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27/06/2024 | FRANCE | N°23/05318

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 2, 27 juin 2024, 23/05318


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 2

ARRÊT DU 27/06/2024



N° de MINUTE : 24/534

N° RG 23/05318 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VHBW

Jugement (N° 23/05212) rendu le 31 Octobre 2023 par le Juge des contentieux de la protection de Lille





APPELANTE



Madame [G] [Z]

née le 29 Janvier 1976 à [Localité 18] ([Localité 20]) - de nationalité Française

[Adresse 1]



Comparante en personne



INTIMÉS

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[11] Service Client chez [14] Pôle surendettement

[Adresse 4]



SA [8] chez [19]

[Adresse 9]



Société [12] chez [6]

[Adresse 10]



Société [13] Service surendettement

[Adresse 22]
...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 2

ARRÊT DU 27/06/2024

N° de MINUTE : 24/534

N° RG 23/05318 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VHBW

Jugement (N° 23/05212) rendu le 31 Octobre 2023 par le Juge des contentieux de la protection de Lille

APPELANTE

Madame [G] [Z]

née le 29 Janvier 1976 à [Localité 18] ([Localité 20]) - de nationalité Française

[Adresse 1]

Comparante en personne

INTIMÉS

[11] Service Client chez [14] Pôle surendettement

[Adresse 4]

SA [8] chez [19]

[Adresse 9]

Société [12] chez [6]

[Adresse 10]

Société [13] Service surendettement

[Adresse 22]

CAF du Nord

[Adresse 3]

[17]

[Adresse 21]

[Adresse 21]

[Adresse 7]

SA [15]

[Adresse 2]

Non comparants, ni représentés

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience

DÉBATS à l'audience publique du 10 Avril 2024 tenue par Danielle Thébaud magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, en application de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile , les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 805 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Dellelis, président de chambre

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Danielle Thébaud, conseiller

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 27 juin 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement réputé contradictoire prononcé par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Lille, statuant en matière de surendettement des particuliers, le 31 octobre 2023,

Vu l'appel interjeté le 20 novembre 2023 par Mme [G] [Z],

Vu le procès-verbal de l'audience du 10 avril 2024,

***

Suivant déclaration enregistrée le 23 janvier 2023 au secrétariat de la [5], Mme [G] [Z] a déposé un dossier et demandé le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers, ne parvenant pas à s'acquitter de ses dettes en raison de l'absence de ressources mensuelles suffisantes et des dépenses nécessaires pour satisfaire aux besoins de la vie courante.

Le 28 février 2023, la commission de surendettement des particuliers du Nord, après avoir constaté la situation de surendettement de Mme [G] [Z], a déclaré sa demande recevable.

Le 10 mai 2023, après examen de la situation de Mme [G] [Z] dont les dettes ont été évaluées à 24 238,82 euros, les ressources mensuelles à 2303 euros et les charges mensuelles à 1587 euros, la commission qui a déterminé un minimum légal à laisser à la disposition de la débitrice de 1633,36 euros, une capacité de remboursement de 702,01 euros et un maximum légal de remboursement de 702,01 euros, a retenu une mensualité de remboursement de 702,01 euros et a imposé des mesures de rééchelonnement de tout ou partie des créances sur une durée maximum de 36 mois, au taux de 2,06 %.

Ces mesures imposées ont été notifiées Mme [G] [Z] le 17 mai 2023, décision qu'elle a contestée le 27 mai 2023.

À l'audience du 12 septembre 2023, Mme [G] [Z] a comparu en personne, elle a indiqué que la mensualité de remboursement retenue par la commission était trop élevée ; qu'il s'agissait d'un premier dossier de surendettement, qu'elle travaillait sous contrat à durée indéterminée et percevait un salaire de 1328 euros, outre 700 euros de pension alimentaire pour sa fille de 10 ans ; qu'elle ne percevait plus d'APL.

Par jugement en date du 31 octobre 2023, le juge des contentieux de la protection de Lille statuant en matière de surendettement des particuliers, saisi du recours, formé par Mme [G] [Z], à l'encontre des mesures imposées par la commission de surendettement des particuliers du Nord le 10 mai 2023, a notamment :

- déclaré le recours de Mme [G] [Z] recevable,

- fixé la contribution mensuelle totale à l'apurement de son passil à la somme de 512 ;

- établit les mesures propres à traiter la situation de surendettement de Mme [G] [Z] selon les modalités suivantes : rééchelonnement des dettes sur une durée de 48 mois, selon les modalités annexées au jugement, le taux d'intérêt des prêts étant ramené à 0% ;

Mme [G] [Z] a relevé appel le 20 novembre 2023 de ce jugement.

A l'audience de la cour du 10 avril 2024, Mme [G] [Z], a comparu en personne. Elle a demandé un effacement de ses dettes. Elle a expliqué qu'elle était vendeuse, actuellement en arrêt maladie depuis le 5 décembre 2023 ; qu'elle percevait des indemnités journalières d'un montant de 860 euros, outre une pension alimentaire de 700 euros pour sa fille dont elle a la charge. Elle a indiqué qu'elle payait une pension pour le poney de sa fille, et qu'elle devait versait 50 euros par mois à l'avocat qu'elle avait dû prendre dans la procédure avec son ex-conjoint, et à qui elle devait la somme de 1893 euros. elle a remis les justificatifs de leur ressources et charges.

Par courrier reçu le 5 février 2024 au greffe de la cour d'appel de Douai, la société [15] a indiqué qu'elle ne serait pas présente à l'audience.

Par courrier reçu le 5 février 2024 au greffe de la cour d'appel de Douai, la direction générale des finances publiques [16], a indiqué que la trésorerie de [Localité 20] à été absorbée le 1er janvier 2024 par le [16] qui est le nouveau créancier de la créance s'élevant à la somme de 133 euros.

Par courrier reçu le 29 janvier 2024 au greffe de la cour d'appel de Douai, la société [12] a indiqué s'en remettre à la décision de la cour.

Les intimés régulièrement convoqués par le greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, n'ont pas comparu ni personne pour les représenter.

MOTIFS

1- Sur les créances

Selon l'article L. 733-12 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation des mesures imposées par la commission peut vérifier, même d'office, la validité des créances et des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées.

Par ailleurs, aux termes de l'article 1353 du Code civil, «celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation»;

Compte tenu du montant non contesté des créances retenues par le premier juge, le passif de Mme [G] [Z], sera fixé à la somme de 24 238,82 euros, étant précisé qu'en tout état de cause, les versements effectués par cette dernière en cours de procédure qui n'auraient pas été pris en compte, s'imputeront sur les montants des créances concernées.

2- Sur la situation de surendettement

Aux termes de l'article L 733-10 du code de la consommation, « une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection, dans un délai fixé par décret, les mesures imposées par la commission en application des articles L 733-1, L 733-4 ou L 733-7. »

Aux termes de l'article L 733-13 du code de la consommation, "le juge saisi de la contestation prévue à l'article L 733-10 prend tout ou partie des mesures définies aux articles L 733-1, L 733-4 et L 733-7. Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est déterminée dans les conditions prévues à l'article L 731-2. Elle est mentionnée dans la décision. Lorsqu'il statue en application de l'article L 733-10, le juge peut en outre prononcer un redressement personnel sans liquidation judiciaire."

Lorsqu'un débiteur se trouve dans l'impossibilité d'apurer sa situation de surendettement par la mise en 'uvre des mesures de traitement prévues aux articles L 732-1, L 733-1, L 733-4 et L 733-7, il est dans une situation irrémédiablement compromise au sens de l'article L 724-1 du code de la consommation et est fondé, s'il ne dispose d'aucun bien de valeur au sens de l'article L 724-1 du code de la consommation, à bénéficier d'une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire

Aux termes de l'article L 731-1 du code de la consommation, 'le montant des remboursements est fixé, dans des conditions précisées par décret en conseil d'État, par référence à la quotité saisissable du salaire telle qu'elle résulte des articles L 3252-2 et L 3252-3 du code du travail, de manière à ce que la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage lui soit réservée par priorité.'

Aux termes de l'article L 731-2 du code de la consommation, 'la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage ne peut être inférieure, pour le ménage en cause, au montant forfaitaire mentionné à l'article L 262-2 du code de l'action sociale et des familles. Elle intègre le montant des dépenses de logement, d'électricité, de gaz, de chauffage, d'eau, de nourriture et de scolarité, de garde et de déplacements professionnels ainsi que les frais de santé.'

Selon l'article R 731-1 du code de la consommation, 'pour l'application des dispositions des articles L 732-1, L 733-1 et L 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L 731-1, L 731-2 et L 731-3, par référence au barème prévu à l'article R 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur.'

Il résulte de ces articles que le montant des remboursements à la charge du débiteur, dans le cadre des mesures de traitement de sa situation de surendettement, doit être fixé par référence à la quotité saisissable du salaire telle qu'elle résulte des articles L. 3252-2 et L. 3252-3 du code du travail, de manière à ce qu'une partie des ressources nécessaires aux dépenses courantes du débiteur, égale au moins au montant forfaitaire du revenu de solidarité active dont il disposerait, lui soit réservée par priorité et à ce qu'il n'excède pas la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant du revenu de solidarité active.

Le juge apprécie la situation du débiteur au regard des éléments dont il dispose au jour où il statue.

En l'espèce, il résulte des pièces actualisées produites que les ressources mensuelles de Mme [G] [Z] s'élèvent en moyenne à la somme de 1575,96 euros (composé d'indemnités journalières à hauteur de 875,96 euros et d'une pension alimentaire versée pour sa fille de 700 euros).

La part saisissable déterminée par les articles L. 3252-2 et L. 3252-3 du code du travail s'établit à 239,53 euros par mois.

Le montant du revenu de solidarité active pour une personne seule avec un enfant s'élève à la somme de 953,56 euros.

Le montant des dépenses courantes des débiteurs, doit être évalué, au vu des pièces justificatives produites et des éléments du dossier, à la somme mensuelle de 1833 euros (en ce compris le forfait pour les dépenses d'alimentation, d'hygiène et d'habillement et le forfait chauffage).

Compte tenu de ces éléments, il convient de constater l'absence de capacité de remboursement de Mme [G] [Z] (-257,04 euros).

En application de l'article L 733-1 du code de la consommation, le juge des contentieux de la protection saisi d'une contestation des mesures imposées par la commission peut :

« 1° Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui reste à courir avant la déchéance ;

2° Imputer les paiements, d'abord sur le capital ;

3° Prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux de l'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. Quelle que soit la durée du plan de redressement, le taux ne peut être supérieur au taux légal ;

4° Suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans. Sauf décision contraire de la commission, la suspension de la créance entraîne la suspension du paiement des intérêts dus à ce titre. Durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital peuvent être productives d'intérêts dont le taux n'excède pas le taux de l'intérêt légal.".

La situation irrémédiablement compromise au sens de l'article L 724-1 alinéa 2 du code de la consommation, permettant de bénéficier d'une procédure de rétablissement personnel, est une situation d'insolvabilité irréversible, caractérisée par l'impossibilité manifeste de remédier au surendettement du débiteur par les mesures ordinaires comme extraordinaires spécifiées aux articles L 732-1, L 733-1, L 733-4 et L 733-7 du code de la consommation.

 

En application de l'article L 733-1 du code de la consommation, le juge du surendettement saisi d'une contestation des mesures imposées par la commission peut notamment suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans.

 

Le moratoire prévu par ce texte a notamment pour finalité de favoriser le retour à une activité professionnelle du débiteur afin de lui permettre de dégager un revenu disponible suffisant et le cas échéant une épargne, pour honorer des obligations réaménagées au moyen d'un plan conventionnel ou imposé de redressement.

 

S'il est manifeste que Mme [G] [Z] se trouve actuellement dans une situation difficile dans la mesure où elle ne dispose pas de biens ou de ressources suffisantes pour faire face à ses dettes, même au moyen d'un plan conventionnel de redressement ou d'un rééchelonnement du paiement de ses dettes, puisqu'elle ne peut pas dégager de capacité de remboursement, compte tenu de ses ressources et charges incompressibles, toutefois son insolvabilité n'apparaît pas irrémédiable au sens de l'article L 724-1 alinéa 2 du code de la consommation.

 

Sa situation économique et financière, est cependant susceptible d'évoluer favorablement à court ou moyen terme, puisqu'elle est salariée sous contrat à durée indéterminée, actuellement en arrêt maladie depuis décembre 2023, qu'elle est âgée de 48 ans, qu'elle a un enfant de 11 ans à charge et qu'aucun élément ne permet de penser qu'elle n'est pas en mesure de reprendre son travail. Au regard des perspectives d'évolution de sa situation économique et financière, la mise en 'uvre de mesures classiques de surendettement et notamment une suspension de l'exigibilité des créances, pour une période de 24 mois, pourrait permettre à Mme [G] [Z] de retrouver son emploi, et de retrouver une capacité de remboursement.

 

Il convient donc d'infirmer la décision entreprise sauf du chef des dépens et de la recevabilité du recours.

Le litige s'inscrivant dans le cadre d'une procédure de surendettement, les dépens seront laissés à la charge du trésor public.

Par ces motifs,

La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris sauf du chef des dépens, et de la recevabilité du recours de Mme [G] [Z],

Statuant à nouveau,

Ordonne la suspension de l'exigibilité des créances pour une durée de 24 mois à compter de la notification du présent arrêt,

Dit que pendant ce délai de 24 mois, les créances ne produiront pas d'intérêts et aucune poursuite ne pourra être engagée ou maintenue,

 

Dit qu'à l'issue de ce délai, Mme [G] [Z] pourra saisir de nouveau la commission de surendettement des particuliers du lieu de son domicile en vue d'un réexamen de sa situation, conformément aux articles L 733-2 et R 733-5 du code de la consommation,

Rejette toute autre demande,

 

Laisse les dépens d'appel à la charge du Trésor public.

LE GREFFIER

Gaëlle PRZEDLACKI

LE PRESIDENT

Véronique DELLELIS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 2
Numéro d'arrêt : 23/05318
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;23.05318 ?
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