La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/07/2024 | FRANCE | N°24/01442

France | France, Cour d'appel de Douai, Etrangers, 16 juillet 2024, 24/01442


COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles





N° RG 24/01442 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVJN

N° de Minute : 1408







Ordonnance du mardi 16 juillet 2024





République Française

Au nom du Peuple Français





APPELANT



M. [N] [C]

né le 20 Octobre 1988 à [Localité 1] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

dûment avisé, comparant en personne



assisté de M

e Orlane REGODIAT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office



INTIMÉ



PREFET DE L'EURE



dûment avisé, représenté par Me TERMEAU avocat au barreau du Val de Marne

substitué par Me Dimi...

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 24/01442 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVJN

N° de Minute : 1408

Ordonnance du mardi 16 juillet 2024

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [N] [C]

né le 20 Octobre 1988 à [Localité 1] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

dûment avisé, comparant en personne

assisté de Me Orlane REGODIAT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office

INTIMÉ

PREFET DE L'EURE

dûment avisé, représenté par Me TERMEAU avocat au barreau du Val de Marne

substitué par Me Dimitri DEREGNAUCOURT avocat au barreau de LILLE

PARTIE JOINTE

M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant

MAGISTRAT(E) DELEGUE (E) : Danielle THEBAUD, conseillère à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté(e) de Serge LAWECKI, Greffier

DÉBATS : à l'audience publique du mardi 16 juillet 2024 à 09 h 00

ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai, le mardi 16 juillet 2024 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de LILLE en date du 13 juillet 2024 à 16h35 notifiée à prolongeant la rétention administrative de M. [N] [C] ;

Vu l'appel interjeté par M. [N] [C] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 15 juillet 2024 à 13h53 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;

Vu les observations de M. le préfet de l'Eure ;

Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;

EXPOSE DU LITIGE

M. [N] [C] né le 20 octobre 1988 à [Localité 1] (Tunisie) de nationalité tunisienne a été placé à la suite de sa levée d'écrou du centre de détention de [Localité 3] le 11 juillet 2024, en rétention administrative par arrêté pris par M. le préfet de l'Eure le 11 juillet 2024 à 8h25 en exécution d'une interdiction définitive du territoire français prononcée par la Cour d'Assises de Paris par décision du 22 juin 2017 l'ayant en outre condamné à 13 ans de réclusion criminelle pour des actes préparatoires à une entreprise terroriste, un arrêté portant pays de renvoi vers la Tunisie lui a été notifié le 1er juillet 2024.

Un recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative a été déposé au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

' Vu l'article 455 du code de procédure civile,

' Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lille en date du 13 juillet 2024 notifié à 16h35, déclarant régulier le placement en rétention administrative et ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 28 jours.

' Vu la déclaration d'appel de M. [N] [C] du 15 juillet 2024 à 13h53 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative

Au titre des moyens soutenus en appel l'étranger soulève :

-Caractère injustifié du placement en rétention, au motif qu'il devait attendre la fin de sa peine pour faire des démarches pour rentrer par lui-même en Tunisie, qu'il ne s'oppose pas à son retour en Tunisie, qu'il ne présente plus une menace réelle et actuelle car il a effectué sa peine,

-irrégularité de la requête en prolongation quant à son signataire.

MOTIFS DE LA DÉCISION

De manière liminaire il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d'éloignement de l'étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.

Les prérogatives judiciaires se limitent à vérifier la régularité et le bien fondé de la décision restreignant la liberté de l'étranger en plaçant ce dernier en rétention, ainsi qu'à vérifier la nécessité de la prolongation de la rétention au vu des diligences faites par l'administration pour l'exécution de l'expulsion et le maintien de la rétention dans la plus courte durée possible.

L'appel de l'étranger ayant été introduit dans les formes et délais légaux est recevable.

Les articles 933 du code de procédure civile et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne permettent, sauf indivisibilité ou demande d'annulation du jugement, que de discuter en cause d'appel des seuls moyens mentionnés dans l'acte d'appel et soutenus oralement à l'audience.

La décision du premier juge déférée ayant joint la requête en annulation de l'arrêté de placement et la demande du préfet en prolongation de la rétention, l'ensemble des moyens soutenus pourront être appréciés par la cour d'appel.

Sur le moyen tiré du caractère injustifié du placement en rétention

Il ressort des dispositions des articles L 741-1 renvoyant à l'article L 612-3, L 751-9 et L 753-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité administrative ne peut placer un étranger en situation irrégulière en rétention administrative que dans les cas et conditions des dits articles après prise en compte de son état éventuel de vulnérabilité :

1) Lorsque, de manière générale, l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes pour prévenir le risque de se soustraire à l'application du titre d'éloignement dans les cas prévus par l'article L 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente.

2) Lorsque, dans le cas spécifique d'un étranger faisant l'objet d'une prise ou d'une reprise en charge par un autre pays de l'Union Européenne selon la procédure dite 'DUBLIN III', il existe 'un risque non négligeable de fuite' tel que défini par l'article L 751-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et lorsque dans cette hypothèse le placement en rétention administrative est proportionné.

3) Lorsque, s'agissant d'un étranger qui a déposé une demande d'asile en France avant toute privation de sa liberté, il existe des raisons impérieuses de protection de l'ordre public ou de la sécurité nationale.

Il apparaît en l'espèce que l'arrêté préfectoral de placement en rétention a considéré, au visa de l'article L741-1 renvoyant aux cas prévus aux articles L 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que l'étranger appelant ne présentait pas suffisamment de garanties de représentation pour attendre l'exécution de son éloignement en étant assigné à résidence, notamment pour :

-Avoir refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou ses droits réels au séjour ou avoir menti sur son identité, être dépourvu de document d'identité ou de voyage, ou avoir tenté de se soustraire aux contrôles des autorités de police ou refusé de se soumettre aux relevés d'empreintes digitales ou de photographie, et ne pas disposer 'd'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale' permettant de justifier d'une mesure d'assignation à résidence administrative (paragraphe 8°) ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 L. 743-15 et L. 751-5

Ainsi qu'au regard de la menace grave à l'ordre public que représente la présence de l'intéressé en France matérialisée par l'interdiction définitive de territoire prononcée a son encontre.

L'autorité préfectorale mesure l'ensemble de ces éléments pour apprécier le risque de soustraction à la décision d'éloignement.

L'existence d'un seul des critères posés par l'article L 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, définissant les 'garanties de représentation' de l'étranger en situation irrégulière, ou par l'article L 751-10 du même code, définissant les 'risques de fuite' présentés par l'étranger en situation irrégulière, est nécessaire pour que l'autorité préfectorale puisse motiver le placement en rétention administrative.

Sur ce point et en l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la juridiction d'appel estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve et adopte au visa de l'article 955 du code de procédure civile, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties.

Y ajoutant, d'une part l'intéressé qui indique avoir entrepris des démarches pour regagner son pays par ses propres moyens, ne justifie d'aucun document d'identité, d'autre part, l'intéressé ne justifie d'aucun domicile, d'aucun travail et d'aucune ressource ; le domicile qu'il déclarait lors de son procès aux assises n'est plus d'actualité, ses liens avec Mme [M], réelle occupante des lieux, ayant été rompus à l'initiative de Mme [M] qui ne souhaite plus avoir de relation avec l'intéressé.

La décision déférée sera donc confirmée sur ces dispositions.

Sur le moyen tiré de la délégation de compétence du signataire de la requête saisissant le juge des libertés et de la détention

Il ressort des pièces du dossier que le signataire de la requête saisissant le juge des libertés et de la détention, M. [Z] [P], adjoint au chef de bureau des migrations et de l'intégration, ayant reçu délégation de signature par arrêté DCAT/SJIPE 2023-28 du 2 novembre 2023, régulièrement publié, disposait de la signature préfectorale pour la période concernée.

Il est en outre constant que, face à une délégation de compétence accordée en cas d'empêchement, la seule signature du délégataire suffit pour établir que l'autorité délégante ne pouvait pas signer

(Cass 2ème Civ 7 octobre 2004 n°03-50.042).

Le moyen est inopérant.

Conformément au droit communautaire, aucun moyen soulevé par les parties ou susceptible d'être relevé d'office ne paraît contraire à la prolongation de la rétention administrative.

Pour le surplus, la cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qui seront intégralement adoptés au visa de l'article 955 du code de procédure civile, que le premier juge et a statué sur le fond en ordonnant la prolongation de la rétention en l'attente du laissez-passer consulaire et du vol sollicités.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE l'appel recevable ;

DÉCLARE la requête de la préfecture de l'Eure recevable ;

CONFIRME l'ordonnance entreprise.

DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l'appelant, à son conseil et à l'autorité administrative ;

LAISSE les dépens à la charge de l'Etat.

Serge LAWECKI,

Greffier

Danielle THEBAUD, conseillère

N° RG 24/01442 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVJN

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE DU 16 Juillet 2024 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le mardi 16 juillet 2024 :

- M. [N] [C]

- l'interprète

- l'avocat de M. [N] [C]

- l'avocat de PREFET DE L'EURE

- décision notifiée à M. [N] [C] le mardi 16 juillet 2024

- décision transmise par courriel pour notification à PREFET DE L'EURE et à Maître Orlane REGODIAT le mardi 16 juillet 2024

- décision communiquée au tribunal administratif de Lille

- décision communiquée à M. le procureur général :

- copie à l'escorte, au Juge des libertés et de la détention de LILLE

Le greffier, le mardi 16 juillet 2024

N° RG 24/01442 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVJN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 24/01442
Date de la décision : 16/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-16;24.01442 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award