ARRÊT DU
29 Mars 2024
N° 348/24
N° RG 21/00608 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TS6F
NRS/AL
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE
en date du
26 Mars 2021
(RG 19/00440 -section )
GROSSE :
aux avocats
le 29 Mars 2024
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANT :
M. [T] [E]
[Adresse 6]
[Localité 5] (MARTINIQUE)
représenté par Me Nicolas GEORGE, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉS :
SOCIETE BFORBIZ anciennement dénommée SARL CLIQEO en liquidation judiciaire
CGEA ILE DE FRANCE EST
[Adresse 1]
[Localité 4]
n'ayant pas constitué avocat, assignation en intervention forcé le 04.11.22 à personne habilitée
S.E.L.A.R.L. MJC2A pris en la personne de Me [F] [X] ès qualité de liquidateur judiciaire de la société BFORBIZ
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Pierre TONOUKOUIN, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS : à l'audience publique du 14 Février 2024
Tenue par Nathalie RICHEZ-SAULE
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Angelique AZZOLINI
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Muriel LE BELLEC
: conseiller faisant fonction de
PRESIDENT DE CHAMBRE
Gilles GUTIERREZ
: CONSEILLER
Nathalie RICHEZ-SAULE
: CONSEILLER
ARRÊT : réputé contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 29 Mars 2024,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Muriel LE BELLEC, conseiller désigné pour exercer les fonctions de président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 24 Janvier 2024
Par contrat de travail à durée indéterminée, Monsieur [T] [E] a été embauché du 3 septembre 2015 au 30 août 2016 en qualité d'attaché commercial au sein de la société CLIQEO, devenue la société devenue BFORBIZ à compter du 9 août 2012 à la suite d'un changement de dénomination sociale.
Le 3 septembre 2015, les parties ont également signé une annexe 1 intitulé
« Rémunération variable ».
A compter du 6 janvier 2016, Monsieur [E] a exercé les fonctions de chef des ventes, puis à compter du 1er septembre 2016, celles de directeur d'agence junior suite à la signature d'un nouveau contrat de travail, prévoyant le versement d'une rémunération fixe de 2.500€ brut, outre une « Rémunération variable Directeur d'Agence Junior » et l'octroi d'un véhicule de fonction.
La convention collective des Bureaux d'étude technique (SYNTEC) était applicable à la relation de travail.
Monsieur [E] a été placé en arrêt de travail. Lors de la visite de reprise, le médecin du travail a rendu l'avis d'aptitude suivant : « Reprise sous réserve d'être affecté dans un environnement de travail différent, mutation souhaitable. A revoir ». Le 30 août 2017, le médecin du travail l'a déclaré inapte dans les termes suivants : « Tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé. Un autre environnement de travail est nécessaire ».
Le 11 septembre 2017, Monsieur [E] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 22 septembre 2017, puis licencié pour inaptitude le 27 septembre 2017.
Le 2 août 2018, Monsieur [E] a saisi le conseil des prud'hommes de Lille en sa section des référés d'une demande de condamnation de la société CLIQEO à lui payer les sommes de 2665,43 euros à titre de rappel de maintien de salaire, 266,54 euros au titre des congés payés y afférents, 6307,20 euros au titre de rappel d'indemnités de sécurité sociale prélevées à tort lors du solde de tout compte, 5842,83 euros au titre de rappel d'indemnité kilométrique et 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance de référé du 24 octobre 2018, le conseil des prud'hommes a dit n'y avoir lieu à référé sur la totalité des demandes de Monsieur [E] et laissé les frais irrépétibles et les dépens à la charge de la partie qui les a exposés.
Le 9 mai 2019, Monsieur [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Lille au fond des demandes de condamnation de son employeur à lui payer diverses sommes :
2.665,43 € à titre de rappel de maintien de salaire et 266,54 € brut au titre des congés payés y afférents ;
6.307,20 € au titre de rappel d'indemnités de sécurité sociale prélevées à torts lors du solde de tout compte ;
5.842,83 € au titre de rappel d'indemnités kilométriques ;
22.308 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse;
11.154 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et .154 € brut à titre de congés payés sur préavis,
2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens.
Par jugement du 26 mars 2021, le conseil de prud'hommes de Lille a :
-dit et jugé que les demandes formées au titre de la rupture du contrat de travail de Monsieur [E] sont prescrites,
En conséquence,
-débouté Monsieur [E] de sa demande de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-débouté Monsieur [E] de sa demande de rappel d'indemnités kilométriques, de sa demande de rappel de maintien de salaire ainsi qu'aux congés payés y afférents, de demande de rappel d'indemnités de sécurité sociale,
-condamné Monsieur [E] au remboursement de la somme de 304,85 euros au titre du trop-perçu versé par la société CLIQEO,
-condamné Monsieur [T] [E] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-dit que chacune des parties garde à sa charge de ses propres dépens,
-débouté les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif.
Le 4 mai 2021, Monsieur [E] a interjeté appel du jugement.
En cours de procédure, la société BFORBIZ (anciennement CLIQEO) a été placée en redressement judiciaire, par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 6 avril 2022. Par jugement du 30 septembre 2022, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en procédure de liquidation judiciaire de la société. Le 4 novembre 2022, Monsieur [E] a assigné en intervention forcée les organes de la procédure collective.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 21 avril 2023, Monsieur [E] demande à la cour de :
Réformer le jugement du Conseil de Prud'hommes de LILLE du 26 mars 2021 en toutes ses dispositions ;
Juger l'action de Monsieur [E] recevable et bien fondée et rejeter dès lors la demande d'irrecevabilité de la société BFORBIZ (anciennement CLIQEO) au titre de la prescription de la demande ;
Juger que la société BFORBIZ (anciennement CLIQEO) a, du fait de son organisation et de son comportement, été à l'origine de la dégradation de l'état de santé de Monsieur [E] rendant son licenciement pour inaptitude sans cause réelle ni sérieuse ;
Faire inscrire au passif de la société BFORBIZ (anciennement CLIQEO) les sommes suivantes :
- 2.665,43€ brut à titre de rappel de maintien de salaire et 266,54€ brut au titre des congés payés y afférents ;
- 6.307,20€ au titre de rappel d'indemnités de sécurité sociale prélevées à tort lors du solde de tout compte ;
- 5.842,83€ net au titre de rappel d'indemnité kilométrique ;
- 22.308€ net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;
- 11.154€ brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1.154€ brut à titre de congés payés sur préavis ;
- 2.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déclarer la décision à intervenir opposable à l'AGS-CGEA d'Ile-de-France Est.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 24 janvier 2023, la Selarl MJC2A, représentée par Maître [F] [X] demande à la cour de :
-Déclarer la société recevable et bien fondée en ses écritures,
Et Y faisant droit
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, à l'exception du quantum de l'indemnité prononcée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau,
A titre liminaire,
- Déclarer prescrites les demandes formées au titre de la rupture du contrat de travail de Monsieur [E]
A titre principal
- Déclarer Monsieur [E] mal fondé en ses demandes,
- Débouter Monsieur [E] de sa demande de rappel d'indemnités kilométriques,
- Débouter Monsieur [E] de sa demande de rappel d'indemnités de sécurité sociale,
- Débouter Monsieur [E] de sa demande de maintien de salaire,
- Débouter Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,
A titre reconventionnel,
- Condamner Monsieur [E] au paiement de la somme de 304,85 euros au titre du trop perçu sur maintien de salaire
A titre infiniment subsidiaire,
- Dire que la demande de rappel de salaire , au titre du maintien de salaire doit être fixé à la somme de 1.755,18 euros,
- Dire que le licenciement de Monsieur [E] repose sur une cause réelle et sérieuse,
- Débouter Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes liées à la rupture de son contrat de travail,
En tout état de cause,
- Condamner Monsieur [E] à payer la MJC2A la somme de 3500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d'appel.
Il convient de se référer aux dernières conclusions des parties régulièrement notifiées par le RPVA pour l'exposé de leurs moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile.
La clôture des débats a été prononcée par ordonnance du 24 janvier 2024.
L'affaire a été appelée à l'audience du 14 février 2024 et mise en délibéré au 29 mars 2024.
MOTIFS
Sur la prescription des demandes de Monsieur [E] liées à la rupture du contrat de travail
Aux termes de l'article L 1471-1 du code du travail « toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit par douze mois à compter de la notification de la rupture ».
L'article 2241 du code civil prévoit que « la demande en justice, même en référé interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure ».
En principe, l'effet interruptif de la prescription liée à une demande en justice en référé ne peut s'étendre d'une action à une autre. Cependant, du fait du principe de l'unicité d'instance qui était applicable en matière prud'homale, il en était autrement lorsque les deux actions au cours d'une même instance concernaient l'exécution du même contrat de travail.
Cependant, le décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail a abrogé les anciens articles R.1452-6 du code du travail qui prévoyait que toutes les demandes liées au contrat de travail devaient faire l'objet d'une même instance et R.1452-7 du même code qui disposait que les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail étaient recevables même en appel. Le principe d'unicité de l'instance prud'homale est ainsi supprimé pour toutes les instances introduites devant le conseil de prud'hommes à compter du 1er août 2016.
Il en résulte qu'à compter de cette date, l'effet interruption de la prescription d'une demande en justice relative à l'exécution d'un même contrat de travail ne peut pas s'étendre à des demandes additionnelles, et les demandes nouvelles devant la cour d'appel ne sont recevables que si elles sont liées aux demandes principales par un lien suffisant.
En l'espèce, Monsieur [E], licencié le 27 septembre 2017, a saisi le conseil des prud'hommes de Lille pour la première fois d'une demande de contestation de son licenciement le 9 mai 2019,outre des demandes liées à l'exécution de son contrat, soit plus de 12 mois après son licenciement.
Cependant Monsieur [E] avait au préalable saisi en référé, le conseil des prud'hommes de demandes en remboursement de frais kilométriques, de rappels de salaires liées à son maintien pendant les congés maladie, et de rappels en paiement d'indemnités de sécurité sociale.
Cette demande en justice présentée le 2 août 2018 a interrompu la prescription de ces actions relatives à l'exécution du contrat de travail, jusqu'à l'ordonnance de référé rendue le 24 octobre 2018. Cependant, cet effet interruptif ne peut s'étendre à l'action en contestation du bien fondé du licenciement du salarié engagée le 9 mai 2019, puisque la règle de l'unicité de l'instance issue des dispositions de l'ancien article R.1452-6 du code du travail n'était plus en vigueur au jour de la saisine initiale des premiers juges en référé, les dispositions du décret du 20 mai 2016 prévoyant que cette disposition cesse de s'appliquer aux instances introduites devant le conseil de prud'hommes à compter du 1er août 2016.
Par conséquent, l'instance prud'homale initiale ayant été introduite après le 1er août 2016, la demande en contestation de la rupture du contrat de travail de Monsieur [E] formée plus de 12 mois après le licenciement n'a pas été interrompue par la demande en justice en référé du 2 août 2018, qui ne concernait que l'exécution du contrat de travail et non sa rupture. Les demandes de Monsieur [E] relatives au licenciement sont donc prescrites et, partant, irrecevables. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de frais kilométriques
Monsieur [E] réclame le paiement d'indemnités kilométriques correspondant à ses déplacements entre le mois de septembre 2015 et le mois de juillet 2016, déduction faite de la somme forfaitaire qu'il a perçue à ce titre qu'il estime s'élever à 150 euros par mois. A l'appui de sa demande il verse aux débats, ses agendas desquels il résulterait qu'il a parcouru pour le compte de la société la distance de 12.593 km. Il précise que par ailleurs, le remboursement forfaitaire versé par la société CLIQEO n'a jamais fait l'objet d'un accord de sa part, et qu'en tout état de cause, cette somme ne couvrait pas les frais exposés d'un montant très largement supérieur à la somme versée.
La société CLIQEO indique en premier lieu qu'elle lui versait la somme forfaitaire de 300 euros en remboursement de ces frais et non celle de 150 euros, et que cette clause d'indemnisation forfaitaire était parfaitement valable.Elle ajoute que le salarié ne produit à l'appui de sa demande aucun justificatif des frais qu'il a exposés pour les mois de février, mars, avril, mai et juillet 2016. Elle fait enfin valoir que selon les justificatifs partiels versés aux débats, le salarié a effectué pour le compte de la société seulement 8.071 km et non 12.593 km, et selon les récapitulatifs hebdomadaires transmis à la société reprenant les rendez-vous clients, il a eu 97 rendez-vous de moins que le nombre de rendez-vous figurant sur les agendas communiqués par le salarié dans le cadre des débats. L'employeur précise encore que selon les agendas communiqués par le salarié, celui-ci déclare avoir effectué des déplacements les lundis et mercredis alors qu'il travaillait ces jours-la en agence et n'effectuait donc aucun déplacement.
Aux termes de son contrat de travail du 3 septembre 2015, le salarié engagé en qualité d'attaché commercial, « pourra être appelé dans l'exercice de ses fonctions à effectuer de courts ou moyens déplacements en France métropolitaine ou en Europe. Ses frais de transport, d'hébergement et de repas seront sur présentation des justificatifs pris en charge ou remboursés aux conditions et selon les modalités en vigueur au sein de la société, lesquelles pourront être modifiées sans que cela ne constitue une modification du présent contrat . Aucun déplacement ne pourra être effectué sans l'accord express de la direction de la société ».
Selon la convention collective SYNTEC « les déplacements hors du lieu de travail nécessités par le service pourront faire l'objet d'une forfait préalable au départ soit par un accord particulier, soit par un règlement spécifique particulier ».
Comme le soutient le salarié, il ne ressort nullement de la convention collective que les déplacements pourront être remboursés de manière forfaitaire, mais qu'un forfait pourra être convenu entre les parties pour certains déplacements avant le départ, soit de manière individualisée, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Il n'est en outre pas établi que le remboursement forfaitaire des frais kilométriques ait été accepté par le salarié de sorte que la société BFORBIZ ne peut opposer au salarié le versement de la somme forfaitaire de 300 euros par mois pour refuser le remboursement des frais kilométriques réellement exposés.
Il reste que le contrat de travail prévoit un remboursement des frais kilométriques sur présentation des justificatifs. Or ne constituent pas de tels justificatifs les agendas produits aux débats par le salarié et retraçant son activité professionnelle difficilement lisibles, d'autant que les informations y figurant concernant le nombre de rendez-vous tenus sont contestées par l'employeur. En revanche, dès lors que l'employeur indique dans ses écritures qu'il ressort des notes de frais que le salarié lui a adressées qu'il justifie avoir effectué 8.071 km, il sera accordé au salarié au titre du remboursement de ses frais kilométriques, la somme de 1070 euros après déduction de la somme de 300 euros par mois figurant au titre de ses frais professionnels sur ses bulletins de paie,. Cette somme sera fixée au passif de la société.
Sur la demande de rappels de salaires pendant les congés maladie
Selon les articles 43 et 44 de la convention collective des bureaux d'études techniques, en cas d'arrêt maladie, l'employeur doit compléter les indemnités journalières de sécurité sociale et les indemnités servies par un régime de prévoyance « jusqu'à concurrence de ce qu'aurait perçu le salarié s'il avait travaillé à temps plein ou à temps partiel , non compris primes et gratifications ».
Il en résulte que pour déterminer le complément de salaire dû au salarié, l'employeur doit tenir compte de,la rémunération fixe et variable que le salarié aurait perçue s'il avait travaillé, et qu'en présence de disposition contractuelle renvoyant au salaire moyen des douze derniers mois de salaires, il convient de tenir compte du salaire fixe et variable afférent aux douze derniers mois de salaires précédant l'arrêt de travail.
En l'espèce, selon son contrat de travail, Monsieur [E] percevait un salaire composé d'une partie fixe et d'une partie variable déterminée en fonction des résultats que le salarié aura réalisés sur chaque mois commercial, la notion de mois commercial étant entendue de la période allant du 01 du mois jusqu'au dernier jour du mois. Il était également prévu que le versement de la rémunération variable se fera le mois de la livraison du contrat, soit dans le cadre classique d'un contrat 30 jours après la signature. Il était ajouté que la prise en compte d'un contrat entrant dans les objectifs commerciaux fixés (selon le tableau mentionné en terme de prise de rendez-vous par semaine, de rendez-vous réalisés par semaine, de nombre de ventes, de prise de commande, d'objectifs de fidélisation, et de prise de commandes totales) impliquait la réalisation de plusieurs conditions cumulatives, soit la signature d'un dossier complet et l'accord du partenaire financier, étant précisé que le contrat est pris en compte au titre du mois au cours duquel la dernière des formalités est réalisée.
Dans ces conditions, seule la moyenne des douze derniers mois travaillés permet de déterminer réellement la rémunération brute du salarié, à l'exclusion de la moyenne des trois derniers mois de salaires qui ne prend pas en compte la totalité des contrats obtenus.
En conséquence, il convient de considérer que le salaire moyen brut du salarié s'élève à 4.079,58 euros. Compte tenu du montant des sommes déjà perçues par le salarié entre le mois d'avril et juin 2018 (soit 10.484 euros), il convient de lui allouer à titre de rappel de salaires la somme de 1755,18 euros, outre la somme de 175,51 euros au titre des congés payés afférents. Cette créance du salarié sera fixée au passif de la société. Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.
Sur la demande de rappel d'indemnité de sécurité sociale déduites du solde de tout compte et la demande reconventionnelle en remboursement d'un trop perçu
Monsieur [E] fait valoir que la somme de 6.307,20 euros brut (ou 5.883,20 euros net) a été retenue sur son solde de tout compte au titre d'indemnité de sécurité sociale de manière indue et sollicite la restitution de cette somme.
L'employeur explique qu'il était tenu de maintenir le salaire de Monsieur [E] pendant son arrêt maladie pendant la durée prévue par la convention collective, déduction faite des indemnités journalières versées au salarié par la CPAM et des sommes perçues par celui-ci au titre de la prévoyance. Il indique que compte tenu des sommes qu'il lui a versées au titre du maintien des salaires, et des sommes perçues directement de la CPAM, il n'est débiteur à l'égard du salarié d'aucune somme, ce dernier étant au contraire débiteur à son encontre au titre d'un trop perçu.
Il ressort du dernier bulletin de salaire du mois de septembre 2017 du salarié que sur la somme de 5883, 20 euros nets déduite par l'employeur au titre des indemnités de sécurité sociale, l'employeur a réintégré au bénéfice du salarié une somme de 3881,44 euros nets. Il ressort par ailleurs de l'attestation de la CPAM que celle-ci a versé au salarié une somme totale de 7.227 euros bruts, ou 6.741,90 euros nets, dont une partie a été versée directement entre les mains du salarié. Compte tenu de ces sommes versées directement entre les mains du salarié par la CPAM, et celles versées entre les mains de l'employeur par subrogation, il n'est pas démontré que l'employeur ait déduit du solde de tout compte une somme au titre des indemnités de sécurité sociale qui ne lui était pas due, le salarié ayant au contraire perçu indûment une somme de 74,64 euros. En conséquence, le salarié sera débouté de sa demande de restitution de la somme de 6.307,20 euros, et sera condamné à verser à l'employeur la somme de 74,64 euros.
La société BFORBIZ soutient, par ailleurs, qu'aux termes de la convention collective, elle n'était tenue de maintenir le salaire de Monsieur [E] que pendant trois mois soit jusqu'au 6 juillet 2017 et qu'il n'est pas contesté qu'elle l'a pourtant maintenue jusqu'au 29 août 2017. Elle en déduit que compte tenu de la somme qu'elle a perçue au titre de la prévoyance, le salarié est débiteur à son égard d'une somme de 230,21 euros. Cependant, la société BFORBIZ anciennement CLIQEO ne justifie pas de la somme qu'elle a effectivement perçue de la prévoyance. En conséquence, elle sera déboutée de sa demande en paiement de la somme de 230,21 euros.
Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive
Les demandes de Monsieur [E] ayant été partiellement accueillies, son action ne peut être considérée comme abusive. La société BFORBIZ sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Sur les demandes accessoires
Compte tenu de l'issue du litige, il convient de fixer au passif de la société BFORBIZ les dépens de première instance, et d'appel ainsi que la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après débats en audience publique par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré prescrites et donc irrecevables les demandes formées au titre de la rupture du contrat de travail de Monsieur [E],
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [E] de sa demande de rappel d'indemnités de sécurité sociale,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
-fixe au passif de la société BFORBIZ les sommes de :
1070 euros au titre du remboursement des frais kilométriques,
1755,18 euros au titre de rappels de maintien de salaires, outre la somme de 175,51 euros au titre des congés payés afférents,
2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens
-condamne Monsieur [E] à payer à la société BFORBIZ la somme de 74,64 euros,
-déboute Monsieur [E] de ses autre demandes,
-déboute la société BFORBIZ de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
-Déclare la décision à intervenir opposable à l'AGS-CGEA d'Ile-de-France Est.
le greffier
Serge LAWECKI
le conseiller désigné pour exercer
les fonctions de président de chambre
Muriel LE BELLEC