République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 2
ARRÊT DU 27/06/2024
N° de MINUTE : 24/546
N° RG 23/02337 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U5DF
Jugement (N° 23/00617) rendu le 09 Mai 2023 par le Juge des contentieux de la protection de Lille
APPELANTE
SA [29]
[Adresse 4] - [Localité 15]
Représentée par Me Martine Mespelaere, avocat au barreau de Lille substitué par Me Marie-Laure Baudoua, avocat
INTIMÉES
Société [32]
[Adresse 1] - [Localité 9]
Madame [O] [L] veuve [Y]
née le 23 Mai 1956 à [Localité 35]
[Adresse 13] - [Localité 33]
SIP [Localité 28] [Localité 36]
[Adresse 6] - [Localité 8]
Société [20] chez [37]
[Adresse 21] - [Localité 11]
Société [24] chez [19] Services surendettement
[Adresse 22] - [Localité 10]
Société [18] chez [30]
[Adresse 2] - [Localité 16]
Société [23] chez [27] - Service surendettement
[Adresse 3] - [Localité 5]
SA [25]
[Adresse 7] - [Localité 14]
Société [31] chez [26] Pôle surendettement
[Adresse 17] - [Localité 12]
Non comparants, ni représentés
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience
DÉBATS à l'audience publique du 10 Avril 2024 tenue par Danielle Thébaud magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, en application de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile , les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 805 du Code de Procédure Civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Gaëlle Przedlacki
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Véronique Dellelis, président de chambre
Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Danielle Thébaud, conseiller
ARRÊT PAR DEFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 27 juin 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement réputé contradictoire prononcé par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille, statuant en matière de surendettement des particuliers, le 9 mai 2023,
Vu l'appel interjeté le 16 mai 2023,
Vu le procès-verbal de l'audience du 15 novembre 2023,
Vu la réouverture des débats par mention au dossier en date du 1er février 2024,
Après avoir bénéficié de mesures sur 11 mois, suivant déclaration enregistrée le 13 septembre 2022 au secrétariat de la Banque de France, Mme [O] [L] veuve [Y] (Mme [L]) a déposé un dossier et demandé le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers, ne parvenant pas à s'acquitter de ses dettes en raison de l'absence de ressources mensuelles suffisantes et des dépenses nécessaires pour satisfaire aux besoins de la vie courante.
Le 28 septembre 2022, la commission de surendettement des particuliers du Nord, après avoir constaté la situation de surendettement de Mme [L], a déclaré sa demande recevable.
Le 29 septembre 2022, après examen de la situation de Mme [L] dont les dettes ont été évaluées à 85 726,60 euros, les ressources mensuelles à 1788 euros et les charges mensuelles à 882 euros, la commission qui a déterminé un minimum légal à laisser à la disposition de la débitrice de 1356,20 euros, une capacité de remboursement de 431,80 euros et un maximum légal de remboursement de 431,80 euros, a retenu une mensualité de remboursement de 431,80 euros et a imposé des mesures de rééchelonnement de tout ou partie des créances sur une durée maximum de 73 mois, au taux de 0 %, et compte tenu de l'insolvabilité partielle de la débitrice a préconisée un effacement du montant des créances non intégralement payées à l'issue de l'exécution du présent plan d'apurement du passif.
Ces mesures imposées ont été notifiées à la société SA [29] le 29 décembre 2022, décision qu'elle a contestée le 31 janvier 2023.
À l'audience du 28 mars 2023, la société SA [29] n'a pas comparu mais a fait valoir par courrier recommandé avec accusé de réception du 3 mars 2023, réceptionné par la débitrice, que Mme [L] n'avait pas déclaré son patrimoine à la commission du surendettement suite au décès de son mari, et qu'elle était restée propriétaire indivis, à hauteur d'au moins 50% de sa résidence principale ; qu'elle devait justifier de l'absence de patrimoine par un acte notarié authentique ; qu'elle ne semblait pas être allée au terme de la succession ; qu'elle pouvait bénéficier d'un plan d'apurement sur une durée plus longue ou d'un plan pour vente si sa situation financière ne permettait pas d'apurer ses dettes ; qu'elle devrait être en mesure de rembourser intégralement la dette dont elle est redevable à son égard, soit 58 900,60 euros et qu'elle refuse tout abandon ou effacement de celle-ci.
Mme [L] a comparu en personne, accompagné de son fil M. [S] [Y]. Elle a indiqué que depuis le décès de son mari elle était usufruitière de la maison qu'elle occupe ; que la succession avait bien été réglée et qu'elle ne souhaitait pas que la maison soit vendue ; que son fils l'occupait avec elle et qu'il contribuait aux charges, mais en précisant que ses revenus se limitaient à 1000 euros par mois.
Messieurs [M] et [T] [U], munis d'un pouvoir du gérant des [32], ont comparu, ils ont souligné que leur créance, qui correspondait au devis accepté par la débitrice, déduction faite du capital décès, s'élevait à la somme de 1907,63 euros et qu'il n'y avait pas lieu à effacement.
Les autres créances dûment convoqués n'ont pas comparu ni personne pour eux.
Par jugement en date du 8 mai 2023, le juge des contentieux de la protection de Lille statuant en matière de surendettement des particuliers, saisi du recours, formé par la société SA [29], à l'encontre des mesures imposées par la commission de surendettement des particuliers du Nord le 29 septembre 2022, a notamment :
- déclaré le recours de la société SA [29] recevable,
- fixé la capacité de remboursement de Mme [L] à la somme de 494,97 euros,
- arrêté les mesures de remboursement selon les modalités suivantes : rééchelonnement des dettes sur une durée de 73 mois, taux 0%, effacement du montant des créances non intégralement payées à l'issue de l'exécution du présent plan d'apurement du passif.
La société SA [29] a relevé appel le 16 mai 2023 de ce jugement qui lui a été notifié le 11 mai 2023.
A l'audience de la cour du 15 novembre 2023, la société SA [29], était représentée par son conseil, qui s'est référé à ses conclusions, qu'il a remis à l'audience et développé oralement, auxquelles il est fait expressément référence. Elle a demandé l'infirmation de la décision dont appel, de constater que la situation de Mme [L] n'est pas irrémédiablement compromise à raison de la propriété indivise d'un bien pour une valeur, la concernant de 145 000 euros, de rééchelonner le paiement des créances sur une durée de 84 mois, et de subordonner ces mesures à la mise en 'uvre dans un délai de 12 mois par le Mme [L] de démarches pour sortir de l'indivision et de céder la part indivise détenue sur l'immeuble, le prix de vente devant désintéresser en priorité les créanciers bénéficiant de privilèges ou de sûretés, de condamner Mme [L] à lui verser la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, elle fait valoir qu'il y a eu un premier dossier déposé en 2021 par le couple, que suite au décès de son mari, Mme [L] a déposé seule un nouveau dossier. Elle considère qu'il y a eu une mauvaise appréciation du patrimoine de la débitrice, qu'en effet si la débitrice a opté pour l'usufruit des biens de son défunt mari, ainsi qu'il ressort de l'acte de notoriété du 22 juin 2022, elle n'a pas renoncé à l'autre moitié des biens qu'elle possédait déjà préalablement au décès, elle était déjà propriétaire du bien immobilier pour moitié, qu'en conséquence elle dispose d'un patrimoine immobilier suffisant pour apurer son endettement.
Mme [L] a comparu en personne, accompagné de son fils M. [S] [Y]. Elle a indiqué que depuis le décès de son mari elle est usufruitière de la maison qu'elle occupe avec son fils nu propriétaire ; que cette maison est évaluée à la somme de 290 000 euros.
Le conseiller rapporteur lui a été demandé de se renseigner auprès de son notaire afin de savoir si elle était uniquement usufruitière de bien ou si elle était propriétaire et quels étaient ses droits sur l'immeuble, et d'adresser cette information à la cour et à la société [29].
M. [M] [U], muni d'un pouvoir du gérant des [32], a comparu, il a indiqué qu'il restait à Mme [L] à régler deux mensualités, et qu'il adresserait à la cour une copie de la facture acquittée quant tout sera réglé.
Par courrier reçu au greffe de la cour le 25 octobre 2023, la direction des finances publiques [Localité 28] [Localité 36] a indiqué que sa créance était nulle au titre de la taxe foncière 2022.
Par courrier reçu au greffe de la cour le 15 septembre 202, la société [37] a indiqué s'en remettre à la décision de la cour.
Les intimés régulièrement convoqués par le greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, n'ont pas comparu ni personne pour les représenter.
Par courrier reçu à la cour le 27 novembre 2022, Mme [L] a fait parvenir à la cour l'acte de notoriété du 20 juin 2022, figurant déjà au dossier.
Ce document ne permettant pas de déterminer les droits de la débitrice sur l'immeuble, par mention au dossier en date du 1er février 2024, il a été ordonné la réouverture des débats à l'audience du 10 avril 2024 afin :
- d'inviter Mme [L] à produire un courrier de son notaire indiquant clairement quels sont ses droits sur l'immeuble sis [Adresse 13] [Localité 34], à savoir si elle est usufruitière de la totalité du bien immobilier, ou si elle propriétaire pour moitié de ce bien comme le prétend la société [29], compte tenu notamment de l'avis d'imposition pour taxes foncières 2023 versé par la débitrice à l'audience, faisant apparaître son nom. Etant rappelé que cette demande avait déjà été formulée à l'audience de la cour du 15 novembre 2023, l'acte de notoriété adressé par la débitrice ne répondant pas à la demande, et figurant déjà au dossier ;
- que les parties fassent valoir leurs observations sur le moyen relevé d'office par la cour tiré de la question de la bonne foi de Mme [L] au motif qu'elle aurait accepté d'abandonner ses droits en pleine propriété sur l'immeuble alors qu'elle était en surendettement ;
- d'inviter Mme [L] à produire :
-les justificatifs qu'elle continue à régler les créanciers figurant au plan établi par le premier juge,
- les justificatifs de ses ressources et charges actuelles, et notamment les trois derniers relevés de tous ses comptes bancaires (comptes courants,comptes d'épargne, livrets...), ainsi que les ressources de son fils et sa contribution aux charges.
A l'audience de réouverture des débats du 10 avril 2024, Mme [L] a indiqué qu'elle ne voulait pas vendre son immeuble, que son fils qui vivait avec elle faisait de temps en temps les courses et percevait 940,44 euros par mois.
MOTIFS
1- Sur les créances
Selon l'article L. 733-12 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation des mesures imposées par la commission peut vérifier, même d'office, la validité des créances et des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées.'
Par ailleurs, aux termes de l'article 1353 du Code civil, «'celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation'»';
A l'audience de la cour du 10 avril 2024, Mme [L] a remis les justificatifs des dettes qu'elle a réglé suivant le plan établit par le premier juge.
Il s'ensuit que :
la créance des [32] d'un montant de 1907,63 est soldée (facture soldée en date du 3 janvier 2024,
la créance de la SIP [Localité 28] [Localité 36] tf 2022 d'un montant de 684 euros est soldée (bordereau de situation du 19 février 2024),
la créance [23] 518347601/V019966354 d'un montant de 846,86 euros est soldée (courrier du 3 janvier 2024),
la créance [20] 28980000832624 d'un montant de 576,74 euros est soldée (courrier du 18 mars 2024),
la créance [20] 28906001027137 d'un montant de 2311,78 euros présente un solde de 757,93 euros (courrier du 18 mars 2024).
Compte tenu de l'actualisation de ces créances et du montant non contesté des créances retenues par le premier juge, le passif de Mme [O] [L] veuve [Y], sera fixé à la somme de 80 157,52 euros, étant précisé qu'en tout état de cause, les versements effectués par cette dernière en cours de procédure qui n'auraient pas été pris en compte, s'imputeront sur les montants des créances concernées.
2- Sur la situation de surendettement
Aux termes de l'article L 733-10 du code de la consommation, « une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection, dans un délai fixé par décret, les mesures imposées par la commission en application des articles L 733-1, L 733-4 ou L 733-7. »
Aux termes de l'article L 733-13 du code de la consommation, "le juge saisi de la contestation prévue à l'article L 733-10 prend tout ou partie des mesures définies aux articles L 733-1, L 733-4 et L 733-7. Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est déterminée dans les conditions prévues à l'article L 731-2. Elle est mentionnée dans la décision. Lorsqu'il statue en application de l'article L 733-10, le juge peut en outre prononcer un redressement personnel sans liquidation judiciaire."
Lorsqu'un débiteur se trouve dans l'impossibilité d'apurer sa situation de surendettement par la mise en 'uvre des mesures de traitement prévues aux articles L 732-1, L 733-1, L 733-4 et L 733-7, il est dans une situation irrémédiablement compromise au sens de l'article L 724-1 du code de la consommation et est fondé, s'il ne dispose d'aucun bien de valeur au sens de l'article L 724-1 du code de la consommation, à bénéficier d'une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.
Aux termes de l'article L 731-1 du code de la consommation, 'le montant des remboursements est fixé, dans des conditions précisées par décret en conseil d'État, par référence à la quotité saisissable du salaire telle qu'elle résulte des articles L 3252-2 et L 3252-3 du code du travail, de manière à ce que la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage lui soit réservée par priorité.'
Aux termes de l'article L 731-2 du code de la consommation, 'la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage ne peut être inférieure, pour le ménage en cause, au montant forfaitaire mentionné à l'article L 262-2 du code de l'action sociale et des familles. Elle intègre le montant des dépenses de logement, d'électricité, de gaz, de chauffage, d'eau, de nourriture et de scolarité, de garde et de déplacements professionnels ainsi que les frais de santé.'
Selon l'article R 731-1 du code de la consommation, 'pour l'application des dispositions des articles L 732-1, L 733-1 et L 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L 731-1, L 731-2 et L 731-3, par référence au barème prévu à l'article R 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur.'
Il résulte de ces articles que le montant des remboursements à la charge du débiteur, dans le cadre des mesures de traitement de sa situation de surendettement, doit être fixé par référence à la quotité saisissable du salaire telle qu'elle résulte des articles L. 3252-2 et L. 3252-3 du code du travail, de manière à ce qu'une partie des ressources nécessaires aux dépenses courantes du débiteur, égale au moins au montant forfaitaire du revenu de solidarité active dont il disposerait, lui soit réservée par priorité et à ce qu'il n'excède pas la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant du revenu de solidarité active.
Le montant des remboursements stipulés dans le plan ne doit pas excéder la part des ressources du débiteur indispensable aux dépenses courantes du ménage ; le juge apprécie la situation du débiteur au regard des éléments dont il dispose au jour où il statue.
Le juge apprécie la situation du débiteur au regard des éléments dont il dispose au jour où il statue.
En l'espèce, il résulte des pièces actualisées produites, que les ressources mensuelles de Mme [L] s'élèvent à la somme de 2164,11 euros composées de pensions de retraite, auxquelles il sera ajouté une contribution aux charges de la part de son fils qui vit au domicile, d'un montant évalué à la somme de 99 euros (correspondant à la quotité saisissable de son salaire s'élevant à la somme de 940 euros)), soit des revenus mensuels de l'ordre de 2262,90 euros.
La part saisissable déterminée par les articles L. 3252-2 et L. 3252-3 du code du travail, pour Mme [L] s'établit à 720 euros par mois.
Le montant du revenu de solidarité active pour une personne seule s'élève à la somme de 635,70 euros.
Le montant des dépenses courantes de la débitrice doit être évalué, au vu des pièces produites et des éléments du dossier, à la somme mensuelle de 1464,33 euros (en ce compris le forfait pour les dépenses d'alimentation, d'hygiène et d'habillement et le forfait chauffage, les dépenses d'assurance et de mutuelle, l'eau, l'électricité, les impôts fonciers, le téléphone).
Compte tenu de ces éléments, il convient de fixer à la somme mensuelle de 720 euros la capacité de remboursement de la débitrice (somme égale à la quotité saisissable, la différence entre les ressources et les charges s'élevant à la somme de 798,57€), le montant de cette contribution mensuelle à l'apurement de son passif laissant à sa disposition une somme de 1542,90 euros qui est supérieure au revenu de solidarité active dont elle pourraient disposer (635,70 euros), n'excédant pas le montant de la quotité saisissable de ses ressources (720 euros), ni la différence entre ses ressources mensuelles et ce revenu de solidarité active, soit 1627,50 euros (2262,90 euros ' 635,70 euros = 1627,20 euros) et lui permettant de faire face aux dépenses de la vie courante (1464,33 euros).
En application de l'article L 733-1 du code de la consommation, le juge des contentieux de la protection saisi d'une contestation des mesures imposées par la commission peut :
«'1° Rééchelonner le paiement des dettes de toute nature, y compris, le cas échéant, en différant le paiement d'une partie d'entre elles, sans que le délai de report ou de rééchelonnement puisse excéder sept ans ou la moitié de la durée de remboursement restant à courir des emprunts en cours'; en cas de déchéance du terme, le délai de report ou de rééchelonnement peut atteindre la moitié de la durée qui reste à courir avant la déchéance';
2° Imputer les paiements, d'abord sur le capital';
3° Prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées ou rééchelonnées porteront intérêt à un taux réduit qui peut être inférieur au taux de l'intérêt légal sur décision spéciale et motivée et si la situation du débiteur l'exige. Quelle que soit la durée du plan de redressement, le taux ne peut être supérieur au taux légal';
4° Suspendre l'exigibilité des créances autres qu'alimentaires pour une durée qui ne peut excéder deux ans. Sauf décision contraire de la commission, la suspension de la créance entraîne la suspension du paiement des intérêts dus à ce titre. Durant cette période, seules les sommes dues au titre du capital peuvent être productives d'intérêts dont le taux n'excède pas le taux de l'intérêt légal."'.
La situation financière actuelle de la débitrice ne lui permet pas d'apurer ses dettes dans un délai de 73 mois (solde restant après avoir bénéficié précédemment de 11 mois), compte tenu de ses revenus et de ses charges incompressibles et du montant de son passif 80 157,52 euros. Elle est propriétaire pour la moitié en pleine propriété et l'autre moitié en usufruit de la maison située à [Localité 33] (Nord), et s'oppose à la vente de l'immeuble (évalué à la somme de 290 000 euros).
Si en vertu des articles L 732-3 et L 733-3 du code de la consommation, la durée totale du plan, y compris lorsqu'il fait l'objet d'une révision ou d'un renouvellement et/ou lorsqu'il met en 'uvre les mesures mentionnées à l'article L 733-1 du code de la consommation, ne peut excéder sept années, toutefois ces deux articles disposent expressément chacun dans leur alinéa 2 que «'les mesures peuvent cependant excéder cette durée lorsqu'elles concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur dont elle permet d'éviter la cession ou lorsqu'elles permettent au débiteur de rembourser la totalité de ses dettes tout en évitant la cession du bien immobilier constituant sa résidence principale.'»';
Il résulte de ces articles qui instituent une dérogation à la limitation du plan à une durée de sept ans, que les mesures du plan peuvent excéder ce délai non seulement pour le remboursement des prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale du débiteur, mais également pour le remboursement intégral de ses autres dettes et ce, afin d'éviter la cession du bien immobilier qui constitue sa résidence principale';
Le prix de vente du bien immobilier de la débitrice a été évalué le 21 juin 2021 à la somme de 290000 nets vendeur, à supposer que cet immeuble qui constitue la résidence principale de la débitrice, qui est situé à [Localité 34], soit vendu à ce montant, il permettrait certes de désintéresser l'intégralité de leurs créanciers, mais le coût prévisible du relogement de la débitrice, aggraverait ses charges, et diminuerait le reste à vivre.
En revanche, la capacité de remboursement actuelle de Mme [L], âgée de 68 ans composé de ses pensions de retraite, permet d'apurer la totalité de leurs dettes sur une durée raisonnable de 112 mois, tout en évitant la cession de leur bien immobilier qui constitue sa résidence principale et qui est adapté à sa situation familiale.
Compte tenu du montant et de la nature du passif de Mme [L] 80 157,52 euros) et du montant de sa capacité mensuelle de remboursement (750 euros), les dettes seront remboursées sur une durée de 112 mois selon les modalités du plan figurant dans le dispositif du présent arrêt (étant précisé que les versements effectués au profit de l'un ou l'autre des créanciers depuis la fixation de l'état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris s'imputeront sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces règlements)';
Afin de favoriser le redressement de la situation financière des débiteurs, les soldes des créances figurant dans le plan d'apurement du passif ne produiront pas d'intérêts pendant la durée du plan';
Le jugement entrepris sera donc infirmé du chef des modalités de remboursement des dettes.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le litige s'inscrivant dans le cadre d'une procédure de surendettement, les dépens seront laissés à la charge du trésor public, et il y n'y pas lieu de faire droit à la demande d'indemnité formé sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs,
La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt par défaut et en dernier ressort,
Infirme le jugement entrepris sauf du chef des dépens';
Statuant à nouveau,
Constate que sont soldées : les créances des [32], de la SIP [Localité 28] [Localité 36] tf 2022 d'un montant de 684 euros, de la société [23] 518347601/V019966354 d'un montant de 846,86 euros, de la société [20] 28980000832624 d'un montant de 576,74 euros ;
Fixe pour les besoins de la présente procédure de surendettement le solde de la créance [20] 28906001027137 à la somme de 757,93 euros ;
Fixe le passif de Mme [O] [L] veuve [Y] à traiter dans le cadre de la procédure de surendettement à la somme de 80157,52 euros (sous réserve d'autres versements intervenus en cours de procédure)';
Fixe la capacité de remboursement de Mme [O] [L] veuve [Y] à la somme mensuelle de 720 euros ;
Dit que Mme [O] [L] veuve [Y] devra rembourser ses dettes selon les modalités fixées dans l'échéancier suivant :
Date de l'arrêt de Plan : 27 juin 2024
Débitrice Mme [O] [L] veuve [Y]
Mensualité de remboursement : 720 euros
Durée 112 mois
Créanciers
Solde des créances
Du 1er au 65ème mois inclus
65 mensualités
Du 66ème au 112ème mois inclus
47 mensualités
Reste dû
Fin de plan
[18]
41536629001100
1 243,98 €
19,14 €
0,00 €
0,00 €
[18]
42945009311100
1 395,54 €
21,46 €
0,00 €
0,00 €
[20]
28906001027137
757,93 €
11,66 €
0,00 €
0,00 €
Franfinance
11198534932
13 501,05 €
207,70 €
0,00 €
0,00 €
My [29]
35579128266
58 900,60 €
393,00 €
0,00 €
[31]
2109062562
3 116,58 €
47,94 €
709,69 €
0,00 €
[31]
2109062563
1 241,84 €
19,10 €
0,00 €
0,00 €
TOTAL du passif et des mensualités
80 157,52 €
720,00 €
709,69 €
0,00 €
Dit que les versements effectués au profit de l'un ou l'autre des créanciers depuis la fixation de l'état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris s'imputeront sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces règlements';
Réduit à 0 % le taux des intérêts dus sur les créances figurant dans cet échéancier pendant la durée du plan';
Dit que sauf meilleur accord des parties, les paiements devront être effectués le 15 de chaque mois et pour la première fois le 15 du mois suivant la notification du présent arrêt';
Dit qu'à défaut de paiement d'une seule des mensualités du plan à son terme, l'ensemble du plan est de plein droit caduc quinze jours après une mise en demeure adressée à Mme [O] [L] veuve [Y] par lettre recommandée avec avis de réception d'avoir à exécuter leurs obligations, et restée infructueuse';
Rappelle que les présentes mesures s'imposent tant aux créanciers qu'à la débitrice, et qu'ainsi toutes autres modalités de paiement, tant amiables que forcées, sont suspendues pendant l'exécution de ce plan ; qu'aucune voie d'exécution ne pourra être poursuivie par l'un quelconque des créanciers figurant dans le plan, pendant toute la durée d'exécution des mesures sauf à constater la caducité de ces dernières';
Dit qu'il appartiendra à Mme [O] [L] veuve [Y], en cas de changement significatif de ses conditions de ressources ou de ses charges, à la hausse comme à la baisse, de ressaisir la commission de surendettement d'une nouvelle demande de traitement de sa situation de surendettement';
Rejette toute autre demande';
Laisse les dépens d'appel à la charge du trésor public.
LE GREFFIER
Ismérie Capiez
LE PRESIDENT
Véronique Dellelis