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17/05/2022 | FRANCE | N°21/00053

France | France, Cour d'appel de Fort-de-France, Chambre civile, 17 mai 2022, 21/00053


ARRET N°



N° RG 21/00053



N°Portalis DBWA-V-B7F-CGJ7



















Mme [L] [B]





C/



LA SOCIETE IMMOBILIERE DE LA MARTINIQUE (SIMAR)













COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE



CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 17 MAI 2022





Décision déférée à la cour : Jugement duTribunal Judiciaire de Fort de France, en date du 13 Octobre 2020, enregistré sous le n° 19/01716 ;


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APPELANTE :



Madame [L] [B]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 3]



Représentée par Me Chantal MEZEN, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

Me Chantal SAINT-CYR de la SELARLU SAINT-CYR AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS





INTIMEE :



LA SO...

ARRET N°

N° RG 21/00053

N°Portalis DBWA-V-B7F-CGJ7

Mme [L] [B]

C/

LA SOCIETE IMMOBILIERE DE LA MARTINIQUE (SIMAR)

COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 17 MAI 2022

Décision déférée à la cour : Jugement duTribunal Judiciaire de Fort de France, en date du 13 Octobre 2020, enregistré sous le n° 19/01716 ;

APPELANTE :

Madame [L] [B]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représentée par Me Chantal MEZEN, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

Me Chantal SAINT-CYR de la SELARLU SAINT-CYR AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMEE :

LA SOCIETE IMMOBILIERE DE LA MARTINIQUE (SIMAR), prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Eric DIENER de la SELARL SHAKTI, avocat au barreau de MARTINIQUE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Mars 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine PARIS, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour, composée de :

Présidente : Mme Christine PARIS, Présidente de Chambre

Assesseur : Mme Marjorie LACASSAGNE, Conseillère

Assesseur : M. Thierry PLUMENAIL, Conseiller

Greffière, lors des débats : Mme Micheline MAGLOIRE,

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 17 Mai 2022 ;

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

La Cité BON AIR a été construite en 1964 et 1965 par la SIMAG et sa propriété a été transférée à la société SIMAR.

En 1982, la société SIMAR a procédé à la cession de certains logements à des locataires occupants.

Suite aux différentes cessions, la Cité BON AIR a été soumise au statut de la copropriété suivant acte de règlement de copropriété reçu par Maître [U] le 12 février 1982, publié au bureau des hypothèques de [Localité 3] le 1er mars 1982, volume 1905 N°1.

Par acte authentique de vente en date du 2 février 1983, reçu par Maître [M] [U], Notaire associé, la société SIMAR a vendu à Madame [L] [B], un appartement de type F4 au [Adresse 7] et moyennant le prix de 32.215 francs.

Le 23 février 2012, un arrêté préfectoral a déclaré cessibles pour cause d'utilité publique au profit de la ville de [Localité 3] et du concessionnaire de la ZAC, la SAS BON AIR, les parcelles AL[Cadastre 1] et [Cadastre 2] sur lesquelles, repose le Bâtiment A.

Par ordonnance d'expropriation du 12 juin 2013, le juge de l'expropriation a déclaré expropriés immédiatement pour cause d'utilité publique au profit du concessionnaire de la ZAC, la SAS BONAIR sis [Adresse 5], agissant au nom et pour le compte de la ville de Fort-de-France, les immeubles, portions d'immeubles et droits réels

immobiliers désignés, dont l'acquisition est nécessaire pour parvenir à l`exécution de l'acte déclaratif et ce, conformément au plan parcellaire.

La SAS BON AIR a procédé à des notifications aux différents copropriétaires et par lettre simple en date du 30 janvier 2014, elle a présenté une offre d'indemnisation à Madame [L] [B] s'élevant à la somme de 21.647 euros pour l'appartement situé dans le Bâtiment C porte n° 6.

Par lettre recommandée en date du 30 avril 2014 envoyée à la SAS BON AIR, Madame [L] [B] a contesté et refusé l'indemnité d'expropriation à hauteur de 21.647 euros et a sollicité que l'indemnisation soit fixée à la somme de 91.574,02 euros, en ce compris 55.000 euros d'indemnité principale correspondant à la valeur du bien exproprié à la date de l'ordonnance d'expropriation.

Par requête en date du 03 juillet 2014, Madame [L] [B] a saisi le juge del'expropriation à fin de voir fixer le montant de son indemnité d'expropriation.

Par jugement en date du 04 mars 2015, l'indemnité d'expropriation de Madame [L] [B] a été fixée à la somme de 25.245 euros au titre de l'indemnité principale et à la somme de 6.311,25 euros au titre de l'indemnité de remploi.

Par lettre recommandée en date du 20 février 2019 envoyée à la société SIMAR,Madame [L] [B] a indiqué qu'elle aurait pu, en l'absence d'un tel taux de vétusté dû à la négligence de la société SIMAR dans l'entretien des parties communes de la copropriété dont elle était le syndic et en tout état de cause le copropriétaire détenteur du plus grand nombre de tantièmes, vendre son bien à la somme de 55.000 euros et que d'autre part, elle a perdu la chance de conserver son bien dans lequel il résidait depuis plus de 30 ans.

C'est dans ces conditions que Madame [L] [B] a mis en demeure la société SIMAR de lui verser la somme de 29.755 euros pour réparer son préjudice matériel et la somme de 15.000 euros au titre de son préjudice moral et ce sous quinzaine, à compter de la réception de la présente.

Par acte en date du 02 août 2019, Madame [L] [B] a fait assigner la société SIMAR devant le tribunal de grande instance devenu le tribunal judiciaire de Fort-de-France sur le fondement des articles 1231 et 1241 du code civil aux fins de :

- dire la responsabilité de la société SIMAR engagée en raison de sa négligence,

- condamner la société SIMAR à payer à Madame [L] [B] la somme de 29.755 euros au titre de son préjudice matériel pour la perte de chance,

- la condamner à lui payer la somme de 1.581,58 euros correspondant aux charges de coproprité payées,

- condamner la société SIMAR à payer à Madame [L] [B] la somme de 15.000 euros au titre de son préjudice moral,

- la condamner à lui payer la somme de 655,73 euros correspondant aux frais de ferrnnerie,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant opposition ou appel et sans caution,

- condamner la société SIMAR aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Chantal MEZEN, Avocat au barreau de Fort-de-France,

- condamner la société SIMAR à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 13 octobre 2020 le tribunal judiciaire de Fort de France a statué comme suit :

- REJETTE l'exception d'irrecevabilité tirée de l`interdiction du cumul des régimes de responsabilités contractuelle et extra-contractuelle ;

- DÉCLARE l'action de Madame [L] [B] irrecevable car prescrite ;

- DÉBOUTE la société anonyme d'économie mixte Société Immobilière de la MARTINIQUE (SIMAR) de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- DÉBOUTE la société anonyme d'économie mixte Société Immobilière de la MARTINIQUE (SIMAR) de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE Madame [L] [B] aux frais et dépens ;

- DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration en date du 22 janvier 2021, Madame [L] [B] a fait appel de la décision dans les termes suivants :

'Appel PARTIEL limité aux chefs de jugement expressément critiqués : Dans le cadre de ce recours, Madame [L] [B] entend critiquer les chefs du jugement rendu le 13 octobre 2020 par Tribunal Judiciaire de Fort de France, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, en ce qu'il a : DECLARE l'action de Madame [L] [B] irrecevable car prescrite ;

En ce qu'il a dit que si le jugement du juge de l'expropriation n'est intervenu que le 04 mars 2015, la prescription a commencé à courir à compter du 30 avril 2014, date à laquelle il est rapporté que Madame [L] [B] a eu connaissance du dommage et non de la décision de justice qui n'a fait que consacrer ce fait dommageable. L'action est donc soumise à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil issu de la loi du 17 juin 2008.

La mise en demeure du 20 février 2019 ne constitue pas un acte interruptif de prescription. Le délai de prescription a donc expiré le 30 avril 2019. CONDAMNE Madame [L] [B] aux frais et dépens. DIT n'y avoir lieu à exécution provisoire. '

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 20 mai 2021,Madame [L] [B] demande à la cour de statuer comme suit :

- DÉCLARER recevable et fondé l'appel interjeté par Madame [L] [B] ;

Y faisant droit,

- CONFIRMER la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté l'exception d'irrecevabilité tirée de l'interdiction du cumul des régimes de responsabilités contractuelle et extra-contractuelle, et dit qu'il n'y avait pas abus du droit d'agir,

- INFIRMER la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré Madame [L] [B] irrecevable car prescrite et, statuant à nouveau ;

- JUGER la société SIMAR responsable du préjudice subi par Madame [L] [B] en raison de sa négligence pour défaut d'entretien des parties communes,

En conséquence,

- LA CONDAMNER à payer à Madame [L] [B] la somme de 25.245,00 euros au titre de son préjudice matériel pour la perte de chance ;

- LA CONDAMNER à payer à Madame [L] [B] la somme de 1.581,58 euros correspondant aux charges de copropriété payées ;

- LA CONDAMNER à payer à Madame [L] [B] la somme de 15.000,00 euros au titre de son préjudice moral ;

- LA CONDAMNER à payer à Madame [L] [B] la somme de 655,73 euros correspondant aux frais de ferronnerie ;

- ORDONNER l'exécution provisoire de la décision à intervenir, nonobstant opposition ou appel et sans caution ;

- CONDAMNER la société SIMAR aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Chantal MEZEN, Avocat au Barreau de FORT DE FRANCE ;

- CONDAMNER la société SIMAR à la somme de 4.000 euros.

La SIMAR a fait appel incident et dans ses dernières conclusions communiquées le 10 juin 2021 elle demande à la cour de statuer comme suit :

- CONSTATER que les chefs du jugement critiqués dans la déclaration d'appel de Madame [L] [B] ne visent ni le moyen portant le non-cumul des responsabilités ni sur celui visant la responsabilité de la SIMAR en qualité de syndic de copropriété.

En conséquence, DIRE ET JUGER que la cour n'est pas saisie d'une demande de réformation ou de confirmation de ces moyens,

Sur la prescription,

Vu les articles 122 du code de procédure civile et 2224 du code civil,

- CONSTATER que le délai de la prescription quinquennale applicable à la présente affaire a commencé à courir en 1987, subsidiairement au cours de l'année 2004 et très subsidiairement au cours de l'année 2006 ;

En conséquence DIRE ET JUGER que la présente action est prescrite ;

- DÉBOUTER Madame [L] [B] de l'intégralité de ses demandes.

Sur la fraude à la loi,

Vu l'article L. 221-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique,

- INFIRMER le jugement du 13 octobre 2020 et faisant droit à nouveau ;

- DIRE ET JUGER que la présente action constitue une fraude à la loi constituée par une tentative de contournement des dispositions du jugement du tribunal de grande instance de Fort de France du 4 mars 2015 qui a fixé l'indemnité de Madame [L] [B] ;

En conséquence, DÉBOUTER Madame [L] [B] de l'intégralité de ses demandes ;

- CONDAMNER Madame [L] [B] au paiement de la somme de 10.000,00 euros à titre de dommages et intérêts ainsi qu'à la somme de 2.500,00 euros au titre de l'article l'article 700 du code de procédure civile ;

- Le CONDAMNER aux dépens dont distraction au profit de la SELARL SHAKTI.

Il est référé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties à leurs dernières conclusions susvisées.

L'ordonnance de clôture est en date du 21 octobre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes des dispositions de l'article 562 du code de procédure civile l'appel défère à la cour la connaissance des chefs du jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

La cour constate que, comme le rappelle la déclaration d'appel, il s'agit d'un appel partiel limité aux chefs de la décision suivants :

- Déclare l'action de Madame [L] [B] irrecevable car prescrite ;

- Condamne Madame [L] [B] aux frais et dépens ;

- Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Comme le soulève la SIMAR, Madame [L] [B] n'a pas fait appel du chef de jugement rejetant l'exception d'irrecevabilité tirée de l'interdiction du cumul des régimes de responsabilité contractuelle et extra contractuelle et la SIMAR n'a pas fait appel incident de ce chef de décision.

Cette demande est irrecevable en vertu de l'effet dévolutif de l'appel étant au surplus constaté que Madame [L] [B] demandait simplement la confirmation de la décision sur ce chef.

Madame [L] [B] soutient que le premier juge fait une confusion entre la Sas Bon Air, société qui a procédé à l'expropriation, et la SIMAR, syndic, le courrier du 30 avril 2014 ayant été adressé à la Sas Bon Air et en aucun cas à la SIMAR et n'ayant vocation qu'à fixer le montant de l'expropriation, étant étranger à la faute mise à la charge de la SIMAR.

Elle soutient qu'elle n'a connu les faits lui permettant d'exercer son action contre la SIMAR que lorsque le juge a fait état du défaut d'entretien dans sa motivation de la fixation de l'indemnité d'expropriation dans son jugement du 4 mars 2015 et situe le point de départ de la prescription à cette date. L'assignation étant du 2 août 2019, elle fait valoir que l'action n'est pas prescrite.

Il convient de rappeler que le syndic n'a aucun lien de droit avec les copropriétaires pris individuellement et que la responsabilité du syndic à l'égard des copropriétaires est de nature délictuelle.

En application des dispositions de l'article 2224 du code civil l'action se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Madame [L] [B] reproche au syndic, la SIMAR, d'avoir manqué à ses obligations d'entretien des immeubles, ce dont il résulterait d'une réunion du 7 février 1982, et d'avoir négligé l'entretien des parties communes concourant à l'état de délabrement avancé de la copropriété à l'origine de sa faible indemnisation suite à son expropriation .

La cour constate que contrairement à ce qu'elle soutient le 7 février 1982 il ne s'est pas tenu une assemblée générale, mais une réunion entre la SIMAR et le syndicat des lotis de 'Bon Air', qui fait déjà état notamment de problèmes de fissures et de colonnes d'eau dans la copropriété. Comme l'a rappelé le premier juge le mauvais état des immeubles est donc connu depuis au moins l'année 1982 soit avant qu'elle n'acquiert son appartement.

Madame [L] [B] soutient dans ses écritures que la copropriété est restée pratiquement sans syndic à compter de l'année 1987, date à laquelle 'la SIMAR a démissionné après trois ans d'exercice' et que l'administrateur provisoire a été désigné le 11 octobre 2005.

Madame [L] [B] ne peut dès lors se prévaloir que des fautes commises pendant cette période.

Dans son courrier du 12 janvier 2005 adressé aux résidents de la cité Bon Air, le maire de [Localité 3] indiquait qu'il avait commandé une étude diagnostic de la cité, qui avait conclu à l'inexistence d'un syndicat de copropriétaires depuis 1987, à un état médiocre de plus d'un tiers des équipements, à des logements proches de la salubrité et des fuites dans la toiture du bâtiment C. avec des risques pour les installations électriques et un engorgement fréquent des réseaux et des mauvais entretiens des espaces. Il précisait que pour l'intervention publique, trois choix s'opéraient soit une démolition avec reconstruction des bâtiments, soit une réhabilitation avec maintien du statut actuel de copropriété, soit une acquisition publique des biens avec réhabilitation des bâtiments.

Il appartient à Madame [L] [B] de démontrer que les fautes qu'elle invoque ont été commises pendant cette période et sont à l'origine de son préjudice, mais qu'elle n'a connu les faits lui permettant d'exercer l'action en réparation que moins de cinq ans avant la délivrance de l'assignation.

Comme l'a rappelé le premier juge l'action en responsabilité ne commence à se prescrire qu'à compter du jour où tous les éléments du délit civil sont réalisés, la prescription de l'action commence donc à courir à compter de la révélation du fait dommageable c'est-à-dire de la faute.

C'est à juste titre et par des motifs pertinents que la cour adopte, que le premier juge a considéré que la révélation du dommage n'est pas une notion assimilable à la connaissance de l'étendue du préjudice et qu'il suffit que le titulaire du droit ait manifesté sa pleine conscience des conséquences dommageables, même s'il en ignorait le montant exact.

En conséquence c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge, après avoir examiné les différents points de départ de l'action en responsabilité formée à l'encontre du syndic invoqués par les parties, a retenu que la prescription a commencé à courir à compter du 30 avril 2014 date à laquelle Madame [L] [B], après avoir eu connaissance de l'évaluation de son bien dans le cadre de la procédure d'expropriation après rapport d'expertise du 11 mars 2014, a manifesté sa pleine conscience des conséquences dommageables des faits qu'elle reproche au syndic dans son courrier du 30 avril 2014 adressé à la société expropriante aux termes desquels elle refuse l'offre d'indemnisation chiffrée à 21.647 euros et sollicite une indemnité principale de 55.000 euros et une indemnisation globale de 91.574,02 euros. Il importe peu que ce courrier n'ait pas été adressé à la SIMAR et ce qu'il importe, c'est qu'au moins à cette date, il est établi comme l'a retenu le premier juge, qu'elle a eu une entière connaissance des conséquences dommageables des fautes qu'elle reproche au syndic.

C'est également par des motifs pertinents et que la cour adopte, que le premier juge a écarté comme point de départ de la prescription le jugement fixant les indemnités d'expropriation rendu le 4 mars 2015, car il importe peu que ce soit à cette date qu'elle ait connu le montant exact de l'évaluation de son bien et ayant connaissance depuis au plus tard le 30 avril 2014, des faits lui permettant d'exercer l'action en responsabilité à l'égard du syndic.

Dès lors l'action introduite par assignation du 2 août 2019 est irrecevable, étant prescrite à cette date sans qu'aucune cause d'interruption ne soit invoquée en appel.

Madame [L] [B] agit également à l'encontre de la SIMAR en sa qualité de copropriétaire majoritaire.

Il lui appartient en conséquence de démontrer d'une part que la SIMAR était copropriétaire majoritaire, d'autre part qu'elle a commis une faute à l'origine du préjudice dont elle demande l'indemnisation et dont elle n'aurait eu connaissance ou dont elle n'aurait dû connaître l'existence, que dans le délai de cinq ans précédant l'assignation du 2 août 2019.

La cour constate que les fautes invoquées par Madame [L] [B] à l'encontre de la SIMAR le sont dans le cadre de sa mission de syndic et que la seule affirmation que la cité a été laissée à l'abandon par son copropriétaire majoritaire, ne permet pas de caractériser l'existence d'une faute, dans la mesure où il n'est fait état d'aucun refus de travaux par la SIMAR en qualité de copropriétaire.

De même le fait que la SIMAR a été copropriétaire majoritaire et syndic, est un fait connu depuis l'acquisition par Madame [L] [B] de son appartement, soit depuis plus de cinq ans avant l'assignation, à supposer même que cette collusion soit à l'origine d'une faute et du préjudice qu'il invoque.

Si le syndic pouvait demander la désignation d'un administrateur provisoire, toute personne intéressée dont Madame [L] [B] copropriétaire le pouvait également et la cour constate en tout état de cause que l'absence de syndic est antérieure à la désignation de l'administrateur provisoire du 2 mai 2005, la carence reprochée étant antérieure de plus de 5 ans à la délivrance de l'assignation.

En conséquence c'est à bon droit que le premier juge a également déclaré prescrite l'action de Madame [L] [B] à l'encontre de la SIMAR, ès qualité de copropriétaire de la résidence Bonnaire.

Dans le cadre de son appel incident la SIMAR soutient que Madame [L] [B] a commis une fraude à la loi en tentant d'obtenir, dans le cadre de la procédure devant le tribunal judiciaire, des indemnités qui lui ont été refusées par le juge de l'expropriation réalisant ainsi un contournement de la loi.

L'action introduite par Madame [L] [B] à l'encontre de la SIMAR ne vise pas à contester l'indemnité de d'expropriation qu'il a obtenue, mais à être indemnisé des fautes qu'elle reproche au syndic et à un copropriétaire majoritaire, ayant conduit à l'état de délabrement de la copropriété et donc à la fixation d'une indemnité d'expropriation inférieure à celle à laquelle elle aurait été due si la copropriété avait été en bon état.

Dès lors il n'est pas démontré de fraude à la loi, et en tout état de cause l'action de Madame [L] [B] ayant été déclarée irrecevable, la SIMAR ne justifie pas d'un préjudice justifiant sa demande de dommages-intérêts, étant rappelé au surplus que l'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages-intérêts que lorsqu'est caractérisée une faute en lien de causalité directe avec un préjudice.

Le jugement du 13 octobre 2020 du tribunal judiciaire de Fort-de-France sera confirmé en toutes ses dispositions et c'est à juste titre que les frais et dépens ont été mis à la charge de Madame [L] [B]. Succombant en appel, Madame [L] [B] supportera les dépens de la procédure d'appel et conservera ses frais irrépétibles. Il est équitable qu'elle prenne en charge les frais exposés par la SIMAR non compris dans les dépens, évalués à 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME en toutes ses dispositions dont appel, le jugement du tribunal judiciaire de Fort-de-France en date du 13 octobre 2020 ;

Y ajoutant,

DÉCLARE irrecevable l'exception d'irrecevabilité de l'interdiction du cumul des régimes de responsabilité contractuelle et extra contractuelle ;

MET les dépens à la charge de Madame [L] [B] ;

CONDAMNE Madame [L] [B] à verser à la SIMAR la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Signé par Mme Christine PARIS, Présidente de Chambre et Mme Micheline MAGLOIRE, Greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Fort-de-France
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00053
Date de la décision : 17/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-17;21.00053 ?
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