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29/03/2024 | FRANCE | N°22/00601

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 29 mars 2024, 22/00601


ARRÊT DU

29 Mars 2024







N° 393/24



N° RG 22/00601 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UHQE



MLBR/VM





























Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

25 Mars 2022

(RG 21/00213 -section 4 )



































GROSSE :



Aux avoca

ts



le 29 Mars 2024



République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-









APPELANTE :



S.A.S. SUPERMARCHÉS MATCH

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Bertrand DANSET, avocat au barreau de LILLE





INTIMÉ :



M. [T] [R]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représen...

ARRÊT DU

29 Mars 2024

N° 393/24

N° RG 22/00601 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UHQE

MLBR/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

25 Mars 2022

(RG 21/00213 -section 4 )

GROSSE :

Aux avocats

le 29 Mars 2024

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

S.A.S. SUPERMARCHÉS MATCH

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Bertrand DANSET, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉ :

M. [T] [R]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Jérôme AUDEMAR, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Marie LE BRAS

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

Clotilde VANHOVE

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Cindy LEPERRE

DÉBATS : à l'audience publique du 30 Janvier 2024

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2024,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 09 Janvier 2024

EXPOSÉ DU LITIGE':

M. [T] [R] a été embauché par la SAS Supermarché Match à compter du 18 août 2014 en qualité de responsable comptable.

En 2018, M. [R] a été promu aux fonctions de directeur des comptabilités. Il encadre à ce titre un service d'une trentaine de personnes.

La société Supermarché Match a convoqué le 14 février 2019 M. [R] à un entretien fixé au 5 mars suivant, préalable à un éventuel licenciement, et l'a mis à pied à titre conservatoire.

Le 12 mars 2019, la société Supermarché Match lui a notifié son licenciement pour faute grave lui reprochant des manquements graves dans le management de ses équipes, des carences dans le contrôle du traitement des factures et la gestion des délais de paiement ainsi que la tenue de propos excessifs et dénigrants.

Par requête du 20 mai 2019, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Lille afin de contester son licenciement et d'obtenir diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Par jugement contradictoire du 25 mars 2022, le conseil de prud'hommes de Lille a':

- dit que le licenciement de M. [R] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Supermarché Match à payer à M. [R] les sommes suivantes':

*7 779 euros au titre du rappel de salarié lié à la mise à pied conservatoire, outre 777,90 euros au titre des congés payés y afférents,

*23 337 euros au titre du préavis, outre 2 333,70 euros au titre des congés payés y afférents,

*9 400 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

*46 675 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

*1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les sommes de nature salariale, et à compter du prononcé de la décision pour les sommes de nature indemnitaire,

- débouté M. [R] de sa demande relative au rappel de la prime PPI en ce qu'elle n'est pas justifiée par les éléments communiqués aux débats,

- débouté les parties de toutes les autres demandes.

Par déclaration reçue au greffe le 15 avril 2022, la société Supermarché Match a interjeté appel de ce jugement en visant toutes ses dispositions.

Dans ses dernières conclusions déposées le 15 juillet 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, la société Supermarché Match demande la cour de :

- infirmer le jugement rendu sauf en ce qu'il a débouté M. [R] de sa demande relative au rappel de la prime PPI et statuant à nouveau de':

-débouter M. [R] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. [R] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions déposées le 11 octobre 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, M. [R] demande à la cour de :

- confirmer le jugement sauf sur le quantum de l'indemnité pour licenciement abusif et en ce qu'il l'a débouté de sa demande relative au rappel de la prime PPI, et statuant à nouveau de':

- condamner la société Supermarché Match à lui payer la somme de 93 350 euros au titre du licenciement abusif, subsidiairement, confirmer le jugement sur le quantum du montant alloué,

- condamner la société Supermarché Match à lui payer la somme de 4 800 euros au titre de la solde de la prime de résultat , outre 480 euros au titre des congés payés y afférents,

- condamner la société Supermarché Match à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

- sur le licenciement de M. [R] :

La faute grave privative du préavis prévu à l'article L1234-1 du même code est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend immédiatement impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis.

II appartient à l'employeur de rapporter la preuve de l'existence d'une faute grave, à défaut de quoi le juge doit rechercher si les faits reprochés sont constitutifs d'une faute pouvant elle-même constituer une cause réelle et sérieuse, le doute subsistant alors devant profiter au salarié.

Aux termes de la lettre de licenciement de M. [R] pour faute grave qui fixe les limites du litige, la société Supermarché Match lui a reproché les faits fautifs suivants :

- des manquements dans le management des équipes : la société Supermarché Match, après avoir évoqué le signalement reçu le 21 décembre 2018 d'un agent de l'équipe comptable sur la désorganisation des activités et l'absence d'écoute des managers, ainsi que la réunion qui s'en est suivie avec l'ensemble de l'équipe, reproche à M. [R] un manque d'écoute et de coordination à défaut d'avoir pris la mesure de la situation et de s'être impliqué davantage dans le fonctionnement et l'organisation des équipes malgré 'de nombreuses alertes exprimées à votre attention' , adoptant ainsi un 'comportement totalement inadapté et dilatoire, au mépris des intérêts de l'entreprise' alors qu'il aurait dû selon la société Supermarché Match faire évoluer sans délai les organisations, celle-ci évoquant plusieurs démissions de collaborateurs justifiées par la démobilisation des équipes,

- un comportement de dénigrement et des propos excessifs : la société Supermarché Match reproche à son salarié d'avoir à 'plusieurs reprises et auprès de plusieurs collaborateurs, critiqué ses équipes, l'organisation de l'entreprise et remis publiquement en cause les compétences de sa hierarchie', relatant notamment que dans le prolongement de la réunion du 21 décembre 2018, il aurait tenu des propos inappropriés 'j'en ai marre de ces gilets jaunes', 'je ne vais pas passer mon temps à changer leurs couches culottes', que le 12 février 2019 lors de la notification de son niveau de prime de progrès individuel (PPI) arrêté à 60%, il aurait traité les dirigeants de l'entreprise de 'voleurs', qu'il aurait également publiquement critiqué des décisions de sa supérieure hiérarchique allant 'jusqu'à demander à certains collaborateurs de quitter l'entreprise',

- d'importantes carences dans le traitement des factures et le respect des délais de paiement : évoquant l'existence au 28 février 2019 de 3 500 factures non traitées pour une valorisation qui dépasse les 6 millions d'euros, la société Supermarché Match reproche à ce titre à M. [R] ' de ne pas avoir clairement mis en oeuvre de relais suffisants' depuis le déménagement du service en mars 2017 pour éviter que de nombreuses factures demeurent encore adressées sur les anciens sites administratifs', 'de n'avoir pas émis la moindre alerte sur le sujet afin de permettre la mise en oeuvre des mesures correctives nécessaires', 'de ne pas avoir assurer un contrôle suffisant dans la comptabilisation des factures' et ce malgré 'les nombreuses et régulières remarques portées à votre connaissance relatives à l'identification d'anomalies dans la production des justificatifs inhérents à l'activité' qui aurait dû aboutir selon l'employeur à une meilleure prise en charge de la problématique.

M. [R] conteste la réalité et la gravité des fautes susvisées, dénonçant l'absence de preuve et rappelant que son employeur a attendu le 14 février 2019 pour le mettre à pied alors qu'il évoque notamment des éléments prétenduement portés à sa connaissance dès le 21 décembre 2018. Il soutient avoir été la victime collatérale du licenciement de M. [J], son collaborateur direct, qui est intervenu à la même période.

Il sera en premier lieu relevé que ni les faits qualifiés de manquements dans le management des équipes, ni les supposés comportements dénigrants et propos excessifs ne sont caractérisés par les pièces de l'appelante.

En effet, celle-ci s'appuie sur un écrit daté du 7 octobre 2019 de M. [P], salarié au sein du service de comptabilité générale, aux termes duquel celui-ci explique s'être fait le porte parole de toute l'équipe et avoir fait la démarche d'alerter la directrice administrative et financière, Mme [M], sur la situation de ce service.

Or, au-delà du non-respect du formalisme imposé pour les attestations en justice, aucune pièce d'identité n'étant notamment jointe pour garantir que M. [P] en est bien l'auteur, il sera surtout relevé qu'aucun fait précis et circonstancié susceptible de constituer une faute n'est relaté. L'intéressé évoque en effet de manière très générale 'l'absence de directive et d'accompagnement afin de résoudre les problèmes du quotidien' de la part des 2 responsables (M. [R] et M. [J]) qui aurait en outre entraîné une démobilisation et incité au départ de collègues sans toutefois les nommer précisément. M. [P] explique n'avoir pas souhaité rencontrer M. [R] 'par manque de confiance et de proximité avec l'équipe', et 'également à cause de la relation amicale qu'il entretient avec M. [J]' mais ce ressenti n'est objectivé par aucune pièce.

Outre des propos insuffisamment circonstanciés et non corroborés par des éléments objectifs concernant les comportements managériaux fautifs qui seraient susceptibles d'être reprochés à M. [R], celui-ci fait également valoir à juste titre en produisant les justificatifs en ce sens que M. [P] a fait l'objet d'un avertissement à son initiative au cours de l'année 2018, de sorte qu'il y a un doute sérieux sur l'impartialité de l'intéressé à l'égard de M. [R].

Il sera aussi relevé qu'il se prétend être le porte parole des autres salariés mais il est pourtant le seul à avoir rédigé une attestation alors qu'il ressort de l'organigramme que le service comptabilité générale comprend 7 salariés et qu'en tenant compte des autres services placés sous la direction de M. [R], c'est près d'une trentaine de salariés qui sont placés sous sa direction.

En complément à cette attestation, la société Supermarché Match produit uniquement l'écrit rédigé le 15 septembre 2019 par Mme [M], directrice administrative et financière et supérieure hiérarchique de M. [R], aux termes duquel celle-ci confirme la démarche de M. [P] le 21 décembre 2018, l'organisation en urgence le jour même d'une réunion avec l'équipe de la comptabilité générale et M. [R], hors la présence de M. [J], et évoque des 'collaboratrices en larmes'.

Or, Mme [M] étant la signataire de la convocation de M. [R] à l'entretien préalable mais également de la lettre de licenciement, son écrit qui n'est corroboré par aucun élément objectif extérieur, ne présente pas de garantie d'impartialité suffisante pour valoir preuve des faits relatés, notamment du fait que des salariés étaient en pleurs et le service en crise.

Au surplus, il n'en ressort aucun fait susceptible d'être directement imputable à M. [R], sachant que celui-ci est le N+2 des salariés concernés et que la réunion du 21 décembre 2018 portait manifestement sur les insuffisances de leur responsable direct, M. [J], à qui il a été d'ailleurs demandé de ne pas y assister 'afin que l'équipe s'exprime librement'.

Il n'est produit par l'appelante aucune pièce sur les supposées démissions qui auraient été provoquées par le comportement de M. [R], ni aucun témoignage écrit des salariés supposés en pleurs, en dehors du courrier susvisé de M. [P].

Au regard de l'ensemble de ces éléments, les fautes qu'aurait commis M. [R] dans le management de son service n'apparaissent pas établies.

S'agissant des supposés comportements dénigrants et des propos excessifs qu'aurait tenus M. [R] , la société Supermarché Match ne s'appuie sur aucune pièce pour fonder son grief qui ne ressort que de la lettre de licenciement rédigée par Mme [M], celle-ci n'évoquant même pas lesdits propos dans son écrit postérieur du 15 septembre 2019. La preuve n'est donc pas rapportée de la réalité de cette seconde série de faits fautifs.

Préalablement à l'examen des fautes relatives aux carences dans le traitement des factures et le respect des délais de paiement, il convient de rappeler qu'en sa qualité de directeur comptable et trésorerie, M. [R] animait et coordonnait les activités de 5 services, dont les services comptabilité générale, comptabilité fournisseurs et trésorerie, animés chacun par un responsable et comprenant au total une trentaine de salariés.

La société Supermarché Match reproche à M. [R] 'une faillite technique et une négligence fautive' dans le pilotage de l'activité desdits services, qui selon elle expliqueraient le retard important pris dans le traitement des factures des fournisseurs et partenaires.

La réalité de ce retard n'est pas en soi contestée par M. [R]. Celui-ci oppose en revanche à juste titre à l'appelante qu'il n'est pas démontré qu'il aurait fait preuve de défaillances fautives dans le traitement de cet arriéré et n'aurait pas tenu informée sa hiérarchie de l'évolution de la situation.

De manière générale, il ressort en effet des nombreux courriels versés aux débats par les parties qu'au cours des années 2017 et 2018, Mme [M], supérieure hiérarchique de M. [R], a été régulièrement mise en copie de ceux relatifs aux causes recensées de ces retards, notamment les erreurs d'adressage, à l'évolution des encours (pièce 33, 34, 36, 37 appelante; pièce 29 de l'intimé) ainsi qu'aux directives données ou aux solutions à envisager pour les réduire, ces mails illustrant par ailleurs pour certains l'implication active de M. [R] ( pièce 22, 31, 32 de l'appelante ; pièces 30, 31,32 de l'intimé).

En outre, par mail du 24 décembre 2018 (pièce 33 appelante) adressé à M. [R] mais également à Mme [M], M. [F], responsable de la comptabilité fournisseurs, a relevé que l'encours avait diminué de manière significative suite aux actions 'menées depuis 15 jours', annonçant une stabilisation le 28 janvier 2019 et de nouvelles mesure prises (pièce 34), M. [R] réagissant immédiatement en proposant de mener une action spécifique sur les plus vieilles factures.

Force est de constater qu'il ne ressort d'aucune pièce de la société Supermarché Match qu'en réaction à ces différents courriels, la hierarchie de M. [R] aurait manifesté une quelconque inquiétude face à une supposée aggravation du retard, ni qu'elle aurait enjoint à M. [R] de prendre des mesures et de lui en rendre compte, avant d'en faire le reproche dans la lettre de licenciement.

S'agissant plus précisément du retard lié aux erreurs d'adressage des factures sur les anciens sites administratifs, il ressort des propres pièces de la société Supermarché Match que M. [R] a été actif dans le pilotage des actions menées pour régler cette difficulté (son mail du 7 novembre 2018).

Il justifie par ailleurs de l'initiative prise pour intervenir lors de réunions régionales des magasins au sujet des procédures de traitement des factures afin de les optimiser (ses pièces 29, 32).

Enfin, M. [R] produit l'attestation de M. [K], responsable à l'époque du service trésorerie, qui atteste des qualités professionnelles et actions positives menées par l'intimé, mettant en avant le fait qu'il a été le pilote de la mise en place 'de l'exigence comptable' au sein de la direction financière, avec l'instauration d'un contrôle comptable interne visant à trouver de nouvelles méthodes de contrôle transversales aux services et insistant sur le fait que les différents commissaires aux comptes intervenus ont toujours validé et certifié les comptes, sans aucune remarque particulière.

Au regard de ces différents éléments, la société Supermarché Match échoue à caractériser l'existence de défaillances de M. [R] dans la coordination et le suivi du traitement des factures, susceptibles d'être qualifiées de fautives.

Ainsi, aucune des fautes visées dans la lettre de licenciement n'apparaissant caractérisées, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La société Supermarché Match ne formulant aucune critique sur l'assiette de calcul de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité de licenciement et du rappel de salaire pour la période de mise à pied à titre conservatoire, il convient de confirmer le jugement sur ces différents chefs, la faute grave n'étant pas retenue.

Dans le cadre de son appel incident, M. [R] demande que l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse soit portée à la somme de 93 350 euros, au regard de la brutalité de la rupture de la relation de travail.

Il sera cependant rappelé que l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail vise uniquement à réparer le préjudice causé par la perte injustifiée de l'emploi. Or, il est acquis aux débats que M. [R] a retrouvé un emploi équivalent quelques mois seulement après son licenciement. Aussi, au regard de son ancienneté relativement limitée au sein de l'entreprise, moins de 5 années, et de la courte période sans emploi, il convient sur la base du dernier salaire perçu par M. [R] de réduire à 25 000 euros le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé en ce sens.

Les conditions prévues par l'article 1235-4 du code du travail étant réunies, la société Supermarché Match est condamnée à rembourser aux organismes concernés, les indemnités chômage susceptibles d'avoir été versées à M. [R], dans la limite de 3 mois.

- sur le rappel de prime PPI :

Dans le cadre de son appel incident, M. [R] fait grief aux premiers juges de ne pas avoir condamné la société Supermarché Match à lui verser le reliquat de prime de résultat, soit 4 800 euros, estimant que son employeur l'a injustement limitée à 60% (7 200 euros) de la valeur maximale (12 000 euros) susceptible de lui être versée au titre de l'année 2018, alors qu'elle lui avait été versée en son intégralité les années précédentes.

Il ressort de la pièce 23 de la société Supermarché Match que 6 objectifs avaient été précisément notifiés à M. [R] en vue de l'obtention de la prime de progrès individuelle, avec pour chacun l'attribution d'un pourcentage de la prime en cas d'atteinte de l'objectif.

Il ressort de cette même pièce que la société Supermarché Match a limité la part de prime attribuée pour les objectifs 1, 3 à 6, pour une attribution globale de 60%.

Or, s'il a été vu précédemment que M. [R] a effectivement pris certaines mesures, il résulte des justificatifs fournis de part et d'autre que le salarié n'a pas atteint tous ses objectifs et que les commissions versées l'ont entièrement rempli de ses droits, étant observé que le salarié ne prétend pas non plus ne pas avoir eu les moyens de réaliser ses objectifs, se limitant à faire valoir qu'il percevait la prime en son intégralité l'année précédente et que le rapport d'audit d'Ernst&Young sur la revue des écarts dans les rapprochements bancaires remis en janvier 2019 avait montré l'efficacité des travaux de réorganisation interne mis en oeuvre.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [R] de sa demande au titre de reliquat de prime PPI.

- sur les demandes accessoires :

Au vu de ce qui précède, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Partie perdante, la société Supermarché Match devra également supporter les dépens d'appel.

L'équité commande de condamner la société Supermarché Match à payer à M. [R] une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement entrepris en date du 25 mars 2022 sauf en ses dispositions relatives au montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

CONDAMNE la société Supermarché Match à payer à M. [R] une somme de 25 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ORDONNE à la société Supermarché Match de rembourser aux organismes concernés, les indemnités chômage susceptibles d'avoir été versées à M. [R], dans la limite de 3 mois ;

CONDAMNE la société Supermarché Match à payer à M. [R] une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel ;

DIT que la société Supermarché Match supportera les dépens d'appel.

LE GREFFIER

Serge LAWECKI

LE PRÉSIDENT

Marie LE BRAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 22/00601
Date de la décision : 29/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-29;22.00601 ?
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