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30/04/2024 | FRANCE | N°22/00147

France | France, Cour d'appel de Fort-de-France, Chambre sociale, 30 avril 2024, 22/00147


ARRET N° 24/54



R.G : N° RG 22/00147 - N° Portalis

DBWA-V-B7G-CK64



Du 30/04/2024



CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA MARTINIQUE



C/



[I]













COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU 30 AVRIL 2024





Décision déférée à la cour : jugement du Pôle social du Tribunal Judiciaire de FORT DE FRANCE, du 01 Septembre 2022, enregistrée sous le n° 21/00313







APPELANT

E :



CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA MARTINIQUE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]









INTIME :



Monsieur [O] [I]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Laurence VIEYRA, avocat au barreau de MARTINIQ...

ARRET N° 24/54

R.G : N° RG 22/00147 - N° Portalis

DBWA-V-B7G-CK64

Du 30/04/2024

CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA MARTINIQUE

C/

[I]

COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU 30 AVRIL 2024

Décision déférée à la cour : jugement du Pôle social du Tribunal Judiciaire de FORT DE FRANCE, du 01 Septembre 2022, enregistrée sous le n° 21/00313

APPELANTE :

CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA MARTINIQUE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

INTIME :

Monsieur [O] [I]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Laurence VIEYRA, avocat au barreau de MARTINIQUE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 janvier 2024 , les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne FOUSSE, Conseillère présidant la chambre sociale, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

- Madame Anne FOUSSE, Présidente

- Madame Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre

- Madame Séverine BLEUSE, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame [C] [K],

DEBATS : A l'audience publique du 19 janvier 2024,

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 19 mars 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, délibéré prorogé au 30 avril 2024.

ARRET : Contradictoire

************

EXPOSE DU LITIGE

Par courrier recommandé avec accusé de réception expédié le 15 mars 2016, Madame [O] [I] a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Martinique d'une opposition à contrainte qui a été délivrée par la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique le 11 février et signifiée le 2 mars 2016 relative aux cotisations et contributions sociales exigibles au titre des premier, deuxième et troisième trimestres 2015 pour un montant total de 7452 euros.

Par jugement du 1er septembre 2022, le Pôle social du Tribunal judiciaire de Fort-de-France a :

- déclaré l'opposition à la contrainte n° 2015067425 du 11 février 2016 délivrée à Madame [O] [I] par la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique recevable,

- annulé la contrainte n° 2015067425 et signifiée le 2 mars 2026 à Madame [O] [I],

- condamné la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique aux dépens,

- rappelé que le présent jugement est exécutoire par provision,

Le tribunal a retenu que la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique avait reconnu ne pas pouvoir démontrer l'expédition de la mise en demeure relative au troisième trimestre 2015; qu'elle justifiait de l'envoi d'une mise en demeure pour les premier et deuxième trimestres 2015 à Madame [O] [I] en date du 17 août 2015 dont l'accusé de réception comporte une signature, peu important que celle-ci soit celle de la défenderesse, l'adresse étant exacte; que cependant cette mise en demeure ne détaille pas le montant de chaque cotisation et contribution, ce qui ne permet pas à Madame [O] [I] de connaître l'étendue de son obligation, de telle sorte que la procédure de recouvrement engagée est irrégulière en la forme; que ce formalisme étant d'ordre public, ladite contrainte du 11 février 2016 ne peut qu'être annulée.

La Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique a interjeté appel de ce jugement le 22 septembre 2022.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 9 février 2023 auxquelles elle a déclaré se rapporter à l'audience du 19 janvier 2024 la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique demande à la Cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré, valider la contrainte n° 201 506 745 et condamner Madame [O] [I] au paiement de la somme actualisée de 6512,51 euros, des frais d'huissier attenants qui ne font pas partie des dépens susceptibles de relever de l'équité et sont de droit, en totalité à la charge du débiteur lorsque l'opposition est infondée; ainsi que tous actes de procédure nécessaires à son exécution conformément à l'article R 133-6 du code de la sécurité sociale,

- débouter Madame [O] [I] de l'ensemble de ses demandes et laisser les entiers dépens de la présente instance à sa charge,

- condamner Madame [O] [I] au paiement de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeter toutes autres demandes des parties,

Au soutien de ses prétentions, la caisse soutient que ce jugement ne reflète pas l'état du droit positif applicable à la matière puisque la mise en demeure porte la mention régime général mise en demeure récapitulative. Elle se réfère à un arrêt de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation 12 mai 2021 n°20 -12265. Elle expose par ailleurs que le défaut de réception par son destinataire d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec avis de réception, n'affecte ni la validité de celle-ci, ni la validité des actes de poursuite subséquents (cass N° 10-28139); qu'il importe que la mise en demeure, soit à peine de nullité notifiée au débiteur même des cotisations réclamées sans que soit exigée la preuve d'un préjudice pour celui-ci; que les textes ne subordonnent pas la validité de la mise en demeure à la réception effective ou à la signature de l'accusé de réception par le cotisant; que la contrainte comme la mise en demeure comportent suffisamment d'éléments pour connaître la nature, la cause de son obligation et les périodes contestées, à savoir les cotisations du régime général (nature), la cause (absence de versement), la période du 1er au 3 ème trimestre, pour un montant en principal ainsi que les majorations de retard, le montant des cotisations ayant été calculé sur la base des déclarations de Madame [O] [I]; qu'enfin les majorations de retard sont appliquées conformément aux dispositions de l'article R 243-18 du code de la sécurité sociale.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 5 juin 2023 auxquelles elle a déclaré se rapporter lors de l'audience du 19 janvier 2024, Madame [O] [I] demande à la Cour au visa des articles L 244-2 et R 244-1 du code de la sécurité sociale de :

- dire que la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique ne conteste pas n'avoir produit aucune mise en demeure,

- dire et juger que la mise en demeure du 17 août 2015 n'est pas conforme aux dispositions précitées,

- en conséquence confirmer le jugement rendu le 1er septembre 2022 par le Pôle social du Tribunal judiciaire de Fort-de-France,

- dire que la mise en demeure du 17 août 2015 et la contrainte du 11 février 2016 sont nulles et de nul effet,

- condamner la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique à payer à Madame [O] [I] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

In limine litis, l'intimée fait valoir au visa de l'article 933 du code de procédure civile que la déclaration d'appel ne précise pas les chefs de jugement critiqués et elle demande à la Cour de dire que la déclaration d'appel n'est pas conforme aux dispositions susvisées et de prononcer sa caducité.

Ensuite elle demande la radiation de l'affaire sur le fondement de l'article 524 du code de procédure civile.

Subsidiairement sur le fond, elle reprend ses arguments de première instance à savoir que l'avis de réception de la lettre recommandée adressant la mise en demeure doit être reçu et signé par son destinataire.

Elle se réfère à un arrêt de la chambre sociale de la Cour d'appel de Grenoble en date du 11 octobre 2018 selon lequel «la seule mention «Régime social des indépendants, cotisations et contributions visées à l'article L 133-6 du code de la sécurité sociale «située sur le document avant le terme contrainte et qui figure également sur les mises en demeure, n'est pas de nature à satisfaire l'obligation qui incombe à l'organisme de préciser de façon individualisée la nature des cotisations réclamées. A défaut de satisfaire à l'exigence de précision sur la nature des cotisations, la contrainte décernée le 21 janvier 2023 doit être déclarée nulle».

MOTIFS

- Sur les demandes in limine litis de déclarer l'appel caduc et de radier l'affaire du rôle

La Cour rappelle qu'aux termes de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la Cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Ces prétentions ne figurant pas au dispositif des conclusions de l'intimée, il ne sera pas statué sur ces dernières.

- Sur le moyen tiré du défaut de signature du destinataire de la contrainte,

Aux termes de l'article L 244-2 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige, toute action ou poursuite effectuée en application de l'article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-11 est obligatoirement précédée, si elle a lieu à la requête du ministère public, d'un avertissement par lettre recommandée de l'autorité compétente de l'État invitant l'employeur ou le travailleur indépendant à régulariser sa situation dans le mois. Si la poursuite n'a pas lieu à la requête du ministère public, ledit avertissement est remplacé par une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l'employeur ou au travailleur indépendant.

Suivant les termes de l'article R 244-1 du même code dans sa rédaction applicable à l'espèce, l'envoi par l'organisme de recouvrement ou par le service mentionné à l'article R. 155-1 de l'avertissement ou de la mise en demeure prévus à l'article L. 244-2, est effectué par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

La mise en demeure doit être notifiée au débiteur des cotisations, aux nom et adresse figurant au compte cotisant de l'organisme de recouvrement.

Il est constant que la CGSSM doit verser la preuve de l'envoi de la mise en demeure à l'adresse déclarée par le cotisant et la validité de la mise en demeure n'est pas soumise à la réception effective de la lettre recommandée par le débiteur ou son accusé réception par lui-même.

En l'espèce, Madame [O] [I] n'établit pas que la mise en demeure du 17 août 2015 a été adressée à une autre adresse que celle déclarée par elle à l'organisme social de sorte que le moyen tiré de l'absence de réception de la mise en demeure par le seul destinataire est inopérant. En outre il est constaté que l'accusé de réception de cette mise en demeure est signé par son destinataire ou son mandataire.

Madame [O] [I] ajoute que la mise en demeure puis la contrainte du 11 février 2016 ne lui permettraient pas de connaître la nature, la cause des cotisations et la période auxquelles elle se rapportent en violation des dispositions de l'article L 244-2 du code de la sécurité sociale, en ce qu'elles ne comportent pas le détail de chaque cotisation et contribution et leur montant.

La Cour constate que la mise en demeure notifiée par la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique indique en ce qui concerne la nature des cotisations «régime général» avec la précision «incluses contribution d'assurance chômage, cotisations l'Unedic délégation Ags CGEA de [Localité 2], sans préciser la nature des cotisations du régime général concernées.

Or cette seule mention est insuffisante pour permettre au cotisant d'avoir connaissance à la fois de la nature des cotisations dont le paiement lui est demandé mais surtout des montants par période pour chacune de ces cotisations. La circonstance que la cotisante a procédé à ses déclarations de salaires sur lesquels sont assises certaines cotisations du régime général est inopérante. La motivation de cette mise en demeure qui ne détaille par nature de cotisations les montants demandés, est affectée d'une irrégularité substantielle affectant sa validité. C'est donc par des motifs appropriés que la Cour adopte que le Pôle social du Tribunal judiciaire de Fort-de-France a dit que «que cependant cette mise en demeure ne détaille pas le montant de chaque cotisation et contribution, ce qui ne permet pas à Madame [O] [I] de connaître l'étendue de son obligation, de telle sorte que la procédure de recouvrement engagée est irrégulière en la forme; que ce formalisme étant d'ordre public, ladite contrainte du 11 février 2016 ne peut qu'être annulée».

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement rendu par le Pôle social du Tribunal judiciaire de Fort-de-France le 1er septembre 2022 en toutes ses dispositions,

Condamne la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Martinique à payer à Madame [O] [I] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et ont signé le présent arrêt Mme Anne FOUSSE, Présidente et Mme Rose-Colette GERMANY, Greffière

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Fort-de-France
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00147
Date de la décision : 30/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-30;22.00147 ?
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