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16/05/2024 | FRANCE | N°23/03792

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 16 mai 2024, 23/03792


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 16/05/2024





****





N° de MINUTE :

N° RG 23/03792 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VB4M



Ordonnance n° 23-001629 rendue le 28 juillet 2023 par le juge délégué aux référés du tribunal de commerce de Douai





APPELANTE



SAS A4C Ingenierie prise en la personne de son représentant légal, la société Foursome, elle-même prise en la perso

nne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

représentée par Me Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 16/05/2024

****

N° de MINUTE :

N° RG 23/03792 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VB4M

Ordonnance n° 23-001629 rendue le 28 juillet 2023 par le juge délégué aux référés du tribunal de commerce de Douai

APPELANTE

SAS A4C Ingenierie prise en la personne de son représentant légal, la société Foursome, elle-même prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

représentée par Me Loïc Le Roy, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me Caroline Fauvage, avocat plaidant, substitué par Me Modeste Dagbo, avocats au barreau de Paris

INTIMÉE

SAS BC Ingenierie représentée par son dirigeant la société [F] Holding, représentée par M. [I] [F]

ayant son siège social [Adresse 2]

représentée par Me Laurent Hietter, avocat constitué, substitué par Me Sophie Eteve, avocats au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 31 janvier 2024 tenue par Dominique Gilles magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Dominique Gilles, président de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Aude Bubbe, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 16 mai 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 24 janvier 2024

****

Vu l'ordonnance de référé du 28 juillet 2023 du juge délégué par le président du tribunal de commerce de Douai, ayant débouté la société A4C ingénierie de sa demande en rétractation de l'ordonnance sur requête du 21 avril 2023 du président du tribunal de commerce de Douai qui a, selon les énonciations de cette ordonnance, ordonné une mesure d'instruction à la requête de la société BC ingénierie, désigné un commissaire de justice et deux experts informaticiens avec mission de se livrer à des investigations au siège social de la société A4C Ingénierie, à l'encontre de cette société, de M. [P] [O], de la société Studybelt, et de la société Foursome, à l'effet de se ménager la preuve d'actes en vue d'un procès futur éventuel, et ayant également rejeté les prétentions incidentes de la société A4C ingénierie, condamné celle-ci aux dépens et à verser 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la société BC ingénierie ;

Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par déclaration du 14 août 2023 de la société A4C ingénierie ;

Vu les dernières conclusions de la SAS A4C ingénierie notifiées et déposées par la voie électronique le 22 janvier 2024, sollicitant de la cour, au visa des articles 145, 1456 et 1565 du code de procédure civile, de :

- infirmer l'ordonnance entreprise ;

- rétracter l'ordonnance sur requête du 21 avril 2023 ;

- annuler les mesures d'investigation réalisées en exécution de cette ordonnance ;

- ordonner la restitution sous astreinte des données ;

- ordonner la communication sous astreinte de toutes les données sauvegardées et extraites ;

- ordonner la communication sous astreinte de tous les supports sur lesquels ces données ont été sauvegardées ainsi que des mesures prises pour assurer leur sécurité ;

- ordonner la suppression de ces données, au frais de la société BC Ingénierie, par une entreprise choisie par la concluante ;

- condamner la société BC Ingénierie à lui payer 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions de la SASU BC ingénierie notifiées et déposées par la voie électronique le 29 novembre 2023, sollicitant de la cour, au visa de l'article 496 du code de procédure civile, mais encore de « la requête et de l'ordonnance du 21 avril 2023 » de :

- confirmer l'ordonnance entreprise ;

- en tout état de cause :

- débouter la société A4C Ingénierie de ses demandes ;

- condamner celle-ci à payer 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus ;

L'ordonnance de clôture est du 24 janvier 2024.

SUR CE

La société BC Ingénierie expose avoir été autorisée par l'ordonnance entreprise à :

« - se rendre au siège social de la société A4C ingénierie 1 [Adresse 5].

A cette occasion, avec l'aide d'un expert informatique si nécessaire présent sur place ou à distance par téléphone ou en visio-assistance :

- Se faire remettre le ou les téléphones portables de la société A4C ingénierie et de Monsieur [P] [O] ;

- Se faire remettre le ou les ordinateurs de la société A4C ingénierie et de Monsieur [P] [O] ;

- Procéder à la récupération de l'ensemble des données figurant dans le ou les téléphones portables et dans le ou les ordinateurs de la société A4C ingénierie et de Monsieur [P] [O] et à leur sauvegarde sur tout support approprié ;

- Se faire communiquer la liste des mails, envoyés, reçus, supprimés, brouillons figurant sur les deux boites mails suivantes : [Courriel 4] et [Courriel 3] ;

- Procéder à une extraction des données contenues dans le téléphone portable dès lors que celles-ci contiennent des informations relatives à la société BC ingénierie ou des informations relatives à l'ensemble des clients de la société BC ingénierie selon liste figurant en pièce 13 annexée à la présente requête ;

- Procéder à une extraction de toutes les données, informations, messages, études, devis contenus dans l'ordinateur portable de Monsieur [P] [O], qui concernent la société BC ingénierie ainsi que les clients de la société BC ingénierie selon liste jointe en annexe 13 à la requête ;

- Qu'à défaut de réaliser cette extraction sur place, il soit autorisé à emporter le disque dur de l'ordinateur et le téléphone afin de procéder à une extraction en son étude, assisté de l'expert informatique si nécessaire.

- Se fasse autoriser à poser toutes questions utiles à Monsieur [P] [O] et plus précisément lui faire sommation de répondre aux questions suivantes :

o A compter de quelle date êtes-vous entré en contact avec la société Studybelt '

o Depuis quelle date avez-vous fourni des prestations de travail ou de service pour le compte de la société Studybelt '

o Confirmez-vous avoir procédé à une présentation commune au mois de septembre 2022 avec et pour le compte de la société Studybelt '

o Avant le 9 janvier 2023, avez-vous procédé à d'autres présentations communes ou de travaux en commun avec ou pour le compte de la société Studybelt '

o Avez-vous contacté des salariés de la société BC Ingénierie dans la perspective de leur proposer de travailler avec vous pour le compte de la société Studybelt '

o Êtes-vous en contact avec des sociétés, bureaux d'études, ou autres, tels qu'ils figurent sur la liste des clients de la société BC Ingénierie et tels qu'ils figurent en annexe 12 de la présente requête '

o Avez-vous effectué des travaux, prestations, études pour le compte de ces sociétés '

o Quels sont vos liens avec la société Foursome '

o Avez-vous procédé à la destruction de fichiers, d'emails, de documents, appartenant à la société BC Ingénierie et tels qu'ils figuraient dans l'ordinateur de la société BC ingénierie qui vous avait été confié ainsi que sur votre téléphone portable et ce, depuis le 10 septembre 2022 '

Pour ce faire, il est autorisé à se faire assister dans ses opérations par tout Expert informatique de son choix ainsi que d'un Commissaire de Police et d'un serrurier »,

L'ordonnance de référé entreprise a débouté la société A4C Ingénierie de sa demande, aux motifs que selon les constatations du commissaire de justice ayant dressé un procès-verbal le 16 mai 2023, sont établis des soupçons sur les modalités de développement de la clientèle de la société A4C Ingénierie créee par M. [O] avec éventuellement l'appui de la société Stydybelt, qu'en outre des documents, notamment des devis et un fichier de présentation propriété de la société BC Ingénierie n'ont pas été retrouvés après le départ de M. [L], d'où il résulte un motif légitime à rechercher auprès de la société A4C Ingénierie si cette dernière aurait pu recueillir et user d'éléments provenant de la société BC Ingénierie et transmis par M. [O], ces éléments étant de nature à éclairer un litige qui pourrait naître.

Concernant l'atteinte au principe de la contradiction, le premier juge a énoncé que compte tenu de la nature du litige et la nature des éléments visés par la mesure d'investigation contestée qui apparaissent particulièrement volatiles et pourraient être déplacés ou effacés par la société A4 Ingénierie si elle avait eu connaissance de la mesure demandée, il apparaît nécessaire que ces informations soient obtenues par surprise.

Concernant le périmètre de la mesure d'investigation, le premier juge a retenu qu'au vu du descriptif de la mission confiée au commissaire de justice instrumentaire, que celle-ci était suffisamment définie, les recherches étant circonscrites par des listes de clients, certaines adresses mail et aux propriétés et droits de la requérante.

En vertu de l'article 496 alinéa 2 du code de procédure civile, lorsqu'il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l'ordonnance sur requête.

La présente instance en référé a pour objet la demande en rétractation de l'ordonnance qui la concerne.

Dans le cadre du présent recours, la cour est investie du pouvoir du juge qui a statué sur cette la requête, et doit statuer sur les mérites de celle-ci, après débat contradictoire.

Selon les parties, il est constant que l'ordonnance sur requête a autorisé le commissaire de justice à :

'Procéder à la récupération de l'ensemble des données figurant dans le ou les téléphones portables et dans le ou les ordinateurs de la société A4C ingénierie et de Monsieur [P] [O] et à leur sauvegarde sur tout support approprié'.

Or, la société A4C Ingénierie conteste formellement le défaut d'intérêt légitime et soutient que les investigations ordonnées constituent une atteinte intolérable à ses droits.

Force est de constater que le chef de mission ci-dessus aboutit, quel que soit le surplus de définition des investigations autorisées, à des appréhensions de données sans limite qui, quelle que soit la rédaction de la requête justifie la rétractation de l'ordonnance sur requête.

Cependant, en vertu de l'article 494 du code civil, la requête doit être présentée en double exemplaire, être motivée et comporter l'indication précise des pièces invoquées.

Or, la société BC Ingénierie, requérante, ne produit nullement cette requête, ainsi qu'il résulte du bordereau des pièces justificatives annexé à ses présentes conclusions devant la cour.

En effet, la société BC Ingénierie se borne à produire :

- une assignation du 9 août 2023 ;

- le contrat de travail de M. [O] ;

- le contrat de travail et avenant de M. [S] ;

- la lettre de démission de M. [O] ;

- la lettre de démission de M. [S] ;

- la lettre de démission de M. [E] ;

- le rapport d'assistance à constat de M. [Z] du 25 mai 202, qui faut référence à une ordonnance de référence du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer étrangère à l'ordonnance sur requête en cause dans la présente instance ;

- le constat de Me [J] des 11 janvier et 30 janvier 2023, qui comporte 40 pages et ne précise pas de lien avec la présente ordonnance sur requête ;

- un mail du 20 janvier 2023 ;

- un mail à M. [O] du 14 février 2023 ;

- une attestation de M. [H] ;

- un tableau de chiffres d'affaires de la société BC Ingénierie ;

- la liste des clients de la société BC Ingénierie ;

- une ordonnance du 3 avril 2023 du président du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer ;

- les statuts de la société A4C Ingénierie ;

- des extraits Pappers des sociétés A4C Ingénierie, Fursome, Studybelt et AM Métallerie ;

- un procès verbal d'associé unique de la société A4M Métallerie ;

- le jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la société Stydybelt.

La société A4C Ingénierie, requise et appelante, n'a pas la charge de suppléer la requérante dans sa production de pièces, mais ne produit pas davantage la requête, ainsi qu'en atteste son propre bordereau de pièces justificatives.

Celle-ci produit en effet uniquement :

- des extraits Kbis et des statuts ;

- des bilans ;

- une lettre de la société ACMA ;

- des témoignages et attestations ;

- des profils Linkedln ;

- un procès verbal d'associé unique ;

- l'ordonnance entreprise.

L'ordonnance entreprise ne démontre pas davantage que le premier juge s'est assuré de la régularité de la saisine du juge de la requête.

La requête y est passée sous silence.

Le constat du 16 mai 2023 visé par l'ordonnance entreprise et postérieur à l'ordonnance sur requête n'est pas produit.

L'ordonnance du 21 avril 2023 ayant autorisé les mesures litigieuses n'est elle-même pas produite par les parties.

Alors que la société A4C Ingénierie conteste formellement le défaut d'intérêt légitime et soutient que les investigations ordonnées constituent une atteinte intolérable à ses droits, la cour n'est pas en possession des éléments lui permettant de vérifier que les mesures ont été ordonnées à bon escient en vertu d'une motivation valable, cohérente avec des pièces justificatives précisées à l'appui de la requête.

Il sera souligné que l'ordonnance entreprise est exclusivement motivée, quant à l'existence d'un motif légitime, à partir des éléments d'un procès-verbal de constat de commissaire de justice postérieur à l'ordonnance sur requête, et encore non produit dans le cadre de la présente instance.

Par conséquent, face à l'impossibilité pour la cour de s'assurer de la teneur de la requête en vertu de laquelle a été rendue l'ordonnance sur requête dont la rétractation est demandée, la rétractation s'impose de plus fort.

L'ordonnance entreprise sera réformée.

S'agissant des demandes d'annulation, de restitution et de communication des pièces saisies ou des supports, elles excèdent les pouvoirs du juge de la requête, de sorte qu'il n'y a pas lieu à référé de ce chef au sens de l'article 496 du code de procédure civile.

Les dépens seront mis à charge de la société BC Ingénierie qui succombe et qui, en équité, versera à la société A4C Ingéniérie une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile dont le montant sera précisé au dispositif de la présente décision.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Réforme l'ordonnance entreprise ;

Rétracte l'ordonnance sur requête du 21 avril 2023 ;

Condamne la société BC Ingénierie à payer 2 000 euros à la société A4 C Ingénierie au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit n'y avoir lieu à référé rétractation du chef des demandes plus amples de la société A4C Ingénierie ;

Condamne la société BC Ingénierie aux dépens ;

Le greffier

Valérie Roelofs

Le président

Dominique Gilles


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 23/03792
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;23.03792 ?
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