République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 11/04/2024
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N° de MINUTE :
N° RG 22/05214 - N° Portalis DBVT-V-B7G-USVG
Ordonnance 282 (N°2027/943-1) rendue le 14 octobre 2022 par le juge commissaire de Lille Métropole
APPELANTE
SAS JV la Française prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
ayant son siège social, [Adresse 4]
représentée par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assistée de Me Alexandrine Guillaume, avocat au barreau de Caen, avocat plaidant
INTIMÉES
SAS Jean Caby, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège agissant en qualité de représentant des droits propres de Jean Caby
ayant son siège social, [Adresse 2]
SCP Alpha MJ prise en la personne de Maître [V] [D], en qualité de mandataire ad hoc de la société Jean Caby.
ayant son siège social, [Adresse 1]
représentées par Me Nicolas Nef Naf, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, substitué par Me Eloise Lacroix, avocat au barreau de Paris
assistées de Mes Marine Simonnot et Thierry Monteran, avocats plaidants, substitués par Me Eloise Lacroix, avocats au barreau de Paris
SELAS MJS Partners prise en la personne de Maître [P] [N] en qualité de co-liquidateur judiciaire de la société SAS Jean Caby désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole en date du 27 juin 2018.
ayant son siège social, [Adresse 5]
SCP BTSG² prise en la personne de Maître [I] [O] désigné aux lieu et place de la SELARL MJ Valem par ordonnance du 10 mai 2022, en qualité de co-liquidateur judiciaire de la société SAS Jean Caby désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole en date du 27 juin 2018.
ayant son siège social, [Adresse 3]
représentées par Me Nicolas Nef Naf, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, substitué par Me Éloïse Lacroix, avocat au barreau de Paris
DÉBATS à l'audience publique du 23 janvier 2024 tenue par Nadia Cordier, magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Stéphanie Barbot, présidente de chambre
Nadia Cordier, conseiller
Anne Soreau, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 11 avril 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Stéphanie Barbot, présidente et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 9 janvier 2024
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FAITS ET PROCEDURE
La société JV La Française (la société JV) est une société notamment spécialisée dans la vente de fours de marque Schröter et leur maintenance en continu.
Le 27 juin 2016, pour les besoins de son activité et notamment la construction de sa nouvelle usine de production, la société Jean Caby a conclu avec la société JV un contrat portant sur deux fours tunnels de la marque précitée pour un prix de 3 650 000 euros HT.
Les fours ont été livrés sur site les 2 novembre 2016 et 22 février 2017, puis installés, la société Jean Caby respectant jusqu'à cette date l'échéancier convenu entre les parties pour le règlement du prix.
Par jugement du 4 décembre 2017, le tribunal de commerce de Lille Métropole a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Jean Caby, désignant la SELARL Ajilink en qualité d'administrateur judiciaire et la SELARL MJ Valem et la SELAS MJS Partners en qualité de mandataires judiciaires.
Les deux dernières échéances du contrat n'ont pas été réglées.
Le 14 décembre 2017, la société JV a déclaré au passif sa créance à titre chirographaire. Par une déclaration rectificative du 13 février 2018, elle a ramené la somme déclarée au montant de 748 021,08 euros, pour tenir compte d'imputations omises lors de la première déclaration.
Le 27 juin 2018, le tribunal de commerce de Lille Métropole a converti le redressement judiciaire en liquidation judiciaire, la société MJS Partners et la société MJ Valem, depuis remplacée par la société BTSG ², ayant été nommées liquidateurs.
Une contestation de la créance a été formulée par la débitrice, la société JV contestant avoir été informée de la contestation et sollicitant une convocation devant le juge-commissaire par courrier des 24 décembre 2021 et 22 juin 2022.
Le créancier n'a pas été convoqué à l'audience du juge-commissaire, lequel, par ordonnance du 14 octobre 2022, a rejeté en totalité la créance déclarée.
Par déclaration d'appel du 9 novembre 2022, la société JV a interjeté appel de l'ordonnance du juge commissaire.
PRETENTIONS
Par conclusions signifiées le 9 janvier 2024, la société JV demande à la cour de :
- déclarer la société JV recevable en son appel ;
- déclarer la SCP Alpha mandataires judiciaires, prise en la personne de Me [D], en qualité de mandataire ad'hoc de la SAS Jean Caby, la SCP BTSG prise en la personne de Me [O], et la SELARL MJS Partners, prise en la personne de Me [N], en qualité de liquidateurs de la SAS Jean Caby irrecevable au titre de leur demande subsidiaire visant à juger qu'il existe une contestation sérieuse et inviter l'une des parties à saisir la juridiction compétente ;
- réformer en totalité la décision rendue par le juge-commissaire dans son ordonnance en date du 14 octobre 2022 en ce qu'elle a rejeté en totalité la créance déclarée au passif de la procédure collective de la société Jean Caby ;
- et statuant à nouveau,
- admettre la créance de la société JV au passif de la liquidation judiciaire de la société Jean Caby pour un montant de 748 021,08 € avec intérêts à hauteur de 3 fois le taux d'intérêt légal à titre chirographaire ;
- débouter la SCP Alpha mandataires judiciaires, prise en la personne de Me [D], ès qualités de mandataire ad'hoc de la SAS Jean Caby, la SCP BTSG prise en la personne de Me [O], et la SELARL MJS Partners, prise en la personne de Me [N], en qualité de liquidateurs de la SAS Jean Caby, de toute demandes, fins et conclusions ;
- condamner la SCP Alpha mandataires judiciaires, prise en la personne de Me [D], en qualité de mandataire ad'hoc de la SAS Jean Caby, la SCP BTSG prise en la personne de Me [O], et la SELARL MJS Partners, prise en la personne de Me [N], en qualité de liquidateurs de la SAS Jean Caby in solidum à verser à la société JV la somme de 2 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la SCP Alpha mandataires judiciaires, prise en la personne de Me [D], en qualité de mandataire ad'hoc de la SAS Jean Caby, la SCP BTSG prise en la personne de Me [O], et la SELARL MJS Partners, prise en la personne de Me [N], en qualité de liquidateurs de la SAS Jean Caby in solidum aux entiers dépens de l'instance y compris ce de première instance.
La société JV rappelle que la preuve de la date de réception du courrier de contestation incombe au mandataire de justice et conteste avoir reçu le moindre courrier. Son appel ne peut qu'être déclaré recevable.
Elle souligne que la créance déclarée correspond aux deux dernières échéances impayées du contrat de vente, ainsi qu'à plusieurs prestations de maintenances effectuées dans l'ancienne usine de la société avant l'ouverture de la procédure collective. Elle précise avoir adressé l'ensemble des justificatifs.
Elle s'oppose à l'objection de la société Jean Caby selon laquelle, en l'absence de justification de la réalisation des deux dernières étapes (mise en service et réception du matériel), elle ne peut prétendre au règlement des deux dernières échéances conditionnées à la réalisation de ces deux évènements. Elle estime que le contrat conclu entre les parties doit être qualifié de vente à tempérament ou à crédit, le paiement du prix étant échelonné dans le temps et non conditionné à la réalisation d'un certain nombre d'évènements qui n'affectent pas l'existence de la créance.
Elle objecte que l'ouverture de la liquidation judiciaire entraînant la déchéance du terme des créances à échoir, elle est parfaitement fondée à voir admettre au passif de la procédure la totalité de la créance du prix de vente des machines dont l'exigibilité était soumise à la réalisation d'évènements postérieurs. Elle rappelle que les évènements (mise en service et réception du matériel) ne pourront plus se réaliser du fait du prononcé de la société Jean Caby en redressement, puis en liquidation judiciaire.
Elle réplique aux arguments de la société Jean Caby qu'il est parfaitement normal que les conventions de mises à disposition du personnel ne soient pas signées par la société Jean Caby, puisqu'elles lient la société Shröter à la société JV et que le planning était respecté. Seul le redressement judiciaire puis la liquidation de la société Jean Caby, demandés par cette dernière, ont empêché la réalisation des conditions, si bien qu'en application des dispositions de l'article 1304-3 du code civil, ces dernières devront être réputées accomplies. Elle revient sur le fait que l'administrateur judiciaire n'a jamais été en mesure de l'autoriser à finaliser la prestation en raison de l'arrêt total du chantier au vu de l'orientation de cette procédure collective en « cession quasi-immédiate ».
Au visa de l'article 564 du code de procédure civile, elle estime que la demande des intimés en présence de contestations sérieuses visant à voir saisie la juridiction compétente est irrecevable.
Concernant la créance correspondant à la location des matériels intervenus entre octobre et novembre 2017 pour un montant de 6 579,68 euros, elle indique produire les justificatifs nécessaires. Elle conteste qu'une partie des factures serait postérieure à l'ouverture de la procédure, les factures visant à tenir compte d'avoirs ou du coût de la location prorata temporis compte tenu de l'ouverture de la procédure collective début décembre 2017.
Elle ajoute que la société Jean Caby avait donné son accord au surcoût lié à la fermeture du chantier. Sont également versés aux débats les bons de commande émis par la société Jean Caby, les devis et bons de livraisons visés dans les factures pour les diverses pièces nécessaires.
Elle s'estime bien fondée à solliciter l'admission de la créance de frais forfaitaires de recouvrement.
Par conclusions signifiées le 6 janvier 2024, la société Jean Caby, au titre de ses droits propres, la SELAS MJS Partners et la SCP BTSG², en qualité de liquidateurs, et la société Alpha MJ en qualité de mandataire ad hoc de la société Jean Caby, demandent à la cour, au visa des articles L. 622-24, R. 622-23, L. 622-28, L. 624-5 du code de commerce, L. 624-2 du code de commerce, L. 631-1 et L. 641-1 du code de commerce, de l'article 9 du code de procédure civile, des articles 1353 et 1363 du code civil, de l'ordonnance du 25 août 1539 sur le fait de la justice (dite ordonnance de Villers-Cotterêts), de :
- prononcer la mise hors de cause de la SCP Alpha MJ,
- Sur la créance de 730 250 euros :
- juger que la société JV ne justifie pas du bien-fondé de la créance dont elle sollicite l'admission ;
- confirmer l'ordonnance du 14 octobre 2022 en ce qu'elle a rejeté la créance de la société JV ;
- Subsidiairement, dire et juger qu'il est opposé une contestation sérieuse au sens de l'article L. 624-2 du code de commerce et inviter l'une des parties à saisir les juridictions compétentes
-Sur la créance de 6 579,68 euros :
- statuer ce que de droit sur la justification produite par la société JV ;
- « fixer, en tout état de cause, la créance de la société JV au passif de la société Jean Caby, à titre chirographaire, dans la limite de (°) € correspondant à la période antérieure à la procédure de redressement judiciaire » ;
-Sur la créance de 6 620,40 euros :
- juger que la société JV ne justifie pas du bien-fondé de la créance dont elle sollicite l'admission ;
- confirmer l'ordonnance du 14 octobre 2022 en ce qu'elle a rejeté la créance de la société JV :
- Sur la créance de 4 011 euros :
- juger que la société JV ne justifie pas du bien-fondé de la créance dont elle sollicite l'admission ;
- confirmer l'ordonnance du 14 octobre 2022 en ce qu'elle a rejeté la créance de la société JV
- Sur la créance de 560 euros :
- juger que la société JV ne justifie pas du bien-fondé de la créance dont elle sollicite l'admission ;
- confirmer l'ordonnance du 14 octobre 2022 en ce qu'elle a rejeté la créance de la société JV
En tout état de cause :
- débouter la société JV de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires ;
- condamner la société JV à verser à la société Jean Caby, la SCP BTSG et la SELAS MJS Partners la somme de 1 500 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la même aux entiers dépens.
Au titre de la mise hors de cause de la société Alpha MJ, elle expose que les droits propres de la société Jean Caby sont exercés par la société Jean Caby Holding et que la mission initialement dévolue au mandataire ad hoc a pris fin.
Les intimées se reportent à la jurisprudence selon laquelle lorsque le paiement du prix est échelonné dans le temps et que les échéances dépendent de la réalisation d'un évènement, il incombe au créancier de rapporter la preuve de la réalisation de l'évènement déclenchant le paiement de l'échéance. Elles en déduisent que la production de documents rédigés en interne par le créancier ou de factures est insuffisante pour ce faire. Sans procès-verbal définitif conforme au contrat, il est impossible de s'assurer que les fours vendus par la société JV ont bien été livrés, mis en service et acceptés par la société Jean Caby.
Elles reviennent sur les mentions de la déclaration ne pouvant valoir déclaration des intérêts et l'existence d'un arrêt du cours des intérêts suite à l'ouverture de la procédure collective, sauf en présence d'un contrat de prêt ou d'un paiement différé d'un an ou plus. L'absence d'indication sur les modalités de calcul des intérêts à échoir ne permet pas de considérer que ces derniers ont été régulièrement déclarés.
Elles critiquent chaque poste de la déclaration de créance (absence de contrat de location, absence de sommes dues rendant sans objet les demandes au titre de l'indemnité forfaitaire, absence de mise à disposition du matériel et absence de déclaration des intérêts).
Par conclusions du 21 janvier 2024, la société Jean Caby, au titre de ses droits propres, la société Alpha MJ, en qualité de mandataire ad hoc, et la société MJS Partners et la société BTSG², en qualité de liquidateurs, ont sollicité le rejet des conclusions et pièces 22, 23, 24 et 25 signifiées le 9 janvier 2024 par la société JV aux motifs que ces conclusions et pièces ont été transmises en violation de l'exigence légale de communication des écritures et pièces en temps utile.
Elles soulignent que la transmission a eu lieu le jour de la clôture et que les pièces transmises étaient en possession de la société JV dès l'origine.
MOTIVATION
I- Sur les questions procédurales
1) sur la recevabilité de l'appel de la société JV
En vertu des dispositions de l'article L. 622-27 du code de commerce, rendu applicable en cas de liquidation judiciaire par l'article L 641-3 alinéa 4 du même code, s'il y a discussion sur tout ou partie d'une créance autre que celles mentionnées à l'article L 625-1, le mandataire judiciaire en avise le créancier intéressé en l'invitant à faire connaître ses explications.
Le défaut de réponse dans le délai de 30 jours interdit toute contestation ultérieure de la proposition du mandataire judiciaire.
En application des dispositions de l'article R 624-1 du code de commerce alinéa 2, si une créance autre que celle mentionnée à l'article L. 625-1 est discutée, le mandataire judiciaire en avise le créancier ou son mandataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Le délai de trente jours prévu à l'article L 622-27 court à partir de la réception de la lettre. Cette lettre précise l'objet de la discussion, indique le montant de la créance dont l'inscription est proposée et rappelle les dispositions de l'article L 622-27.
L'article R 624-4 du code de commerce précise qu'il n'y a pas lieu à convocation du créancier lorsque celui-ci n'a pas contesté la proposition du mandataire judiciaire dans le délai prévu à l'article L 622-27.
Conformément aux dispositions de l'article L 624-3 du code de commerce alinéa 2, le créancier dont la créance est discutée en tout ou en partie et qui n'a pas répondu dans le délai mentionné à l'article L 622-27 ne peut pas exercer de recours contre la décision du juge-commissaire lorsque celle-ci confirme la proposition du mandataire judiciaire.
En l'espèce, malgré les courriers au greffe de la société JV pointant que celle-ci n'a pas été avisée de la lettre de contestation du mandataire, l'ordonnance a été rendue sans convocation du créancier.
S'il est joint au dossier des intimées en cause d'appel le courrier de contestation, il n'est pas justifié du respect d'un envoi de celui-ci par le biais d'une lettre recommandée avec accusé de réception, tel qu'envisagé par l'article R 624-1 de commerce.
Faute de preuve d'un respect des formalités imposées par le texte précité, le délai de 30 jours octroyé au créancier à compter de la réception de ce courrier pour faire parvenir des observations n'a pas couru. Il ne saurait être interdit à ce créancier de participer à la procédure de vérification dans ces conditions et le juge-commissaire aurait dû le convoquer à l'audience avant de rendre son ordonnance.
Compte tenu des éléments ci-dessus exposés, quand bien même la créancière n'a pas été convoquée en première instance et l'ordonnance querellée a été rendue en son absence, l'appel interjeté par la société JV est recevable.
2) sur la recevabilité des conclusions du 9 janvier 2024 et des pièces 22, 23, 24 et 25
Aux termes des dispositions de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
L'article 15 du même code précise que parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.
Selon l'article 783 du code de procédure civile, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, sauf exception, notamment les conclusions à visée procédurale.
En l'espèce, la clôture de cette procédure devait intervenir le 19 décembre 2023.
A la suite d'écritures prises par la société JV le 18 décembre 2023 en réponse à celle de l'intimée du 8 mai 2023, un report de l'ordonnance de clôture a été accordé à la demande de l'intimée pour répondre aux écritures nouvellement signifiées.
Les parties étaient informées par message du greffe du 19 décembre 2023 de la date de la nouvelle clôture, à savoir le 9 janvier 2024 à 14 heures, et qu'aucun autre report ne serait accordé.
Le 9 janvier 2024, jour de la clôture, à 10h 22, la société JV a signifié néanmoins de nouvelles conclusions avec un bordereau de communication comportant 4 nouvelles pièces, dont les intimées sollicitent le rejet pour cause de tardiveté.
Le dispositif de ces écritures litigieuses comporte deux ajouts clairement identifiés, d'une part, une fin de non-recevoir pour cause de nouveauté opposée à la demande subsidiaire des intimées sollicitant un renvoi devant la juridiction compétente à raison d'une contestation sérieuse, d'autre part, une demande de débouté des intimées de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
Les ajouts dans les motifs sont également clairement identifiés, et constitués de 3 paragraphes en page 8, 3 paragraphes en page 9, la page 10 en son intégralité et deux paragraphes en page 12. Leur contenu vise essentiellement à répondre à l'argumentation des intimées, en développant les prétentions d'ores et déjà contenues dans les écritures antérieures.
S'agissant des pièces, deux d'entre elles, les pièces 22 et 23, ne sont que la traduction de pièces préalablement produites : la pièce 10 relative aux relevés de temps la société Schröter et la pièce 21 contenant l'ensemble des bons de livraisons, étant précisé qu'il s'agissait essentiellement de tableaux ou bons de livraison en allemand, au contenu rapidement compréhensible grâce aux moyens modernes de traduction désormais offerts en libre-service sur internet, tel que google traduction.
La pièce 24 est constituée des bons de commande transmis par la société Jean Caby et la pièce 25 comprend un courrier du 24 mai 2018 et un courrier en réponse du 28 mai 2018, relatif aux interrogations de la société JV adressées à l'administrateur sur une poursuite du chantier compte tenu de l'ouverture de la procédure collective.
La cour note d'ores et déjà que l'ensemble de ces pièces, soit était connu des intimées (pièces 10 ou 21), soit émanait des intimées mêmes, s'agissant des pièces 24 et 25.
Ces pièces et conclusions font suite aux écritures des intimées régularisées le 6 janvier 2024, lesquelles comportent un ajout d'argumentations tant juridiques que factuelles, sur plus de deux pages pleines, le dispositif passant quant à lui de 5 chefs à plus de 15.
La matérialisation des ajouts dans ces conclusions des intimées permet de constater un enrichissement notable des écritures par rapport à celles signifiées le 8 mai 2023. Ainsi, était notamment envisagée une argumentation nouvelle, d'une part, relative à la production de pièces en langue étrangère et ses conséquences, d'autre part, relatives aux étapes de mises en service des fours, avec notamment une critique de chacune des pièces produites par la société JV et des développements concernant la nature des engagements pesant sur la créancière, notamment en termes de mise à disposition et de réception des fours ainsi que des reproches sur l'absence de conduite à son terme du chantier après l'ouverture de la procédure collective.
En conséquence, les pièces et conclusions de l'appelante, certes signifiées le 9 janvier 2024 à 10h22, à quelques heures de la clôture devant intervenir à 14 heures, font suite aux écritures des intimées, signifiées un jour non ouvrable et nuitamment, à savoir le samedi 6 janvier 2024 à 1h 30, développant une argumentation nouvelle en de nombreux points et contenant de nouvelles prétentions.
Le conseil de l'appelante qui n'a pu prendre connaissance de ces écritures que le lundi 8 janvier, a manifestement fait diligences pour les transmettre à la société JV, obtenir dans un si court laps de temps une traduction des pièces, recueillir l'accord de sa mandante sur la réponse à l'argumentation nouvelle des intimées et formaliser de nouvelles écritures.
A l'évidence, la société JV a tout mis en 'uvre pour répondre à l'argumentation nouvelle des intimées, avec la plus grande célérité possible, de sorte que ces dernières ne peuvent utilement lui reprocher un manquement au principe de la contradiction.
En conséquence, les pièces et conclusions signifiées le 9 janvier 2024 par la société JV doivent donc être déclarées recevables.
3) Sur la mise hors de cause société Alpha MJ en qualité de mandataire ad hoc de la société Jean Caby
Le mandat ad hoc dévolu à la société Alpha MJ, désignée pour exercer lesdits droits propres étant arrivé à terme, il ne peut qu'être prononcé la mise hors de cause de cette dernière société.
II- Sur la créance déclarée par la société JV
Aux termes des dispositions de l'article L 622-24 du code de commerce, à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leur créance au mandataire judiciaire.
Le montant de la créance à admettre doit être celui existant au jour de l'ouverture de la procédure collective, indépendamment des causes ayant pu éteindre, en tout ou partie, la créance postérieurement au jugement d'ouverture.
Conformément aux dispositions de l'article R 622-23 du code de commerce, le créancier doit apporter les éléments de nature à prouver l'existence et le montant de sa créance, à défaut une évaluation de la créance si son montant n'a pas encore été fixé, ainsi que tous documents permettant d'en justifier.
Selon l'ancien article 1315 du code civil, devenu 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Aux termes des dispositions de l'article L624-2 du code de commerce, au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l'admission ou du rejet des créances ou constate soit qu'une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence. En l'absence de contestation sérieuse, le juge-commissaire a également compétence, dans les limites de la compétence matérielle de la juridiction qui l'a désigné, pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d'admission.
La procédure de vérification et d'admission des créances devant le juge commissaire ne tend qu'à la détermination de l'existence, du montant et de la nature de la créance déclarée, et le juge commissaire, et la cour saisie sur appel de ses décisions, n'est pas compétent pour statuer en dehors de cette détermination de la créance.
Ainsi, le juge de la vérification des créances n'a pas le pouvoir de trancher des contestations portant sur le bien-fondé de la créance, telles que par exemple celles impliquant soit l'interprétation et l'exécution d'un contrat, soit l'appréciation d'une responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle, soit encore, l'appréciation d'un préjudice.
En l'espèce, la fin de non-recevoir opposée par la société JV à la demande subsidiaire des intimées visant à juger qu'il existe une contestation sérieuse et tirée de son caractère nouveau est inopérante, dès lors que le juge-commissaire, juge de l'évidence, doit, en présence d'une contestation ne relevant pas de son pouvoir juridictionnel, le constater nécessairement et inviter les parties à saisir le juge du fond avant de statuer sur l'admission de la créance. Cette fin de non-recevoir ne peut donc que d'ores et déjà être rejetée.
Par ailleurs, la société JV sollicite l'admission de sa créance à hauteur d'un montant global de 748 021,08 euros, outre intérêts, basée sur des factures émises entre le 14 novembre 2016 et le 31 décembre 2017, correspondant, à la date du redressement judiciaire :
- au solde restant dû au titre du contrat du 27 juin 2016 pour un montant de 730 250 euros ;
- à la location de divers matériels intervenue entre octobre et novembre 2017 pour un montant de 6 579,68 euros ;
- à des surcoûts liés à la fermeture du chantier relatif à la construction de la nouvelle usine à [Localité 6] pour la somme de 6 620,40 euros ;
- à la vente de pièces pour un montant total de 4 011 euros ;
- et à des indemnités de recouvrement à hauteur de 500 euros.
Ainsi, compte tenu des pouvoirs dévolus au juge-commissaire, et à la cour d'appel saisie sur recours des ordonnances de ce dernier, et dans les limites ci-dessus rappelées, convient-il successivement d'examiner les différentes créances invoquées.
1) sur la créance correspondant aux deux dernières échéances de règlement prévu par le contrat du 27 juin 2016 pour un montant total de 730 250 euros
Des développements décousus des intimées, la cour comprend que ces dernières, sans remettre en cause la nature de contrat de vente, estiment que le solde du prix ne serait dû qu'en cas de mise en service et de réception du matériel, lesquelles ne sont pas prouvées par la société JV, qui n'établit pas plus avoir été empêchée par le comportement même du débiteur.
Néanmoins, de la seule lecture du contrat du 27 juin 2016, il s'extrait que :
- conformément à son intitulé « contrat d'achat de matériel », la convention a pour objet la fourniture à l'acheteur d'un « matériel conforme en tout point aux spécifications telles que décrites dans l'offre PR PN 6296/2 du 11/02/2016 », « le montant de cette vente [étant] de 3 650 000 euros HT » ;
- suivant l'article « 14- conditions financières », « en contrepartie de la fourniture du matériel par le vendeur, l'acheteur paiera la somme globale forfaitaire de 3 650 000 euros HT au vendeur. Le prix est fixe et inclut tous les frais que le vendeur doit engager pour satisfaire à son obligation de livraison, de résultat et de prestations, à savoir notamment les frais d'étude, plans, fichiers informatiques, essais, transport, montage, mise en service, réception, assurance, sécurisation du chantiers, formation des opérateurs et du personnel de maintenance, fourniture de la documentation, la garantie d'un an et les interventions du vendeur pendant cette période ainsi que tous les coûts annexes »;
- les modalités de facturation sont envisagées par l'article 14, lequel prévoit que « les factures du vendeur seront établies selon l'échéancier suivant :
- un acompte de 340 000 euros HT a été remis à la fin de la négociation par chèque. Le vendeur fournit une caution bancaire de restitution d'acompte émise par le CIC Nord Ouest ;
-755 000 euros d'acompte à signature du présent contrat par virement. Le vendeur fournit une caution bancaire de restitution d'acompte émise par le CIC Nord Ouest ;
- 730 000 euros HT d'acompte à la validation des plans et du CDC par virement ;
- la moitié de la TVA (365 000 euros) + 15% (547 500 € HT) à la livraison [Localité 6] par virement pour le premier four ;
- la moitié de la TVA (365 000 euros) + 15% (547 500 € HT) à la livraison [Localité 6] par virement pour le second four ;
- 365 000 euros HT à la mise en service, par virement différencié pour chaque cellule ;
- 365 000 euros HT à la réception, par virement différencié pour chaque cellule.
- conformément à l'article 12, « la réception du matériel donne lieu à un procès-verbal entre les deux parties pour valider les performances et la conformité du matériel par rapport aux exigences de l'acheteur ».
A l'évidence, la convention conclue entre la société JV et la société Jean Caby est un contrat de vente, instantanée et non conditionnelle, de biens, pour un prix forfaitaire et ferme, dont seules les modalités de règlement ont été organisées par les parties, en prévoyant différentes échéances sans qu'il résulte des pièces versées aux débats que les parties aient eu l'intention de soumettre le règlement de ces échéances à la réalisation d'une quelconque condition ou d'un évènement spécifique.
Cela rend donc non sérieuse la contestation des intimées, qui prétendent que le paiement des deux dernières échéances nécessiterait la réalisation d'une mise en service et d'une réception en bonne et due forme, la mise en service et la réception n'étant qu'une étape de la fourniture d'un bien complexe dont le prix de vente global était déterminé par avance et est une créance antérieure à l'ouverture du redressement judiciaire, dès lors que cette vente est antérieure au jugement d'ouverture.
Pour attester de la réalisation de sa prestation, la société JV verse aux débats les bons de livraisons des fours, les relevés de temps Shröter détaillant les horaires effectués mais également les personnels concernés, des plannings prévisionnels établis pour l'exécution de la prestation et les formulaire Cerfa de déclaration préalable de détachement de personnels, dont une simple lecture prive de toute opérance les critiques élevées par les intimées, puisque, si ces dernières conventions de mise à disposition de personnels ne sont pas signées, il n'en demeure pas moins que le lieu d'exécution de la prestation spécifiée est bien l'adresse de la société Jean Caby et les noms des personnels détachés correspondent à ceux indiqués dans les relevés de temps Shröter, étant précisé les périodes d'intervention correspondent à celles envisagées dans les plannings réalisés.
A l'évidence, ces pièces privent de tout sérieux la contestation de la société Jean Caby quant à l'absence de preuve de la livraison et de l'installation des fours, lesquelles sont au contraire démontrées. La réception et la mise en route de ces derniers n'ont pu être formalisées qu'en raison de l'ouverture de la procédure collective de la société Jean Caby et de l'impossibilité pour l'administrateur de poursuivre le contrat, comme en atteste la pièce 25 versée aux débats par la société JV.
Il s'ensuit que la société JV est fondée à solliciter l'admission de sa créance pour le montant correspondant au solde du prix de vente des deux fours, lequel s'élève, compte tenu des acomptes d'ores et déjà réglés, avant le jugement d'ouverture, à la somme de 730 250 euros.
2) sur la location de matériels intervenue entre octobre et novembre 2017
Pour justifier de cette créance, la société JV produit :
- le contrat de location d'une ligne d'embossage signé le 6 mars 2017 prévoyant, après un premier loyer de 23 500 euros, 47 loyers mensuels de 2000 euros HT pour chaque ligne (au nombre de deux), et une valeur de rachat finale sous réserve de paiement de tous les loyers pour chaque ligne de 11 750 euros ainsi que les échanges de courriels entre les parties de mars 2017, envisageant l'intégration de basculeurs de bacs sur la ligne de poussage Vemag, sous la forme d'une location du basculeur intégré pour un loyer mensuel de 615 euros HT ;
- la déclaration de créance initiale comportant les six factures de location de matériels pour les mois d'octobre, novembre et décembre 2017 et une déclaration de créance rectificative, comportant deux avoirs, annulant pour partie les deux factures du 30 novembre 2017 et deux nouvelles factures ramenant le coût des 2 matériels loués pour décembre à une somme arrêtée prorata temporis de 71, 42 euros et 232,26 euros.
La société Jean Caby et ses liquidateurs ne peuvent sérieusement, sans se contredire gravement, contester la « réelle mise à disposition du matériel » litigieux, par des motifs très généraux, alors même que l'administrateur judiciaire de cette société a, pour lesdits matériels, sollicité une prorogation du délai pour se positionner sur la poursuite de ces contrats. La fourniture de ces matériels et l'existence des contrats n'avaient à l'époque fait l'objet d'aucune objection de la part des organes de procédure et de la société Jean Caby.
D'ailleurs, c'est tout autant par des motifs généraux et non sérieux que la société Jean Caby et ses liquidateurs prétendent que les modalités financières de ces locations ne seraient pas prouvées ou que les loyers réclamés porteraient, pour une part, sur une créance postérieure.
Compte tenu des pièces versées, la société JV justifie à l'évidence de contrats de location en cours au jours du jugement d'ouverture à raison de la mise à disposition, d'une part, d'une ligne d'embossage pour 2 000 euros par mois, d'autre part, d'un basculeur intégré pour un montant de 615 euros par mois, ainsi que de loyers demeurées impayées pour la période d'octobre 2017 au jour de l'ouverture de la procédure collective, ce qui porte sa créance de ce chef à un montant total de 6 579,68 euros, qu'il convient d'admettre au passif de la société Jean Caby.
3) sur la créance de surcoûts liés à la fermeture du chantier relatif à la construction de la nouvelle usine de [Localité 6]
La seule production d'un devis actualisé pour les surcoûts du chantier de [Localité 6] établis par la société JV et l'accusé réception de lecture du courrier sont insuffisants à justifier de l'existence des retards invoqués, de l'origine des retards et de leur imputabilité, ainsi que d'un accord pour une prise en charge par la société Jean Caby de ces retards.
Cette créance, déclarée pour un montant de 6 620,40 euros, ne peut qu'être rejetée.
4) sur la créance de vente de diverses pièces
La société Jean Caby et ses liquidateurs ne peuvent se contenter de motifs généraux et de l'énoncé d'un principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, pour voir écarter la créance déclarée à ce titre par la société JV pour un montant de 4 011 euros. Outre que ce principe ne trouve pas à s'appliquer en matière de faits juridiques, il est au surplus inopérant.
En outre, s'il est produit les bons de livraison et les factures, qui émanent bien de la créancière, il est aussi versé aux débats les bons de commandes émis par la société Jean Caby. La cour note par ailleurs qu'il ne ressort pas des développements des liquidateurs et de la société Jean Caby que ceux-ci contesteraient la fourniture des pièces visées par les factures litigieuses.
La créance de la société JV au titre des diverses pièces fournies est à l'évidence établie, compte tenu des justificatifs versés aux débats, à hauteur de 3 862,80 euros, sur une créance déclarée de 4 011 euros de ce chef.
La créance est donc admise à hauteur de 3 862,80 euros et rejetée pour le surplus.
5) sur la créance correspondant aux pénalités et intérêts de retard
En application des dispositions de l'article L 441-6 du code de commerce, applicables aux conventions souscrites, les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt de pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire. Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire sur justification. Toutefois, le créancier ne peut invoquer le bénéfice de ces indemnités lorsque l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire interdit le paiement à son échéance de la créance qui lui est due.
L'article D 441-5 du même code prévoit que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement prévue au 12ème alinéa du I de l'article L 441-6 est fixé à 40 euros.
Concernant plus particulièrement les intérêts, l'article R 622-23, 2°, du code de commerce précise que la déclaration de créance contient les modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté, cette indication valant déclaration pour le montant ultérieurement arrêté.
Il s'ensuit que le créancier doit déclarer les intérêts échus et impayés avant le jugement, qu'il s'agisse d'intérêts de retard ou conventionnels.
Si par principe, après jugement d'ouverture, il y a arrêt du cours des intérêts en application de l'article L 622-28 du code de commerce, les créanciers qui continuent, par exception, à bénéficier de la continuation du cours des intérêts, doivent mentionner dans leur déclaration les intérêts à échoir dont le cours n'est pas arrêté.
Le premier alinéa de l'article précité dispose en effet que le jugement d'ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations, à moins qu'il ne s'agisse des intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d'un paiement différé d'un an ou plus.
En l'espèce, compte tenu des créances admises par la présente cour au vu des justificatifs produits, seules 12 factures ont été retenues comme justifiées et exigibles. La société JV est donc en droit de demander une indemnité forfaitaire d'un montant de 480 euros.
La créance au titre de l'indemnité de recouvrement est donc admise pour ce montant et rejetée pour le surplus.
Concernant les intérêts de retard, les créances déclarées par la société JV ne relèvent pas des exceptions au principe d'arrêt du cours des intérêts ci-dessus rappelé, étant en outre observé que sa déclaration d'intérêts pour mémoire ne répondait de toute évidence pas aux exigences légales en ne permettant pas de déterminer les sommes concernées, les points de départ des intérêts réclamés, leur assiette, ainsi que le taux d'intérêt précis à appliquer
Cette créance d'intérêts ne peut qu'être rejetée.
Ainsi, sur le montant total de 748 021, 08 euros déclaré, doivent être admises :
- la somme de 730 250 euros au titre du contrat du 27 juin 2016 ;
- la somme de 6 579,68 euros au titre de la location de divers matériels intervenue en octobre, novembre 2017 jusqu'au 4 décembre 2017,
- une somme de 3 862,80 euros sur une créance déclarée de 4 011 euros au titre de la vente de pièces ;
- une indemnité forfaitaire de 480 euros sur une somme déclarée de 560 euros,
Soit une somme totale de 741 172, 48 euros.
Le surplus est rejeté ainsi que la demande au titre des intérêts de retard.
L'ordonnance querellée est infirmée en ce qu'elle a rejeté en intégralité la créance de la société JV, qui est admise à titre chirographaire au passif de la société Jean Caby pour un montant global de 741 172,48 euros.
III- Sur les dépens et accessoires
En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la société Jean Caby au titre de ses droits propres et ses liquidateurs, ès qualités, succombant en leurs prétentions, il convient de les condamner in solidum aux dépens de première instance et d'appel.
Compte tenu des circonstances et de l'équité, les demandes respectives d'indemnité procédurale sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
DECLARE recevables les pièces et conclusions signifiées le 9 janvier 2024 par la société JV La Française ;
REJETTE la fin de non-recevoir tirée du caractère nouveau opposée par la société JV La Française à la demande subsidiaire des intimées ;
MET hors de cause la société Alpha MJ, en qualité de mandataire ad hoc de la société Jean Caby Holding ;
INFIRME l'ordonnance du juge-commissaire du 14 octobre 2022 afférente à la créance contestée n° 282 ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
ADMET la créance de la société JV La Française au passif de la procédure collective de la société Jean Caby à hauteur de 741 172,48 euros à titre chirographaire ;
CONDAMNE in solidum la société Jean Caby au titre de ses droits propres et les sociétés MJS Partners et BTSG² en qualité de liquidateurs de la société Jean Caby aux dépens de première instance et d'appel ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, DEBOUTE chacune des parties de sa demande d'indemnité procédurale.
Le greffier
Marlène Tocco
La présidente
Stéphanie Barbot