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28/05/2024 | FRANCE | N°23/00087

France | France, Cour d'appel de Fort-de-France, Chambre civile, 28 mai 2024, 23/00087


ARRET N°



N° RG 23/00087





N°Portalis DBWA-V-B7H-CLYN















M. [K] [M] [V]





C/



M. [Z] [T]

















COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE



CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 28 MAI 2024





Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire de Fort de France, en date du 03 janvier 2023, enregistré sous le n° 21/00014.





APPELANT :
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Monsieur [K] [M] [V]

[Adresse 6]

[Localité 2]



Représenté par Me Chantal MEZEN, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

Me Chantal SAINT-CYR, de la SELARLU SAINT-CYR-AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS





INTIME :



Monsieur [Z] [T]

[Adresse 7]

[Localité 5]


...

ARRET N°

N° RG 23/00087

N°Portalis DBWA-V-B7H-CLYN

M. [K] [M] [V]

C/

M. [Z] [T]

COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 28 MAI 2024

Décision déférée à la cour : jugement du tribunal judiciaire de Fort de France, en date du 03 janvier 2023, enregistré sous le n° 21/00014.

APPELANT :

Monsieur [K] [M] [V]

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représenté par Me Chantal MEZEN, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

Me Chantal SAINT-CYR, de la SELARLU SAINT-CYR-AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIME :

Monsieur [Z] [T]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représenté par Me Marie-Laure AGIAN, avocat au barreau de MARTINIQUE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C-97209-2023-000534 du 16/03/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de FORT DE FRANCE)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Mars 2024 sur le rapport de Mme Nathalie RAMAGE, devant la cour composée de :

Présidente : Mme Nathalie RAMAGE, présidente de chambre

Assesseur : Mme Amandine PELATAN, vice-présidente placée

Assesseur : M. Thierry PLUMENAIL, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Mme Béatrice PIERRE-GABRIEL,

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 28 mai 2024 ;

ARRÊT : contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'alinéa 2 de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte du 08 juillet 1932, [R] [A] a acquis une parcelle de terre 32 ares et 32 centiares située sur la commune du [Localité 5], quartier [Localité 3].

Par acte de notoriété du 27 novembre 2014 reçu par Me [W] [U] [B], notaire à [Localité 4], une prescription acquisitive a été constatée au profit de M. [Z] [T] sur la parcelle T[Cadastre 1] d'une contenance de 32a et 32ca, située quartier [Localité 3] au [Localité 5].

Contestant cette prescription acquisitive, M. [K] [M] [V] a, par exploit d'huissier en date du 08 décembre 2020, fait citer M. [Z] [T] devant le tribunal judiciaire de Fort-de-France aux 'ns notamment de prononcer la nullité de l'acte de notoriété acquisitive établi le 27 novembre 2014 et d'ordonner la liquidation des opérations de compte-liquidation et partage de la succession de [R] [A].

Par jugement contradictoire du 03 janvier 2023, le tribunal a :

- déclaré recevable l'action exercée par M. [K] [M] [V] à l'encontre de M. [Z] [T],

- dit que M. [Z] [T] avait acquis la propriété par prescription acquisitive de la parcelle section T n°[Cadastre 1] sise au [Localité 5], quartier [Localité 3] d'une contenance de 32 ares et 32 centiares,

- rejeté la demande de M. [K] [M] [V] de nullité de l'acte de notoriété du 27 novembre 2014 constatant la prescription acquisitive au pro't de M. [Z] [T],

- débouté M. [K] [M] [V] de sa demande d'ouverture des opérations de compte-liquidation et partage de la succession de M. [R] [A],

- débouté M. [K] [M] [V] de sa demande indemnitaire,

- débouté M. [Z] [T] de sa demande indemnitaire,

- rejeté la demande de M. [K] [M] [V] relative à l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [K] [M] [V] à verser à M. [Z] [T] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [K] [M] [V] aux entiers dépens,

- ordonné la publication du jugement auprès du service de la publicité foncière de [Localité 4].

Par déclaration reçue le 14 février 2023, M. [V] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses premières conclusions du 13 mai 2023 et dernières du 20 septembre 2023, l'appelant demande de :

- éclarer recevable et bien fondé son appel ;

Y faisant droit,

-infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

*dit que M. [Z] [T] avait acquis la propriété par prescription acquisitive de la parcelle section T n°[Cadastre 1] sise au [Localité 5] quartier [Localité 3] d'une contenance de 32 ares et 32 centiares,

*rejeté la demande de M. [K] [M] [V] de nullité de l'acte de notoriété du 27 novembre 2014 constatant la prescription acquisitive au profit de M. [Z] [T],

*débouté M. [K] [M] [V] de sa demande d'ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de M. [R] [A],

*débouté M. [K] [M] [V] de sa demande indemnitaire,

*rejeté la demande de M. [K] [M] [V] relative à l'article 700 du CPC,

*condamné M. [K] [M] [V] à verser à Mr [Z] [T] la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du CPC,

*condamné M. [K] [M] [V] aux entiers dépens,

*ordonné la publication du jugement auprès de la publicité foncière de fort de France ;

Et statuant à nouveau,

- prononcer la nullité de l'acte de notoriété acquisitive établi le 27 novembre 2014 suivant acte de notoriété acquisitive reçu par Me [W] [U] [B] notaire à [Localité 4], publié au bureau des hypothèques de [Localité 4] le 11 décembre 2014, volume 2014 P n°5741 en ce que cet acte vise la parcelle T [Cadastre 1],

- ordonner la publication de la décision à intervenir à la conservation des hypothèques de [Localité 4],

- dire que la parcelle sur laquelle repose une maison à usage d'habitation sise sur la commune de [Localité 5] lieudit [Localité 3] cadastrée section T numéro [Cadastre 1] pour une contenance de 33a 30 ca dépend de la succession de M. [R] [A] ;

En conséquence,

- ordonner la liquidation les opérations de compte-liquidation et partage de la succession de M. [R] [A],

- désigner M. le président de la chambre interdépartementale des notaires de la Martinique,

- commettre un de MM. les juges du siège pour surveiller les opérations de partage et faire un rapport sur l'homologation de la liquidation s'il y a lieu,

- dire qu'en cas d'empêchement des notaires, juge, ils seront remplacés par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie la plus diligente,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- décharger M. [K] [V] des condamnations prononcées contre lui en principal, intérêts, frais et accessoires,

- confirmer pour le surplus la décision déférée en ses dispositions non contraires aux présentes et plus précisément en ce qu'elle a dit M. [K] [M] [V] recevable en son action,

- condamner M. [Z] [T] à porter et payer à M. [K] [V] la somme de 6 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [Z] [T] en tous les dépens.

Par ses premières et dernières conclusions du 11 juillet 2023, l'intimé demande de :

- confirmer le jugement querellé du 3 janvier 2023 en tous points,

- condamner M. [K] [M] [V] à payer à Mr [Z] [T] la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner M. [L] [M] [V] aux entiers dépens de l'instance.

La clôture de l'instruction est intervenue le 08 février 2024.

L'affaire a été évoquée à l'audience du 22 mars 2024 et la décision a été mise en délibéré au 28 mai 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées et au jugement déféré.

MOTIFS :

1/ Sur la prescription acquisitive

Le tribunal, au visa des articles 712, 2258, 2272 alinéa 1er et 2261 du code civil, a retenu que la possession de M. [T] était paisible puisqu'elle n'avait pas été obtenue par la violence, continue en ce qu'elle avait été exercée sans intervalle, publique comme ayant été matérialisée par des actes apparents et non équivoque en ce que M. [T] s'était comporté comme le véritable propriétaire.

Il a considéré que la possession avait débuté en 1984, année de la majorité de M. [T] et date à laquelle il avait pu se comporter comme le véritable propriétaire dudit bien avec sa tante (et non sa mère comme indiqué par erreur dans l'acte de notoriété) feue [J] [T] avec qui il vivait jusqu'en 1994; que dès lors en 2014 la possession avait bien eu lieu depuis plus de trente ans ; que ces éléments étaient corroborés par des attestations, factures, taxes foncières et taxes d'habitation.

Le tribunal a relevé que M. [V], qui affirmait avoir autorisé M. [T] à résider sur le terrain en échange de l'entretien de ce dernier, ne rapportait aucunement la preuve de ses allégations.

L'appelant fait grief au tribunal d'avoir considéré que l'acte de notoriété était affecté d'une erreur matérielle en ce que l'intimé avait continué l'acte de possession de sa tante, non de sa mère alors qu'il n'existe aucun lien de filiation entre les deux et que l'intimé ne pouvait donc pas continuer la possession de la première.

Il affirme que la possession de l'intimé était précaire en qualité de locataire à titre gratuit ; qu'il n'a pu commencer à prescrire qu'au décès de Mme veuve [A], soit en 1994 ; que s'il avait été autorisé à se maintenir dans les lieux, c'était à la condition de les entretenir, ce qu'il n'a pas fait ; qu'il n'ignorait pas qu'il n'était pas le propriétaire du bien.

Il souligne que lui-même accomplissait tous les actes qu'aurait effectués un propriétaire, notamment le paiement des impôts.

L'intimé se prévaut d'une possession paisible et non équivoque depuis plus de trente ans, précisément depuis sa majorité, y vivant et s'en occupant depuis qu'il y vit avec sa tante et ayant l'intention de se comporter comme son propriétaire, comme le démontre le paiement de factures ou de la taxe foncière.

Il affirme qu'il était le neveu en ligne de Mme [J] [T] veuve [A].

L'intimé expose encore que l'appelant n'a effectué aucun acte d'entretien ou de possession sur la parcelle litigieuse.

La cour retient que si les attestations produites par l'intimé démontrent que celui-ci réside sur la parcelle, et dans l'habitation y édifiée, qui fait l'objet du litige, ce, depuis 1969, date à laquelle sa tante, feue [J] [T], l'a recueilli, sans que soit justifiée l'adoption invoquée par M. [T], la possession des lieux par l'intimé était équivoque jusqu'en 1994, année du décès de la susnommée puisqu'il apparaît que cette dernière lui avait 'donné la jouissance de sa propriété' (attestation de Mme [D] [N] épouse [C], pièce n° 6 de l'intimé) ou 'le droit de se loger' (attestation de M. [P] [F], pièce n° 10), ce dont il résulte que les droits accordés à M. [T] étaient alors limités à une occupation à titre précaire, aucune des autres attestations produites ne venant contredire cette analyse.

Par ailleurs, l'intimé, neveu d'[J] [T], dont il n'est pas contesté qu'elle n'a pas eu d'enfant, ne peut utilement prétendre joindre sa possession, devenue non équivoque en 1994, à celle de la défunte en sa qualité d'ayant cause de cette dernière et soutenir que les deux possessions répondent aux conditions posées par l'article 2261 précité.

En effet, soit la défunte était devenue propriétaire de la parcelle au décès de son époux comme mariée à [R] [A] qui l'avait achetée 13 années avant le mariage, célébré sans contrat préalable permettant de déroger au régime légal de communauté des meubles et acquêts et il ne peut donc y avoir eu de prescription acquisitive de son chef puisqu'elle en avait acquis la propriété par titre ; soit, en présence d'un tel contrat de mariage, elle en était devenue, comme le soutient l'appelant, simple usufruitière et elle ne pouvait alors prescrire que pour le compte du nu-propriétaire.

Ainsi, dans les deux cas, il ne peut y avoir eu de prescription acquisitive au bénéfice de feue [J] [T].

Au surplus, l'intimé ne démontre s'être comporté comme le propriétaire de la parcelle et avoir manifesté son intention de se conduire comme tel qu'à compter de l'année 2011 au cours de laquelle il lui a été réclamé le paiement de la taxe foncière afférente à la parcelle, étant observé que le paiement de la taxe d'habitation, réclamée à tout occupant même non propriétaire, ou de factures d'eau et d'électricité ne rapporte la preuve que de l'occupation de la parcelle, sans qu'il puisse en être déduit la volonté de se comporter comme son propriétaire.

Il en résulte qu'au 27 novembre 2014 l'intimé ne justifiait pas d'une possession trentenaire répondant aux conditions de l'article 2261 du code civil ; que l'acte de notoriété doit être annulé et le jugement du 03 janvier 2023, infirmé.

La publication du présent arrêt sera en conséquence ordonnée.

2/ Sur le surplus des demandes de l'appelant :

L'appelant demande, aux termes du dispositif de ses conclusions, de dire que la parcelle sur laquelle repose une maison à usage d'habitation sise sur la commune de [Localité 5] lieudit [Localité 3] cadastrée section T numéro [Cadastre 1] pour une contenance de 33a 30 ca, dépend de la succession de [R] [A] et, en conséquence, d'ordonner 'la liquidation les opérations de compte-liquidation et partage' de la succession de [R] [A].

Aucun moyen n'est toutefois développé dans la partie discussion de ses conclusions à l'appui de ces prétentions.

En outre, à titre superfétataoire, s'il résulte des précédents développements que la parcelle litigieuse dépend effectivement de la succession de [R] [A], il n'est aucunement justifié de la tentative de partage amiable préalable exigée par l'article 1360 du code de procédure civile à peine d'irrecevabilité de la demande, pas plus que ne sont indiquées les intentions de l'appelant quant au partage.

Cette dernière demande, et celles qui s'y rattachent, doivent donc être déclarées irrecevables.

3/ Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Le jugement sera également infirmé en ce qu'il a condamné M. [V] aux dépens et à payer à M. [T] la somme de 3 000e au titre des frais irrépétibles.

Succombant en cause d'appel, l'intimé supportera la charge des dépens y afférents, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

Aucune considération tirée de l'équité ne permet de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Par arrêt contradictoire, en dernier ressort et mis à disposition par le greffe,

INFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Fort de France du 03 janvier 2023 en toutes ses dispositions dont appel ;

Statuant à nouveau,

PRONONCE la nullité de l'acte de notoriété acquisitive établi le 27 novembre 2014 suivant acte de notoriété acquisitive reçu par Me [W] [U] [B] notaire à [Localité 4], publié au bureau des hypothèques de [Localité 4] le 11 décembre 2014, volume 2014 P n°5741 en ce que cet acte vise la parcelle T [Cadastre 1] ;

ORDONNE la publication du présent arrêt à la conservation des hypothèques de [Localité 4] ;

DIT que la parcelle sur laquelle repose une maison à usage d'habitation sise sur la commune de [Localité 5] lieudit [Localité 3] cadastrée section T numéro [Cadastre 1] pour une contenance de 33a 30 ca, dépend de la succession de [R] [A] ;

DÉCLARE M. [K] [V] irrecevable en sa demande d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [R] [A] et en ses demandes subséquentes ;

CONDAMNE M. [Z] [T] aux dépens, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;

DÉBOUTE M. [Z] [T] de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance ;

Et y ajoutant,

CONDAMNE M. [Z] [T] aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel.

Signé par Mme Nathalie RAMAGE, présidente de chambre et Mme Béatrice PIERRE-GABRIEL, greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Fort-de-France
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 23/00087
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;23.00087 ?
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