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27/06/2024 | FRANCE | N°23/00113

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 4, 27 juin 2024, 23/00113


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 4

ARRÊT DU 27/06/2024





N° de MINUTE : 24/583

N° RG 23/00113 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UVUF

Jugement (N° 15/003620) rendu le 27 Janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Lille



APPELANT



Monsieur [T] [V]

né le 14 Février 1936 à [Localité 10] - de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté Me Catherine Trognon-Lernon, avocat au barreau

de Lille, avocat constitué, constitué aux lieu et place de Me Jacques Sellier, avocat au barreau de Lille



INTIMÉES



Madame [I] [U]

née le 22 Juin 1967 à [Localité 7] - de nation...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 4

ARRÊT DU 27/06/2024

N° de MINUTE : 24/583

N° RG 23/00113 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UVUF

Jugement (N° 15/003620) rendu le 27 Janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Lille

APPELANT

Monsieur [T] [V]

né le 14 Février 1936 à [Localité 10] - de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté Me Catherine Trognon-Lernon, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, constitué aux lieu et place de Me Jacques Sellier, avocat au barreau de Lille

INTIMÉES

Madame [I] [U]

née le 22 Juin 1967 à [Localité 7] - de nationalité Française

[Adresse 9]

[Localité 3]

Représentée par Me Carole Guillin, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

Association Soliha venant aux droits de l'association Pact Métropole Nord prise en la personne de son président domicilié es qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Anne-Laurence Delobel Briche, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 23 janvier 2024 tenue par Emmanuelle Boutié magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Véronique Dellelis, président de chambre

Emmanuelle Boutié, conseiller

Catherine Menegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 27 juin 2024 après prorogation du délibéré en date du 18 avril 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Véronique Dellelis, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 8 décembre 2023

****

Par acte sous seing privé en date du 1er août 1998, M. [T] [V] a donné en location son bien immobilier situé à [Localité 8], [Adresse 6], à l'association Le Cal Pact aux droits de laquelle intervient désormais l'association Soliha Métropole Nord.

Le 16 mai 2018, M. [T] [V] a fait intervenir M. [F] [O] s'agissant de la menuiserie, la fourniture et la pose d'une fenêtre en PVC.

Suivant acte sous seing privé du 11 août 2008, l'association Le Cal Pact aux droits de laquelle intervient désormais l'association Soliha Métropole Nord a donné en location à Mme [I] [U] la maison appartement à M. [T] [V], moyennant un loyer mensuel de 297,58 euros et une provision mensuelle pour charges de 67,98 euros.

Le 1er juin 2011, le service communal d'hygiène et de santé de [Localité 8] a procédé une première visite du logement, puis le 22 mai 2012 et le 12 novembre 2012. Il a été constaté des infiltrations et un système d'évacuation et d'aération non conforme.

Le 29 janvier 2013, Mme [I] [U] a déclaré à sa compagnie d'assurances Novellia Crédit Mutuel un dégât des eaux. La compagnie d'assurance a refusé de prendre en charge le sinistre en considérant que les désordres relevaient du bailleur.

Le 3 octobre 2014, le service communal d'hygiène et de santé de la ville de [Localité 8] a procédé à une nouvelle visite et a indiqué que si certains travaux avaient été réalisés, des désordres demeuraient, résultant notamment de la présence de condensation et de moisissure.

Le 2 novembre 2015, l'inspecteur des services d'hygiène de la ville de [Localité 8] a constaté à nouveaux l'existence de désordres.

Par acte signifié le 4 novembre 2015, Mme [I] [U] a assigné l'association Soliha Lille Métropole devant le tribunal d'instance de Lille.

Par acte d'huissier du 24 mai 2016, l'association Soliha Lille Métropole a assigné M. [T] [V] devant le tribunal d'instance de Lille.

Par acte d'huissier du 24 novembre 2016, M. [T] [V] a assigné M. [F] [O] devant le tribunal d'instance de Lille.

Par acte d'huissier du 28 février 2017, M. [F] [O] a assigné la société anonyme AXA France IARD, son assureur décennal, devant le tribunal d'instance de Lille.

Par jugement du 26 mai 2017, le tribunal d'instance de Lille a ordonné la jonction de l'ensemble de ces procédures sous le numéro unique 15-3620, ordonné une expertise et a désigné M. [M] [H] pour y procéder, et sursis à statuer sur les autres demandes.

Par acte d'huissier du 16 novembre 2017, l'association Soliha Lille Métropole a assigné la SARL Didier Vanufel, société qui était intervenue au niveau de la toiture de l'immeuble litigieux, devant le tribunal d'instance de Lille.

Par acte d'huissier du 30 novembre 2017, l'association Soliha Métropole Nord a assigné la SCI Chaubarre, société propriétaire de l'immeuble voisin dé l'immeuble litigieux, devant le tribunal d'instance de Lille.

Par jugements du 22 octobre et 12 novembre 2018, le tribunal d'instance de Lille a ordonné la jonction de ces procédures et a étendu les opérations d'expertises à la SCI Chaubarre, à M. [N] et à la SARL Didier Vanufel.

Mme [I] [U] a quitté le logement le 3 janvier 2019.

Par acte d'huissier du 21 février 2020, l'association Soliha Métropole Nord a assigné en garantie M. [P] [N], propriétaire voisin de l'immeuble litigieux.

Par ordonnance du 23 juin 2020, le tribunal de commerce de Lille a désigné Maître [Z] [A] en qualité de mandataire ad hoc de M. [F] [O], à la suite de la cessation de son activité le 30 septembre 2015.

Malgré de très nombreuses relances de la part du tribunal, l'expert n'a pas déposé son rapport. Dans ces conditions, les parties ont accepté de soumettre la procédure à l'application de l'article 446-2 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n°2017-892 du 6 mai 2017

Par jugement réputé contradictoire du 27 juin 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :

- condamné M. [T] [V] à payer à Mme [I] [U] la somme de 8000 euros en réparation de son préjudice de jouissance,

- condamné M. [T] [V] à payer à Mme [I] [U] la somme de 3500 euros en réparation de son préjudice relatif à la dégradation de son état de santé,

- condamné M. [T] [V] à payer à Mme [I] [U] la somme de 1500 euros au titre de l'article 37 du décret de 1991,

- condamné M. [T] [V] à payer à l'association Soliha la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,

- condamné M. [T] [V] aux entiers dépens de la présente instance,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Par acte d'huissier en date du 16 décembre 2022, Mme [U] a fait signifier le jugement à M. [V].

M. [T] [V] a relevé appel de cette décision par déclaration en date du 5 janvier 2023, déclaration d'appel critiquant chacune des dispositions de la décision entreprise .

Mme [I] [U] a constitué avocat en date du 30 mars 2023.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 octobre 2023, M. [T] [V] demande la cour de :

- débouter la société Soliha de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de M. [V],

- dire mal jugé et bien appelé,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné M. [V] à payer à Mme [I] [U] les sommes de 8 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance, 3 500 euros en réparation de son préjudice relatif à la dégradation de son état de santé, 1 500 euros au titre de l'article 37 du décret de 1991,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté M. [V] de ses demandes de garantie à l'encontre du Cal Pact devenu Soliha,

Statuant à nouveau, constater que seule la société Soliha venant aux droits du Cal Pact est bailleresse de Mme [U],

- constater que le contrat passé entre M. [V] et le Cal Pact laisse uniquement à sa charge les réparations de l'article 606 du code de procédure civile, à savoir les toitures entières et les gros murs,

En conséquence, mettre hors de cause M. [V] et débouter Mme [U] de ses demandes fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées contre à son encontre,

A titre subsidiaire, s'entendre condamner Soliha venant aux droits du Cal Pact, à garantir M. [V] de toutes condamnations en principal, intérêts, dommages et intérêts, et frais, qui pourraient être prononcées à son encontre,

- s'entendre condamner tout succombant au paiement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le12 mai 2023, Mme [I] [U] demande à la cour de :

- réformer le jugement du 27 juin 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Lille en ce qu'il a condamné M. [V] à payer à Mme [I] [U] les sommes de:

* 8000 euros en réparation de son préjudice de jouissance,

* 3500 euros en réparation de son préjudice relatif à la dégradation de son état de santé,

Statuant à nouveau,

- condamner solidairement M. [V] et Soliha Metropole au paiement des sommes suivantes:

*16000 euros à titre de dommages et intérêts pour trouble de jouissance

* 3853,30 euros au titre de son préjudice matériel

* 8000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à la santé et à la sécurité

- débouter M. [V] de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [V] et Soliha Metropole à la somme de 2000 euros au titre de l'article 37 du décret de 1991,

- condamner les défendeurs aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 7 décembre 2023, Soliha Solidaire pour l'Habitat, venant aux droits de l'association Pact Métropole Nord, demande à la cour de :

- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a débouté les parties de toutes leurs demandes dirigées contre Soliha venant aux droits du CAL PACT, et en ce que M. [V] a été condamné à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code pénal,

Subsidiairement, si par impossible, la responsabilité de Soliha était retenue, ce cas, réformer la décision déférée, et statuant à nouveau, il est demandé à la cour :

A titre principal,

- dire que les prétentions de Mme [U] sont mal fondées à l'égard de Soliha qui devra être mis hors de cause,

A titre subsidiaire, si par impossible, les demandes de Mme [U] étaient déclarées bien fondées et bien dirigées à l'égard de Soliha venant aux droits du CAL PACT, en tout état de cause,

- débouter Mme [U] de l'ensemble de ses prétentions,

A titre infiniment subsidiaire, si les prétentions de Mme [U] sont accueillies, en ce cas, condamner M. [V] à garantir toutes condamnations, qui pourraient être prononcées contre Soliha venant aux droits du CAL PACT, afin de l'en relever indemne.

- débouter M. [V] de l'ensemble de ses prétentions,

En tout état de cause,

- débouter l'ensemble des parties de toutes leurs demandes dirigées à l'encontre de Soliha

- condamner M. [V] à payer à Soliha la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [V] aux entiers frais et dépens de la présente procédure en ce compris les frais d'expertise.

Il est renvoyé aux conclusions pour un exposé détaillé des demandes et des moyens en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Sur la décence du logement loué

L'article 9 du code de procédure civile dispose qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Il résulte des dispositions de l'article 1719 du code civil que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière:

1° De délivrer au preneur la chose louée, et s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent,

2° D'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée,

3° D'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail,

(...)

Aux termes des dispositions de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d'espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. Un décret en Conseil d'Etat définit le critère de performance énergétique minimale à respecter et un calendrier de mise en oeuvre échelonnée.

(...)

Le bailleur est obligé:

a) De délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les équipements mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement; toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer; cette clause prévoit la durée de cette imputation et, en cas de départ anticipé du locataire, les modalités de son dédommagement sur justification des dépenses effectuées; une telle clause ne peut concerner que des logements répondant aux caractéristiques définies en application des 1er et 2ème alinéas.

Enfin, il résulte des dispositions de l'article 2 du décret du 30 janvier 2002 que le logement doit satisfaire aux conditions suivantes au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires: il assure le clos et le couvert. Le gros-oeuvre du logement et de ses accès est en bon état d'entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d'eau dans l'habitation.

En l'espèce, Mme [U] fait valoir qu'après son emménagement dans l'appartement loué avec ses enfants en 2008, elle a subi de nombreux désordres à partir de 2011, l'indécence du logement lui ayant causé un préjudice de jouissance dont elle sollicite l'indemnisation pour un montant de 16 000 euros.

Il résulte des éléments du dossier que Mme [U] a sollicité l'intervention des services d'hygiène et de santé dès 2011, le compte-rendu réalisé le 1er juin 2011 ayant relevé l'existence de plusieurs désordres :

- façade: 'absence de joint entre les menuiseries des fenêtres et le mur de façade'

- chambre porte droite: 'volets bloqués, signalement de stagnation d'eau sur le balcon',

- chambre porte gauche: 'infiltration d'eau par la menuiserie de la fenêtre'.

Si la visite réalisée le 14 mai 2012 a permis de constater la réparation des volets, la visite réalisée le 22 octobre 2012 au cours de laquelle de nouveaux désordres ont été relevés s'agissant la présence au niveau du balcon, d'une évacuation des eaux insuffisante et d'une stagnation d'eau.

En outre, il est constant qu'alors que Mme [U] a été victime d'un dégât des eaux le 29 janvier 2013, l'assureur de la locataire a considéré à l'issue de la réalisation d'une expertise extra-judiciaire, que la prise en charge des dommages relevait de l'assureur du propriétaire de Mme [U].

De plus, le service communal d'hygiène et de santé de la ville de [Localité 8] a procédé à une nouvelle visite du logement le 3 octobre 2014 et a précisé que si certains travaux avaient été réalisés, s'agissant de la réfection du balcon, de l'application d'un joint entre le bâti de la fenêtre et le mur de façade et la création d'une ventilation haute et basse dans la salle de bains, des désordres persistaient avec notamment la présence de condensation et de moisissures, la descente d'eau pluviale cassée sur la façade et un mauvais écoulement de l'eau sur le balcon.

De la même manière, aux termes d'un courrier daté du 10 juillet 2018, le service communal d'hygiène et de santé précise que l'enquête effectuée par l'inspecteur de salubrité a permis de constater que certains travaux ont été effectués afin de remédier aux causes d'insalubrité, concernant notamment raccordement de la descente d'eau pluviale en façade mais il relève toutefois la persistance de certains désordres:

Séjour :

- dégradation des enduits intérieurs du mur de façade suite aux infiltrations d'eau, 20% d'humidité mesuré en profondeur,

- appuis de fenêtres en bois dégradé,

Salle d'eau :

- manifestation d'humidité et développement constant de moisissures sur l'ensemble des murs et plafonds,

- présence d'une ventilation haute dans le coffrage du volet ne débouchant pas sur l'extérieur,

- enduit des murs dégradé,

Chambre 1er étage porte droite :

- dégradation des enduits intérieurs du mur de façade suite aux infiltrations d'eau, 20% d'humidité mesuré en profondeur,

- seuils des portes fenêtres dégradés,

Chambre du fond au 1er étage :

- dégradation importante des enduits intérieurs du mur de façade et du mur d'angle suite aux infiltrations d'eau, 30% d'humidité mesuré en profondeur,

- seuils des portes fenêtres dégradés.

Balcon :

- mauvais écoulement des eaux pluviales, débordement par temps de forte pluie,

- débordement du chéneau par temps de forte pluie selon l'occupante

Enfin, il résulte des résultats de l'enquête effectuée par l'inspecteur de salubrité et de la visite contradictoire du logement réalisée le 9 janvier 2019 qu'aucune évolution de la situation n'a pu être notée, la persistance de nombreux désordres ayant pu être relevée:

Séjour :

- dégradation des enduits intérieurs du mur de façade suite aux infiltrations d'eau, 20% d'humidité mesuré en profondeur,

- appuis de fenêtres en bois dégradés.

Salle d'eau :

- manifestation d'humidité et développement important de moisissures sur l'ensemble des murs et plafonds,

- présence d'une ventilation haute dans le coffrage du volet ne débouchant pas sur l'extérieur,

- enduit des murs dégradé,

- fuite du robinet de la baignoire.

C :

- absence de système d'aération / ventilation réglementaire, la ventilation haute donne dans la salle d'eau.

Chambre 1er étage porte gauche :

- manifestation d'humidité, 20% d'humidité mesuré localement en profondeur.

Chambre 1er étage porte droite :

- dégradation des enduits intérieurs du mur de façade suite aux infiltrations d'eau, 20% d'humidité mesuré en profondeur,

- seuils des portes fenêtres dégradés.

Chambre du fond au 1er étage :

- dégradation importante des enduits intérieurs du mur de façade et du mur d'angle suite aux infiltrations d'eau, 30% d'humidité mesuré en profondeur,

- seuils des portes fenêtres dégradés.

Balcon :

- mauvais écoulement des eaux pluviales, débordement par temps de forte pluie.

- débordement du chéneau par temps de forte pluie selon l'occupante.

Par ailleurs, le courrier adressé à la locataire le 4 février 2019 par le service communal d'hygiène et de santé de la ville de [Localité 8] précise que ces désordres constituent des infractions à l'arrêté préfectoral du 12 avril 1979 portant règlement sanitaire départemental, notamment en ses articles 23, 32, 35, 40, 45 et 165 et qu'il a été demandé au propriétaire de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation dans un délai d'un mois et qu'à défaut d'engagement de travaux, une procédure sera engagée pour interdire le logement à l'habitation.

Ainsi, c'est à juste titre que le tribunal a retenu qu'il est démontré que le logement ne satisfait pas aux disposition du décret du 30 janvier 2002, tant l'expert judiciaire que le service d'hygiène et de santé de la ville ayant constaté à de nombreuses reprises des problèmes de ventilation, l'absence de protection du logement contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau engendrant d'importants problèmes d'humidité, ces éléments permettant de caractériser l'indécence du logement loué alors que les seuls courriers de Mme [U] datés de janvier 2016 sont insuffisants à démontrer une opposition de la locataire à la réalisation des travaux de remise en état.

En conséquence, la décision entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a retenu que le logement était indécent à compter du mois de janvier 2011, date à laquelle la locataire a sollicité l'intervention des services d'hygiène et de santé de la mairie de [Localité 8].

Sur la responsabilité des désordres

Aux termes des dispositions de l'article 606 du code civil, les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières. Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. Toutes les autres réparations sont d'entretien.

En l'espèce, un contrat de gestion a été régularisé entre M. [V] et le CAL PACT de [Localité 8], ce contrat prenant effet le 1er août 1998 et étant renouvelable par tacite reconduction.

Il était aussi stipulé qu' 'en vue de favoriser le relogement des familles défavorisées ou mal logées demeurant sur la commune de [Localité 8], M. [V] donne en gestion au CAL PACT les immeubles référencés en annexe'.

En outre, l'article 7 de cette convention de gestion dispose que:

'Le gestionnaire sera tenu d'entretenir la chose louée en état de servir à l'usage prévu par le contrat à cet effet.

Il fera effectuer les travaux d'entretien courant des logements dans la limite stricte de la provision déterminée à l'article 9 et en vérifiera la bonne exécution. Il pourra les faire réaliser par tout prestataire dûment qualifié et selon les règles de l'art, et en particulier, soit par l'équipe d'ouvriers d'entretien dont il dispose, soit par entreprise, ou par tout autre dispositif concourant à la réinsertion professionnelle.

Le bailleur devra assurer les grosses réparations telles que celles énumérées à l'article 606 du code civil qui en définies par l'usage.

La facturation de l'intervention des ouvriers s'appliquera suivant un barème préalablement négocié.

Le gestionnaire devra informer le bailleur de tout risque de dépassement de la provision de 5%.

Au-delà; le bailleur prendre la relais pour les travaux qu'il reste à exécuter, ou chargera le gestionnaire de l'exécution dans le cadre d'un complément de provision.

Le gestionnaire répondra des dégradations et des pertes qui pourraient survenir pendant la durée du contrat sauf dommages couverts dans le cadre des assurances souscrites par le propriétaire.'

Par ailleurs, un contrat de bail était régularisé entre les même parties, l'association PACT de [Localité 8] étant désignée en qualité de preneur, portant sur le logement situé [Adresse 6], à [Localité 8].

Enfin, suivant acte sous seing privé en date du 11 août 2008, l'association LE CAL PACT a donné en location à Mme [U] le logement appartenant à M. [V] moyennant le versement d'un loyer mensuel de 297,58 euros outre une provision sur charges de 67,98 euros.

S'il résulte des développements précédents que l'indécence du logement loué est caractérisée par des problèmes de ventilation, l'absence de protection du local contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau ainsi que des désordres constatés sur les menuiseries extérieures et sur la couverture avec ses raccords et accessoires, certains travaux devant être réalisés pour remédier à ces désordres s'analysent en de 'grosses réparations', s'agissant du clos et du couvert, et incombent au propriétaire au sens des dispositions de l'article 606 du code civil, ces derniers devant donc être mis à la charge de M. [V].

Ainsi, si M. [V] affirme qu'il a entièrement financé les travaux destinés à assurer la couverture et le clos, ces derniers ayant été intégralement réalisés, de sorte qu'il a satisfait aux demandes qui lui avaient été faites, il ne justifie pas avoir répondu aux courriers adressés par le service communal d'hygiène et de santé de [Localité 8] en 2011, 2012, 2014, 2015, 2018 et 2019 l'informant de la persistance de désordres en dépit de la réalisation de certains travaux.

Toutefois, il convient de relever que l'ensemble des désordres relevés ne relèvent pas de la responsabilité du propriétaire bailleur alors même que l'association PAC CAT a elle-même la qualité de bailleur à l'égard de Mme [U].

Ainsi, le seul courrier du PAC CAT en date du 26 décembre 2012 informant M. [V] de l'existence de plusieurs désordres affectant le logement loué et de la nécessité de réaliser les travaux permettant d'y remédier s'agissant notamment de la réparation du cheneau (fuite toiture), de l'étanchéité des fenêtre (zinc) à refaire et de la finition des menuiseries en façade avant ne saurait suffire à l'exonérer de sa responsabilité de bailleresse au sens de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989, ces désordres ne relevant pas des 'grosses réparations' visées par l'article 606 du code civil mises à la charge du propriétaire mais des réparations d'entretien mises à la charge du bailleur.

Ainsi, la cour relève qu'alors que M. [V] justifie avoir réalisé certains travaux dans le logement loué, s'agissant notamment de la création d'une ventilation haute et basse dans la salle de bain, de la réfection du balcon et de l'application d'un joint entre le bâti de la fenêtre et le mur de façade, la réalisation des autres travaux permettant de remédier aux désordres relevés par le service d'hygiène et de santé et caractérisant l'indécence du logement loué relèvent de la responsabilité de la CAL PACT en sa qualité de bailleur de Mme [U].

En conséquence, la preuve d'un manquement de la CAL PACT à son obligation d'entretien des lieux loués est caractérisée en l'espèce compte tenu de l'indécence du logement et le seul courrier alertant M. [V] de la persistance des désordres ne saurait permettre de l'exonérer de sa responsabilité.

En conséquence, il y a lieu de faire droit à la demande subsidiaire de M. [V] et de le condamner solidairement avec l'association Soliha venant aux droits du CAL PACT à indemniser le préjudice subi par Mme [U] résultant de l'indécence des lieux loués.

Sur la demande d'indemnisation formulée par Mme [U]

- Sur le trouble de jouissance

Alors qu'il résulte des développements précédents que la preuve de l'indécence du logement loué est caractérisée en l'espèce pour la période comprise entre 2011, date à laquelle Mme [U] a sollicité l'intervention du service d'hygiène et de santé de la mairie de [Localité 8] et 2019, date de son départ des lieux, le premier juge a justement indemnisé le préjudice de jouissance subi par Mme [U] au titre de l'occupation du logement indécent par l'allocation de la somme de 8000 euros.

-Sur la dégradation de l'état de santé de Mme [U]

Au soutien de sa demande d'indemnisation, Mme [U] produit aux débats deux certificats médicaux établis les 21 novembre 2014 et le 11 février 2015 dont il résulte que sa fille et elle-même sont atteintes d'affections pulmonaires et d'allergies respiratoires en relation avec leur environnement et précisant que l'humidité du logement constitue un facteur aggravant pour leur santé.

En outre, il résulte du compte rendu de visite établi le 23 mars 2015 par une conseillère médicale en environnement intérieur, dont Mme [U] a sollicité l'intervention à son domicile, que le logement apparaît 'nettement défavorable' à la santé de Mme [U] compte tenu notamment d'une exposition très importante aux allergènes et irritants de moisissures participant très certainement aux symptômes respiratoires de la locataire ainsi qu'à ses migraines, étant précisé que les développements fongiques sont liés à la fois à des phénomènes d'infiltrations, dont certains sont en cours de résolution, mais aussi à des phénomènes de condensation importants par défaut de ventilation.

Ainsi, c'est à juste titre que le tribunal a retenu que ces éléments démontrent que l'état du logement et notamment la présence importante d'humidité, a constitué une cause d'aggravation de l'état de santé de la locataire et de ses occupants et a fixé à 3500 euros le montant des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi à ce titre.

La décision entreprise sera donc confirmée de ce chef.

- Sur le préjudice matériel

Mme [U] fait valoir qu'elle a subi un dégât des eaux le 29 janvier 2013 pour lequel son assureur a décliné sa compétence, l'origine du sinistre étant liée au manque de joint sur une fenêtre et à l'absence de vmc dans la chambre. Elle soutient avoir été contrainte de remplacer par ses propres moyens l'ensemble des éléments d'équipement endommagés pour un montant de 3853,30 euros et que cette situation a créée une situation d'endettement pour elle compte tenu de son absence d'activité professionnelle.

Toutefois, c'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le tribunal a retenu que Mme [U] ne démontre pas que le dégât des eaux a causé la dégradation de ces équipements et qu'elle a été contrainte de les racheter alors que les factures produites aux débats datent de novembre 2011, soit avant le dégât des eaux, novembre 2014 et janvier 2015 et ne correspondent pas avec la période du dommage allégué.

Dès lors, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [U] de sa demande d'indemnisation à ce titre.

Sur l'appel en garantie

M. [V] sollicite la condamnation du Cal Pact devenu Soliha à le relever et garantir de toutes condamnations en principal et intérêts en faisant valoir qu'il appartenait au Cal Pact de procéder aux travaux nécessaires à l'entretien du logement autres que les grosses réparations incombant au propriétaire et qu'il a toujours réalisé et réglé les travaux demandés par le Cal Pact qui avait seule les connaissances et l'expertise pour en décider l'opportunité et le bien fondé.

S'il résulte des développements précédents que l'indécence du logement loué par Mme [U] est caractérisé depuis 2011, date à laquelle le service communal d'hygiène et de santé a pu constater l'existence de désordres affectant les lieux loués, M. [V] justifie avoir réalisé des travaux relevant du gros oeuvre s'agissant de la réalisation de ventilation dans la salle de bains en 2014, de réalisation de plâtrerie et d'isolation ainsi que du remplacement d'un tuyau de descente d'eau sur la façade avant en 2015.

Par ailleurs, alors que M. [V] avait confié au Cal Pact la gestion de l'appartement loué à Mme [U] dans le cadre du contrat de mandat régularisé par les parties le 1er août 1998, le mandataire ne justifie pas avoir alerté M. [V] sur la nécessité de réaliser des travaux de remise en état du logement compte tenu des désordres constatés, le seul courrier en date du 26 décembre 2012 informant M. [V] de l'existence de plusieurs désordres affectant le logement loué et de la nécessité de réaliser les travaux permettant d'y remédier s'agissant notamment de la réparation du chéneau (fuite toiture), de l'étanchéité des fenêtre (zinc) à refaire et de la finition des menuiseries en façade avant, étant insuffisant à justifier du respect de son obligation à ce titre.

Ainsi, alors que l'obligation de remettre au locataire un logement décent et ne comportant pas de risque pour la sécurité des occupants incombe au bailleur autant qu'à son mandataire, dès lors que ce dernier est contractuellement en charge de la gestion de l'immeuble, le CAL Pact ne justifie pas avoir alerté M. [V] sur la nécessité de réaliser des travaux urgents permettant de remédier à l'indécence du logement loué dans le cadre de l'exécution de son contrat de mandat.

Dès lors, compte tenu de la faute commise dans l'exécution de son mandat, il y a lieu de la condamner à relever et garantir M. [V] à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre.

Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [V] et l'association Soliha, parties perdantes, seront condamnés à supporter les dépens d'appel en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Il n'apparaît pas inéquitable de les condamner à verser à Mme [U] la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 37 du décret de 1991.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Déclare irrecevable les conclusions notifiées par l'association Soliha venant aux droits du CAL PACT,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions en ce qu'il a débouté Mme [I] [U] de toutes ses demandes dirigées contre Soliha venant aux droits du CAL PACT,

Statuant à nouveau sur ce point,

Déclare l'association Soliha venant aux droits du Cal Pact tenue in solidum avec M. [V] au titre des condamnations prononcées contre ce dernier par le jugement entrepris au profit de Mme [I] [U] et prononce en conséquence condamnation de ce chef à l'encontre de ladite association ;

Dit que la charge finale des condamnations prononcées au profit de Mme [I] [U] sera répartie par moitié entre M. [V] d'une part et l'association Soliha venant au droit de CAL PACT d'autre part et condamne en conséquence M. [V] et l'association Soliha venant aux droits du CAL PACT à se garantir réciproquement à hauteur de 50 % des condamnations prononcées in solidum à leur égard par la présente décision,

Condamne M. [T] [V] et l'association Soliha à verser à Mme [I] [U] la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 37 du décret de 1991,

Condamne M. [T] [V] et l'association Soliha aux entiers dépens.

Le Greffier

Harmony Poyteau

Le Président

Véronique Dellelis


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 4
Numéro d'arrêt : 23/00113
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;23.00113 ?
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