La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2024 | FRANCE | N°23/05358

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 3, 04 juillet 2024, 23/05358


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 04/07/2024





N° de MINUTE : 24/569

N° RG 23/05358 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VHGN

Jugement (N° 23/00048) rendu le 17 Novembre 2023 par le Juge de l'exécution de Lille





APPELANTS



Monsieur [O] [T]

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 12] - de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 11]



Madame [E] [J] épouse [T]

née le

[Date naissance 2] 1959 - de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 11]



Représentés par Me Christian Delbe, avocat au barreau de Lille, avocat constitué





INTIMÉE



SA LCL Le Crédit...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 04/07/2024

N° de MINUTE : 24/569

N° RG 23/05358 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VHGN

Jugement (N° 23/00048) rendu le 17 Novembre 2023 par le Juge de l'exécution de Lille

APPELANTS

Monsieur [O] [T]

né le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 12] - de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 11]

Madame [E] [J] épouse [T]

née le [Date naissance 2] 1959 - de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 11]

Représentés par Me Christian Delbe, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉE

SA LCL Le Crédit Lyonnais, S.A., dont le siège social est à [Adresse 9] immatriculée au RCS de LYON sous le n° 954 509 741, représentée par son Directeur Général domicilié audit siège, agissant par son mandataire, le Crédit Logement, S.A., dont le siège social est à [Adresse 10], immatriculée au RCS de Paris sous le n° B 302 493 275, représentée par ses représentants légaux domiciliés audit siège, en vertu d'un pouvoir en date du 12 décembre 2012.

[Adresse 9]

[Localité 5]

Représentée par Me Patrick Dupont Thieffry, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 13 juin 2024 tenue par Sylvie Collière magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Ismérie Capiez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sylvie Collière, président de chambre

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 04 juillet 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 21 mai 2024

EXPOSE DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 22 juin 2011, la SA Le Crédit Lyonnais 'LCL' a consenti à M. [O] [T] et à Mme [E] [J] épouse [T] un prêt immobilier d'un montant de 246 300 euros remboursable en 264 mensualités au taux de 4,30 % l'an.

Par jugement du 18 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Lille a condamné solidairement les époux [T] à payer à la société Le Crédit Lyonnais LCL la somme de 311 320,14 euros, montant de la créance arrêté au 2 septembre 2019 en principal, intérêts échus et accessoires, outre les intérêts postérieurs au 1er septembre 2016 au taux conventionnel de 4,30% sur la somme de 265 278,54 euros ainsi que la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par arrêt contradictoire du 3 février 2022, la cour d'appel de Douai, statuant sur l'appel interjeté par les époux [T], a :

- infirmé le jugement en ce qu'il a condamné les époux [T] à payer solidairement à la société Crédit Lyonnais la somme de 311 320,14 euros, montant de la créance arrêté au 2 septembre 2019 en principal, intérêts échus et accessoires, outre les intérêts postérieurs au 1er septembre 2016 au taux conventionnel de 4,30% sur la somme de 265 278,54 euros ;

- statuant à nouveau sur le chef infirmé, condamné solidairement les époux [T] à payer à la société Crédit Lyonnais la somme de 243 841,70 euros avec intérêts au taux de 4,30 % l'an sur la somme de 241 841,70 euros à compter du 22 avril

2015 ;

- confirmé le jugement pour le surplus ;

- y ajoutant, laissé à chacune des parties la charge de ses dépens d'appel et rejeté leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Crédit Lyonnais a fait signifier cet arrêt aux époux [T] par acte du 23 mars 2022.

Suivant procès-verbaux du 16 janvier 2023, Le Crédit Lyonnais a, en vertu du jugement du 18 novembre 2019 et de l'arrêt du 3 février 2022, fait pratiquer deux saisies-attributions de loyers auprès des locataires de l'immeuble situé [Adresse 3] à [Localité 8], appartenant aux époux [T], pour un montant de

328 242,43 euros.

Suivant procès-verbal du 17 janvier 2023, la société Le Crédit Lyonnais a, en vertu des mêmes décisions, fait pratiquer une saisie-attribution de loyers auprès des locataires de l'immeuble situé [Adresse 6] à [Localité 11], appartenant aux époux [T], pour un montant total de 328 569,98 euros.

Par actes du 23 janvier 2023, la société Le Crédit Lyonnais a fait dénoncer ces trois saisies aux époux [T].

Par acte du 22 février 2023, les époux [T] ont fait assigner la société Le Crédit lyonnais devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Lille aux fins de contester ces mesures d'exécution.

Par jugement contradictoire du 17 novembre 2023, le juge de l'exécution a :

- rejeté l'ensemble des demandes des époux [T] ;

- condamné in solidum les époux [T] à payer à la société Le Crédit Lyonnais la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure

civile ;

- condamné in solidum les époux [T] aux dépens ;

- rappelé que le jugement est immédiatement exécutoire.

Par déclaration adressée par la voie électronique le 1er décembre 2023, les époux [T] ont relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 15 janvier 2024, ils demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

- fixer la créance du Crédit Lyonnais à la somme de 264 668,57 euros ;

- ordonner la mainlevée des saisies-attributions pratiquées les 16 et 17 janvier 2023, puis dénoncées le 23 janvier 2023 ;

- les autoriser à s'acquitter de leur dette en 23 mensualités égales et consécutives d'un montant de 750 euros puis le solde à la 24ème mensualité ;

- condamner la société Le Crédit Lyonnais à leur payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Le Crédit lyonnais aux entiers frais et dépens, en ce compris les frais de mainlevée des saisies-attributions.

Aux termes de ses dernières conclusions du 25 janvier 2024, Le Crédit Lyonnais 'LCL' demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- condamner in solidum les époux [T] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de défense qu'il a exposés en appel ainsi qu'aux dépens de la procédure d'appel.

MOTIFS

Sur le montant de la créance du LCL :

Si un créancier peut, en application de l'article L. 110-4 du code des procédures civiles d'exécution, poursuivre pendant dix ans l'exécution d'un jugement portant condamnation au paiement d'une somme payable à termes périodiques, le recouvrement des arriérés échus avant la date de sa demande et non encore exigibles à celle arrêtée par le jugement est soumis au délai de prescription applicable en raison de la nature de la créance.

Les créances périodiques nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la suite de la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur sont soumises au délai de prescription biennale prévu à l'article L. 218-2 du code de la consommation, applicable au regard de la nature de la créance.

L'article L. 218-2 du code de la consommation s'applique aux crédits immobiliers consentis par des organismes de crédit au consommateur, lesquels constituent des services financiers fournis par des professionnels.

En l'espèce, contrairement à ce que soutiennent les époux [T], le premier juge a fait une juste application de ces règles en retenant que :

- les intérêts dus à la date de l'arrêt du 3 février 2022, soit les intérêts sur la somme de 241 841,70 euros échus du 22 avril 2015 au 3 février 2022 sont soumis à la prescription décennale;

- les intérêts exigibles postérieurement au 3 février 2022 sont soumis à la prescription biennale.

Dès lors, les saisies-attributions ayant été pratiquées le 16 et 17 janvier 2023, la prescription des intérêts mentionnés sur l'acte du 16 janvier 2023 pour la période du 22 avril 2015 au 13 janvier 2023 et sur l'acte du 17 janvier 2023 pour la période du 22 avril 2025 au 16 janvier 2023 n'est pas acquise.

Le jugement déféré qui a rejeté la contestation relative au montant de la créance, cause des saisies-attributions sera donc confirmé.

Sur la demande de mainlevée des saisies-attributions :

Selon l'article L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages et intérêts en cas d'abus de saisie.

Selon l'article L. 111-7 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier a le choix des mesures propres à assurer l'exécution ou la conservation de sa créance. L'exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l'obligation.

Les époux [T] exposent que :

- ils ont, après l'arrêt du 3 février 2022, se fiant à un courrier du Crédit Lyonnais du 22 octobre 2021, pris attache avec la banque afin de reprendre le remboursement du prêt ;

- plusieurs échanges s'en sont suivis et le Crédit Lyonnais devait revenir vers eux pour formaliser cet accord mais un tel accord n'est jamais intervenu ;

- après avoir été contactés par la société de commissaires de justice Waterlot & Associés qui ne leur a pas indiqué formellement pour qui elle agissait, ils ont, par courriel de leur conseil du 18 janvier 2023, sollicité du commissaire de justice la communication de copies du titre fondant l'action en recouvrement, de sa signification et des actes d'exécution ainsi que d'un décompte de la créance, indiquant qu'à réception ils feraient une proposition de règlement ;

- la société Waterlot & Associés leur a indiqué par courriel du 19 janvier 2023 transmettre leur requête à son mandant.

- aucune réponse ne leur a été apportée et c'est dans ce contexte que les trois saisies-attributions ont été pratiquées ;

- ces mesures d'exécution étaient inutiles et abusives puisqu'ils avaient clairement indiqué qu'ils formuleraient une proposition de règlement à réception d'un décompte.

Or, force est de constater que :

- le courrier du 22 octobre 2021 concerne un 'prêt immobilier in fine' venant à échéance le 22 février 2022 qui est manifestement sans rapport avec le prêt du 22 juin 2011 remboursable en 264 échéances mensuelles, ayant fait l'objet d'une déchéance du terme le 24 avril 2015 ;

- il n'existe aucune trace des échanges qui auraient, selon les époux [T], suivi l'arrêt du 3 février 2022 et porté sur une reprise des remboursements du prêt ;

- s'il est exact que la société de commissaires de justice Waterlot & Associés a pris contact avec les époux [T] en leur adressant le 16 janvier 2023 un courriel afin d'avoir communication du bail de l'immeuble situé [Adresse 6] à [Localité 11], il reste que le courriel que leur avocat a adressé à cette société pour réclamer une copie du titre fondant l'action en recouvrement, une copie de la signification et des actes d'exécution et un décompte actualisé et détaillé de la créance, précisant qu'à réception et afin d'éviter des frais d'exécution inutiles, il se rapprocherait de ses clients et indiquerait la proposition de règlement qu'ils seraient en mesure de formuler, est en date du 18 janvier 2023, c'est à dire après que les saisies-attributions aient été pratiquées entre les mains des locataires des époux [T] par procès-verbaux des 16 et 17 janvier 2023 et qu'il ne peut être reproché au Crédit Lyonnais d'avoir mis en oeuvre ces mesures d'exécution alors que les débiteurs n'avaient réglé aucun acompte depuis le 23 mars 2022, date de la signification de l'arrêt du 3 février 2022, ni formalisé aucune proposition de règlement de même qu'il ne peut lui être reproché d'avoir fait, le 23 avril 2023, dénoncer ces mesures aux époux [T] au risque d'encourir la caducité des saisies-attributions s'il n'y procédait pas dans le délai de huit jours imparti par l'article R. 211-3 du code des procédures civiles d'exécution.

La cour remarque en outre que rien n'empêchait les époux [T], alors qu'aux actes de dénonciation étaient joints la copie des procès-verbaux de saisie-attribution qui mentionnaient le titre exécutoire sur le fondement duquel les saisies étaient pratiquées par le Crédit Lyonnais et contenaient un décompte actualisé et détaillé de la créance, de faire des propositions de règlement au Crédit Lyonnais en vue de parvenir à une mainlevée amiable des mesures d'exécution.

Les saisies-attributions n'étaient donc ni inutiles, ni abusives et le jugement déféré qui a débouté les époux [T] de leur demande de mainlevée sera donc confirmé.

Sur la demande de délais de paiement :

En application des articles 510 du code de procédure civile et R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution a compétence pour accorder, après signification d'un commandement ou d'un acte de saisie, un délai de grâce.

Selon l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Le règlement de la dette par échéances mensuelles de 750 euros par mois proposé par les époux [T] ne permettrait, à l'issue du délai maximal de deux ans qui peut être octroyé, que d'apurer une faible partie de la somme due dont le solde resterait supérieur à 300 000 euros.

En outre, si les époux [T] justifient avoir mis en vente depuis mars 2023, deux de leurs immeubles situés [Adresse 4] à [Localité 8], rien ne permet d'envisager raisonnablement qu'ils puissent être vendus dans les deux ans alors qu'ils n'ont manifestement fait l'objet d'aucune marque d'intérêt depuis leur mise en vente.

Il convient donc de confirmer le jugement déféré qui a débouté les époux [T] de leur demande de délais de paiement.

Sur les frais du procès :

Le sens de la présente décision conduit à confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Partie perdante en appel, les époux [T] seront condamnés in solidum aux dépens d'appel et nécessairement déboutés de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile devant la cour.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge du Crédit Lyonnais les frais irrépétibles qu'il a été contraint d'exposer en appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne in solidum M. [O] [T] et à Mme [E] [J] épouse [T] aux dépens d'appel.

Le greffier

Ismérie CAPIEZ

Le président

Sylvie COLLIERE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 3
Numéro d'arrêt : 23/05358
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.05358 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award