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29/04/2022 | FRANCE | N°20/00099

France | France, Cour d'appel de Fort-de-France, Chambre sociale, 29 avril 2022, 20/00099


ARRET N° 22/80



R.G : N° RG 20/00099 - N° Portalis DBWA-V-B7E-CEYU



Du 29/04/2022





Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 2]



C/



[Y]

S.C.P. BR & ASSOCIES













COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE



CHAMBRE SOCIALE



ARRET DU 29 AVRIL 2022





Décision déférée à la cour : jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORT-DE-FRANCE, du 11 Mars 2020, enregistrée sous le n° 17/00258






APPELANTE :



Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 2] prise en la personne de son représentant légal en exercice.

[Adresse 1]

[Localité 2]/MARTINIQUE



Représentée par Me Catherine RODAP, avoca...

ARRET N° 22/80

R.G : N° RG 20/00099 - N° Portalis DBWA-V-B7E-CEYU

Du 29/04/2022

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 2]

C/

[Y]

S.C.P. BR & ASSOCIES

COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU 29 AVRIL 2022

Décision déférée à la cour : jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORT-DE-FRANCE, du 11 Mars 2020, enregistrée sous le n° 17/00258

APPELANTE :

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 2] prise en la personne de son représentant légal en exercice.

[Adresse 1]

[Localité 2]/MARTINIQUE

Représentée par Me Catherine RODAP, avocat au barreau de MARTINIQUE

INTIMES :

Monsieur [W][U] [Y]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3] / Martinique

Représenté par Me Viviane MAUZOLE, avocat au barreau de MARTINIQUE

S.C.P. BR & ASSOCIES

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Jean MACCHI, avocat au barreau de MARTINIQUE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 janvier 2022, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne FOUSSE, Conseillère chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :

- Madame Emmanuelle TRIOL, Présidente

- Madame Anne FOUSSE, Conseillère

- Monsieur Thierry PLUMENAIL, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Rose-Colette GERMANY,

DEBATS : A l'audience publique du 14 janvier 2022,

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 29 avril 2022 par mise à disposition au greffe de la cour.

ARRET : Contradictoire

***************

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [W] [U] [Y] a été engagé à L'AFPA en qualité d'agent d'accueil avec appui administratif et secrétariat à compter du 20 mars 2002 . En dernier lieu il exerçait la fonction de reponsable de sécurité moyennant une rémunération de 3901,15 euros.

Par jugement du Tribunal de Grande Instance de Fort-de-France en date du 18 octobre 2016, l'AFPA Martinique a été mise en liquidation judiciaire.

Suite à la liquidation judiciaire, l'administrateur judiciaire a envisagé le licenciement collectif de l'ensemble du personnel. Le document unilatéral portant projet de licenciement collectif a été homologué par la DIECCTE le 23 novembre 2016.

Monsieur [W] [U] [Y] se voyait notifier son licenciement pour motif économique par Me [W] [T] par courrier du 31 janvier 2017.

Il était recruté par l'IMFPA selon contrat à durée indéterminée en date du 1er février 2017 en qualité de Responsable sécurité maintenance et entretien moyennant un salaire de 3905, 63 euros.

Informé par le mandataire liquidateur du refus de prise en charge par l'AGS de sa créance salariale du fait de son embauche juste après son licenciement, par l'IMFPA, dans des fonctions similaires, il saisissait le Conseil de Prud'hommes le 16 juin 2017 aux fins de voir fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de l'AFPA Martinique et de voir enjoindre l'AGS à lui payer sa créance salariale à hauteur de 55180 euros résultant de son solde de tout compte dont 13383,35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 16522,65 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 25274 euros à titre d'indemnité de congés payés, la fixation de l'exécution provisoire pour un montant de 26766,69 euros, outre une demande de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'AGS soutenait que les contrats de travail de l'AFPA Martinique avaient été transférés en application de l'article L1224-1 du code du travail, en l'état d'éléments de fait concourant à démontrer la réalité d'un transfert d'une activité et entité économique de AFPA Martinique à l'IMFPA, de l'identité de l'activité exercée par l'AFPA Martinique et l'IMFPA, du transfert des éléments corporels, du transfert dissimulé d'une grande partie du personnel de l'AFPA Martinique, de la fraude orchestrée par l'ensemble des parties afin d'actionner à tort la garantie de la délégation AGS UNEDIC et donc à son préjudice. Elle considérait légitime son refus de prendre en charge les créances salariales.

Par jugement du 11 mars 2020, le Conseil de Prud'hommes de Fort-de-France a :

- fixé la créance de Monsieur [W] [U] [Y] au passif de l'AFPA Martinique représentée par la SCP BR et associés, es qualité de mandataire liquidateur à la somme de :

* 55180 euros à titre de paiement du solde de tout compte,

* 13383 ,35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 16522,65 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 25274 euros à titre d'indemnité de congés payés,

- dit que le jugement est opposable et commun à l'AGS et Me [V],

- rappelé que la garantie de la délégation AGS UNEDIC ne peut excéder les limites de sa garantie légale, qu'elle ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L3253-6 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et suivants et L 3253-17 du code du travail, rappelé que l'obligation de l'AGS de faire l'avance ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et sur justification par celui ci de l'absence de fonds disponibles entre ces mains pour procéder à leur paiement.

- condamné l'AGS à régler 750 euros à Monsieur [W] [U] [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Le Conseil de Prud'hommes a considéré qu'il n'était pas démontré, en dépit de l'embauche intervenue postérieurement à la rupture du contrat de travail de certains salariés, qu'il y avait eu de transfert d'activité de L'AFPA vers l'IMFPA; que les actifs cédés après décision du juge commissaire ne constituaient pas un motif de transfert d'activité; qu'il n'existait pas de décision du conseil d'administration du l'AFPA validant la cession de l'activité au profit de l'EPIC comme cela s'était produit au niveau national et qu'enfin la DIECCTE avait validé le projet de licenciement collectif le 23 novembre 2016.

L'AGS a interjeté appel de ce jugement le 19 juin 2020, dans les délais impartis, et a fait signifier sa déclaration d'appel à la la SCP BR Associés es qualité de mandataire liquidateur par exploit d'huissier du 3 août 2020 et à Monsieur [W] [U] [Y] par exploit d'huissier du 4 août 2020.

Aux termes de ses conclusions notifiées par le rpva le 29 janvier 2021, et signifiées à la SCP BR Associés es qualité de mandataire liquidateur par exploit d'huissier du 9 février 2021, l'AGS demande à la Cour de :

- la recevoir en son appel et ses prétentions

- infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes en ce qu'il a fixé la créance au passif de l'AFPA Martinique à la somme de 55180 euros à titre de paiement du solde de tout compte,

* 13383 ,35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 16522,65 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 25274 euros à titre d'indemnité de congs payés,

- dit que le jugement est opposable et commun à l'AGS et à Me [V], rappelé que la garantie de l'AGS ne peut excéder les limites de sa garantie légale,

- condamné l'AGS à régler 750 euros à Monsieur [W] [U] [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

- statuant à nouveau,

- dire et juger que l'entité et l'activité économique de l'AFPA Martinique ont été reprises et poursuivies par l'IMFPA,

- dire et juger en conséquence, que l'article L1224-1 du code du travail, dispositions impératives d'ordre public sont réunies et doivent donc s'appliquer sans que les parties ne puissent y faire échec ou y déroger,

- dire et juger que la fraude aux droits de l'AGS est constituée constituant une circonstance aggravante entourant le transfert d'entreprise,

- déclarer en conséquence, sans effet le licenciement pour motif économique de Monsieur [W] [U] [Y],

- dire et juger que dans ces conditions de transfert de contrat de travail, aucune avance de créances résultant de la rupture du contrat de travail de Monsieur [W] [U] [Y] n'est due par la délégation AGS UNEDIC,

- dire et juger son refus légitime de prise en charge des créances salariales de Monsieur [W] [U] [Y] repose sur des considérations juridiques et objectives en dehors de toute considération discriminatoire,

- débouter en conséquence Monsieur [W] [U] [Y] de ses demandes,

- dire et juger que Monsieur [W] [U] [Y] doit se retourner contre l'IMFPA afin de prendre en compte l'ancienneté acquise au sein de l'AFPA Martinique et l'application des éléments de son contrat de travail transféré à l'IMFPA en application de l'article L1224-1 du code du travail,

- ordonner au besoin, la mise en cause de l'IMFPA,

- condamner Monsieur [W] [U] [Y] au paiement de la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me C. RODAP,

- juger que les sommes éventuellement dues au titre de l'article 700 du code de procédure civile de rentrent pas dans le champ de garantie de la délégation AGS UNEDIC,

- subsidiairement et en tout état de cause, dire et juger que la garantie de l'AGS ne saurait excéder les limites de sa garantie légale '..

Elle rappelle le fondement légal du droit de l'AGS d'agir en reconnaissance d'un transfert du contrat de travail justifiant son refus de prise en charge des créances salariales de l'intimé. Elle soutient à cet égard que l'article L625-4 du code du commerce, lui reconnaît un droit propre distinct de celui des salariés et des employeurs à contester le règlement d'une créance figurant sur un relevé si les conditions de sa garantie ne sont pas réunies et ce pour quelque cause que ce soit. Elle considère en conséquence être légalement et valablement fondée à contester sa garantie en invoquant seule l'existence d'un transfert d'entité économique autonome à l'IMFPA.

Sur le transfert de l'entité économique de l'AFPA Martinique vers l'IMFPA, elle rappelle que les dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail sont d'ordre public et impératives, s'appliquant de plein droit lorsque les conditions sont remplies, avec pour conséquence, le transfert automatique et de plein droit des contrats sans que les parties ne puissent y faire échec ou s'opposer.

Sur les éléments de fait concourant à démontrer la réalité d'un transfert d'une activité et entité économique de L'AFPA à l'IMFPA, elle fait d'abord valoir que les activités de l'AFPA Martinique et de l'IMFPA sont identiques à savoir la formation continue d'adultes ainsi qu'en témoigne leur code APE identiques. Elle souligne que l'AFPA Martinique et l'IMFPA avaient toutes deux pour mission l'organisation de la formation professionnelle pour les adultes et plus largement la mise en place de dispositifs d'accompagnement favorisant l'insertion dans l'emploi.

Elle indique que les médias se sont fait l'écho de la reprise par la CTM de l'activité de l'AFPA Martinique dans le cadre d'un EPIC, notamment l'IMFPA créé le 19 mai 2015, avant même le prononcé de la liquidation judiciaire de l'AFPA Martinique, et ce pour assurer la continuité des formations continues des adultes.

En définitive, elle considère que l'IMFPA a repris et poursuivi l'activité professionnelle et principale de l'AFPA Martinique.

Elle ajoute que les éléments corporels de l'AFPA Martinique ont également été transférés. Elle expose d'une part que l'IMFPA a poursuivi l'activité dans les mêmes locaux que l'AFPA Martinique, mis à disposition dès l'origine par la CTM, soulignant que le transfert n'implique pas nécessairement un transfert de propriété des actifs, la simple mise à disposition des éléments d'actifs nécessaires au fonctionnement de l'activité étant suffisante.

Elle indique d'autre part que l'IMFPA a repris toutefois les actifs corporels et mobiliers de l'AFPA Martinique corporels au prix de 600000 euros en dépit de leur valorisation à dire d'expert à 1188610 euros , aux termes d'une ordonnance rendue par le juge commissaire de la liquidation judiciaire autorisant la cession de gré à gré de l'ensemble des actifs mobiliers de l'AFPA Martinique.

Elle en déduit que l'IMFPA a repris l'activité de L'AFPA à l'identique avec la même clientèle d'anciens salariés mais en outre, les locaux occupés précédemment par L'AFPA, l'ensemble des éléments corporels nécessaires et significatifs à l'exploitation de l'activité principale de L'AFPA(à savoir la formation continue pour adulte), les personnels diplômés, qualifiés , leur savoir faire professionnel indispensable, de sorte que l'entité économique transférée a conservé son identité.

Elle soutient que ce transfert d'une grande partie du personnel de L'AFPA à l'IMFPA a été dissimulé et expose sur ce point qu'une grande partie de l'effectif de l'association a été reprise par l'IMFPA soit 32 salariés moins de 4 mois après leur licenciement pour motif économique, cette dissimulation constituant une fraude orchestrée par cette dernière dans le but de réduire le coût salarial du transfert.

Elle considère que le salarié a agi en pleine connaissance de la fraude, puisque le licenciement économique lui a été notifié le 31 janvier 2017,, qu'alors que le terme de son contrat de travail avec l'AFPA était situé au 31 mars 2017, il a été ensuite embauché par l'IMFPA selon contrat à durée indéterminée dès le 1er février 2017, sur un poste identique à celui qu'il occupait au sein de L'AFPA, l'objectif étant alors de percevoir les indemnités d'un licenciement pour motif économique qui n'avait pas lieu d'être, tout en s'engageant avec le nouvel employeur l'IMFPA créé le 19 mai 2015 afin précisément de reprendre l'activité de formation continue ainsi que les salariés de l'AFPA.

Elle précise que bien que contacté par l'administrateur de l'AFPA Martinique, l'IMFPA n'a formé aucune offre de reprise lors de la procédure collective. Elle ajoute même que lors de l'audience des procédures collectives du 18 octobre 2016, la représentante des salariés qui a été entendue a expliqué que l'EPIC entendait procéder à posteriori à des reprises de salariés de l'AFPA sans reprise de l'ancienneté et sans maintien des salaires contrevenant ainsi totalement aux dispositions issues de l'article L1224-1 du code du travail. Ainsi dès l'audience de liquidation judiciaire de L'AFPA, les futurs salariés repris savaient donc pertinemment qu'ils seraient réintégrés dans la nouvelle structure IMFPA.

Pour l'AGS, le fait que le salarié n'ait jamais revendiqué le transfert de son contrat par le nouvel employeur , la reprise de son ancienneté et son niveau de salaire, alors que cela aurait été dans son intérêt, ce d'autant plus qu'il a signé un contrat à durée déterminée donc moins favorable démontre l'existence de la fraude dont l'intérêt est double, d'une part pour le salarié de percevoir les indemnités de licenciement économique tout en ayant l'assurance d'un emploi promis par l'IMFPA, et d'autre part pour l'IMFPA de reprendre les contrats de travail de l'AFPA, notamment celui du salarié, sans reprise d'ancienneté, du salaire et des avantages acquis, mais en s'assurant par ce biais, de la reprise à moindre frais du savoir faire expérimenté des salariés de l'AFPA.

Elle soutient que la fraude a donc consisté en l'exfiltration de concert des salariés de L'AFPA avec le consentement de ces derniers, et le recours à la procédure de recrutement via le Pôle emploi et elle en déduit que le délai s'écoulant entre la liquidation judiciaire et les futures nouvelles embauches n'ont été qu'un artifice, un leurre destiné à échapper aux règles légales et d'ordre public de transfert d'entreprises issues de l'article L 1224-1 du code du travail et à l'obligation corollaire de transfert automatique et de plein droit des contrats de travail avec reprise d'ancienneté et de rémunération.

Elle poursuit son argumentation en soutenant que les procédures de recrutement par Pôle emploi se lissent dans le temps, passant par des phases d'entretien et de test par un conseiller au recrutement . Or selon elle, l'IMFPA a lancé son processus de recrutement via le Pôle emploi pour 61 postes de travail en décembre 2016, soit postérieurement à la liquidation judiciaire de l'AFPA Martinique alors que l'EPIC a été créé depuis le 19 mai 2015, soit plus d'un an plus tôt. Ainsi elle considère que l'IMFPA a attendu sciemment la liquidation judiciaire de L'AFPA afin de reprendre à moindre coût les salariés de l'AFPA. Elle en conclut de tous ces éléments que la fraude aux droits de l'AGS est constituée.

Il sera renvoyé aux conclusions de l'AGS pour le surplus des moyens développés, notamment quant aux conséquences tirées de la réalité d'un transfert d'entreprise sur le contrat de travail de Monsieur [W] [U] [Y], au refus de prise en charge des créances salariales et au rejet des demandes de demandes incidentes de l'intéressé relatives notamment à la modification du quantum de ses demandes d'indemnité de congés payés et de licenciement.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 14 novembre 2020 par le rpva, Monsieur [W] [U] [Y] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement du 11 mars 2020 en ce qu'il retient que le licenciement économique a été validé par une double autorisation de la DIECCTE en date des 25 novembre 2016 et 27 janvier 2017,

- dire et juger qu'au nom du principe de la séparation des pouvoirs les décisions sus visées s'imposent au juge judiciaire,

- dire que Monsieur [W] [U] [Y] n'a participé ni à une fraude ni à la violation de la loi,

- dire et juger que l'AGS doit garantir les créances salariales et indemnitaires de Monsieur [W] [U] [Y],

- fixer sa créance au passif de l'association AFPA représentée par la SCP BR ASSOCIES es qualité de liquidateur aux sommes suivantes :

- 18736 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,

- 18215,75 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- déclarer la décision à intervenir opposable à la SCP [V] RAVISE, liquidateur judiciaire de l'association AFPA, et à la délégation AGS UNEDIC.

A l'appui de ses prétentions il fait valoir que l'autorisation de licenciement a aété accordée pour motif économique et que dès lors le juge judiciaire ne peut controler le respect de l'obligation individuelle de reclassement qui a déjà été vérifié par l'inspecteur du travail, que les décisions de l'insepcteur du travail s'imposent en conséquence au juge judiciaire, celle du 23 novembre 2016 portant homologation du document unilatéral quite à la seconde décision d'homologation portant sur un projet de licenciement économique collectif Association AFPA Martinique, celle du 26 janvier 2017 qui statuant sur l'autorisation de licenciement de Monsieur [Y] salarié protégé a dit :

- considérons que le reclassement en interne ne peut être envisagé du fait de la liquidation judiciaire de l'AFPA Martinique et de son absence d'appartenance à un groupe,

- considérons que les lettres de l'administrateur judiciaire à destination d'éventuel employeur en vue d'un reclassement en externe qui énumère les postes libérés sans nommer les éventuels bénéficiaires ne peuvent être regardés comme discriminatoire,

- considérons en l'absence de lien avec le mandat de Monsieur [Y] décide,

La demnde de licenciement de Monsieur [Y] est autorisée.

Il soutient encore que conformément aux dispositions légales, l'AGS a vocation à garantir sa créance salariale; que le débat de l'AGS sur l'application de l'article L 1224-1 du code du travail qui invoque une prétendue fraude et la saisine du parquet mais ne démontre ni fraude ni infraction n'est en rien recevable.

Il sera renvoyé aux conclusions de l'intimé pour les surplus des moyens développés.

Bien qu'ayant constitué avocat, La SCP BR Associés es qualité de mandataire liquidateur n'a pas conclu.

La clôture a été prononcée le 21 mai 2021.

MOTIFS

- Sur la qualité à agir de l'AGS

l'AGS demande à la cour de la déclarer recevable en son appel et ses prétentions , tandis que Monsieur [Y] soutient qu'elle ne démontre aucune fraude ni infraction bien qu'invoquant la saisine du parquet.

Aux termes de l'article L 625-4 du code de commerce, «lorsque les institutions mentionnées à l'article L 143-11-4 du code du travail refusent pour quelque cause que ce soit de régler une créance figurant sur un relevé des créances résultant d'un contrat de travail, elles font connaître leur refus au mandataire judiciaire qui en informe immédiatement le représentant des salariés et le salarié concerné. Ce dernier peut saisir du litige le Conseil de Prud'hommes. Le mandataire judiciaire, le débiteur et l'administrateur lorsqu'il a une mission d'assistance sont mis en cause. Le salarié peut demander au représentant des salariés de l'assister ou de le représenter devant la juridiction prudhommale.

Il est constant que l'AGS tire de l'article précité un droit propre et un intérêt à agir distinct de celui des salariés et des employeurs à contester le règlement d'une créance figurant sur un relevé si les conditions de sa garantie ne sont pas réunies et ce pour quelque cause que ce soit, et la jurisprudence a effectivement reconnu la possibilité pour la délégation AGS UNEDIC de contester le principe et l'étendue de sa garantie dans les cas où les conditions de celle- ci ne sont pas réunies.

Ainsi il a été admis à titre d'exemple que l'AGS peut remettre en cause l'existence d'un véritable contrat de travail en rapportant la preuve de sa fictivité, contester le cumul d'un contrat de travail avec un mandat social de droit ou de fait, critiquer la validité d'une clause de non concurrence, ou encore former tierce opposition à l'encontre d'une décision.

En revanche les dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail et suivants du code du travail ont été édictées dans un souci de protection du salarié qui peut seul se prévaloir de leur inobservation. Il en résulte que l'AGS n'est pas recevable sauf fraude du salarié qu'il lui appartient de démontrer, à demander la reconnaissance d'un transfert des contrats de travail.

En l'espèce l'AGS rappelle que la rupture du contrat de travail de Monsieur [W] [U] [Y] était effective le 31 janvier 2017, qu'il a été ensuite embauché sur un poste identique de formateur à celui qu'il occupait au sein de L'AFPA le 1er février 2017 que durant la période d'observation l'administrateur judiciaire a mis en place un appel à candidatures en vue de la reprise de l'activité et des effectifs de L'AFPA qui comptait un effectif de 138 postes, mais que devant le constat d'une absence de candidature il a pris l'attache de l'IMFPA créé depuis le 19 mai 2015; que celui-ci n'a fait aucune offre; que la fraude orchestrée par l'IMFPA a été de reprendre les contrats de travail de l'AFPA, du savoir faire expérimenté des salariés à moindre coût c'est à dire sans reprise de leur ancienneté, de leur salaire et de leurs avantages acquis, pour reprendre son activité avec ses éléments corporels acquis à prix inférieur à leur valorisation à dire d'expert, en faisant ainsi échec aux dispositions pourtant impératives de l'article L 1224-1 du code du travail.

S'il est possible à l'AGS de contester une créance salariale notamment en cas de fraude, celle-ci s'entend de la fraude du salarié et non de celle d'un tiers en l'espèce l'IMFPA.

Or l'AGS ne justifie pas comme elle le soutient, au regard des pièces de son dossier que la représentante des salariés à l'audience des procédures collectives du 18 octobre 2016 aurait expliqué que l'EPIC entendait procéder a posteriori à de nouvelles embauches sans reprise de l'ancienneté et sans maintien des salaires, et que le salarié informé de cette situation, aurait sciemment renoncé à son ancienneté, salaire et avantages aux fins de percevoir des indemnités de licenciement, sachant participer à une fraude aux droits de l'AGS. Elle ne justifie pas non plus que la délégation AGS UNEDIC a alerté lors de cette audience publique le tribunal mixte de commerce sur la présence de paramètres s'apparentant à une dissimulation du transfert organisé de l'activité de l'AFPA à l'EPIC IMFPA.

Ensuite l'AGS n'indique pas de la suite apportée à la plainte déposée 6 avril 2017 auprès du Procureur de la République pour dénoncer le fait que pour faire échec aux dispositions impératives d'ordre public de l'article L 1224-1 du code du travail, la direction de l'IMFPA a attendu le licenciement des salariés de L'AFPA soit prononcé afin de les embaucher à une période contemporaine de leur licenciement avec la circonstance que ceux ci détenaient un niveau de diplôme, de savoir faire indispensable à l'activité de l'IMFPA, agissant ainsi en fraude de ses droits.

Force est de constater en toute hypothèse que cette plainte ne visait pas une fraude des salariés laquelle n'apparait pas établie même en cause d'appel.

Il s'en suit qu'en l'absence de fraude démontrée du salarié par l'AGS, celle- ci ne dispose d'aucun droit propre en reconnaissance d'un transfert des contrats de travail et qu'elle est irrecevable en ses demandes à ce titre.

La demande de l'AGS tendant à ordonner en tant que de besoin la mise en cause de l'IMFPA apparaît dès lors sans intérêt pour l'issue du litige.

Il est rappelé que la garantie de l'AGS est acquise dans les limites prévues à l'article L 3253-8 du code du travail et les plafonds prévus aux articles L 3253,17 et D 3253-5 du code du travail.

- Sur le quantum de la créance de Monsieur [W] [U] [Y]

En première instance celui ci sollicitait les sommes de :

* 13383 ,35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 16522,65 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 25274 euros à titre d'indemnité de congés payés,

soit un total de 55180 euros.

Le jugement de premirère instance faisant droit à cette demade fixait la créance du salarié au passif de l'association AFPA à la somme de :

* 55180 euros à titre de paiement du solde de tout compte,

* 13383 ,35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 16522,65 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 25274 euros à titrd d'indemnité de congs payés.

En cause d'appel Monsieur [W] [U] [Y] demande de fixer sa créance aux sommes suivantes :

- 18736 euros à titre d'indemnité de congés payés . Or L'AGS ne conteste pas le quantum de cette demande. Il y sera fait droit,

- 18215,75 euros à titre d'indemnité légale de licenciement .

Le salarié bénéficiait d'une ancienneté de 14 ans et 10 mois.

Aux termes de l'article R 1234-2 du code du travail dans sa version applicable au litige L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté, auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté.

Aux termes de l'article R 1234-4 du code du travail, le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

1° Soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement ;

2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.

Le douzième de la rémunération des douze derniers mois (formule la plus avantageuse pour la salarié) précédant le licenciement est égale à 53533 /12=4461,11 euros.

L'idemnité légale de licenciement s'élève donc à la somme de :

4461,11 x1/5 x 10 (8922,22 euros ) + 4461,11 x 2/15 x 4 ans(2379,25) + 4461,11 x 2,15 x 10/12(495,67) =11797,14 euros.

Le jugement critiqué sera infirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

DEBOUTE l'UNEDIC Délégation AGS CGEA de [Localité 2] de sa demande tendant à ordonner en tant que de besoin la mise en cause de l'IMFPA,

Ajoutant au jugement entrepris,

Dit l'UNEDIC Délégation AGS CGEA de [Localité 2] irrecevable à invoquer l'existence d'un transfert de l'entité économique autonome de l'association liquidée L'AFPA vers l'IMFPA, en application des dispositions des articles L. 1224-1 et du Code du travail , en l'absence de fraude de Monsieur [W] [U] [Y],

CONFIRME le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Fort-de -France le 11 mars 2020, sauf sur le quantum des sommes fixées au passif de la liquidation judiciaire de l'Association AFPA;

STATUANT à nouveau de ce chef,

FIXE la créance de Monsieur [W] [U] [Y] au passif de la liquidation judiciaire de l'association AFPA, représentée par la SCP [V] et associés es qualité de mandataire liquidateur à la somme de :

-18736 euros à titre d'indemnité de congés payés,

-11797,14 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

Dit n'y avoir lieuà application de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE l'UNEDIC Délégation AGS CGEA de Fort-de -France aux dépens d'appel,

Et ont signé le présent arrêt Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Rose-Colette Germany, Greffier

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Fort-de-France
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/00099
Date de la décision : 29/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-29;20.00099 ?
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