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16/05/2024 | FRANCE | N°23/03784

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 3, 16 mai 2024, 23/03784


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 8 SECTION 3



ARRÊT DU 16/05/2024







N° de MINUTE : 24/368

N° RG 23/03784 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VB3Z

Jugement (N° 23/00165) rendu le 02 Août 2023 par le Juge de l'exécution de Cambrai





APPELANTE



Madame [S] [W] épouse [N],

née le [Date naissance 2] 1983 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 4]



Rep

résentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assisté de Me Charles-Stéphane Marchiani, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant



INTIMÉ



Monsieur le Comptable Public en...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 16/05/2024

N° de MINUTE : 24/368

N° RG 23/03784 - N° Portalis DBVT-V-B7H-VB3Z

Jugement (N° 23/00165) rendu le 02 Août 2023 par le Juge de l'exécution de Cambrai

APPELANTE

Madame [S] [W] épouse [N],

née le [Date naissance 2] 1983 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué assisté de Me Charles-Stéphane Marchiani, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

INTIMÉ

Monsieur le Comptable Public en Charge du Pôle de Recouvrement Spécialisé du Nord

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Caroline Follet, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 28 mars 2024 tenue par Sylvie Collière magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Ismérie Capiez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sylvie Colliere, président de chambre

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 16 mai 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Catherine Ménegaire, conseiller pour le président empêché conformément aux dispositions de l'article 452 du cpc et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 26 mars 2024

EXPOSE DU LITIGE

Selon procès-verbal du 21 décembre 2022, la Direction générale des finances publiques - pôle de recouvrement spécialisé du Nord a fait saisir les cinquante parts sociales détenues par Mme [S] [W] épouse [N] dans la SARL Havas, pour le recouvrement de la somme de 1 730 670 euros, en vertu des neuf titres exécutoires suivants :

- Etat du 30 avril 2017 pour un montant de 27 029 euros au titre de l'impôt sur le revenu 2017;

- Etat du 30 avril 2017 pour un montant de 26 815 euros au titre de l'impôt sur le revenu 2017;

- Etat du 30 avril 2017 pour un montant de 22 118 euros au titre de l'impôt sur le revenu 2017;

- Etat du 30 avril 2018 pour un montant de 107 432 euros au titre de l'impôt sur le revenu 2018;

- Etat du 30 avril 2018 pour un montant de 709 768 euros au titre de l'impôt sur le revenu 2018;

- Etat du 30 avril 2018 pour un montant de 450 339 euros au titre de l'impôt sur le revenu 2018;

- Etat du 30 juin 2018 pour un montant de 34 224 euros au titre des contributions sociales 2018;

- Etat du 30 juin 2018 pour un montant de 216 922 euros au titre des contributions sociales 2018;

- Etat du 30 juin 2018 pour un montant de 148 523 euros au titre des contributions sociales 2018.

Cette saisie a été dénoncée à Mme [N] par acte du même jour.

Par lettre recommandée en date du 9 janvier 2023, Mme [N] a saisi l'administrateur général des finances publiques de la direction régionale des finances publiques des Hauts de France et du département du Nord d'une réclamation.

Par acte du 19 janvier 2023, Mme [N] a fait assigner M. le comptable public du pôle de recouvrement spécialisé du Nord (le comptable public) devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Cambrai aux fins de contester cette saisie.

Par jugement contradictoire du 2 août 2023, le juge de l'exécution a :

- déclaré l'action de Mme [N], tendant à l'annulation de la saisie opérée le 21 décembre 2022, irrecevable ;

- condamné Mme [N] à payer au comptable public la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [N] aux entiers dépens ;

- rappelé que l'exécution provisoire de la décision est de droit.

Par déclaration adressée par la voie électronique le 11 août 2023, Mme [N] a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.

Aux termes de ses dernières conclusions du 29 septembre 2023, elle demande à la cour, au visa des articles R. 232-6 du code des procédures civiles d'exécution,

L. 54 et L. 54 A du livre des procédures fiscales, de :

- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Par l'effet dévolutif de l'appel,

- juger recevable sa contestation contre la saisie du 21 décembre 2022 ;

- juger insaisissables les droits d'associée et les valeurs mobilières qu'elle détient dans la société Havas ;

En conséquence,

- annuler la saisie du 21 décembre 2022 ;

- condamner le comptable public du PRS Nord aux entiers dépens ;

- condamner le comptable public du PRS Nord à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 8 février 2024, les conclusions du comptable public du 2 février 2024 ont été déclarées irrecevables.

A la demande de la cour, Mme [W] a produit le 25 mars 2024, la réponse apportée à sa contestation par le directeur régional des finances publiques par courrier du 10 février 2023.

MOTIFS

L'intimé dont les conclusions sont déclarées irrecevables est réputé ne pas avoir conclu et s'être approprié les motifs du jugement attaqué.

Sur la recevabilité de la contestation de Mme [N]

L'article L. 281, 1°, du livre des procédures fiscales dispose que :

'Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites.

Lorsque les contestations portent sur le recouvrement de créances détenues par les établissements publics de l'Etat, par un de ses groupements d'intérêt public ou par les autorités publiques indépendantes, dotés d'un agent comptable, ces contestations sont adressées à l'ordonnateur de l'établissement public, du groupement d'intérêt public ou de l'autorité publique indépendante pour le compte duquel l'agent comptable a exercé ces poursuites.

Les contestations relatives au recouvrement ne peuvent pas remettre en cause le bien-fondé de la créance. Elles peuvent porter :

1° Sur la régularité en la forme de l'acte ;

2° A l'exclusion des amendes et condamnations pécuniaires, sur l'obligation au paiement, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués et sur l'exigibilité de la somme réclamée.

Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés dans le cas prévu au 1° devant le juge de l'exécution. Dans les cas prévus au 2°, ils sont portés:

a) Pour les créances fiscales, devant le juge de l'impôt prévu à l'article L. 199 ;

b) Pour les créances non fiscales de l'Etat, des établissements publics de l'Etat, de ses groupements d'intérêt public et des autorités publiques indépendantes, dotés d'un agent comptable, devant le juge de droit commun selon la nature de la créance ;

c) Pour les créances non fiscales des collectivités territoriales, des établissements publics locaux et des établissements publics de santé, devant le juge de l'exécution.'

La procédure de recours préalable est réglementée par les articles R. 281-1 à R. 281-5 du livre des procédures fiscales.

L'article R. 281-4 de ce livre précise que :

'Le chef de service ou l'ordonnateur mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 281 se prononce dans un délai de deux mois à partir du dépôt de la demande, dont il doit accuser réception.

(...)

Si aucune décision n'a été prise dans ce délai ou si la décision rendue ne lui donne pas satisfaction, le redevable ou la personne tenue solidairement ou conjointement doit, à peine de forclusion, porter l'affaire devant le juge compétent tel qu'il est défini à l'article L. 281. Il dispose pour cela de deux mois à partir :

a) soit de la notification de la décision du chef de service ou de l'ordonnateur mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 281 ;

b) soit de l'expiration du délai de deux mois accordé au chef de service ou à l'ordonnateur mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 281 pour prendre sa décision.

La procédure ne peut, à peine d'irrecevabilité, être engagée avant ces dates.'

En l'espèce, l'acte de dénonciation du 21 décembre 2022 mentionne en page 2 que : ' toute contestation relative au présent acte doit être présentée dans les conditions prévues au verso du présent acte et que le délai de contestation expirera :

- contestation de la saisissabilité des titres le 21 janvier 2023

- contestation du présent acte le 21 février 2023'

Il indique par ailleurs en page 3 sous le titre 'modalités de contestation' :

'En cas de contestation, il convient de saisir :

LE CHEF DU SERVICE DU DÉPARTEMENT désigné ci-dessous :

- pour toute contestation relative au présent acte, à compter de sa signification dans un délai de de (suit la mention des délais selon la nature de la créance fiscale) ;

- pour toute contestation relative à la propriété des biens saisis (suit la mention du délai) ;

LE JUGE DE L'EXECUTION désigné ci-dessous :

- dans le délai d'un mois pour toute contestation relative à la saisissabilité des biens compris dans la présente saisie et ne remettant pas en cause leur propriété, quelle que soit la nature de la créance réclamée (...).

Il en résulte que les contestations portant sur la saisissabilité des biens n'entrent pas dans le champ d'application de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales et que le redevable peut saisir directement le juge de l'exécution dans les conditions prévues par le code des procédures civiles d'exécution

En l'espèce, Mme [N] a saisi le juge de l'exécution de sa contestation relative à la saisissabilité de ses parts sociales le 19 janvier 2023, soit dans le délai d'un mois mentionné dans l'acte de dénonciation du 21 décembre 2022. Sa contestation est donc recevable, sans qu'il puisse lui être reproché de ne pas avoir respecté les dispositions de l'article R. 281-4 du livre des procédures fiscales en saisissant le juge de l'exécution de manière prématurée.

Il convient donc d'infirmer le jugement déféré.

Sur la contestation :

A la suite du recours porté devant lui par Mme [N] par courrier du 9 janvier 2023, le directeur régional des finances publiques, a, par lettre du 10 février 2023, indiqué à cette dernière qu'il faisait droit à sa contestation portant sur l'irrégularité formelle de l'acte de saisie et en informait le PRS du Nord pour annulation de la procédure de saisie des droits d'associés et de valeurs mobilières entre les mains de la SARL Havas.

Aucun acte n'étant produit pour justifier de l'annulation de la saisie, effectuée par le PRS du Nord consécutivement à l'information reçue, il convient d'accueillir la demande de Mme [N] tendant à cette fin, peu important que cette demande soit fondée sur un autre moyen que celui retenu par l'administration fiscale.

Sur les frais du procès :

La solution donnée au litige conduit à infirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles, à condamner le comptable public aux dépens de première instance et à le débouter de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante en appel, le comptable public sera condamné aux dépens.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de Mme [N] les frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Déclare recevable la contestation formée par Mme [S] [W] épouse [N] à l'encontre de la saisie du 21 décembre 2022 ;

Annule la saisie pratiquée par procès-verbal du 21 décembre 2022 ;

Déboute M. le comptable public du Pôle recouvrement spécialisé du Nord de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile en première

instance ;

Déboute Mme [S] [W] épouse [N] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de l'appel ;

Condamne M. le comptable public du pôle de recouvrement spécialisé du Nord aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, Pour le président empêché,

L'un des conseillers ayant délibéré

(article 456 cpc)

Ismérie CAPIEZ Catherine MENEGAIRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 3
Numéro d'arrêt : 23/03784
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;23.03784 ?
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