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13/07/2024 | FRANCE | N°24/01427

France | France, Cour d'appel de Douai, Etrangers, 13 juillet 2024, 24/01427


COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles





N° RG 24/01427 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVFS

N° de Minute : 1395







Ordonnance du samedi 13 juillet 2024





République Française

Au nom du Peuple Français





APPELANT



M. [P] [W] né le 03 Juillet 1988 à [Localité 3] au Maroc, de nationalité marocaine alias [P] [W] né le 3 juillet 1988 à [Localité 2] en Algérie, de nationalité algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Locali

té 1]

dûment avisé, comparant en personne



assisté de Me Anne CHAMPAGNE, avocat au barreau de DOUAI, avocate commise d'office et de M. [X] [I] interprète assermenté en langue a...

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 24/01427 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVFS

N° de Minute : 1395

Ordonnance du samedi 13 juillet 2024

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [P] [W] né le 03 Juillet 1988 à [Localité 3] au Maroc, de nationalité marocaine alias [P] [W] né le 3 juillet 1988 à [Localité 2] en Algérie, de nationalité algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 1]

dûment avisé, comparant en personne

assisté de Me Anne CHAMPAGNE, avocat au barreau de DOUAI, avocate commise d'office et de M. [X] [I] interprète assermenté en langue arabe, tout au long de la procédure devant la cour

INTIMÉ

M. LE PREFET DU NORD

dûment avisé, absent non représenté

PARTIE JOINTE

M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant

MAGISTRATE DELEGUEE : Véronique PAIR, Conseillère à la cour d'appel de Douai désignée par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assistée de Hélène SWIERCZEK, Greffière

DÉBATS : à l'audience publique du samedi 13 juillet 2024 à 14 H 00

ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai, le samedi 13 juillet 2024 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de LILLE en date du 12 juillet 2024 prolongeant la rétention administrative de M. [P] [W] ;

Vu l'appel interjeté par Maître Olivier IDZIEJCZAK venant au soutien des intérêts de M. [P] [W] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 12 juillet 2024 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;

Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;

EXPOSÉ DU LITIGE

[P] [W], se disant né le 03/07/1988 à [Localité 3], ressortissant à l'origine encore indéterminée, a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 17 janvier 2023 notifiée le même jour, avec reconduite vers le pays dont il a la nationalité ou en application d'un accord de réadmission communautaire ou bilatéral à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage.

Cette obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire de 30 jours conformément à l'article L 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par décision administrative en date du 13 mai 2024, il a été placé en rétention administrative. Monsieur le Préfet du Nord a saisi le juge des libertés et de la détention de Lille afin de voir prolongée cette mesure de rétention à trois reprises. La mesure de rétention administrative a été prolongée judiciairement par le juge des libertés et de la détention le 15 mai 2024 pour 28 jours, le 12 juin 2024 pour 30 jours puis, sur requête de la préfecture du Nord en date du 11 juillet 2024, par ordonnance du 12 juillet 2024 pour une prolongation exceptionnelle de 15 jours, décision dont appel.

Vu l'article 455 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Lille en date du 15 mai 2024,ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 28 jours.

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Lille en date du 12 juin 2024 ,ordonnant la deuxième prolongation du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 30 jours.

Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Lille en date du 12 juillet 2024 ,ordonnant la première prolongation exceptionnelle du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 15 jours.

Vu la déclaration d'appel du 12 juillet 2024 sollicitant la mainlevée du placement en rétention administrative.

Au titre des moyens soutenus en appel l'étranger soulève :

Le droit à la santé et à la dignité, arguant de la séropositivé de [P] [W] et de sa vulnérabilité sur le plan médical

MOTIFS DE LA DÉCISION

De manière liminaire il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d'éloignement de l'étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.

Les prérogatives judiciaires se limitent à vérifier la régularité et le bien fondé de la décision restreignant la liberté de l'étranger en plaçant ce dernier en rétention, ainsi qu'à vérifier la nécessité de la prolongation de la rétention au vu des diligences faites par l'administration pour l'exécution de l'expulsion et le maintien de la rétention dans la plus courte durée possible.

Sur la recevabilité de l'appel et des moyens tirés des exceptions de procédure

L'appel de l'étranger ayant été introduit dans les formes et délais légaux est recevable.

Les articles 933 du code de procédure civile et R.743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne permettent, sauf indivisibilité ou demande d'annulation du jugement, que de discuter en cause d'appel des seuls moyens mentionnés dans l'acte d'appel et soutenus oralement à l'audience.

La décision du premier juge déférée ayant joint la requête en annulation de l'arrêté de placement et la demande du préfet en prolongation de la rétention, l'ensemble des moyens soutenus pourront être appréciés par la cour d'appel.

Le placement en rétention administrative est soumis au principe de proportionnalité apprécié par le juge, notamment lorsque la privation de liberté qu'il entraîne est en opposition avec l'exercice d'un autre droit légitime revendiqué par l'étranger.

Ainsi, sauf à disposer d'un titre de séjour spécifiquement destiné à permettre à un étranger de recevoir des soins en France, la personne en situation irrégulière sur le territoire national et faisant l'objet d'un placement en rétention administrative, ne peut invoquer que son état de santé est incompatible avec un placement en rétention administrative que lorsque les soins qu'elle souhaite se voir dispenser en France sont urgents et vitaux pour la préservation de sa santé et ne peuvent être dispensés dans le cadre du service médical du Centre de Rétention Administrative.

Sur la troisième prorogation exceptionnelle

L'article L 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que :

"A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L. 611-3 ou du 5° de l'article L. 631-3;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.

Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application du huitième alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours."

L'article L.742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que :

"A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-6, dans les conditions prévues à l'article L. 742-5. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas deux cent dix jours."

Il convient de rappeler que lorsque la procédure se situe dans le cadre des articles précités et concerne une demande de troisième ou de quatrième prorogation exceptionnelle du placement en rétention administrative :

Il n'existe aucune obligation de justification d'une arrivée "bref délai" des documents et titres en attente pour exécuter l'éloignement dés lors que l'étranger a fait obstruction la mesure d'éloignement, dans les 15 jours précédents la demande, notamment par des demandes dilatoires d'asile ou de protection.

En revanche, lorsqu'aucune obstruction ne peut être invoquée l'encontre de l'étranger, une troisième prorogation exceptionnelle du placement en rétention administrative ne peut être ordonnée que si l'administration française est en mesure de justifier que les obstacles administratifs la mise en oeuvre de l'éloignement peuvent être levés " bref délai".

L'obstruction est constituée par tout acte matériel effectué par action ou par omission dans le seul but d'éviter l'exécution de l'éloignement. Ainsi le fait de donner ou de maintenir une identité ou une nationalité fausse de manière à éviter la délivrance d'un laisser passer consulaire constitue un acte d'obstruction continue relevant de l'article L.742-5 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En l'espèce, [P] [W], dépourvu de tout document d'identité, placé en rétention administrative à l'issue de son incarcération (condamnation du 15/03/2024) se déclarant né à [Localité 3], les autorités marocaines ont été sollicitées : elles n'ont pas reconnu l'intéressé. Il s'est ensuite déclaré de nationalité algérienne puis tunisienne. Les autorités tunisiennes et algériennes ont donc ensuite été sollicitées. L'intéressé a à cinq reprises (procès-verbaux des 16/05/24, 24/05/24, 07/06/24, 25/06/24 et 09/07/24) refusé de se soumettre aux opérations de relevé de ses empreintes digitales ainsi que d'être entendu par les autorités consulaires algériennes, ce qui caractérise des actes volontaires d'obstruction à l'exécution de la mesure d'éloignement, laquelle permet, en vertu de l'article L742-5 du CESEDA de prolonger de manière exceptionnelle la rétention pour une nouvelle durée de 15 jours.

[P] [W] est dépourvu d'attaches sur le territoire français, n'a aucune garantie de représentation et a récemment été condamné par le tribunal correctionnel de Valenciennes le 15 mars 2024 à une peine d'emprisonnement pour des faits d'escroquerie, vols aggravés et recel de vol. Il n'a entamé aucune démarche administratives en vue de sa régularisation sur le territoire français.

Il ne soulève aucun moyen à l'appui de sa demande d'annulation de l'acte administratif d'éloignement.

La décision de prolongation exceptionnelle de rétention administrative pour 15 jours sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME l'ordonnance entreprise.

DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l'appelant, à son conseil et à l'autorité administrative ;

LAISSE les dépens à la charge de l'Etat.

Hélène SWIERCZEK, Greffière

Véronique PAIR, Conseillère

N° RG 24/01427 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVFS

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 1395 DU 13 Juillet 2024 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le samedi 13 juillet 2024 :

- M. [P] [W]

- l'interprète

- l'avocat de M. [P] [W]

- l'avocat de M. LE PREFET DU NORD

- décision notifiée à M. [P] [W] le samedi 13 juillet 2024

- décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU NORD et à Maître Anne CHAMPAGNE le samedi 13 juillet 2024

- décision communiquée au tribunal administratif de Lille

- décision communiquée à M. le procureur général :

- copie à l'escorte, au Juge des libertés et de la détention de LILLE

Le greffier, le samedi 13 juillet 2024

N° RG 24/01427 - N° Portalis DBVT-V-B7I-VVFS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Etrangers
Numéro d'arrêt : 24/01427
Date de la décision : 13/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-13;24.01427 ?
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