République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
TROISIEME CHAMBRE
ARRÊT DU 29/08/2024
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N° de MINUTE :24/243
N° RG 23/05631 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VIBB
Arrêt (N° 17/6734) rendu le 10 Septembre 2020 par le Cour d'Appel de Douai
DEMANDERESSE A LA REQUÊTE EN OMISSION DE STATUER
SA Caisse d'Epargne et de Prévoyance Hauts de France
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Arnaud Ninive, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
DEFENDEURS A LA REQUÊTE EN OMISSION DE STATUER
Monsieur [U] [F]
né le 08 Août 1948 à [Localité 16]
de nationalité Algérienne
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté par Me Jean-Pierre Congos, avocat au barreau de Douai, avocat constitué aux lieu et place de Me Martine Mespelaere, avocat au barreau de Lille
Madame [N] [M] veuve [F]
née le 05 Mai 1930 à [Localité 16] (Algerie)
de nationalité Algérienne
[Adresse 15]
[Localité 7] - Algerie
Monsieur [K] [F]
né le 15 Mai 1953 à [Localité 16] (Algerie)
de nationalité Algérienne
[Adresse 10]
[Localité 2] (Algerie)
Madame [I] [X] Née [F]
née le 19 Décembre 1960 à [Localité 8]
de nationalité Algérienne
[Adresse 14]
Commune de [Localité 11] - Wilaya de [Localité 13] (Algerie)
Monsieur [G] [F]
né le 31 Mai 1993 à [Localité 13] (Algerie) ([Localité 13])
de nationalité Algérienne
[Adresse 9]
[Localité 13] - Algerie
Madame [N] [F] épouse [V]
née le 18 Avril 1965 à [Localité 12] (Algerie)
de nationalité Algérienne
[Adresse 4]
[Localité 13] (Algerie)
Monsieur [J] [F]
né le 15 Janvier 1969 à [Localité 12]
de nationalité Algérienne
[Adresse 15]
Commune de [Localité 7] - Algerie
Représentés par Me Farid Maachi, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 18 avril 2024 tenue par Claire Bertin magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Fabienne Dufossé
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Guillaume Salomon, président de chambre
Claire Bertin, conseiller
Yasmina Belkaid, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 août 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président et Fabienne Dufossé, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
1. Les faits et la procédure antérieure :
Par conclusions récapitulatives en réponse n°2 notifiées le 10 décembre 2020, la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts-de-France (Caisse d'épargne) a notamment demandé à la cour d'appel de Douai, à titre infiniment subsidiaire, de condamner M. [U] [F] à la garantir de toute condamnation en principal, frais, intérêts et dépens, qui serait susceptible d'être prononcée à son encontre au profit des consorts [F].
Par arrêt rendu le 10 septembre 2020, la cour de céans a notamment condamné in solidum la Caisse d'épargne et M. [U] [F] à verser la somme de 267 442,57 euros entre les mains du notaire en charge de la succession d'[L] [F] avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, et condamné M. [U] [F] à garantir la Caisse d'épargne à hauteur de la somme de 267 442,57 euros, et débouté les parties du surplus de leurs demandes.
La Caisse d'épargne a formé pourvoi en cassation notamment du chef du dispositif rejetant la demande de la Caisse d'épargne tendant à voir condamner M. [U] [F] à la garantir de sa condamnation à verser les intérêts courus au taux légal sur la somme de 267 442,57 euros à compter de l'assignation.
Par arrêt rendu le 5 avril 2023, la chambre commerciale de la Cour de cassation a rejeté ledit pourvoi considérant qu'en dépit de la formule générale du dispositif qui « débou[tait] les parties du surplus de leurs demandes », la cour d'appel n'avait pas statué sur la demande de la banque tendant à voir condamner M. [U] [F] à la garantir de la condamnation prononcée contre elle au paiement des intérêts au taux légal ayant couru sur la somme de 267 442,57 euros à compter de son assignation par [L] [F], dès lors qu'il ne résultait pas des motifs de la décision qu'elle l'eût examinée, et que l'omission de statuer pouvait être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile.
2. La requête en omission de statuer
Par requête notifiée via le réseau privé virtuel des avocats (RPVA) le 19 décembre 2023, la Caisse d'épargne a saisi la cour de céans aux fins de réparer l'omission de statuer sur le chef de demande relatif aux intérêts au taux légal à compter de l'assignation.
3. Les prétentions et moyens des parties :
3.1. Aux termes de sa requête notifiée le 19 décembre 2023, la Caisse d'épargne, demanderesse à l'omission de statuer, demande à la cour, au visa de l'article 463 du code de procédure civile et de l'arrêt du 10 septembre 2020, de :
- réparer l'omission de statuer portant sur sa demande de condamnation de M. [U] [F] à la garantir à titre infiniment subsidiaire et notamment de toute condamnation en intérêts qui serait susceptible d'être prononcée à son encontre au profit des consorts [F] ;
- compléter la condamnation de M. [U] [F] en prévoyant la condamnation de celui-ci à la garantir au paiement des intérêts au taux légal à compter de l'assignation sur la somme de 267 442,57 euros ;
- en conséquence, dire et juger que l'arrêt du 10 septembre 2020 sera complété afin de réparer l'omission de statuer et que M. [U] [F] sera condamné à la garantir, à titre infiniment subsidiaire, et notamment de toute condamnation en intérêts qui serait susceptible d'être prononcée à son encontre au profit des consorts [F] de la façon suivante: « Condamne M. [U] [F] à garantir la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts de-France à hauteur de la somme de 267 442,57 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation »,
- statuer comme de croit sur les dépens.
3.2. Aux termes de ses conclusions notifiées le 15 avril 2024, M. [U] [F], défendeur à la requête en omission de statuer, demande à la cour, au visa de l'article 463 du code de procédure civile, de :
- débouter la Caisse d'épargne de l'ensemble de ses demandes ;
- dire n'y avoir lieu à le condamner au paiement de l'intérêt au taux légal ;
- subsidiairement, sur le fond, débouter la Caisse d'épargne de sa requête en omission de statuer ;
- à titre infiniment subsidiaire, « statuer dans les limites des dernières conclusions du concluant saisissant la cour sollicitant de la cour de dire l'appel en garantie sans objet au vu des condamnations in solidum » ;
- en tout état de cause, condamner le demandeur à l'omission de statuer aux dépens ainsi qu'à la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Aux termes de l'article 463 du code de procédure civile, la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
La demande doit être présentée un an au plus tard après que la décision est passée en force de chose jugée ou, en cas de pourvoi en cassation de ce chef, à compter de l'arrêt d'irrecevabilité.
Le juge est saisi par simple requête de l'une des parties, ou par requête commune. Il statue après avoir entendu les parties ou celles-ci appelées.
La décision est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement. Elle est notifiée comme le jugement et donne ouverture aux mêmes voies de recours que celui-ci.
En l'espèce, par conclusions récapitulatives du 10 décembre 2020, la Caisse d'épargne avait notamment demandé à la cour d'appel de Douai, à titre infiniment subsidiaire, de condamner M. [U] [F] à la garantir de toute condamnation en principal, frais, intérêts et dépens, qui était susceptible d'être prononcée à son encontre au profit des consorts [F].
Par arrêt rendu le 10 septembre 2020, la cour d'appel a notamment condamné in solidum la Caisse d'épargne et M. [U] [F] à verser la somme de 267 442,57 euros entre les mains du notaire en charge de la succession d'[L] [F] avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, puis a condamné M. [U] [F] à garantir la Caisse d'épargne à hauteur de la somme de 267 442,57 euros, et a débouté les parties du surplus de leurs demandes.
En dépit de la formule générale du dispositif qui « déboute les parties de leurs plus amples demandes », il ne résulte pas des motifs de l'arrêt que la cour d'appel ait examiné la demande relative au droit à intérêts, et donc qu'elle ait statué de ce chef.
Il s'ensuit que cette omission de statuer peut donner lieu à une requête en complément tendant à faire compléter l'arrêt dans les formes et délais prévus par l'article 463 précité.
L'alinéa 2 dudit article dispose que la requête en omission de statuer doit être présentée un an, au plus tard, après que la décision est passée en force de chose jugée ou, en cas de pourvoi en cassation de ce chef, à compter de l'arrêt d'irrecevabilité.
La Cour de cassation a, suivant arrêt de rejet du 5 avril 2023, jugé que le moyen tiré de l'omission de statuer n'était pas recevable dès lors que celle-ci pouvait être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile.
Il s'ensuit que la requête en omission de statuer présentée par la Caisse d'épargne devait par conséquent, sous peine de forclusion, être présentée à la cour d'appel dans l'année suivant le prononcé de l'arrêt du 5 avril 2023, soit au plus tard le 5 avril 2024.
La cour juge recevable la requête en complément transmise par la Caisse d'épargne via le RPVA le 19 décembre 2023, dans le délai d'un an qui lui était imparti.
Aux termes de l'article 1153 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement.
Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.
Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer, ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.
Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.
En application de ces dispositions, il convient de réparer l'omission de statuer portant sur les intérêts de la créance principale, et de compléter l'arrêt du 10 septembre 2020 en condamnant M. [U] [F] à garantir la Caisse d'épargne du paiement de la somme principale à hauteur de 267 442,57 euros, laquelle portera intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2009, date de l'assignation délivrée par [L] [F].
Constatant que M. [U] [F] n'explicite la prétention qu'il forme à titre infiniment subsidiaire, il n'y a pas lieu de déclarer l'appel en garantie sans objet au vu des condamnations prononcées in solidum.
L'article R. 93, II, 3° du code de procédure pénale prévoit, en ce qui concerne les décisions en matière civile, que les frais et dépens sont mis à la charge de l'État en cas de décision juridictionnelle rectifiant ou interprétant une précédente décision.
Il s'ensuit, dès lors que le recours en omission de la Caisse d'épargne est bien fondé, que les frais et dépens resteront à la charge de l'Etat.
Le sens de l'arrêt commande de débouter M. [U] [F], qui succombe, de sa demande au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Vu les dispositions de l'article 463 du code de procédure civile,
Vu la requête en omission de statuer enregistrée le 19 décembre 2023,
Déclare la requête recevable ;
Complète comme suit l'arrêt rendu le 10 septembre 2020 par la cour d'appel de Douai - n° de minute 20/331 - n° RG 17/06734 - n° Portalis DBVT-V-B7B-RFJZ :
Condamne M. [U] [F] à garantir la Caisse d'épargne et de prévoyance des Hauts-de-France à hauteur de la somme principale de 267 442,57 euros avec intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2009, date de l'assignation en justice délivrée par [L] [F] ;
Rejette les autres prétentions des parties ;
Laisse les entiers dépens de la présente instance à la charge de l'Etat ;
Déboute M. [U] [F] de sa demande d'indemnité de procédure fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le greffier
Fabienne DUFOSSÉ
Le président
Guillaume SALOMON