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17/07/2024 | FRANCE | N°24/01451

France | France, Cour d'appel de Douai, Etrangers, 17 juillet 2024, 24/01451


COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles





N° RG 24/01451 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVLL

N° de Minute : 24/







Ordonnance du mercredi 17 juillet 2024





République Française

Au nom du Peuple Français





APPELANT



M. [T] [O]

né le à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

dûment avisé, comparant en personne par visioconférence



assis

té de Me Olivier CARDON, substitué par Me Clémence TROUFLEAU, avocats au barreau de LILLE, avocat (e) commis (e) d'office et de M. [N] [C] interprète assermenté en langue arabe, tout au long de la procédure d...

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 24/01451 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVLL

N° de Minute : 24/

Ordonnance du mercredi 17 juillet 2024

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [T] [O]

né le à [Localité 1] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

dûment avisé, comparant en personne par visioconférence

assisté de Me Olivier CARDON, substitué par Me Clémence TROUFLEAU, avocats au barreau de LILLE, avocat (e) commis (e) d'office et de M. [N] [C] interprète assermenté en langue arabe, tout au long de la procédure devant la cour, serment préalablement prêté ce jour

INTIMÉ

PREFET DE L'AISNE

dûment avisé, absent non représenté

PARTIE JOINTE

M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant

MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Camille COLONNA, conseillère à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté(e) de Marlène TOCCO, greffière

DÉBATS : à l'audience publique du mercredi 17 juillet 2024 à 13 h 15

Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le mercredi 17 juillet 2024 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;

Vu l'aricle L 743-8 du CESEDA ;

Vu la demande de l'autorité administrative proposant que l'audience se déroule avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ;

Vu l'accord du magistrat délégué ;

Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER en date du 15 juillet 2024 à notifiée à prolongeant la rétention administrative de M. [T] [O] ;

Vu l'appel interjeté par M. [T] [O] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 15 juillet 2024 à sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;

Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;

Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [T] [O] a fait l'objet d'une décision de placement en rétention administrative ordonnée par M. Le Préfet de l'Aisne le 13 juillet 2024 et notifiée le même jour à 09h27 en exécution d'une mesure portant obligation de quitter le territoire français, sans délai de départ volontaire avec interdiction de retour prononcée le 12 mars 2024 et notifiée le 15 mars 2024 à 09h50 par la même autorité.

M. [O] a contesté cet arrêté et par jugement du 31 mai 2024, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'interdiction de retour. M. [O] a interjeté appel de cette décision le 1er juillet 2024.

Le 14 juillet 2024 l'autorité préfectorale a saisi le juge des liberté et de la détention près le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer afin de voir prolonger la rétention administrative de M. [O] pour une durée de 28 jours.

' Vu l'article 455 du code de procédure civile, les articles L742-1, L743-4, L743-6, L743-20 et l743-24 du CESEDA,

' Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-Mer du 15 juillet 2024 à 12h13, ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de M. [O], pour une durée de 28 jours ;

' Vu la déclaration d'appel du conseil de M. [O], du 15 juillet 2024 à 22h33, sollicitant l'infirmation de l'ordonnance susvisée et la main-levée de son placement en rétention administrative.

Au soutien de sa déclaration d'appel, M. [T] [O] soulève les moyens suivants:

- l'irrecevabilité de la requête préfectorale en ce que la délégation du signataire n'était pas assez précise,

- l'absence de tampon du greffe sur la requête en prolongation,

- l'irrégularité de la notification de la mesure d'éloignement à défaut de la présence de l'interprète

- l'irrégularité de la notification de l'arrêté de placement en rétention à défaut de la présence physique de l'interprète,

- l'absence de diligences suffisantes de l'administration en ce que la préfecture du Nord n'a pas communiqué la copie du passeport expiré alors même que la préfecture détenait son passeport.

.

MOTIFS DE LA DÉCISION

M. [O] vit en France depuis 2001, il a deux enfants majeurs et dit avoir travaillé en France.

Il détenait un certificat de résidence algérien, expiré le 21 mars 2017, dont il a sollicité le renouvellement, lequel a été refusé par la préfecture.

Lors de son audition administrative du 27 février 2024, il déclare ne pas accepter de repartir dans son pays d'origine.

Sur le moyen tiré de l'irrecevabilité de la requête du fait que la délégation de signature n'était pas précise

 

La préfecture justifie que M. [H] [F], directeur de cabinet du préfet de l'Aisne, signataire de la requête en prolongation de la retention, disposait de la signature préfectorale pour la période concernée, en application de l'arrêté préfectoral du 21 mai 2024. M. [H] [F] intervient bien dans le cadre de la permanence préfectorale puisque cet arrêté précise qu'il peut signer tous les arrêtés, décisions, réquisitions circulaires, rapports, correspondances et documents relatifs aux attributions des services du cabinet.

L'acte est bien motivé, daté et signé conformément aux dispositions de l'article R.743-2 du CESEDA.

Le moyen est inopérant.

Sur le moyen tiré de l'absence de tampon du greffe sur la requête en prolongation

Sur la requête préfectorale, figure le tampon du greffe du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer en date du 14 juillet 2024 avec l'heure précise : 09h41.

Le moyen est inopérant.

Sur le moyen de l'irrégularité de la notification de la mesure d'éloignement

Il est constant que la notification d'une mesure et de ces voies de recours est destinée à la personne visée par les décisions, et en l'espèce par l appelant M. [O] et que les mentions des heures de notification le concernent. La présence de croix sur le formulaire devant la mention 'lecture faite par nous, l'intéressé déclarant comprendre le français mais ne pas savoir le lire' ne laisse pas de doute quant à cette notification dans la mesure où cette notification est signée par l'étranger et par l'agent notifiant. Il importe d'ajouter que M. [O] a pu contester l'arrêté de placement en rétention dont il avait eu connaissance.

En outre, il est constant que le contentieux de la notification de la mesure d'éloignement ne relève pas du juge judiciaire mais du juge administratif.

Enfin, lors de l'audience devant le premier juge, l'avocat de M. [O] a indiqué qu'il ne relevait pas d'irrégularité.

Sur le moyen tiré de l'interprétariat par téléphone non justifié lors de la notification de l'arrêté de placement en rétention

L'article L. 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit qu'en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l'étranger dont l'effectivité n'a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clôture des débats.

En application de l'article L. 141-3 du CESEDA, lorsque les dispositions du présent code prévoient qu'une information ou qu'une décision doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits dans cette langue, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire.

En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, la seule condition légale est que l'interprète choisi soit identifié par son nom et ses coordonnées sur le procès-verbal et soit inscrit sur une liste établie par le procureur de la République ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger.

En l'espèce, il résulte des pièces du dossier que l'arrêté de placement en rétention a été notifié à M. [O] le 13 juillet 2024 à 09h27 par Madame [E] [I], interprète en langue arable telle que mentionnée dans le procès verbal de notification.

Sa réquisition par le préfet de l'Aisne (document du 26 juin 2024) explique que l'interprétatriat est effectué par téléphone en raison de l'absence d'accès à l'établissement pénitentiaire et au lieu du domicile.

La nécessité du recours à l'interprète par téléphone ainsi que prévu par le texte sus-visé est expliquée dans ce document quand bien même aucune démarche permettant la présence d'un interprète en personne n'est justifiée.

Cette circonstance ne peut suffire à démontrer une atteinte aux droits de l'étranger.

Il n'est pas établi que le recours à un interprétariat par téléphone pour la notification des mesures d'éloignement et de rétention et des droits de rétention ait eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'intéressé qui a eu connaissance de ces mesures et droits dans la langue arabe qu'il a déclaré comprendre.

Dans ces conditions, il convient de rejeter ce moyen de nullité.

Sur le moyen tiré de l'absence de diligences suffisantes de l'administration en ce qu'elle n'a pas communiqué la copie du passeport

Aux termes de l'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

Si ce texte impose en effet au préfet d'effectuer sans désemparer les démarches nécessaires à l'exécution, dans les meilleurs délais, de la décision d'éloignement, l'appréciation des diligences qu'il a effectuées doit être faite in concreto en tenant compte des circonstances propres à chaque cas.

S'il est constant qu'il n'appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur la légalité de la décision fixant le pays de retour, il lui incombe d'apprécier les diligences mises en oeuvre pour reconduire l'intéressé dans son pays ou tout autre pays.

Sur le moyen tiré de l'absence de diligences suffisantes de l'administration en ce qu'elle n'a pas communiqué la copie du passeport

Aux termes de l'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

Si ce texte impose en effet au préfet d'effectuer sans désemparer les démarches nécessaires à l'exécution, dans les meilleurs délais, de la décision d'éloignement, l'appréciation des diligences qu'il a effectuées doit être faite in concreto en tenant compte des circonstances propres à chaque cas.

S'il est constant qu'il n'appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur la légalité de la décision fixant le pays de retour, il lui incombe d'apprécier les diligences mises en oeuvre pour reconduire l'intéressé dans son pays ou tout autre pays.

En l'espèce, si la mention de la copie du passeport est effectivement au bordereau des pièces fournies par l'appelant à la cour administrative, cette pièce rédigée par l'appelant, est insuffisante à démontrer l'existence du passeport et le défaut de diligence de l'autorité administrative chargée de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire à laquelle elle n'a pas été produite.

Lors de son audition administrative en date du 27 février 2024 à 09h30, M. [O] précisait qu'il ne savait pas où se trouvait son passeport. Il n'est pas fondé à reprocher à l'administration de ne pas communiquer un passeport qu'il ne lui a pas remis.

Par ailleurs, les autorités consulaires algériennes ont été saisies par courrier en date du 21 juin 2024, soit avant le placement en rétention, d'une demande de laissez-passer consulaire. Suite à l'audition consulaire de l'étranger en date du 28 juin 2024, les autorités consulaires ont été relancées par l'administration le 12 juillet 2024.

Une demande de routing a été faite le 10 juillet 2024 à 15h22.

Ce moyen ne saurait être accueilli.

Aucun moyen soulevé par les parties ou susceptible d'être relevé d'office ne paraît contraire à la prolongation de la rétention administrative.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARONS l'appel recevable ;

CONFIRMONS l'ordonnance entreprise ;

DISONS que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DISONS que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [T] [O] par l'intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d'un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l'autorité administrative ;

LAISSONS les dépens à la charge de l'État.

Marlène TOCCO, greffière

Camille COLONNA, conseillère

A l'attention du centre de rétention, le mercredi 17 juillet 2024

Bien vouloir procéder à la notification de l'ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l'interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : M. [N] [C]

Le greffier

N° RG 24/01451 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVLL

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE DU 17 Juillet 2024 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 3]) :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le

- M. [T] [O]

- par truchement téléphonique d'un interprète en tant que de besoin

- nom de l'interprète (à renseigner) :

- décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [T] [O] le mercredi 17 juillet 2024

- décision transmise par courriel pour notification à PREFET DE L'AISNE et à Maître Olivier CARDON le mercredi 17 juillet 2024

- décision communiquée au tribunal administratif de Lille

- décision communiquée à M. le procureur général

- copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER

Le greffier, le mercredi 17 juillet 2024

N° RG 24/01451 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVLL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 24/01451
Date de la décision : 17/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-17;24.01451 ?
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