspecteur de police devenu lieutenant de police lors de l' entrée en vigueur de la réforme de 1995 sans avoir la qualité d'officier de police judiciaire avait été promu capitaine en janvier 2000 ;

Renvoyé devant le Tribunal Correctionnel sur chef d'outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique, Monsieur X... a été relaxé au terme du jugement rendu le 19 mai 2005 par le Tribunal Correctionnel de GUÉRET qui a également débouté la partie civile de

ses demandes ;

Le Ministère Public et Monsieur Z..., partie civile ont relevé appel de cette décision.

Vu les conclusions déposées le 12 janvier 2006 par la partie civile tendant à voir la Cour

- réformer le jugement entrepris,

- retenir Monsieur X... dans les liens de la prévention du chef d'outrage

- déclarer recevable et fondée la constitution de partie civile,

- condamner Monsieur X... au paiement des sommes de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts et 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale ;

Le Ministère Public requiert la confirmation de la relaxe en première instance, relevant que l'écrit a été rendu public, que s'agissant d'un outrage indirect, il n'est pas établi que Monsieur X... avait l'intention que l'écrit soit porté à la connaissance de la partie civile, qu'aucune requalification n'est envisageable au regard du caractère alternatif de la plainte et de la prescription ;

Monsieur X... qui affirme maintenir les propos qu'il a écrits afin de rectifier l'atteinte portée à son honneur conclut également à la confirmation de sa relaxe aux motifs :

- que les écrits prétendument outrageants ont fait l'objet d'une publicité auprès de diverses personnes non liées par une communauté d'intérêts,

- qu'ils n'ont pas été adressés directement à Monsieur Z... qui en a été expressément informé par Monsieur C...,

- qu'il n'a jamais eu l'intention que les écrits soient portés à la connaissance de Monsieur Z...,

- que la vérité ne saurait être outrageante. SUR QUOISUR QUOI

ATTENDU que l'article 433-5 du Code de Procédure Pénale ne réprime l'outrage par écrit qu'à la condition qu'il n'ait pas été rendu public ;

Que s'agissant des lettres du 13 mai et 10 juin 2002 dont Monsieur X... revendique la paternité, les premiers juges ont, par des motifs pertinents que la Cour adopte considéré que l'infraction n'était pas constituée dès lors qu'elles avaient été rendues publiques, publicité dont se prévalait d'ailleurs largement Monsieur Z... dans sa plainte avec constitution de partie civile ;

Qu'il n'est en effet pas contesté que les deux lettres ont été adressées aux Maire et conseillers municipaux respectivement de GUÉRET et de SAINTE FEYRE ;

Qu'il est constant que la distribution d'un écrit à des personnes étrangères les unes aux autres suffit à caractériser la publicité au sens de l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881 et que les élus municipaux ne forment pas un groupement de personnes liées par une communauté d'intérêts ;

Qu'il résulte en outre du dossier que la lettre du 13 mai 2002 a été lue en audience publique du Tribunal Correctionnel de GUÉRET lors de l'évocation d'une autre affaire ;

Que la publicité ainsi donnée à ces deux lettres exclut l'application de l'article 433-5 du Code Pénal ;

ATTENDU que la publicité n'existe par contre pas pour le montage opéré par Monsieur X... d'après la lettre circulaire diffusée par Monsieur C... au sein de la SA MEUBLES SAUTHON et qui a manifestement, donnée lieu à une diffusion identique, le personnel d'une entreprise ne constituant pas un public ;

Mais ATTENDU que cette lettre circulaire n'a pas été adressée directement à Monsieur Z... qui n'en a eu connaissance que par la volonté de Monsieur C... lequel n'en était pas lui-même le destinataire direct et surtout n'avait pas avec Monsieur Z... des relations de parenté, d'affection, de collaboration ou de subordination hiérarchique telles qu'il était évident qu'il devait nécessairement lui rapporter les propos contenus dans ce document de sorte que les conditions posées par la jurisprudence dans l'hypothèse d'un outrage indirect ne sont pas réunies et que la relaxe de Monsieur X... doit être confirmée ;

Qu'il apparaît en effet qu'aucune autre qualification ne peut en l'espèce être retenue notamment sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881 tant au regard de la nullité de la plainte avec constitution de partie civile de Monsieur Z..., indispensable pour engager l'action publique mais qui, pour un fait unique, a visé des qualifications alternatives que des règles de prescription applicables en la matière ;

ATTENDU que Monsieur Z..., partie civile, a été, à bon droit, débouté de ses demandes ;

P A R C E B... M O T I F B...

et ceux non contraints des premiers juges L a C o u r :

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire

DÉCLARE les appels recevables

SUR L'ACTION PUBLIQUE

CONFIRME le jugement entrepris

SUR L'ACTION CIVILE

CONFIRME le jugement entrepris. COMPOSITION DE LA COUR LORS DU PRONONCE DE L'ARRÊT PRÉSIDENT : Robert JAOUEN CONSEILLERS : Eliane RENON, Martine BARBERON-PASQUET MINISTÈRE PUBLIC : Lionel CHASSIN, Substitut Général GREFFIER : Catherine COUDOUR LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Ct0074
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006949069
Date de la décision : 03/02/2006

Analyses

ATTEINTE A L'AUTORITE DE L'ETAT - Atteinte à l'administration publique commise par les particuliers - Outrage - Ecrits ou images de toute nature non rendus publics - Exclusion - Cas - /

Selon l'article 433-5 du Code pénal, l'outrage par écrit n'est constitué qu'à la condition que l'écrit n'ait pas été rendu public. Or la distribution d'un écrit à des personnes étrangères les unes aux autres suffit à caractériser la publicité au sens de l'article 23 de la loi du 29 juillet 1881


Références :

Code pénal, article 433-5

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2006-02-03;juritext000006949069 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award