COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 24/01785 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VYB7
N° de Minute : 1749
Ordonnance du mardi 03 septembre 2024
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. [L] [X]
né le 28 Janvier 1993 à [Localité 5]
de nationalité Géorgienne
Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 6]
dûment avisé, comparant en personne
assisté de Me Anne sophie AUDEGOND-PRUD'HOMME, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office et de Mme [T] [G] interprète en langue géorgienne, tout au long de la procédure devant la cour, serment préalablement prêté ce jour
INTIMÉ
MME LE PREFET DE L'OISE
dûment avisée, absente non représentée
PARTIE JOINTE
M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant
MAGISTRAT(E) DELEGUE (E) : Danielle THÉBAUD, conseillère à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assisté(e) de Yannick LANCE, greffier
DÉBATS : à l'audience publique du mardi 03 septembre 2024 à 08 h 30
ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai, le mardi 03 septembre 2024 à
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles R 743-18 et R 743-19 ;
Vu l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de LILLE en date du 01 septembre 2024 à 15 h 07 notifiée à 15 h 07 à M. [L] [X] prolongeant sa rétention administrative ;
Vu l'appel interjeté par Maître Luc Basili venant au soutien des intérêts de M. [L] [X] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 02 septembre 2024 à 14 h 02 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;
Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [L] [X], né le 28 janvier 1993 à [Localité 4] (Géorgie), de nationalité géorgienne, a fait l'objet d'un placement en rétention administrative ordonné par Mme la préfète de l'Oise le 29 août 2024 notifié à 19h36 pour l'exécution d'un éloignement vers pays de nationalité au titre d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français délivrée le même jour par la même autorité.
Aucun recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative n'a été déposé au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
' Vu l'article 455 du code de procédure civile,
' Vu l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Lille en date du 1er septembre 2024 à 15h07, ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de M. [L] [X] pour une durée de 26 jours,
' Vu la déclaration d'appel de M. [L] [X] du 2 septembre 2024 à 14h02 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative.
Au titre des moyens soutenus en appel l'étranger soulève :
port injustifié des menottes,
absence interprète lors de la notification de ses droits en rétention.
MOTIFS DE LA DÉCISION
De manière liminaire il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d'éloignement de l'étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.
Les prérogatives judiciaires se limitent à vérifier la régularité et le bien fondé de la décision restreignant la liberté de l'étranger en plaçant ce dernier en rétention, ainsi qu'à vérifier la nécessité de la prolongation de la rétention au vu des diligences faites par l'administration pour l'exécution de l'expulsion et le maintien de la rétention dans la plus courte durée possible.
L'appel de l'étranger ayant été introduit dans les formes et délais légaux est recevable.
Les articles 933 du code de procédure civile et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne permettent, sauf indivisibilité ou demande d'annulation du jugement, que de discuter en cause d'appel des seuls moyens mentionnés dans l'acte d'appel et soutenus oralement à l'audience.
La décision du premier juge déférée ayant joint la requête en annulation de l'arrêté de placement et la demande du préfet en prolongation de la rétention, l'ensemble des moyens soutenus pourront être appréciés par la cour d'appel.
Sur le moyen tiré de l'absence d'interprète lors de la notification des droits en rétention
L'article L.744-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : « L'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieude rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend.
En cas de placement simultané en rétention d'un nombre important d'étrangers, la notification des droits mentionnés au premier alinéa s'effectue dans les meilleurs délais. Les modalités selon lesquelles s'exerce l'assistance de ces intervenants sont précisées, en tant que de besoin, par décret en Conseil d'Etat. »
L'article L.141-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : «Lorsque les dispositions du présent code prévoient qu'une information ou qu'une décision doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits dans cette langue, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur une liste établie par le procureur de la République ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger. »
L'article L.743-12 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que :
« En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.»
Sur ce point et en l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la juridiction d'appel estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve et adopte au visa de l'article 955 du code de procédure civile, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties. Y ajoutant, il est constaté qu'à la fin de la notification des droits il est mentionné :
« Après lecture faite par le truchement téléphonique de notre interprète en langue GEORGIEN, SOCIETE GFTIJ (MME [M] [N]) (liste agrée par Monsieur le Procureur de la République de Lille), [XXXXXXXX01] ([XXXXXXXX02]), à l'intéressé, ce dernier signe et prend copie", ce qui confirme l'assistance par téléphone de l'interprète pour la notification des droits en rétention.
La décision déférée sera donc confirmée sur ces dispositions.
Sur le moyen tiré du port injustifié des menottes durant son transfert de l'Oise jusqu'à [Localité 6]
Selon l'artic1e R434-17 alinéa 4 du code de la sécurité intérieure, l'utilisation du port des menottes ou des entraves n'est justifiée que lorsque la personne appréhendée est considérée soit comme dangereuse pour autrui ou pour elle-méme, soit comme susceptible de tenter de s'enfuir.
Ainsi que l'a justement relevé le premier juge, la mention en procédure du non-port des menottes n'est cependant pas exige à peine de nullité, au surplus il ressort de la procédure que l'interessé a été interpellé pour non respect de son assignation à résidence ce qui induit un risque de fuite et justifie le port des menottes. En outre il ressort parfaitement de la procédure qu'il y a eu un temps de trajet d'une heure entre la notification de ses droits à [Localité 3] et son arrivée à [Localité 6].
Le moyen est inopérant.
Conformément au droit communautaire, aucun moyen soulevé par les parties ou susceptible d'être relevé d'office ne paraît contraire à la prolongation de la rétention administrative.
Pour le surplus, la cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qui seront intégralement adoptés au visa de l'article 955 du code de procédure civile, que le premier juge et a statué sur le fond en ordonnant la prolongation de la rétention en l'attente du laissez-passer consulaire et du vol sollicités respectivement le 29 août 2024 à 18h44 et le 30 août 2024 à 11h19.
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE l'appel recevable ;
CONFIRME l'ordonnance entreprise.
DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l'appelant, à son conseil et à l'autorité administrative ;
LAISSE les dépens à la charge de l'Etat.
Yannick LANCE, greffier
Danielle THÉBAUD, conseillère
N° RG 24/01785 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VYB7
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 1749 DU 03 Septembre 2024 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le mardi 03 septembre 2024 :
- M. [L] [X]
- l'interprète
- l'avocat de M. [L] [X]
- l'avocat de MME LE PREFET DE L'OISE
- décision notifiée à M. [L] [X] le mardi 03 septembre 2024
- décision transmise par courriel pour notification à MME LE PREFET DE L'OISE et à Maître Anne sophie AUDEGOND-PRUD'HOMME le mardi 03 septembre 2024
- décision communiquée au tribunal administratif de Lille
- décision communiquée à M. le procureur général :
- copie au tribunal judicaire de LILLE, au centre de rétention
Le greffier, le mardi 03 septembre 2024
N° RG 24/01785 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VYB7