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04/04/2024 | FRANCE | N°23/01663

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 04 avril 2024, 23/01663


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ARRÊT DU 04/04/2024





****





N° de MINUTE : 24/120

N° RG 23/01663 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U24A



Jugement (N° 20/00705) rendu le 20 Janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Douai





APPELANTE



SA Allianz Iard représentée par ses dirigeants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

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INTIMÉ



Monsieur [S] [T]

né le [Date naissance 2] 1985 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Repr...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 04/04/2024

****

N° de MINUTE : 24/120

N° RG 23/01663 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U24A

Jugement (N° 20/00705) rendu le 20 Janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Douai

APPELANTE

SA Allianz Iard représentée par ses dirigeants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Bruno Bufquin, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

INTIMÉ

Monsieur [S] [T]

né le [Date naissance 2] 1985 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Caroline Follet, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, assisté de Me Aurélien Boudeweel, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

DÉBATS à l'audience publique du 10 janvier 2024 tenue par Yasmina Belkaid magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de chambre

Claire Bertin, conseiller

Yasmina Belkaid, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 4 avril 2024 après prorogation en date du 21 mars 2024 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 6 novembre 2023

****

EXPOSE DU LITIGE

M. [S] [T] est propriétaire d'un immeuble situé [Adresse 4], assuré auprès de la société Allianz Iard.

Cet immeuble a été endommagé à la suite d'un incendie survenu le 13 juin 2018.

M. [T] a demandé à son assureur la prise en charge du sinistre, en vain.

Par acte, du 11 juin 2020, il a donc fait assigner la société Allianz Iard aux fins d'indemnisation de son préjudice.

Par un jugement du 20 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Douai a :

condamné la société Allianz Iard à verser à M. [S] [T] la somme de 188 644 euros en application du contrat d'assurance

rejeté les demandes d'indemnisation au titre du préjudice moral et de la résistance abusive formulées par M. [S] [T]

rejeté la demande de restitution formulée par la société Allianz Iard

condamné la société Allianz Iard aux entiers dépens

condamné la société Allianz Iard à verser la somme de 1 500 euros à M. [S] [T] au titre de l'article 700 du code de procédure civile

rejeté la demande de la société Allianz Iard formulée au titre des frais irrépétibles

Par déclaration du 2 mars 2022, la société Allianz Iard a formé appel de cette décision en limitant sa contestation aux chefs du dispositif numérotés 1, 4 et 5 ci-dessus.

Dans ses conclusions notifiées le 31 mai 2022, la société Allianz Iard demande à la cour, au visa des articles L. 113-2 et L. 113-8 du code des assurances, de :

dire recevable et bien fondé son appel

dire et juger qu'il y a lieu de réformer le jugement rendu le 10 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Douai

en conséquence, débouter M. [T] de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre

la dire recevable et fondée à opposer sa garantie « depuis le dépôt du rapport d'expertise du cabinet Polyexpert du 4 février 2019 » (sic) et les demandes de pièces restées sans effet depuis le 21 février 2019

vu l'absence de communication des nouveaux risques à assurer à compter de mai 2018,

vu les multiples réticences de M. [T] et M. [P] à produire les pièces justificatives de l'activité exercée dans les lieux

dire et juger le contrat d'assurance risque professionnel du 3 juin 2014 nul et de nul effet

en conséquence ;

condamner M. [T] à lui payer la somme de 10 000 euros en restitution des provisions versées sans cause en application des articles 1302 et suivant du code civil avec intérêts au taux légal à compter de la lettre recommandée du 23 septembre 2019

condamner M. [T] à lui payer la somme de 190 144 euros en application des articles 1302 et suivant du code civil avec intérêts au taux légal à compter de la lettre recommandée du 7 avril 2022

condamner M. [T] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens d'instance et d'appel don distraction au profit de Me Bruno Bufquin.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que :

M. [T] n'a pas déclaré le nouveau bail professionnel et le changement d'activité de sorte que son appréciation des risques a été viciée et alors en outre que la nouvelle activité en lien avec des véhicules automobiles est exclue du contrat d'assurance

M. [T] a commis une fausse déclaration intentionnelle en désignant M. [W] [P] comme pouvant être le propriétaire du véhicule Renault se trouvant à l'intérieur des locaux incendiés

M. [T] a commis de multiples réticences en s'abstenant de lui fournir des pièces comptables de nature à établir la location des locaux ainsi que les éléments d'identification du véhicule Renault

sa garantie n'est pas due en application des conditions particulières de la police qui excluent les activités de garagiste, de dépôt de pièces automobiles, de moteurs ou de pneus

elle n'est pas davantage due selon les conditions générales du contrat qui excluent de la garantie les dommages causés par les véhicules soumis à une assurance obligatoire et alors que l'expert a conclu que le véhicule Renault était probablement à l'origine du sinistre

elle est donc fondée à obtenir le remboursement des sommes qu'elle a versées à la suite du sinistre.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 1er juin 2023, M. [S] [T] demande à la cour, au visa des articles 1103 du code civil et L. 111-8 du code des assurances, de :

confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Douai en date du 20 janvier 2022 en ce qu'il a condamné la société Allianz Iard à lui payer la somme de 188 644 euros en application du contrat d'assurance

au surplus :

condamner la société Allianz Iard à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral

condamner la société Allianz Iard à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive

condamner la société Allianz Iard à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondemande de l'article 700 du code de procédure civile

condamner la société Allianz Iard à lui payer la somme de 6 648 au titre des frais d'huissier rendus nécessaires aux fins d'exécution de la décision rendue en première instance

condamner la société Allianz Iard aux entiers frais et dépens de l'instance.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que :

il n'a pas fait de fausses déclarations

la société Allianz refuse de mauvaise foi de prendre en charge le sinistre alors qu'il lui a communiqué le bail commercial conclu avec M. [P] le 28 mai 2028 qui est au demeurant mentionné dans le rapport de Polyexpert et qu'il est attesté de la présence du locataire dans les locaux

M. [P] qui, dans un premier temps, a formulé de fausses déclarations par peur, a ensuite reconnu sa qualité de locataire

il a souscrit une assurance en qualité de propriétaire non occupant de sorte que Allianz ne peut lui reproché de ne pas l'avoir averti de sa cessation d'activité

le sinistre ayant eu lieu moins d'un mois après le bail, il ne peut produire d'autres documents que ceux qu'il a remis

il ne peut être tenu de justifier de l'immatriculation et de l'identité du propriétaire du véhicule Renault alors que son local avait été donné à bail

les conditions générales dont se prévaut Allianz ne correspondent pas à son contrat

en toute hypothèse, Allianz n'établit pas que le locataire exerçait dans les locaux une activité exclue de la garantie et l'origine de l'incendie n'est pas déterminée

la mauvaise foi de l'assureur est à l'origine de son préjudice moral

le refus de prendre en charge le sinistre est abusif.

Pour un plus ample exposé des moyens de l'appelant, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité du contrat d'assurance

Selon l'article L 113-2 2° du code des assurances, l'assuré est obligé de répondre exactement aux questions précises posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel celui-ci l'interroge, lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à lui faire apprécier les risques qu'il prend en charge.

L'article L. 113-2 3° du même code prévoit que l'assuré est obligé de déclarer, en cours de contrat, les circonstances nouvelles qui ont pour conséquence soit d'aggraver les risques, soit d'en créer de nouveaux et rendent de ce fait inexactes ou caduques les réponses faites à l'assureur, notamment dans le formulaire mentionné au 2° ci-dessus. L'assuré doit, par lettre recommandée ou par envoi recommandé électronique, déclarer ces circonstances à l'assureur dans un délai de quinze jours à partir du moment où il en a eu connaissance.

Aux termes de l'article L 113-8 du code des assurances, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre.

Sur la nullité tirée de la non déclaration d'une activité nouvelle

Alors que la société Allianz ne produit aucun questionnaire qu'elle aurait soumis au moment de la souscription du contrat à M. [T], il ressort toutefois des dispositions particulières de la police n°53898778 souscrite avec prise d'effet au 3 juin 2014 que ce dernier a déclaré agir en qualité de propriétaire non occupant de l'immeuble locatif avec occupant unique situé [Adresse 4] dont la superficie développée est de 170 m², que l'immeuble assuré est à usage commercial avec une activité à venir, qu'il n'abrite aucune activité industrielle ni aucune des professions ou activités, dont la liste est précisée, et notamment celle de garagiste.

Il résulte du bail commercial conclu le 28 mai 2018, soit postérieurement à la souscription du contrat d'assurance, entre M. [T] et M. [W] [P] que l'affectation des locaux est à usage, d'une part, de transport de personnes, VTC et taxis et, d'autre part, de transport, entreposage de marchandises.

La conclusion d'un tel bail commercial n'est pas de nature à changer l'objet du risque pour l'assureur puisque l'occupation des locaux à usage commercial était prévue et que l'activité exercée est conforme aux déclarations de l'assuré.

La société Allianz n'établit pas, dans ces conditions, que l'assuré devait déclarer, en application de l'article L. 113-2 3° du code des assurances, l'activité exercée dans les locaux donnés à bail.

A cet égard, la présence d'un véhicule automobile dans les locaux sinistrés ne saurait à elle seule impliquer l'exercice d'une activité de stockage de véhicules comme le prétend Allianz sans le démontrer.

Dès lors, la société Allianz n'est pas fondée à solliciter la nullité du contrat au motif de l'absence de déclaration d'une activité nouvelle.

Sur la nullité tirée de la fausse déclaration du tiers locataire

S'il ressort du procès-verbal de constat d'huissier de justice dressé le 26 septembre 2018 que M. [W] [P] a, dans un premier temps, déclaré qu'il n'avait jamais eu de local à [Localité 5] à son nom, celui-ci a reconnu sa qualité de locataire des locaux, propriété de M. [T], en justifiant ses fausses déclarations initiales par la peur des enquêteurs d'assurance ainsi que cela ressort du procès-verbal de constat d'huissier de justice établi le 25 juillet 2019.

Est annexé au dit procès-verbal de constat, la pièce d'identité de M. [P] dont les mentions sont conformes à celles visées au contrat de bail du 28 mai 2018, dont il n'est ni allégué ni établi qu'il s'agit d'un faux alors en outre que les deux témoignages produits au dossier tendent à établir que M. [P], qui disposait de la télécommande du bâtiment, se rendait régulièrement dans les locaux sinistrés.

Par suite, la société Allianz n'est pas fondée à solliciter la nullité du contrat pour fausse déclaration du tiers locataire.

Sur la nullité tirée des réticences multiples

L'article 10-1 des conditions générales du contrat d'assurance, dont se prévaut la société Allianz, qui prévoit qu' « en cas de mauvaise foi, de fausses déclarations sur la date, la nature, les causes, les circonstances et les conséquences apparentes d'un sinistre, l'assuré perd le bénéfice des garanties pour ce sinistre. Il en est de même si vous conservez ou dissimulez des pièces pouvant faciliter l'évaluation du dommage ou encore si vous employez comme justification des documents inexacts. Nous pourrions alors mettre fin au contrat (') » constitue une clause de déchéance de garantie.

La société Allianz ne démontre pas, en l'absence de production des conditions générales du contrat signées par l'assuré ou d'un renvoi à celles-ci dans les conditions particulières, que ce dernier avait eu connaissance, avant le sinistre, de la clause de déchéance de garantie invoquée par l'assureur et l'avait acceptée.

C'est donc à juste titre que le premier juge a considéré que la société Allianz ne pouvait opposer la clause 10-1 des conditions générales à son assuré.

Sur la mise en 'uvre de la garantie

Selon l'article 1134 du code civil applicable au présent litige, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

En application de l'article 1315 du même code, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de l'obligation.

En application de ces textes, il incombe à l'assuré de faire la preuve de la condition de mise en jeu de la garantie et à l'assureur, qui se prévaut d'une clause d'exclusion de la garantie, de démontrer que les conditions de sa mise en 'uvre sont réunies.

M. [T] établit que les conditions de la garantie dont il demande la mise en 'uvre sont bien remplies.

Il appartient donc à Allianz qui entend s'exonérer de son obligation de garantie, de rapporter la preuve de ce que le sinistre tombe sous le coup d'une clause d'exclusion.

Sur les exclusions de garantie

D'une part, ainsi qu'il a été dit, la société Allianz ne rapporte nullement la preuve de l'exercice dans les locaux d'une activité exclue des conditions particulières de la police à savoir celle de garagiste, de dépôt de pièces automobiles, de moteurs automobiles ou de pneus.

En toute hypothèse, la clause de destination du bail commercial consenti par M. [T] ne vise nullement une telle activité.

Si l'expertise diligentée par le cabinet Polyexpert fait état de la présence d'un véhicule dans les locaux sinistrés, cette circonstance n'est pas à elle seule de nature à caractériser une activité de garagiste.

D'autre part, les conclusions du cabinet Polyexpert ne sont pas catégoriques sur l'origine du sinistre puisque l'expert, après avoir écarté avec certitude plusieurs hypothèses, donne un avis alternatif considérant que l'incendie est lié soit à un accident d'origine humaine soit au véhicule stationné à l'intérieur des locaux.

La société Allianz, qui se prévaut d'une exclusion de garantie relativement aux dommages causés par les véhicules soumis à une assurance obligatoire, outre que cette clause figure aux conditions générales du contrat dont il n'est pas établi qu'elles ont été signées par l'assuré ou que celui-ci en avait connaissance ainsi qu'il a été dit, ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de ce que le sinistre a été causé par le véhicule entreposé dans les locaux.

L'assureur ne peut donc pas se prévaloir d'une telle clause d'exclusion de garantie de sorte que sa garantie est due.

Le jugement critiqué sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de remboursement des sommes versées au titre du sinistre par la société Allianz.

Sur l'indemnisation du préjudice en exécution du contrat d'assurance

Il n'est pas contesté que le contrat d'assurance souscrit par M. [T] auprès de la société Allianz couvre la garantie incendie.

La cour approuve le premier juge qui a condamné la société Allianz, qui ne formule aucun grief sur ce point, à payer à M. [T] la somme de 188 644 euros en réparation d'une part des dommages matériels causés par l'incendie sur la base du rapport d'expertise amiable du 4 février 2019 qui évalué le préjudice à la somme de 190 274 euros et d'autre part du préjudice immatériel résultant de la perte des loyers pendant la durée du bail, soit pendant 9 mois, de mars 2019 à novembre 2019 sur la base du loyer contractuel de 930 euros, soit la somme totale de 8 370 euros et enfin après déduction de la somme de 10 000 euros versée à titre de provision par la société Allianz.

Sur la demande au titre des frais d'exécution du jugement dont appel

M. [T] sollicite le remboursement de la somme de 6 648 euros correspondant à la note d'honoraires au titre de l'article A 444-32 du code de commerce de Maitre [Z], huissier de justice, du 30 mai 2022.

Il justifie des actes de procédure d'exécution forcée du jugement dont appel, à savoir la signification d'un commandement de payer aux fins de saisie vente du 4 mars 2022, la signification du procès-verbal de saisie-attribution du 29 mars 2022 et la dénonciation dudit procès-verbal de saisie-attribution du 4 avril 2022.

L'article 32 de la loi n° 91-650 du 09 juillet 1991 prévoit que « à l'exception des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement qui peuvent être mis partiellement à la charge des créanciers dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, les frais de l'exécution forcée sont à la charge du débiteur, sauf s'il est manifeste qu'ils n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés.

Toutefois, en application des dispositions des articles 704 et suivants du code de procédure civile, une partie ne peut poursuivre, par voie d'exécution forcée, le recouvrement des dépens par elle avancés qu'au vu d'un certificat de vérification ou d'une ordonnance de taxe exécutoire.

Par suite et dès lors que la vérification des dépens constitue un préalable nécessaire, la demande de paiement des frais d'exécution forcée du jugement dont appel, sera rejetée.

Sur le préjudice moral

M. [T] produit un certificat médical établi le 17 février 2020 par le docteur [D] qui indique qu'il « présente un syndrome anxio dépressif depuis le 19 juin 2018 [date de l'incendie des locaux] réactionnel ainsi qu'un certificat médical du 29 septembre 2022 du docteur [B], psychiatre, qui atteste de son suivi depuis mars 2022 « dans le cadre de la procédure en cours ».

La responsabilité contractuelle de l'assureur est engagée dès lors qu'il a commis une faute en refusant abusivement d'indemniser le sinistre et qu'une telle faute a causé un préjudice à M. [T].

Les tracas inhérents à ce refus abusif d'indemniser et à la procédure judiciaire à l'origine de l'anxiété de M. [T] justifient l'allocation de la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.

Le jugement critiqué sera réformé de ce chef.

Sur la résistance abusive

En application de l'article 1240 du code civil dans sa rédaction postérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d'erreur grossière équipollente au dol, de faute, même non grossière ou dolosive, ou encore de légèreté blâmable, dès lors qu'un préjudice en résulte.

L'assureur ne commet pas de faute lorsqu'il conteste sa garantie en opposant des moyens sérieux, même si ses prétentions sont rejetées.

La résistance d'une des parties ne peut dégénérer en abus, susceptible d'engager sa responsabilité, que lorsqu'elle présente un caractère dolosif ou malveillant.

En l'espèce, M. [T] ne rapporte pas la preuve du caractère dolosif ou malveillant de la résistance de son assureur, celui-ci lui ayant opposé des moyens sérieux.

Le jugement critiqué sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes accessoires

Le sens du présent arrêt conduit :

- d'une part, à confirmer le jugement critiqué sur ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,

- et, d'autre part, à condamner la société Allianz, outre aux entiers dépens d'appel à payer à M. [T] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu le 20 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Douai en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a débouté M. [S] [T] de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice moral ;

Réformant de ce seul chef,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne la société Allianz Iard à payer à M. [S] [T] la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice moral ;

Condamne la société Allianz Iard aux dépens d'appel ;

Condamne la société Allianz Iard à payer à M. [S] [T] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

Le Greffier

Harmony Poyteau

Le Président

Guillaume Salomon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 23/01663
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;23.01663 ?
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