ARRET N°24/281
N° RG 23/00446
N°Portalis DBWA-V-B7H-CNLN
Mme [U] [W] épouse [D]
C/
Mme [K] [B] [W]
COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 16 JUILLET 2024
Décision déférée à la cour : Ordonnance du Juge de la Mise en État, près de Tribunal Judiciaire de Fort de France en date du 18 Septembre 2023, enregistrée sous le n° 22/02125 ;
APPELANTE :
Madame [U] [W] épouse [D]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Driss EL HARZLI, avocat au barreau de MARTINIQUE
INTIMEE :
Madame [K] [B] [W]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Daniel LUC-CAYOL, avocat au barreau de MARTINIQUE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Mai 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine PARIS, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour, composée de :
Présidente : Mme Christine PARIS, Présidente de Chambre
Assesseur : M. Thierry PLUMENAIL, Conseiller
Assesseur : Mme Claire DONNIZAUX, Conseillère
Greffière, lors des débats : Mme Béatrice PIERRE-GABRIEL,
Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 16 Juillet 2024 ;
ARRÊT : Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte en date du 21 octobre 2022 madame [U] [W] a assigné devant le tribunal judiciaire de Fort-de-France madame [K] [W] au visa des dispositions des articles 1992 et 1993 du code civil aux fins de l'entendre condamner à rembourser à la succession la somme de 114'000 € avec intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2013, 7000 € à titre de dommages-intérêts et 3000 € à titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance en date du 18 septembre 2023 le juge de la mise en état a statué comme suit :
- déclare irrecevable l'action de madame [U] [W] comme se heurtant à l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Fort-de-France 26 juillet 2022,
- condamne madame [U] [W] à payer à madame [K] [W] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Par déclaration en date du 29 novembre 2023, madame [U] [W] a fait appel de chacun des chefs de cette ordonnance.
L'affaire a été orientée à bref délai le 8 janvier 2024.
Dans ses premières et dernières conclusions communiquées par voie électronique le 8 février 2024 madame [U] [W] demande à la cour de statué comme suit :
- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par madame [U] [W] épouse [D],
- Infirmer l'ordonnance entreprise par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Fort-de-France en date du 18 septembre 2023 en toutes ses dispositions ;
Statuer à nouveau
- rejeter la fin de non-recevoir soulevée par madame [K] [W],
- déclarer madame [U] [W] recevable en son action,
- condamner madame [K] [W] à la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- dépens de droit.
Se fondant sur les dispositions de l'article 1355 du code civil elle soutient que les conditions requises pour l'autorité de la chose jugée ne sont pas réunies, la chose demandée n'étant pas la même, la cause non plus ainsi que la qualité des parties.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 7 mars 2024 madame [K] [W] demande à la cour de statuer comme suit :
- rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,
- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue le 18 septembre 2023 par le juge de la mise en état,
- condamner madame [U] [W] épouse [D] à payer à madame [K] [W] la somme de 7 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux dépens.
Elle fait valoir que l'on ne peut attraire la même partie pour réclamer la même chose sur un fondement juridique différent et qu'en conséquence l'action de madame [U] [W] se heurte à l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt du 26 juillet 2022 de la cour d'appel de Fort-de-France.
Il est référé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties à leurs dernières conclusions susvisées.
L'ordonnance de clôture du 21 mars 2024.
L'affaire a été retenue à l'audience collégial rapporteur du 17 mai 2024 et mise en délibéré au 16 juillet 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes des dispositions de l'article 1355 du code civil l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
La cour d'appel de Fort-de-France dans son arrêt du 26 juillet 2022 a confirmé le jugement du tribunal judiciaire de Fort-de-France du
2 juin 2020 sauf en ce qu'il avait rejeté la demande d'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession de Madame [C] [V] [W].
Le tribunal judiciaire de Fort-de-France dans son jugement du 2 juin 2020 avait déclarée recevable mais non fondée l'action en rapport à la succession de Madame [C] [V] [W] décédée le [Date décès 1] 2013, de la somme de 114'000 € remise à madame [K] [W] le 17 décembre 2008 par Maître [G] [H] notaire associé à [Localité 4] en vertu d'une procuration reçue le 28 septembre 2007 correspondant au prix de vente d'un terrain situé à Sainte Luce.
Le tribunal avait débouté madame [U] [W] et Madame [X] [J] [W] de leur demande de rapport de cette somme à l'actif successoral ainsi que de leur demande de dommages-intérêts.
La cour a rejeté les demandes de rapport à la succession au motif qu'elles étaient fondées sur les dispositions de l'article 778 du Code civil et que madame [K] [W] à qui il était reproché un recel successoral n'avait pas la qualité d'héritière.
Le tribunal avait effectivement été saisi au visa des articles 815 et suivants et 778 du code civil d'une demande de rapport à la succession.
Aux termes des dispositions de l'article 778 du Code civil, sans préjudice de dommages-intérêts, l'héritier qui a recelé des biens des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés.
Il n'est pas contesté et il est établi que madame [K] [W] n'a pas la qualité d'héritière de madame [C] [V] [W].
Dans le cadre de la présente instance, madame [U] [W] a assigné devant le tribunal judiciaire de Fort-de-France, madame [K] [W] par acte du 21 octobre 2022 sur le fondement des dispositions des articles 1992 et 1993 du code civil en sa qualité de mandataire de Madame [C] [W]. Le tribunal est donc saisi d'une action en reddition de comptes à l'encontre du mandataire de Madame [C] [W].
Aux termes des dispositions de l'article 1993 du Code civil tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût point été dû au mandant.
Il ne s'agit dès lors pas d'un simple changement de moyen juridique à l'appui de la demande en paiement au profit de la succession de la somme de 114'000 € et la cour ne peut que constater que dans l'action ayant donné lieu à l'arrêt du 26 juillet 2022 madame [K] [W] était assignée en qualité d'héritière, alors que dans le cadre de la présente action elle est assignée en qualité de mandataire de Madame [C] [W].
En conséquence madame [K] [W] ne peut se prévaloir de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France en date du 26 juillet 2022 pour s'opposer à la recevabilité de l'action de madame [U] [W].
Il convient d'infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état en toutes ses dispositions dont appel.
Succombant madame [K] [W] supportera les dépens et conservera ses frais irrépétibles.
Il est équitable qu'elle prenne en charge les frais exposés en appel par madame [U] [W], non compris dans les dépens, évalués à 800,00 € au titre l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME l'ordonnance du juge de la mise en état en date du 18 septembre 2023 en toutes ses dispositions dont appel ;
Statuant à nouveau
REJETTE la fin de non recevoir de madame [K] [W] tirée de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France du 26 juillet 2022 ;
DÉCLARE recevable l'action de madame [U] [W] à l'encontre de madame [K] [W] ;
MET les dépens à la charge de madame [K] [W] ;
CONDAMNE madame [K] [W] à verser à madame [U] [W] la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Signé par Mme Christine PARIS, Présidente de Chambre et Mme Micheline MAGLOIRE, Greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,