République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 8 SECTION 1
ARRÊT DU 27/06/2024
N° de MINUTE : 24/579
N° RG 22/01415 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UFXX
Jugement (N° 21-000934) rendu le 03 Janvier 2022 par le Juge des contentieux de la protection de Lille
APPELANTE
SA Cofidis
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉS
Monsieur [V] [I]
né le [Date naissance 1] 1973
[Adresse 8]
[Localité 3]
Madame [H] [E]
née le [Date naissance 4] 1968
[Adresse 8]
[Localité 3]
Représentés par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assisté de Me Harry Bensimon, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
SELAS MJS Partners prise en la personne de Maître [Y] ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS Agence Nationale pour l'Ecologie
[Adresse 2]
[Localité 7]
Défaillante, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 02 juin 2022 par acte remis à personne morale
DÉBATS à l'audience publique du 03 avril 2024 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Yves Benhamou, président de chambre
Samuel Vitse, président de chambre
Catherine Ménegaire, conseiller
ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 24 juin 2024 après prorogation du délibéré du 13 juin 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 20 mars 2024
EXPOSE DU LITIGE
Le 12 janvier 2017, M. [V] [I] a contracté auprès de la SAS Agence nationale pour l'écologie une prestation relative à la fourniture et la pose d'un système photovoltaïque et d'un micro onduleur pour un montant total de 22'500 euros, dans le cadre d'un démarchage à domicile, suivant bon de commande numéro 35 498.
Le même jour, aux fins de financer cet achat, M. [I] et Mme [H] [E], engagés solidairement, ont accepté une offre préalable de crédit affecté auprès de la société Cofidis d'un montant de 22'500 euros, remboursable en 120 mensualités, précédées d'un différé de paiement de 12 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 4,64 %.
Par jugement du 7 mai 2019, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la société Agence nationale pour l'écologie et désigné la SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], en qualité de liquidateur judiciaire de la société.
Par actes d'huissier de justice des 12 et 16 mars 2021, M. [I] et Mme [E] ont fait assigner en justice la société Cofidis et la SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Agence nationale pour l'écologie aux fins notamment de voir prononcer la nullité, et à titre subsidiaire la résolution des contrats de vente et de crédit affecté.
Par jugement réputé contradictoire du 1er juillet 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :
- déclaré recevable l'action de M. [I] et Mme [E],
- prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 12 janvier 2017 entre M. [I] et la société Agence nationale pour l'écologie sous le bon de commande numéro 35498,
- constaté la nullité du contrat de crédit affecté souscrit par M. [I] et Mme [E] auprès de la société Cofidis le 12 janvier 2017,
- condamné la société Cofidis à payer à M. [I] et Mme [E] la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de perte de chance,
- condamné solidairement M. [I] et Mme [E] à payer à la société Cofidis la somme de 7 585,33 euros selon décompte arrêté à la date du 8 février 2021, déduction faite de la somme de 6 000 euros due par la société Cofidis à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter la signification de la présente décision,
- dit que M. [I] et Mme [E] disposent d'une créance à l'encontre de la liquidation de la société Agence nationale pour l'écologie à hauteur de 22'500 euros,
- dit qu'il appartient à la SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS Agence nationale pour l'écologie de procéder à la dépose du matériel objet du bon de commande numéro 35498,
- dit qu'à compter de la clôture de la procédure collective de la SAS Agence nationale pour l'écologie et si la SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Agence nationale pour l'écologie, n'a pas procédé à la dépose du matériel, objet du bon de commande numéro 35498, M. [I] pourra alors disposer de ce matériel,
- mis les dépens de l'instance à la charge de la SAS Agence nationale pour l'écologie représentée par la SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Agence nationale pour l'écologie,
- mis à la charge de la SAS Agence nationale représentée par la SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], ès qualité de liquidateur judiciaire au profit de M. [I] et Mme [E] la somme de 850 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé à M. [I] et Mme [E] les dispositions de l'article L.622-24 alinéa 6 du code de commerce s'ils entendent voir mettre au passif de la procédure collective de la SAS Agence nationale pour l'écologie les créances postérieures allouées par le présent jugement,
- rejeté le surplus des demandes,
- dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire du présent jugement.
Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 22 mars 2022, la société Cofidis a relevé appel de l'ensemble des chefs de ce jugement.
Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 6 mars 2024, la société Cofidis demande à la cour de :
- confirmer le jugement dont appel sur la nullité des conventions et les fautes de la société Cofidis,
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté M. [I] et Mme [E] de leur demande de condamnation de la société Cofidis sur le fondement d'un prétendu manquement au devoir de mise en garde,
- infirmer le jugement sur les conséquences de la nullité des conventions,
- infirmer le jugement ce qu'il a condamné la société Cofidis à payer à M. [I] et Mme [E] la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement d'une prétendue perte de chance,
- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [I] et Mme [E] à payer à la société Cofidis la somme de 7 585,33 euros,
statuant à nouveau,
- condamner solidairement M. [I] et Mme [E] à rembourser à la société Cofidis la totalité du capital d'un montant de 22'500 euros au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées, en l'absence de préjudice et de lien de causalité,
- en tout état de cause,
- condamner solidairement M. [I] et Mme [E] à payer à la société Cofidis une indemnité d'un montant de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner solidairement M. [I] et Mme [E] aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par l'avocat soussigné par application de l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de leurs conclusions récapitulatives notifiées le 2 octobre 2023, M. [I] et Mme [E] demandent à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté M. [I] et Mme [E] de leurs demandes tendant à la condamnation des sociétés Cofidis et Agence nationale pour l'écologie à leur verser la somme de 5 000 euros au titre des frais de désinstallation et de remise en état de la toiture dans son état initial,
- débouté M. [I] et Mme [E] de leurs demandes tendant à la condamnation des sociétés Cofidis et Agence nationale pour l'écologie à leur verser la somme de 8 000 euros au titre de la réparation de leur préjudice financier et de trouble de jouissance,
- débouté M. [I] et Mme [E] de leurs demandes tendant à la condamnation des sociétés BNP Cofidis et Agence nationale pour l'écologie à leur verser la somme de 3 000 euros au titre de réparation de leur préjudice moral,
- limité la réparation du préjudice causé par la société Cofidis à la somme de 6 000 euros au lieu d'une privation totale de la restitution du capital emprunté,
- condamné solidairement M. [I] et Mme [E] à payer à la société Cofidis la somme de 7 585,33 euros, déduction faite de la somme de 6 000 euros due par la société Cofidis à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux lgal à compter de la signification du jugement,
- confirmer le jugement pour le surplus,
statuant à nouveau,
- déclarer que le contrat conclu entre M. [I] et Mme [E] et l'Agence nationale pour l'écologie est nul en raison de la violation des dispositions du droit de la consommation,
- déclarer que la société Agence nationale pour l'écologie a commis un dol à l'encontre de M. [I] et Mme [E],
- déclarer que la société Cofidis a délibérément participé au dol commis par la société Agence nationale pour l'écologie,
au surplus,
- déclarer que la société Cofidis a commis des fautes personnelles :
- en laissant prospérer l'activité de la société Agence nationale pour l'écologie par la fourniture de financements malgré les nombreux manquements de cette dernière qu'elle ne pouvait prétendre ignorer,
- en accordant des financements inappropriés s'agissant de travaux de construction,
- en manquant à ses obligations d'information et de conseil à l'égard de M. [I] et Mme [E],
- en délivrant les fonds à la société Agence nationale pour l'écologie sans s'assurer de l'achèvement des travaux,
- déclarer que les fautes commises par la société Cofidis ont causé un préjudice à M. [I] et Mme [E],
en conséquence,
- déclarer que la société Agence nationale pour l'écologie et Cofidis sont solidairement responsables de l'ensemble des conséquences de leur faute à l'égard de M. [I] et Mme [E],
- prononcer la nullité du contrat de vente liant M. [I] et Mme [E] à la société Agence nationale pour l'écologie,
- prononcer la nullité du contrat de crédit affecté liant M. [I] et Mme [E] et la société Cofidis,
- déclarer que la société Cofidis ne pourra se prévaloir des effets de l'annulation à l'égard des emprunteurs,
- ordonner le remboursement des sommes versées par M. [I] et Mme [E] à la société Cofidis au jour du jugement à intervenir, outre celles à venir, soit la somme de 34'418,84 euros, sauf à parfaire,
- condamner solidairement les sociétés Agence nationale pour l'écologies et Cofidis à payer 5 000 euros au titre des frais de désinstallation et de remise de la toiture dans son état initial à défaut de dépose spontanée,
- condamner la société Cofidis à verser à M. [I] et Mme [E] la somme de 8 000 euros au titre leur préjudice financier et du trouble de jouissance et 3000 euros au titre leur préjudice moral,
- dire qu'à défaut pour la société Agence nationale pour l'écologie de récupérer le matériel fourni dans un délai d'un mois à compter la signification du jugement, celui-ci sera définitivement acquis par M. [I] et Mme [E],
- condamner la société Agence nationale pour l'écologie à garantir M. [I] et Mme [E] de toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre,
- déclarer en toute hypothèse que la société Cofidis ne pourra se faire restituer les fonds auprès de M. [I] et Mme [E] mais devra nécessairement récupérer les sommes auprès de la société Agence nationale pour l'écologie, seule bénéficiaire des fonds débloqués eut égard au mécanisme de l'opération commerciale litigieuse,
- condamner solidairement les sociétés Agence nationale pour l'écologies et Cofidis au paiement des entiers dépens, outre 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum la société Agence nationale pour l'écologie et la société Cofidis, dans l'hypothèse ou à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir, une exécution forcée serait nécessaire, à supporter le montant des sommes retenues par huissier par application des articles 10 et 12 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 numéro 96/1080 relatifs aux tarifs des huissiers en application de l'article R.631-4 du code de la consommation,
- fixer les créances au passif de la liquidation de la société Agence nationale pour l'écologie.
La SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Agence nationale pour l'écologie n'a pas constitué avocat, ni conclu.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.
La clôture de l'affaire a été rendue le 20 mars 2024 et l'affaire plaidée à l'audience de la cour du 3 avril 2024.
MOTIFS
Sur la nullité du contrat de vente et la nullité subséquente du contrat de crédit
Au visa des articles L.221-5, L.221-9 et L.111-1 du code de la consommation, le premier juge a prononcé l'annulation du contrat de vente conclu entre M. [I] et la société Agence nationale pour l'écologie au motif qu'il est entaché d'irrégularités formelles au regard des dispositions du code de la consommation en matière de vente hors établissement, et a annulé en conséquence le contrat de crédit accessoire conclu entre M. [I], Mme [E] et la société Cofidis en application des dispositions de l'article L.312-55 du même code.
La cour constate que l'appelante demande la confirmation du jugement entrepris 'sur la nullité des conventions et les fautes de la société Cofidis', cependant que M. [I] et Mme [E] ne demandent l'infirmation du jugement qu'en ce qu'il les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts complémentaires afférents aux frais de remise en état, au trouble de jouissance et au préjudice moral, ainsi qu'en ce qu'il a limité la réparation du préjudice causé par la société Cofidis à la somme de 6 000 euros et les a en conséquence solidairement condamnés à payer à cette dernière la somme de 7 585,33 euros. Ils demandent la confirmation du jugement pour le surplus.
Dès lors, il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat de vente conclu le 12 janvier 2017 entre M. [I] et la société Agence nationale pour l'écologie au motif qu'il est entaché d'irrégularités formelles au regard des dispositions du code de la consommation en matière de vente hors établissement, et a annulé en conséquence le contrat de crédit accessoire conclu le même jour entre M. [I], Mme [E] et la société Cofidis en application des dispositions de l'article L.312-55 du même code.
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a :
- dit que M. [I] et Mme [E] disposent d'une créance à l'encontre de la liquidation de la société Agence nationale pour l'écologie à hauteur de 22'500 euros,
- dit qu'il appartient à la SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], ès qualité de mandataire liquidateur de la SAS Agence nationale pour l'écologie de procéder à la dépose du matériel objet du bon de commande numéro 35498,
- dit qu'à compter de la clôture de la procédure collective de la SAS Agence nationale pour l'écologie et si la SELAS MJS Partners en la personne de Me [L] [Y], ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS Agence nationale pour l'écologie, n'a pas procédé à la dépose du matériel objet du bon de commande numéro 35498, M. [I] pourra alors disposer de ce matériel.
Le contrat de vente étant annulé à raison de ses irrégularités formelles, il n'y a pas lieu d'examiner la demande de nullité pour dol formée par les intimés.
Sur conséquence de l'annulation du crédit accessoire
Il est l que les annulations prononcées entraînent en principe l remise des parties en l'état antérieur à l conclusion des contrats.
Il résulte des articles 1231-1 du code civil, L.311-31 et L.311-32 devenus L.312-48 et L.312-55 du code de l consommation que l'annulation du contrat de vente ou de prestation de services emporte celle du contrat et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute.
L'annulation du contrat de crédit emporte également pour le prêteur l'obligation de restituer les sommes déjà versées par l'emprunteur.
Il est constant que le prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de l régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur prouve avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
En l'espèce, le premier juge a relevé que l société Cofidis avait commis des fautes en débloquant les fonds le 14 juillet 2017 nonobstant les irrégularité affectant le bon de commande, alors qu'aucune démarche préalable administrative comme technique, n'était mentionnée comme ayant été finalisée et que l'attestation de conformité du Consuel n'était pas encore obtenue.
L société Cofidis ne conteste pas avoir commis ces fautes, mais soutient que M. [I] et Mme [E] n'ont subit aucun préjudice dès lors que l'installation a été mise en service et fonctionne parfaitement, que l'éventuel préjudice lié à l'impossibilité de récupérer le prix de vente sur la venderesse à raison de sa liquidation judiciaire n'a aucun de lien de causalité avec ses fautes lors du déblocage des fonds, et qu'elle n'est pas responsable du défaut de rentabilité de l'installation allégué.
M. [I] et Mme [E] font valoir que l banque doit être purement et simplement privée de sa créance dans l mesure où ils subissent un préjudice du fait de l'obligation de restituer le capital sans pouvoir se retourner contre l société venderesse à raison de sa liquidation judiciaire.
Toutefois, il n'existe aucun lien de causalité entre les fautes susvisées reprochées au prêteur et le préjudice, au demeurant hypothétique lié à l'impossibilité pour l'acquéreur d'obtenir l restitution du prix de vente auprès du vendeur, lequel est exclusivement l conséquence de l liquidation judiciaire de ce dernier.
De plus, il n'est pas contesté qu'une attestation de conformité de l'installation photovoltaïque a été délivrée par le Consuel le 11 juillet 2017 et que M. [I] a conclu un contrat de rachat d'électricité avec Electricité de France le 15 juin 2019, l'installation litigieuse ayant été effectivement mise en service et produisant de l'énergie. M. [I] et Mme [E], sur lesquels repose le fardeau de l preuve en application de l'article 9 du code de procédure civile, ne prouvent nullement que l'installation de panneaux photovoltaïques connaîtrait des dysfonctionnements (notamment en produisant un procès-verbal de constat d'huissier).
Par suite, il ne résulte d'aucun élément objectif du dossier que M. [I] et Mme [E] aient subi un préjudice corrélé aux fautes imputable à l société Cofidis dans le déblocage des fonds de telle manière que celle-ci ne peut être privée de sa créance de restitution.
En outre, M. [I] et Mme [E] affirment que l'installation ne produit pas les résultats promis l venderesse, que l banque s'est rendue complice d'un dol et a laissé prospérer l'activité de l société Agence nationale pour l'écologie malgré ses manquements qu'elle ne pouvaient ignorer. Cependant, ils ne résulte nullement du contrat de vente, ni d'aucun élément du dossier que le vendeur ait pris un quelconque engagement à l'égard de l'acheteur sur l rentabilité de l'installation et que cet élément était entrée dans le champs contractuel. Aucune faute ne saurait davantage être reprochée de ce chef à l banque.
Réformant le jugement entrepris, M. [I] et Mme [E] seront donc solidairement condamnés à rembourser à l société Cofidis l somme de 22 500 euros correspondant au capital emprunté, sous déduction de l'ensemble des sommes versées par eux en exécution du contrat de crédit affecté.
Sur l'obligation de mise en garde de l banque
M. [I] et Mme [E] invoquent également un manquement de l banque à son obligation de mise en garde à raison du caractère excessif du prêt au regard de leurs facultés de remboursement, ainsi qu'un manquement à son obligation de conseil, en acceptant de financer une installation ruineuse sans les informer sur le caractère illusoire du rendement de ladite installation.
L'article 1231-1 dispose que 'Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.'
Le banquier dispensateur de crédit est tenu à une obligation d'information, qui consiste à fournir à son cocontractant une information objective sur les caractéristiques du crédit et à lui remettre les conditions générales et particulières du contrat de crédit, permettant à l'emprunteur de s'engager en toute connaissance de cause.
Le banquier est également tenu à une obligation de mise en garde envers l'emprunteur profane.
Il est rappelé que cette obligation ne porte que sur l'inadaptation du prêt et le risque d'endettement qui résulte de l'octroi du prêt et non pas sur l'opportunité ou les risques de l'opération financée.
En effet, l banque dispensatrice de crédits n'a pas immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l'opportunité des opérations auxquelles il procède et n'est pas tenue, en cette qualité, d'une obligation de conseil envers l'emprunteur, sauf si elle en a pris l'engagement, ni d'une obligation de mise en garde sur les risques de l'opération financée.
Le devoir de mise en garde consiste donc à consentir un prêt adapté aux capacités financières de l'emprunteur et, le cas échéant, à l'alerter sur les risques de l'endettement né de l'octroi du prêt ; il implique l'obligation pour l banque de se renseigner sur les capacités financières de l'emprunteur pour l'alerter, si nécessaire, sur un risque d'endettement. Il incombe à l'emprunteur qui invoque un devoir de mise en garde de l banque à son égard de démontrer que les prêts n'étaient pas adaptés à sa situation financière et créaient un risque d'endettement contre lequel il devait être mis en garde.
En l'espèce, il n'est pas discuté que M. [I] et Mme [E] étaient des emprunteurs non-avertis.
Mais, d'une part, les emprunteurs ne détaillent aucun élément relatif à leur situation financière, se bornant à rappeler les principes directeurs en l matière.
D'autre part, il ressort de l fiche de dialogue signée par eux, corroborée par les pièces produites, que M. [I] et Mme [E] disposent d'un revenu mensuel de 4 400 euros, dont 1 600 euros de revenus locatifs, cependant qu'ils ne déclarent aucune charge particulière, et être propriétaires de leur logement. Les échéances mensuelles de l'emprunt sont d'un montant de 286,83 euros.
Il résulte de ces éléments que M. [I] et Mme [E] ne démontrent pas que le crédit affecté litigieux était inadapté à leur situation et créait un risque d'endettement sur lequel l banque aurait dû les mettre en garde, étant d'ailleurs observé qu'il n'est enregistré aucun incident de paiement dans le remboursement du crédit.
L banque n'était donc pas tenue à un devoir spécifique de mise en garde à leur égard, et M. [I] et Mme [E] seront donc déboutés de toutes demandes à ce titre.
Sur l demande de garantie de M. [I] et Mme [E] à l'encontre de l société Agence nationale pour l'écologie
Selon l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, l cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans l discussion.
L cour observe que dans le corps de leurs conclusions, aucun moyen n'est développé, ni fondement énoncé par M. [I] et Mme [E] afférents à leur demande de garantie.
Cette demande sera donc rejetée, ainsi que celle visant à voir déclarer que l société Cofidis ne pourra se faire restituer les fonds que par l société Agence nationale pour l'écologie.
Sur les demandes de dommages et intérêts au titre du préjudice financier, de jouissance et moral
Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à l loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
C'est par des motifs pertinents que l cour adopte que le premier juge a relevé que M. [I] et Mme [E] ne rapportaient pas l preuve de ce que leur niveau de vie avait été réduit, ni qu'ils auraient des problèmes de trésorerie à cause du crédit accessoire lequel est remboursé sans incident, ni que l'installation photovoltaïque présenterait un caractère inesthétique et occasionnerait des désordres, ni encore de ce qu'ils subiraient un préjudice moral, et les a débouté de leurs demandes de dommages et intérêts de ces chefs. Le jugement sera en conséquence confirmé sur ce point.
Sur les frais de désinstallation du matériel
Le préjudice indemnisable doit être actuel, direct et certain.
L société Agence nationale pour l'écologie ayant été placée en liquidation judiciaire, il est improbable que le mandataire demande l restitution du matériel, ce qui impliquerait pour lui l restitution du prix, de sorte que, malgré l'annulation du contrat de vente, M. [I] va demeurer propriétaire d'une installation produisant de l'électricité.
De plus, rien n'indique à ce jour que M. [I] et Mme [E] vont mener à bien l désinstallation de l centrale et l remise en état de l toiture dès lors que l nécessité d'enlever cette dernière n'est pas justifiée et alors qu'ils demandent par ailleurs à voir dire que le matériel leur sera définitivement acquis à défaut pour l société Agence nationale pour l'écologie de venir le récupérer.
Ajoutant au jugement déféré, M. [I] et Mme [E] seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts au titre de l désinstallation du matériel.
Sur les demandes accessoires
Les motifs du premier juge méritant d'être adoptés, les dispositions du jugement relatives aux dépens et à l'article 700 seront confirmées, sauf à préciser, s'agissant des condamnations prononcées contre l société Agence nationale pour l'écologie que, compte tenu de sa liquidation judiciaire, les dépens de première instance et l'indemnité procédurale de 850 euros obtenue par M. [I] et Mme [E] seront fixés au passif de l liquidation judiciaire de cette société.
Chaque partie succombant partiellement en appel, elles conserveront l charges de leurs dépens d'appel ainsi que de leurs frais irrépétibles non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS
L cour statuant par arrêt réputé contradictoire ;
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :
- condamné l société Cofidis à payer à M. [I] et Mme [E] l somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de perte de chance,
- condamné solidairement M. [I] et Mme [E] à payer à l société Cofidis l somme de 7 585,33 euros selon décompte arrêté à l date du 8 février 2021, déduction faite de l somme de 6 000 euros due par l société Cofidis à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter l signification de l présente décision,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant ;
Condamne solidairement M. [I] et Mme [E] à rembourser à l société Cofidis l somme de 22 500 euros augmentée des intérêts légaux à compter du présent arrêt, sous déduction de l'ensemble des sommes versées par eux en exécution du contrat de crédit affecté du 12 janvier 2017;
Déboute M. [I] de sa demande de dommages et intérêts au titre de l désinstallation du matériel ;
Déboute M. [I] et Mme [E] de leur demande de garantie ;
Dit que chaque parties conservera l charge de ses dépens et frais irrépétibles d'appel.
Le greffier
Ismérie CAPIEZ
Le président
Yves BENHAMOU