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21/10/2002 | FRANCE | N°S02;0135

France | France, Cour d'appel de Limoges, Chambre sociale, 21 octobre 2002, S02 et 0135


Arrêt n° Dossier n° 2002/135 Affaire Nathalie X... C/ S.A. PENAUILLE Licenciement JL / MCF À l'audience publique de la chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES, le vingt et un octobre deux mille deux, a été rendu l'arrêt dont la teneur suit : Entre : Nathalie X... domiciliée "Les Rivières" à BEAUMONT (19390), aide juridictionnelle totale n° 3876/2002 du 26 septembre 2002, appelante d'un jugement rendu par le conseil de prud'hommes de TULLE le 8 janvier 2002, représentée par Maître Marie-Christine CARRIER, avocat Et : La S.A. PENAUILLE au capital de 5 100 000 inscrite au regi

stre de commerce et des sociétés sous le numéro CRETEIL B7020...

Arrêt n° Dossier n° 2002/135 Affaire Nathalie X... C/ S.A. PENAUILLE Licenciement JL / MCF À l'audience publique de la chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES, le vingt et un octobre deux mille deux, a été rendu l'arrêt dont la teneur suit : Entre : Nathalie X... domiciliée "Les Rivières" à BEAUMONT (19390), aide juridictionnelle totale n° 3876/2002 du 26 septembre 2002, appelante d'un jugement rendu par le conseil de prud'hommes de TULLE le 8 janvier 2002, représentée par Maître Marie-Christine CARRIER, avocat Et : La S.A. PENAUILLE au capital de 5 100 000 inscrite au registre de commerce et des sociétés sous le numéro CRETEIL B702021114 agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège ZAC de la Haie Griselle, 6, allée des Coquelicots à BOISSY -SAINT -LÉGER CEDEX (94478), intimée principale et appelante incidente, représentée par Maître DEBEAUCE substituant Maître Pascal LA VILLE, avocats du barreau d'ORLÉANS ; À l'audience publique du 23 septembre 2002, la cour étant composée de Monsieur Jacques LEFLAIVE, président de chambre, de Monsieur Philippe Y... et de Monsieur Didier BALUZE, conseillers, assistés de Madame Geneviève BOYER, greffier, Maîtres CARRIER et DEBEAUCE, avocats, ont été entendus en leur plaidoirie ; Puis, Monsieur le président a renvoyé le prononcé de l'arrêt, pour plus ample délibéré, à l'audience du 21 octobre 2002 ; À l'audience ainsi fixée, l'arrêt qui suit a été prononcé, les mêmes magistrats en ayant délibéré. LA COUR La société PENAUILLE a engagé le 2 octobre 2000 Nathalie X... comme agent de propreté niveau AP 1 coefficient 150 pour un horaire de 151, 67 heures par mois. Un avenant ramenant l'horaire mensuel à 56 heures a été signé le 5 mars 2001 et un second avenant réduisant à nouveau l'horaire mensuel à 26 heures a été signé le 14 mai 2001. Nathalie X... a saisi le conseil de prud'hommes de TULLE le 5 juin 2001 et a demandé à cette juridiction de prononcer la résiliation du contrat de

travail aux torts de la société PENAUILLE et de condamner celle-ci à lui payer les sommes suivantes : - rappel de salaires: 48984,45 F, - congés payés correspondants : 4 898,00 F - indemnité compensatrice de préavis : 6 665,00F - dommages-intérêts: 80 000,00 F - indemnité au titre de l'article 700 du nouveau: 5 000,00 F code de procédure civile La société PENAUILLE a conclu au débouté de l'ensemble des demandes et, ou subsidiairement, à la limitation du rappel de salaires à 16 835, 15 francs et a réclamé reconventionnellement un euro à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et 6 500 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Par jugement du 8 janvier 2002 le conseil de prud'hommes de TULLE a condamné la société PENAUll.,LE à payer à 2578,16 euros, soit 16911,64 francs au titre de rappel de salaires et 257,79 euros, soit 1 691 francs, de congés payés correspondants à Nathalie JUILLET et a débouté celle-ci du surplus de ses prétentions. Nathalie X... a relevé appel de ce jugement le 18 janvier 2002 Par écritures soutenues oralement à l'audience elle demande à la cour de confirmer la condamnation au titre du rappel de salaires et de congés payés et de prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de la société PENAUILLE et de condamner celle-ci à lui payer les sommes suivantes : - rappel de salaires pour les mois d'avril et mai 200 l : 331,60 euros - indemnité compensatrice de préavis : 1 016,07 euros, - dommages-intérêts : 12 195,92 euros, - indemnité au titre de l'article 700 du nouveau: 1 000,00 euros code de procédure civile Elle expose l'argumentation suivante au soutien de ses prétentions: La société PENAUILLE ne lui fournissait pas le nombre d'heures de travail contractuellement prévu. Elle a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de voir résilier le contrat de travail, son employeur ne respectant pas le dit contrat et la rémunérant de façon fantaisiste. Postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes

la société PENAUILLE lui a proposé des postes mais elle ne faisait plus partie de l' entreprise. Le juge garde toute latitude pour fixer la date d' effet de la rupture, qui se situe en l'espèce à la date de la saisine du conseil de prud'hommes. Par écritures soutenues oralement à l'audience la société PENAUILLE, formant appel incident, conclut au débouté de l'ensemble des demandes de Nathalie X... et réclame à son encontre I 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle expose l'argumentation suivante au soutien de ses prétentions: Elle a été contrainte de déplacer Nathalie X... de certains sites à la suite de plaintes de certains clients et lui a proposé d'autres sites, comme le lui permettrait la clause de mobilité figurant au contrat de travail, mais Nathalie X... n'a pas donné suite à ces propositions. La société PENAUlLLE était donc fondée à ne la payer qu'en fonction des heures réellement travaillées. Deux clients ont en effet demandé son remplacement car elle ne leur donnait pas satisfaction. D'autres postes ont été alors proposés à Nathalie X... mais elle ne les a pas tous acceptés ou alors elle ne donnait pas suite aux propositions. Il a d' ailleurs fallu la convoquer deux fois pour la joindre afin de trouver une solution. Il lui a été indiqué qu' on lui fournirait un véhicule pour ses déplacements. Le conseil de prud'hommes a considéré à juste titre qu'elle avait abandonné son poste. La salariée qui demande la résiliation ne peut quitter son emploi d'elle-même en imputant unilatéralement la responsabilité de la rupture à son employeur. En proposant à Nathalie X... de travailler sur d'autres sites que ceux initialement prévus la société PENAUILLE a respecté son obligation de fournir du travail à sa salariée. Subsidiairement si la rupture est imputée à l'employeur Nathalie X..., qui a moins de deux années d'ancienneté, doit justifier du préjudice consécutif à la rupture. D'autre part, le

préavis ne peut pas être alloué sur la base de 151,67 heures. SUR QUOI, LA COUR: Attendu que Nathalie X... demande la résiliation de son contrat de travail aux torts de son employeur au motif qu'il ne lui a pas fourni le nombre d'heures de travail contractuellement prévu ; Attendu que la société PENAUILLE lui conteste le droit à demander la résiliation dans la mesure où la demande de résiliation en justice ne l'autorisait pas à abandonner immédiatement son emploi ; Mais attendu que la gravité du comportement d'une des parties à un contrat peut justifier que l'autre y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls ( en ce sens Civ. 1° 20 février 2001 D 2001 SC 3239) ; Attendu que, dans la mesure où l'employeur ne fournit pas le nombre d'heures de travail contractuellement prévu à son salarié, celui-ci est en droit de considérer qu'un tel manquement rend impossible la poursuite du contrat de travail et de prendre l'initiative de la rupture soit en en demandant la résiliation judiciaire du contrat de travail soit en démissionnant ; Que la circonstance que le salarié s'est borné à demander la résiliation judiciaire du contrat de travail sans démissionner ne permet pas à l'employeur de lui imposer la poursuite des relations et de lui imputer à faute d'avoir cessé de fournir sa prestation de travail ; Attendu qu'il est constant au vu des bulletins de paie versés aux débats que le nombre d'heures travaillées et payées du mois d'octobre 2000 au mois de mai 2001 a été systématiquement inférieur et de façon substantielle à celui prévu au contrat et à ses avenants successifs ; Qu'en effet du mois d'octobre 2000 au mois de février 2001 Nathalie X... n'a travaillé que de 50,42 heures à 114,44 heures par mois alors que son emploi était à temps plein ; Qu'aux mois de mars et d'avril 2001 elle n'a travaillé que 45,75 heures et 20,5 au lieu de 56 ; Qu' au mois de mai elle n'a travaillé aucune heure alors qu' il en était prévu 26; Attendu que la société PENAUILLE fait valoir que

ses clients, mécontents du travail fourni par Nathalie X..., exigeaient son départ, qu'elle lui a alors proposé d'autres postes et que Nathalie X... en a refusé ; Attendu que les seules plaintes de clients dont il est justifié sont celle de lasociété TIAG INDUSTRIE au début du mois de novembre 2000 et celle de la société CGSM le 5 février 2001 ; Qu'elles n'expliquent pas pourquoi Nathalie JUlLLE n'a travaillé que 50,42 heures dès le premier mois de son embauche et la plainte de la société TIAG n'a pas eu de conséquences négatives puisqu' elle a travaillé 114,44 heures le mois suivant ; Que, si des clients se plaignaient, il appartenait à l'employeur de donner à sa salariée des directives pour que ses négligences ne soient plus réitérées ( en ce sens LIMOGES 9 novembre 1999 BICC 15 février 2000 n° 193), alors que, paradoxalement, le directeur régional de l'entreprise, Patricia AUBERTY, atteste qu'aucun courrier de mise au point ou d'avertissement n'a été envoyé à Nathalie X... malgré les réclamations répétées des clients ; Que les propositions de poste refusées dont il est justifié (Conseil Général dela Corrèze, GEB à BRIVE-LA-GAILLARDE, MADRIAS à USSAC, Hôtel de LA PROMENADE à SOUlLLAC, TRESORERIE GENERALE à TULLE) sont toutes postérieures à la saisine du conseil de prud'hommes ; Attendu que, dès lors que son employeur ne l'a fait travailler qu'un nombre d'heures très inférieur à celui prévu par le contrat initial et ses avenants sans pouvoir se prévaloir d'un cas de force majeure, la salariée est bien fondée à demander la résiliation de son contrat de travail aux torts de la société PENAUILLE ; Attendu que la résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée à l'initiative du salarié et aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ( en ce sens Soc 20 janvier 1998 D 1998 J 350 note RADE) ; Que Nathalie X... peut donc prétendre à une indemnité au moins égale aux six derniers mois de salaire et à l'indemnité

compensatrice de préavis ; Qu' au vu des bulletins de paie produits aux débats le montant de la première doit être fixé, en l'absence de tout autre élément sur le préjudice, à 26059,29 francs, soit 3 972,71 euros, et celui de la seconde à 1 142,55 francs, soit 174, 18 euros ; Attendu, en ce qui concerne la demande de rappel de salaire, que le conseil de prud'hommes a alloué à ce titre 16911,64 francs et 1 691 francs de congés payés ; Que, sous réserve d'une légère erreur de calcul, la somme de 16911,64 francs représente un rappel de salaire correspondant à la différence entre le salaire convenu et le salaire effectivement payé, pour la période du mois d'octobre 2000 au mois de mars 2001 ; Attendu qu'en l'état actuel de la procédure Nathalie X... conclut à la confirmation de la condamnation prononcée et réclame un rappel de salaire pour les mois d'avril et mai 2001 ; Que la somme de 2175,14 francs, soit 331,60 euros, qui est demandée à ce titre, n'excède pas ce à quoi elle peut légitimement prétendre ; Attendu qu'il y a lieu de condamner la société PENAUILLE aux dépens et aux frais irrépétibles supportés par Nathalie X... en première instance et en appel ; LA COUR, Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi ; -Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de TULLE en date du 8 janvier 2002 en ses dispositions prononçant condamnation au titre de rappel de salaire et des congés payés correspondants en ce qu'elles concernent la période du mois d'octobre 2000 au mois de mars 2001 ; -Réforme le dit jugement pour le surplus de ses dispositions -Statuant à nouveau, -Prononce la résiliation du contrat de travail de Nathalie X... aux torts de la société PENAUlLLE ; -Condamne la société PENAUILLE à payer à Nathalie X... les sommes suivantes :indemnité

compensatrice de préavis: cent soixante quatorze euros dix huit centimes (174,18 euros),

indemnité au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile mille euros (I 000 euros) ; -Dit que la société PENAUILLE devra remettre à Nathalie X... l'attestation destinée à l'ASSEDIC, un certificat de travail et des bulletins de paie rectifiés dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sous astreinte de dix euros (10 euros) par jour de retard ; -Condamne la société PENAUILLE aux dépens de première instance et d'appel ; Cet arrêt a été prononcé à l'audience publique de la chambre sociale de la cour d'appel de LIMOGES en date du vingt et un octobre deux mille deux par Monsieur le président Jacques LEFLAIVE. Le greffier ,

Le président, Geneviève BOYER.

Jacques Leflaive


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Limoges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : S02;0135
Date de la décision : 21/10/2002
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Imputabilité - Imputabilité à l'employeur - Inexécution par l'employeur de ses obligations

Dès lors qu'un employeur, sans pouvoir se prévaloir d'un cas de force majeure, ne fait travailler son salarié qu'un nombre d'heures très inférieur à celui prévu par le contrat de travail initial et ses avenants,ce dernier est bien fondé à demander la résiliation de son contrat de travail aux torts de l'employeur. Cette résiliation prononcée à l'initiative du salarié et aux torts de l'employeurs produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.limoges;arret;2002-10-21;s02 ?
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