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10/05/2022 | FRANCE | N°20/00506

France | France, Cour d'appel de Fort-de-France, Chambre civile, 10 mai 2022, 20/00506


ARRET N°



N° RG 20/00506







N°Portalis DBWA-V-B7E-CF7U

















S.C.I. BERANN





C/



Mme [C] [O]



M. [M] [I] [Z]



















COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE



CHAMBRE CIVILE



ARRET DU 10 MAI 2022





Décision déférée à la cour : Jugement du Juge des Contentieux de la Protection, près le Tribunal Judiciaire de Fort de France,

en date du 09 Novembre 2020, enregistré sous le n° 19-000962 ;





APPELANTE :



SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE BERANN, agisant poursuites et diligences de son représentant légal M. [P] [J], domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par Me Marie-Line SA...

ARRET N°

N° RG 20/00506

N°Portalis DBWA-V-B7E-CF7U

S.C.I. BERANN

C/

Mme [C] [O]

M. [M] [I] [Z]

COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 10 MAI 2022

Décision déférée à la cour : Jugement du Juge des Contentieux de la Protection, près le Tribunal Judiciaire de Fort de France, en date du 09 Novembre 2020, enregistré sous le n° 19-000962 ;

APPELANTE :

SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE BERANN, agisant poursuites et diligences de son représentant légal M. [P] [J], domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Marie-Line SALGUES-JAN, avocat au barreau de MARTINIQUE

INTIMES :

Madame [C] [O]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4] (GUADELOUPE)

Représentée par Me Moïse CARETO de la SELARL D'AVOCATS MOÏSE CARETO, avocat au barreau de MARTINIQUE

Monsieur [M] [I] [Z]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4] (GUADELOUPE)

Représenté par Me Moïse CARETO de la SELARL D'AVOCATS MOÏSE CARETO, avocat au barreau de MARTINIQUE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Mars 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thierry PLUMENAIL, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour, composée de :

Présidente : Mme Christine PARIS, Présidente de Chambre

Assesseur : Mme Marjorie LACASSAGNE, Conseillère

Assesseur : M. Thierry PLUMENAIL, Conseiller

Greffière, lors des débats : Mme Micheline MAGLOIRE,

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 10 Mai 2022

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 28 décembre 2010, la SCI BERANN a donné à bail à usage d`habitation à Messieurs [E] et [Z] et à Madame [O] :

I- Une villa neuve T2 et T4 sise [Adresse 1] comprenant :

- Au rez de chaussée un grand séjour, cuisine aménagée, buanderie, WC indépendant une chambre climatisée, salle d'eau, une salle de jeux, une grande terrasse, piscine, jardin clos et arboré ;

- A l'étage: un grand séjour, cuisine aménagée et équipée, cellier, chambre principale climatisée avec salle d'eau et dressing, deux autres chambres climatisées, salle d'eau, WC indépendant, bureau climatisé.

Le loyer a été fixé à la somme de mensuelle de 2.000 euros. Les locataires ont versé un dépôt de garantie de 2 000 euros représentant un mois de loyer. Le 12 avril 2016, la SCI BERANN a fait savoir à ses locataires qu'eIle avait l'intention de vendre le bien objet de la location pour la somme de 515 000 euros.

Le 25 avril 2016, la SCI BERANN a fait délivrer aux locataires, par le ministère de la SCP MICHEL ABAUTRET, huissiers de justice associés à Fort de France, un congé pour vendre. Ledit congé reprenait les dispositions de l`articIe 15 de la loi du 6 juillet 1989 et mentionnait le prix auquel la SCI BERANN avait l'intention de vendre, à savoir la somme de 515 000 euros, et qu'il était donné pour le 30 novembre 2016 .

Les locataires n'ayant pas quitté les lieux à l'expiration du délai de préavis, la SCI BERANN a assigné ses locataires en référé pour que soit constatée la validité du congé pour vendre donné et solliciter l'expulsion des locataires. En cours de procédure, Monsieur [E] [Y] [D] [R], né le 5 mai 1944 à Trinité, est décédé.

Par ordonnance de référé en date du 29/06/2018, Mme le président près le tribunal de Fort-de-France statuant en matière de référé a :

- Validé le congé aux fins de vente signifié par la SCI BERANN, prise en la personne de son représentant légal, à Messieurs [E], [Z],[O], le 26/04/2016 pour une prise d'effet au 30/11/2016 concernant la villa sise [Adresse 1] ;

- Ordonné l'expulsion de M. [M] [Z] et Mme [C] [O] et tous occupants de leur chef de la villa dans les formes et délais légaux et si besoin avec la force publique et d'un serrurier ;

- Dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L.433-1 et L433-2 du Code des Procédures d'Exécution ;

- Condamné M. [Z] et Mme [O] à payer à la SCI BERANN la somme de 2.000 euros du ler décembre 2016 jusqu`à la libération effective des lieux d'une indemnité d'occupation provisionnelle égale au montant du loyer en principal tel qu'il résulterait du bail expiré et augmenté des accessoires, outre indexation légale étant précisé que le montant du dernier loyer hors charges s'élève à la somme de 2.000 euros, avec les intérêts légaux à compter du présent jugement pour les indemnités échues et à compter de chaque indemnité pour les indemnités à échoir ;

- Rejeté les demandes plus amples et contraires des parties ;

- Condamné M. [Z] et Mme [O] à payer à la SCI BERANN la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

- Rappelé que la décision était assortie de l'exécution provisoire de droit.

Les locataires ont quitté les lieux le 10 octobre 2018. Faisant valoir que les lieux loués ont été laissés dans un état de dégradation avancé, la SCI BERANN a adressé aux locataires une mise en demeure d'avoir à payer les frais de remise en état des lieux qui est restée vaine. La SCI BERANN a assigné M. [Z] et Mme [O] devant le tribunal d`instance de Fort-de-France pour obtenir leur condamnation à payer les frais de remise en état, ce aux termes d'un exploit introductif d'instance en date du 13/08/2019.

Par jugement avant dire droit en date du 3l/06/2020, le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Fort-de-France a ordonné la réouverture des débats et invité la SCI BERANN à justifier de sa qualité de propriétaire de l'immeuble d'habitation sis [Adresse 1].

Par jugement rendu le 09 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Fort de France a :

- Constaté le défaut d'agir de la SCI BERANN ;

- Débouté les parties de toute autre demande ;

- Condamné la SCI BERANN à payer à M. [Z] et Mme [O] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la SCI BERANN aux dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 03 décembre 2020, la SCI BERANN a critiqué tous les chefs de jugement.

Dans des conclusions responsives n° 3 en date du 1er décembre 2021, la société civile immobilière BERANN demande à la cour d'appel de :

- Accueillir l'appel interjeté par la SCI BERANN du jugement du tribunal judiciaire en date du 9/11/2020 ;

- Le déclarer recevable et bien fondé ;

- Réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions.

En conséquence :

- Dire et juger que la SCI BERANN a qualité pour agir dans le présent litige, en tant que propriétaire de l'immeubIe sis [Adresse 1] ;

- Condamner Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O], conjointement et solidairement à payer à la SCI BERANN la somme de 6.861 euros au titre des travaux de remise en état de la maison sise [Adresse 1] ;

- Débouter Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O] de l'ensemble de leurs demandes.

- Condamner Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O], conjointement et solidairement à payer la somme de 3.000 euros en application de I'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O], conjointement et solidairement aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître ML SALGUES JAN avocat sur son affirmation de droit.

Dans leurs conclusions d'intimé et d'appel incident en date du 20 octobre 2021, Madame [C] [O] et Monsieur [M] [I] [Z] demandent à la cour d'appel de:

- DIRE et JUGER que Monsieur [M] [Z] et Madame [C] [O] sont recevables et bien fondés en leurs moyens ;

A TITRE PRINCIPAL

- CONSTATER le défaut de qualité à agir de la SCI BERANN en raison de la vente du logement d'habitation ;

- REJETER la demande de la SCI BERANN pour défaut de qualité à agir ;

A TITRE SUBSIDIAIRE,

- CONSTATER que le congé n'a pas été fait en respectant les dispositions légales ;

Par conséquent,

- DIRE que le congé donné aux intimés était frauduleux et d'autre part de condamner la SCI BERANN à la somme de 6.630 € au titre des frais de déménagement des intimés ;

- CONSTATER que le bailleur ne démontre aucun préjudice notamment si l'état du bien a eu un impact sur le prix du bien par rapport au prix du marché ;

- DIRE et JUGER que la SCI BERANN ne prouve aucun préjudice ;

- DIRE et JUGER que Monsieur [Z] et Mme [C] [O] ne supporteront pas le coût de l'usure du sol, des murs ainsi que la présence de tartre car il s'agit d'une usure normale du logement et qu'il ne peut être reproché à Monsieur [Z] de ne pas avoir laissé des ampoules dans les douilles ;

- ORDONNER des délais de paiement afin que Monsieur [Z] et Mme [C] [O] réglent leur créance sur 24 mois.

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

- CONDAMNER la SCI BERANN à payer à Monsieur [M] [Z] et à Madame [C] [O] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNER la SCI BERANN aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 février 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, il sera fait expressément référence à la décision déférée à la cour et aux dernières conclusions déposées.

L'affaire a été plaidée le 11 mars 2022. La décision a été mise en délibéré au 10 mai 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, la cour constate que la décision du premier juge est affectée d'une erreur matérielle concernant le nom de l'intimée, qui est [O] et non [O]. Le jugement déféré sera rectifié en ce sens.

La cour rappelle également que les demandes tendant à voir dire, juger et constater ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile de sorte qu'il n'en sera pas fait mention dans le dispositif.

Sur la qualité à agir.

L'article 122 du code de procédure civile dispose que : 'Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée'.

Le premier juge a considéré que la SCI BERANN n'apportait pas la preuve de son intérêt à agir puisqu'elle ne justifiait pas, à la date du 13 août 2019, de sa qualité de propriétaire des locaux précédemment loués à Monsieur [Z] et Madame [O] par bail en date du 28 décembre 2010 et susceptibles d'avoir été vendus à compter du 30 novembre 2016.

Toutefois, en cause d'appel, la SCI BERANN produit les pièces justificatives suivantes :

- l'acte de propriété du terrain situé [Adresse 1] et cadastré [Cadastre 3],

- une attestation rédigée le 11 mai 2011 par Monsieur [A] démontrant qu'un bâtiment à usage d'habitation a été édifié sur la parcelle en cause, l'ouvrage ayant été réceptionné le 12 février 2010,

- un relevé des formalités établi par le service de la publicité foncière de Fort-de-France dans lequel il est précisé que l'acte de vente de la parcelle [Cadastre 3] a été enregistré le 23 mai 2008 et que, au 04 décembre 2020, la SCI BERANN était toujours propriétaire de l'immeuble cadastré [Cadastre 3] et situé à [Adresse 1].

Dès lors, la cour relève que, en sa qualité de propriétaire de l'immeuble situé [Adresse 1], la SCI BERANN justifie de sa qualité à agir. Le jugement de première instance sera infirmé sur ce point.

Sur la validité du congé pour vendre.

L'article 15 II de la loi du 06 juillet 1989, dans sa rédaction applicable à la date du congé, dispose que : « Lorsqu'il est fondé sur la décision de vendre le logement, le congé doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente projetée. Le congé vaut offre de vente au profit du locataire : l'offre est valable pendant les deux premiers mois du délai de préavis. Les dispositions de l'article 46 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ne sont pas applicables au congé fondé sur la décision de vendre le logement.

A l'expiration du délai de préavis, le locataire qui n'a pas accepté l'offre de vente est déchu de plein droit de tout titre d'occupation sur le local.

Le locataire qui accepte l'offre dispose, à compter de la date d'envoi de sa réponse au bailleur, d'un délai de deux mois pour la réalisation de l'acte de vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l'acceptation par le locataire de l'offre de vente est subordonnée à l'obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois. Le contrat de location est prorogé jusqu'à l'expiration du délai de réalisation de la vente. Si, à l'expiration de ce délai, la vente n'a pas été réalisée, l'acceptation de l'offre de vente est nulle de plein droit et le locataire est déchu de plein droit de tout titre d'occupation.

Dans le cas où le propriétaire décide de vendre à des conditions ou à un prix plus avantageux pour l'acquéreur, le notaire doit, lorsque le bailleur n'y a pas préalablement procédé, notifier au locataire ces conditions et prix à peine de nullité de la vente. Cette notification est effectuée à l'adresse indiquée à cet effet par le locataire au bailleur ; si le locataire n'a pas fait connaître cette adresse au bailleur, la notification est effectuée à l'adresse des locaux dont la location avait été consentie.

Elle vaut offre de vente au profit du locataire. Cette offre est valable pendant une durée d'un mois à compter de sa réception. L'offre qui n'a pas été acceptée dans le délai d'un mois est caduque. [...]. »

En l'espèce, il est établi que, par acte d'huissier en date du 25 avril 2016, la SCI BERANN a signifié à Messieurs [E] et [Z] et à Madame [O] un congé pour vendre le 30 novembre 2016 aux fins de vente de la villa au prix de 515.000 euros, valant offre de vente.

Dans leurs dernières conclusions, les intimés soutiennent que rien n'indique que la SCI BERANN s'est comportée comme un bailleur qui cherchait à vendre un bien mais a voulu en réalité récupérer sa maison d'habitation en prétendant vouloir donné congé pour vendre. Ils ajoutent que, pendant la durée du congé, aucune visite des lieux n'a été organisée.

En l'espèce, les intimés reconnaissent dans leurs dernières conclusions qu'ils n'ont pas indiqué au bailleur leur intention d'acquérir le bien dans un délai de deux mois, soit au plus tard le 25 juin 2016. Il n'est pas non plus contesté que le bailleur a attendu le 19 août 2016 pour mettre le bien en vente dans une agence immobilière.

La cour relève que le délai qui s'est écoulé entre l'expiration du droit de préremption des locataires et le mandat de vente exclusif signé par le bailleur auprès de l'agence immobilière 'L'AFFAIRE IMMOBILIERE' était tout à fait raisonnable, et ce d'autant que, au cours du mois de juillet 2016, les locataires ont soumis en vain au bailleur une nouvelle offre d'acquisition du bien en cause. En outre, il importe peu que ce mandat ait été donné postérieurement à la date d'effet du congé. Enfin, le caractère frauduleux du congé pour vendre allégué par les intimés s'apprécie après le départ des locataires pour s'assurer de la réalité de la vente au prix annoncé auprès des locataires et de l'absence de re-location immédiate.

En l'espèce, il ressort des éléments du dossier que, après le départ des lieux de Monsieur [Z] et Madame [O] le 10 octobre 2018, la villa a été de nouveau proposée à la vente au prix de 550.000 euros à compter du 02 mai 2019, sans avoir été occupée, entre-temps, par un autre locataire. L'agence immobilière HOPLOC a attesté des démarches faites pour permettre la vente du logement et a précisé que le prix de vente de la villa avait été revu à la baisse pour être fixé à 525.000 euros HAI (hors frais d'agence).

Il résulte de l'ensemble de ces énonciations que Monsieur [Z] et Madame [O] échouent à administrer la preuve du caractère prétendument frauduleux du congé pour vendre qui leur a été délivré. Dès lors, le congé pour vendre délivré le 25 avril 2016 doit être déclaré valable.

Sur les nouvelles conditions de vente.

Les intimés font valoir que, alors qu'une promesse de vente a été signée le 15 janvier 2021 pour un prix de 500.000 euros, ils n'ont reçu aucun courrier de leur ancien bailleur ou de son notaire les informant de la diminution du prix de vente.

En l'espèce, aucune pièce justificative n'est produite en ce sens par l'appelante.

Toutefois, le congé pour vendre délivré le 25 avril 2016 a été déclaré valable, de sorte que le bail qui avait pris effet le 1er décembre 2010 s'est trouvé résilié de plein droit le 30 novembre 2016.

Si le locataire découvre, après l'extinction du bail, que la vente est intervenue à des conditions plus avantageuses, cette vente est nulle.

En l'espèce, il est établi qu'une promesse de vente a été consentie, devant notaire, le 15 janvier 2021, pour un prix de 500.000 euros, par la SCI BERANN au bénéfice de la SCI d'ILIANA.

Toutefois, il résulte d'un courrier recommandé avec accusé de réception adressé le 20 août 2021 par la SCI BERANN à Maître [G], notaire, que la SCI d'ILIANA, n'ayant pas levé l'option d'achat ni signé l'acte de vente dans les délais prévus par l'acte notarié, a été déchue de plein droit du bénéfice de la promesse de vente signée le 15 janvier 2021 par le promettant et le bénéficiaire.

Ensuite, Monsieur [Z] et Madame [O] n'ont jamais manifesté leur intention d'acquérir à ces conditions plus avantageuses, ni même démontré leur capacité financière à cette fin. Nonobstant ce défaut d'information relatif à la diminution du prix de vente du bien en cause, la cour relève que cette absence d'intention d'acquérir est exclusive de tout préjudice. Dans ces conditions, les intimés seront déboutés de leur demande en paiement de la somme de 6.630 euros au titre du remboursement des frais de déménagement.

Sur les réparations locatives.

Il résulte des articles 4 du code civil et 7 de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989 que le juge ne peut refuser d'évaluer le montant d'un dommage, résultant de l'inexécution des obligations du locataire, dont il constate l'existence dans son principe.

En l'espèce, l'appelante prétend que l'état dans lequel les lieux loués ont été laissés par les intimés a retardé la vente du bien litigieux. Pour autant, la SCI BERANN ne démontre pas en quoi les manquements des locataires à leurs obligations contractuelles l'auraient amenée à différer la mise en vente de la villa en cause.

L'article 7 c de la loi 89-462 du 6 juillet 1989 oblige le locataire à répondre des dégradations et pertes qui surviennent pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu par cas de force majeure, par la faute du bailleur ou par le fait d'un tiers qu'il n'a pas introduit dans le logement.

L'article 7 d de la loi du 6 juillet 1989 oblige également le locataire à prendre à sa charge l'entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat et les menues réparations ainsi que l'ensemble des réparations locatives définies par décret en Conseil d'Etat, sauf si elles sont occasionnées par vétusté, malfaçon, vice de construction, cas fortuit ou force majeure (...).

Il résulte du V de l'article 25 de cette loi que le décret en Conseil d'Etat visé par cet article est le décret n 87-712 du 26 août 1987 qui a été expressément maintenu en vigueur. L'article 1er de ce décret dispose: ' Sont des réparations locatives les travaux d'entretien courant et de menues réparations, y compris les remplacements d'éléments assimilables aux dites réparations, consécutifs à l'usage normal des locaux et équipements à usage privatif. Ont notamment le caractère de réparations locatives les réparations énumérées en annexe au présent décret'.

En l'espèce, Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O] font valoir qu'ils ne sont pas tenus de supporter le coût de la réfection des murs et des sols qui sont usagés dans la mesure où il s'agit d'une usure normale du logement et qu'aucune dégradation majeure n'a été constatée lors de l'établissement de l'état des lieux de sortie.

Toutefois, la SCI BERANN a présenté uniquement, dans le dispositif de ses dernières conclusions, une demande en paiement de la somme de 6.861 euros au titre des travaux de réfection des peintures et de remise en état du jardin, déduction faite du dépôt de garantie d'un montant de 2.000 euros.

Dès lors, la cour n'est tenue d'examiner que les demandes présentées par le bailleur au titre des travaux de réfection des peintures et de remise en état du jardin.

Il résulte de l'état des lieux d'entrée du 1er décembre 2010 que le logement est en bon état, étant rappelé que l'ouvrage a été achevé et réceptionné au cours du premier trimestre de l'année 2010.

Dès lors que l'état des lieux d'entrée ne mentionne pas l'existence de désordres en ce qui concerne les peintures, le locataire est tenu de réparer les dégradations constatées lors de son départ, sauf à démontrer qu'il n'en est pas l'auteur ou à établir un cas de force majeure ou encore à justifier que les désordres sont dus à l'usure normale ou à la vétusté. De même, la preuve de l'état d'usure normale ou de la vétusté incombe au locataire. Mais c'est au bailleur de rapporter la preuve de l'existence des dégradations locatives.

Lors de ses constatations effectuées le 19 octobre 2018, corroborées par les photographies annexées au procès-verbal, Maître [V] [N], huissier de justice, a noté les éléments suivants se rapportant à l'état des peintures :

au rez-de-chaussée :

- dans le séjour, les murs présentent des traces d'usure et des traces d'infiltration,

- dans la chambre 1, les murs présentent des traces d'infiltration avec une peinture écaillée et un enduit effrité, ainsi que des traces d'usure,

- dans la salle de bains attenante à la chambre 1, de l'enduit a été appliqué sur le mur, sans être poncé et repeint,

- dans la chambre 2, les murs sont sales et présentent des traces d'infiltration avec une peinture écaillée et un enduit effrité,

- dans le dégagement, des traces d'usure sont présentes sur les murs,

- dans les WC, les murs présentent des traces d'usure,

- dans la cuisine, les murs présentent des traces d'usure,

- dans le cellier, les murs présentent des traces d'usure et des traces d'infiltration ;

à l'étage

- dans le séjour, les murs présentent des traces d'usure,

- dans la chambre 3, la porte n'est pas peinte et les murs présentent des traces d'adhésif et d'usure,

- dans la salle de bains attenante à la chambre 3, un enduit a été appliqué sur le mur, mais non poncé et non repeint,

- dans la chambre 4, les murs présentent sept trous, six cavaliers, ainsi que des traces d'usure et d'infiltration,

- dans la salle de bains, la porte présente des signes d'usure,

- dans les WC indépendants, les murs sont sales,

- dans la chambre 5, les murs sont sales avec des traces d'usure,

- dans la chambre 6, les murs sont très sales avec notamment des excréments de chauve-souris,

- dans le cellier, les murs sont sales avec des traces d'usure,

- sur la terrasse, les murs présentent des traces d'usure.

Ayant occupé les lieux pendant huit ans, Monsieur [Z] et Madame [O] ne peuvent être tenus de prendre en charge la réfection pour vétusté des murs qui s'est traduite par des traces d'usure. De même, ils n'ont pas à prendre en charge la réfection de certains murs dont les dégradations visibles ont pour origine des infiltrations d'eau qui révèlent l'existence de problèmes d'étanchéité du bâtiment.

En revanche, les intimés doivent supporter le coût du nettoyage des murs dont l'état de saleté a été constaté par l'huissier de justice, mais également la réfection des peintures dès lors que, sur certains murs, un enduit a été appliqué sans être poncé et repeint.

Dans ce cadre et au vu des constations susvisées, s'agissant des peintures, il apparaît que les preneurs n'ont pas satisfait à leurs obligations en ce qui concerne les points suivants :

- dans la salle de bains attenante à la chambre 1, de l'enduit a été appliqué sur le mur, sans être poncé et repeint,

- dans la chambre 2, les murs sont sales,

- dans la chambre 3, la porte n'est pas peinte et les murs présentent des traces d'adhésif,

- dans la salle de bains attenante à la chambre 3, un enduit a été appliqué sur le mur, mais non poncé et non repeint,

- dans la chambre 4, les murs présentent sept trous et six cavaliers,

- dans les WC indépendants, les murs sont sales,

- dans la chambre 5, les murs sont sales,

- dans la chambre 6, les murs sont très sales avec notamment des excréments de chauve-souris,

- dans le cellier, les murs sont sales.

En l'espèce et aux fins d'évaluer le montant de son préjudice, le bailleur produit un devis et une facture qui décrivent les travaux de peinture réalisés mais ne verse pas à la procédure de devis se rapportant au nettoyage des murs de la chambre 2, de la chambre 3, de la chambre 5, des WC indépendants et du cellier dont l'état de saleté a été relevé par Maître [N].

Compte tenu de ces éléments, la cour estime le montant des travaux de réfection des peintures devant être supportées par les locataires à la somme de 1.306,95 euros TTC.

Par ailleurs, l'huissier de justice a constaté, lors de l'établissement de l'état des lieux de sortie, la présence dans le jardin de blocs en béton et de déchets végétaux. Maître [N] a également relevé que les locataires s'engagent à effectuer un nouvel entretien du jardin à une date qui sera fixée par le bailleur. En cause d'appel, Monsieur [Z] et Madame [O] n'ont pas contesté ne pas avoir procédé à la remise en état du jardin. Ils n'ont pas non plus formulé d'observations relatives à la facture afférente à la remise en état du jardin et produite par l'appelante. Dès lors, la SCI BERANN rapporte la preuve que le manque d'entretien du jardin est imputable aux locataires.

Compte tenu de ces éléments, la cour estime le coût de la remise en état du jardin devant être supporté par les locataires à la somme de 2.061 euros TTC.

En conséquence, Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O] seront condamnés solidairement à payer à la SCI BERANN la somme de 1.367,95 euros au titre des réparations locatives, déduction faite du dépôt de garantie d'un montant de 2.000 euros.

Sur les délais de paiement.

L'article 1343-5 du Code Civil permet d'accorder aux débiteurs impécunieux des délais de paiement qui emprunteront leur mesure aux circonstances, sans pouvoir dépasser deux ans.

En l'espèce, les intimés ont été mis en demeure par la SCI BERANN de régler la somme de 9.586,97 euros, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 04 mars 2019.

Or, la cour relève que Monsieur [Z] et Madame [O] n'ont effectué aucun versement. De ce fait et au regard des délais dont ils ont déjà bénéficié en raison de la durée de la procédure, il n'y a pas lieu de faire droit à leur demande de délais de paiement.

Sur les demandes accessoires.

Le jugement de première instance sera infirmé en ce qu'il a condamné la SCI BERANN à payer à Monsieur [Z] et Madame [O] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Il sera alloué la somme de 2.000 euros à la SCI BERANN au titre des frais irrépétibles.

Succombant, Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O] seront condamnés in solidum aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

CONSTATE que le jugement déféré est affecté d'une erreur matérielle qu'il convient de rectifier, l'intimée se nommant [O] et non [O] ;

INFIRME le jugement rendu le 09 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Fort-de-France dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

DIT que, en sa qualité de propriétaire de l'immeuble situé [Adresse 1], la SCI BERANN justifie de sa qualité à agir ;

DÉCLARE valable le congé pour vendre délivré le 25 avril 2016 par la SCI BERANN à Monsieur [Z] et Madame [O] ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O] à payer à la SCI BERANN la somme de 1.367,95 euros au titre des réparations locatives, déduction faite du dépôt de garantie d'un montant de 2.000 euros ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE les parties de leurs plus amples demandes ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O] à payer à la SCI BERANN la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [M] [I] [Z] et Madame [C] [O] aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître M.L. SALGUES JAN, avocat.

Signé par Mme Christine PARIS, Présidente de Chambre et Mme Micheline MAGLOIRE, Greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Fort-de-France
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00506
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;20.00506 ?
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