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13/06/2024 | FRANCE | N°21/05982

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 13 juin 2024, 21/05982


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 13/06/2024





N° de MINUTE : 24/509

N° RG 21/05982 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T7G6

Jugement (N° 21-00308) rendu le 13 Septembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Lille



APPELANT



Monsieur [R] [P]

né le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 8] - de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représenté par Me Jérémie Boulaire, avo

cat au barreau de Douai, avocat constitué





INTIMÉES



SELARLU [O] représentée par Maître [K] [O] exerçant au [Adresse 4] ès qualité de mandataire ad hoc de la Sarl HAB 26

[...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 13/06/2024

N° de MINUTE : 24/509

N° RG 21/05982 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T7G6

Jugement (N° 21-00308) rendu le 13 Septembre 2021 par le Juge des contentieux de la protection de Lille

APPELANT

Monsieur [R] [P]

né le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 8] - de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Jérémie Boulaire, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

INTIMÉES

SELARLU [O] représentée par Maître [K] [O] exerçant au [Adresse 4] ès qualité de mandataire ad hoc de la Sarl HAB 26

[Adresse 7]

[Localité 6]

Défaillante, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 21 janvier 2022 par acte remis à personne morale

SA Cofidis venant aux droits de la SA Groupe Sofemo suite à une fusion absorption ayant effet au 1er octobre 2015

[Adresse 9]

[Localité 5]

Représentée par Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

SARL HAB 26 prise en la personne de son représentant légal domicilié en

cette qualité audit siège.

[Adresse 7]

[Localité 6]

Défaillante, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 21 janvier 2022 par acte remis à personne habilitée

DÉBATS à l'audience publique du 03 avril 2024 tenue par Catherine Ménegaire magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Samuel Vitse, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 13 juin 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 20 MARS 2024

EXPOSE DU LITIGE

Le 15 décembre 2011, M. [R] [P] a contracté auprès de la SARL H.A.B 26 exerçant sous l'enseigne commerciale 'Système électricité solaire' une prestation relative à l'installation d'un système photovoltaïque pour un montant de 35'237 euros TTC, dans le cadre d'un démarchage à domicile, selon bon de commande numéro 9011.

Le même jour, afin de financer cet achat, M. [R] [P] a accepté une offre préalable de crédit affecté auprès de la société groupe Sofemo exerçant sous la marque ' Sofemo financement'd'un montant de 35'237 euros, remboursable en 131 mensualités, précédées d'un différé de paiement de 11 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 6,48 %.

Suivant jugement du 15 mars 2015, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la société H.A.B 26. Suivant jugement du 15 décembre 2015, la société H.A.B 26 a fait l'objet d'une clôture pour insuffisance d'actifs.

Par ordonnance du président du tribunal de commerce de Lyon du 17 décembre 2019, la SELARLU [O] prise en la personne de Me [K] [O] a été désigné en qualité de mandataire ad'hoc de la société H.A.B 26.

Par acte d'huissier de justice en date 15 et 19 janvier 2021, M. [R] [P] a fait assigner en justice la SELARLU [O] ès qualité et la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.

Par jugement réputé contradictoire du 13 septembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille a :

- déclaré prescrite l'action en nullité du contrat de vente souscrit le 15 décembre 2011 avec la société H.A.B 26 exerçant sous l'enseigne commerciale 'Système électricité solaire' et du contrat de crédit affecté le 15 décembre 2011 avec la société 'groupe Cofidis exerçant sous la marque Sofemo financement',

- déclaré prescrite l'action en déchéance du droit aux intérêts de la société 'groupe Cofidis exerçant sous la marque Sofemo financement', s'agissant du contrat de crédit affecté du 15 décembre 2011 conclu avec M. [R] [P],

- condamné M. [R] [P] aux dépens de l'instance,

- condamné M. [R] [P] à payer à la société Cofidis la somme de 850 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'exécution provisoire de droit.

Par déclaration reçue par le greffe de la cour le 29 novembre 2021, M. [R] [P] a relevé appel de l'ensemble des chefs de ce jugement, sauf en ses dispositions relatives à l'exécution provisoire. Il a signifié sa déclaration d'appel à la SELARLU [O] représentée par Me [K] [O], ès qualité de mandataire ad' hoc de la société H.A.B 26 par acte d'huissier de justice délivrée le 21 janvier 2022 à personne.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives notifiées le 7 mars 2024, l'appelant demande à la cour de :

Vu l'article liminaire du code de la consommation,

vu les anciens articles 1109 et 1116 du code civil,

vu l'article 16 de la loi n°2012-354 du 14 mars 2012 de finance rectificative pour 2012,

vu les articles L.121-23 à L.123-26 du code de la consommation dans leur rédaction issue de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993,

vu l'article L.121-28, tel qu'issu de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- déclaré prescrite l'action en nullité du contrat de vente souscrit le 15 décembre 2011 avec la société H.A.B 26 exerçant sous l'enseigne commerciale 'Système électricité solaire' et du contrat de crédit affecté le 15 décembre 2011 avec la société 'groupe Cofidis exerçant sous la marque Sofemo financement',

- déclaré prescrite l'action déchéance du droit aux intérêts de la société 'groupe Cofidis exerçant sous la marque Sofemo financement', s'agissant du contrat de crédit affecté du 15 décembre 2011 conclu avec M. [R] [P],

- condamné M. [R] [P] aux dépens de l'instance,

- condamné M. [R] [P] à payer à la société Cofidis la somme de 850 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau et y ajoutant,

- déclarer les demandes de M. [R] [P] recevables et bien fondées,

- prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre M. [R] [P] et la société H.A.B 26,

- prononcer en conséquence la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre M. [R] [P] et la société Cofidis, venant aux droits de la société Groupe Sofemo,

- constater que la société Cofidis a commis une faute dans le déblocage des fonds ;

- constater que la société Cofidis doit être privée de sa créance de restitution du capital emprunté, et la condamner à procéder au remboursement de l'ensemble des sommes versées par M. [R] [P] au titre de l'exécution normale du contrat de prêt litigieux,

- condamner la société Cofidis à verser à M. [R] [P] l'intégralité des sommes suivantes :

- 35 237 euros correspondant intégralité du prix de vente de l'installation,

- 16 414,60 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés par M. [R] [P] en exécution du prêt souscrit,

- 5 000 euros au titre du préjudice moral,

- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- En tout état de cause, prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels à l'encontre de la société Cofidis, venant aux droits de la société Groupe Sofemo,

- débouter la société Cofidis de l'intégralité ses prétentions fins et conclusions contraires,

- condamner la société Cofidis à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 10 novembre 2022, la société Cofidis demande à la cour de :

- déclarer M. [R] [P] irrecevable et subsidiairement mal fondé en ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

à titre subsidiaire, si la cour venait à déclarer M. [R] [P] recevable et bien fondé en ses demandes,

- condamner la société Cofidis au remboursement des seuls intérêts perçus, le capital remboursé par anticipation lui restant définitivement acquis, en l'absence de faute et en toute hypothèse en l'absence de préjudice et de lien de causalité,

en tout état de cause,

- condamner M. [R] [P] à payer à la société Cofidis une indemnité d'un montant de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [R] [P] aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par l'avocat soussigné en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La SELARLU [O], représentée par Me [K] [O], ès qualité de mandataire ad' hoc de la société H.A.B 26 n'a pas constitué avocat ni conclu.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens.

La clôture de l'affaire a été rendue le 20 mars 2024 et l'affaire plaidée à l'audience de la cour du 3 avril 2024.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes en nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté

M. [R] [P] sollicite la nullité du contrat de vente conclu avec la société la société H.A.B 26 au motif qu'il comporte des irrégularités au regard des dispositions du code de la consommation en matière de vente hors établissement et à raison d'un prétendu dol commis par la société venderesse, qui l'aurait trompé en lui promettant l'autofinancement de l'installation photovoltaïque. Il demande la nullité subséquente du contrat de crédit en application des dispositions de l'article L.311-32 du code de la consommation dans sa version issue de la loi n° 2010-137 du 1er juillet 2010.

La société Cofidis, au visa des articles 2224 et suivant du code civil oppose la prescription de ces demandes.

L'article 2224 du code civil dispose que 'les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.'

Aux termes des dispositions de l'article 1304 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n°2007-308 du 5 mars 2007 , l'action en nullité doit être exercée dans le délai de cinq ans à compter de la découverte du dol ou de l'erreur.

La découverte du dol allégué doit être considéré comme acquise à réception de la première facture annuelle d'électricité. En effet, l'acheteur pouvaient parfaitement se rendre compte dès cette date, par un simple calcul du coût annuel du crédit et en le comparant au montant de la première facture annuelle de revente d'électricité, que l'installation ne pourrait pas s'autofinancer. En l'espèce, la plus ancienne facture d'électricité d'un montant de 1 972,90 euros produite aux débats par l'acheteur date du 5 avril 2014.

Dès lors, l'action en nullité pour dol engagée par assignation du 19 janvier 2021, plus de cinq ans après le 5 avril 2014 est manifestement prescrite.

En second lieu, le délai de prescription de l'action en nullité fondée sur le non-respect des dispositions du code de la consommation, à raison d'irrégularités formelles du contrat qui, à les supposer avérées, étaient visibles par le contractant à la date de la conclusion du contrat, court à compter de cette date. L'acheteur ne peut invoquer une méconnaissance du droit applicable pour faire échec à cette prescription, alors que les conditions générales de vente portées au verso du bon de commande litigieux reproduisaient les dispositions des textes applicables en matière de vente hors établissement, et que M. [R] [P] était dès lors en mesure de vérifier par lui-même si le bon de commande était conforme aux dispositions du code de la consommation.

Le contrat de vente ayant été signé le 15 décembre 2011, l'action en nullité formée sur le fondement des irrégularités formelle de l'acte par M. [R] [P] suivant assignation en date du 19 janvier 2021 est également prescrite.

Dès lors que la demande de nullité du contrat de vente n'est pas recevable, il suit que la demande de nullité du contrat de crédit affecté conclu avec la société Cofidis venant aux droits de la société Groupe Sofemo, formée en conséquence de la nullité du contrat de vente en application de l'article L. 311-32 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-137 du 1er juillet 2010 est également irrecevable.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables car prescrites les demandes de nullité du contrat de vente et du contrat de crédit affecté formées par M. [R] [P].

En l'absence de nullité des contrats de vente et de crédit, il n'y a pas lieu à restitution entre les parties.

Dès lors, les demandes de M. [R] [P] visant à voir priver la société Cofidis de sa créance de restitution à raison des fautes prétendument commises par elle et à se voir rembourser l'intégralité des sommes qu'ils aurait prétenduement versées en exécution du crédit, à savoir l'intégralité du capital prêté et les intérêts conventionnels, sont sans objet.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral

L'appelant sollicitent la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral résultant des fautes commises par la banque dans le déblocage des fonds.

Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

En l'espèce, à supposer même que la demande de dommages et intérêts ne soit pas prescrite, voire que la banque ait commis des fautes lors du déblocage des fonds, force est de constater que M. [R] [P] ne qualifie ni ne démontre aucunement l'existence d'un préjudice moral imputable à la banque, aucune pièce justificative d'un tel préjudice n'étant versée aux débats.

Il sera en conséquence débouté de sa demande à ce titre.

Sur la demande de déchéance du droit aux intérêts du prêteur

Au visa de l'article L.312-14 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, M. [R] [P] demande que la société Cofidis soit déchue de son droit aux intérêts au motif qu'elle a manqué à son 'devoir de conseil et de mise en garde' quant à l'opportunité économique du projet et son caractère ruineux, et n'a pas vérifié les capacités financières de l'emprunteur. Il fait également valoir au visa des article L.311-8 issu de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et D.311-4-3 issu de décret n° 2011-1871 du 13 décembre 2011, que la société Cofidis n'apporte pas la preuve que le crédit a été distribué par un professionnel qualifié, ni qu'elle a consulté le fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) lors de la conclusion du contrat de crédit.

A titre liminaire, le contrat de crédit ayant été conclu le 15 décembre 2011, il y a lieu d'appliquer les dispositions du code de la consommation issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010.

Selon l'article L.311-48 alinéa 2 du code de la consommation applicable à la date de conclusions du contrat de crédit, lorsque le prêteur n'a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

L'article L. 311-8 du code de la consommation (et non L.312-24 du même code) applicable à la date de conclusion du crédit dispose :

'Le prêteur ou l'intermédiaire de crédit fournit à l'emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit proposé est adapté à ses besoins et à sa situation financière, notamment à partir des informations contenues dans la fiche mentionnée à l'article L. 311-6. Il attire l'attention de l'emprunteur sur les caractéristiques essentielles du ou des crédits proposés et sur les conséquences que ces crédits peuvent avoir sur sa situation financière, y compris en cas de défaut de paiement. Ces informations sont données, le cas échéant, sur la base des préférences exprimées par l'emprunteur.

Lorsque le crédit est proposé sur un lieu de vente, le prêteur veille à ce que l'emprunteur reçoive ces explications de manière complète et appropriée sur le lieu même de la vente, dans des conditions garantissant la confidentialité des échanges.

Les personnes chargées de fournir à l'emprunteur les explications sur le crédit proposé et de recueillir les informations nécessaires à l'établissement de la fiche prévue à l'article L. 311-10 sont formées à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement. L'employeur de ces personnes tient à disposition, à des fins de contrôle, l'attestation de formation mentionnée à l'article L. 6353-1 du code du travail établie par un des prêteurs dont les crédits sont proposés sur le lieu de vente ou par un organisme de formation enregistré'.

L'article D.311-4-3 du code de la consommation prévoit les exigences minimales auxquelles doit répondre cette formation.

L'article L.311-9 du même code dispose :

'Avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur, le prêteur consultant le fichier prévu à l'article L. 333-4, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5 du même code."

Par ailleurs, l'article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans du jour ou le titulaire d'un droit a connu ou aurait du connaître les faits qui lui permettent de l'exercer. En application de L.110-4 du code de commerce, l'action en déchéance du droit aux intérêts se prescrit par cinq ans à compter du jour ou l'emprunteur a connu ou aurait du connaître l'irrégularité qu'il invoque.

S'agissant de la demande de déchéance du droit aux intérêts à raison de la violation de l'article L.311-8 alinéa 1 du code de la consommation (absence d'explication sur l'adaptation du crédit aux besoin et la situation financière de l'emprunteur), la cour observe que M. [R] [P] a signé sous la mention suivante : 'Je reconnais avoir été informé du fait que les éléments fournis ici constituent la base d'acceptation de mon dossier par Sofemo. J'atteste avoir reçu les informations sur le crédit proposé, me permettant de déterminer s'il est adapté à mes besoins et à ma situation financière, conformément à l'article L.311-8 du code de la consommation.'

A supposer que, contrairement à cette mention, l'information n'ait pas été donnée comme le soutient M. [R] [P], ce dernier en a eu nécessairement connaissance dès la conclusion du contrat et la signature par lui de la mention susvisée, date à laquelle il convient en conséquence de fixer le point de départ de la prescription de cinq ans.

Dès lors, la demande de déchéance du prêteur du droit aux intérêts de ce chef, formée par conclusions en date du 21 juin 2021, soit plus de cinq ans après la conclusion du contrat, est prescrite.

En revanche, ce n'est qu'au cour de la procédure de première instance et au vue de la communication de pièces de la société Cofidis, que M. [R] [P] a pu prendre connaissance des manquements allégués de la banque à ses autres obligations, à savoir, le défaut de justification de la formation de la personne chargée de fournir à l'emprunteur les explications sur le crédit (article D.311-4-3 du code de la consommation), et le défaut de consultation du FICP (article L.311-9 du code de la consommation).

Les demandes de déchéance du droit aux intérêts de ces chef ne sont donc pas prescrites.

Le décret n° 2011-1871 du 13 décembre 2011 (article D.311-4-3) a laissé un délai jusqu'au 1er juillet 2012 pour le suivi de la formation de la personne chargée de fournir à l'emprunteur les explications sur le crédit qui lui était proposé. Dès lors, le contrat ayant été conclu le 15 décembre 2011, il ne peut être fait grief à la banque de ne pas avoir justifié de cette formation.

En revanche, s'il est manifeste que la banque a bien fait compléter aux emprunteurs la fiche de ressources et charges, elle ne justifie pas avoir consulté le FICP avant la conclusion du contrat, en violation de l'article L.311-9 du code de la consommation, en sorte qu'elle encourt la déchéance des intérêts, totale ou dans une proportion fixé par le juge.

Il résulte du dossier que le prêt a été remboursé partiellement par anticipation dès le 18 janvier 2013 par le versement par les emprunteurs d'une somme de 22 000 euros, puis définitivement remboursé le 10 juin 2016 par le versement d'une somme complémentaire de 11 986 euros, et qu'aucun incident de paiement n'est jamais survenu, ce qui démontre que les emprunteurs étant parfaitement solvables.

Dès lors, au regard du préjudice réellement subi par les emprunteur du fait de la non consultation du FICP, la banque sera déchue de son droit aux intérêts à hauteur de 200 euros. Le crédit étant intégralement remboursé, la banque sera donc condamnée à payer à M. [R] [P] la dite somme.

Sur les demandes accesoires

Les motifs du premier juge méritant d'être adoptés, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant principalement, M. [R] [P] sera condamné aux dépens d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Me Xavier Helain, avocat, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Il ne paraît pas inéquitable de le condamner à payer à la société Cofidis la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, et de le débouter de sa demande à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt réputé contradictoire ;

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a déclaré prescrite l'action en déchéance du droit aux intérêts de la société Cofidis ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant ;

Déclare les demandes en paiement formées par M. [Y] [Z] sans objet ;

Rejette la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral formée par M. [R] [P] ;

Déclare recevable l'action en déchéance de la société Cofidis au droit au intérêts formée par M. [R] [P];

Prononce la déchéance partielle de la société Cofidis de son droit aux intérêts contractuels à raison de la non justification de la consultation du Fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers ;

Condamne la société Cofidis à payer à M. [R] [P] la somme de 200

euros ;

Rejette la demande formée par M. [R] [P] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [R] [P] à payer à la société Cofidis la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [R] [P] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier

Ismérie CAPIEZ

Le président

Yves BENHAMOU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 21/05982
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;21.05982 ?
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