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07/07/2023 | FRANCE | N°22/00439

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 3, 07 juillet 2023, 22/00439


ARRÊT DU

07 Juillet 2023







N° 1048/23



N° RG 22/00439 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UFYM



PS/CH

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Lens

en date du

28 Février 2022

(RG 20/00222 -section )











































GROSSE :



aux avocats



le 07 Juillet 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [I] [B]

[Adresse 4]

[Localité 1]

représenté par Me Aurélie BERTIN, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Lancelot RAOULT, avocat au barreau de LILLE





I...

ARRÊT DU

07 Juillet 2023

N° 1048/23

N° RG 22/00439 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UFYM

PS/CH

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Lens

en date du

28 Février 2022

(RG 20/00222 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 07 Juillet 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [I] [B]

[Adresse 4]

[Localité 1]

représenté par Me Aurélie BERTIN, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Lancelot RAOULT, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉE :

S.A.R.L. ATS NORD

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Loïc LE ROY, avocat au barreau de DOUAI, assisté de Me Pierre-Olivier BACH, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l'audience publique du 06 Juin 2023

Tenue par Patrick SENDRAL

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Cindy LEPERRE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie LE BRAS

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 07 Juillet 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 16 mai 2023

FAITS ET PROCEDURE

En septembre 2008 la société ATS NORD a engagé M. [B] en qualité de chauffeur livreur. Les 26 janvier 2018 et 4 février 2019 elle lui a notifié des avertissements. Le 16 septembre 2019 elle l'a licencié pour faute grave.

Par jugement ci-dessus référencé le conseil de prud'hommes, saisi par M. [B] le 10 septembre 2020 de réclamations salariales et indemnitaires pour avertissements et licenciement infondés, les a rejetées.

Vu l'appel formé par M. [B] contre ce jugement et ses conclusions du 9 mai 2023 ainsi closes :

ANNULER l'avertissement du 26 janvier 201 et du 4 février 2019,

CONDAMNER la Société ATS à lui verser les sommes suivantes :

' 5772.98 € à titre d'indemnité de licenciement,

' 4075.08 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 407.50 € de congés payés

' 21 394.17 € en application de l'article L 1235-3 du code du travail

' 2000.00 € à titre de dommages et intérêts à raisons de la rupture brutale et vexatoire

' 3 500.00 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile...»

Vu les conclusions du 15 mai 2023 par lesquelles la société ATS NORD demande à la cour de confirmer le jugement, déclarer irrecevable la contestation de l'avertissement du 26 janvier 2018, rejeter les demandes adverses et lui allouer une somme de 6000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre 3000 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive.

MOTIFS

La contestation de l'avertissement du 26 janvier 2018

L'action, soumise au délai de prescription de deux ans, est prescrite comme ayant été engagée plus de deux ans après la notification de la sanction.

La contestation de l'avertissement suivant

Il est ainsi libellé :

«Vous avez été embauché par notre société ATS Nord en qualité de Chauffeur Livreur le 1er septembre 2008. A ce titre votre devoir est de livrer les marchandises conformément aux instructions reçues et ce, sans les discuter.

Or le 31 janvier dernier, alors qu'un exploitant, prénommé [R], vous a contacté à 12h pour vous donner les instructions pour votre mission entre [Localité 5] et [Localité 6], vous vous êtes montré extrêmement désagréable envers votre interlocuteur. Comprenant que vous étiez énervé il vous a suggéré d'adresser vos revendications au Responsable d'Exploitation, [K] [U] et/ou à Monsieur [H] [O], Directeur de l'Agence, mais vous a également demandé en attendant de bien vouloir faire votre travail. Vous lui avez alors répondu «ce n'est pas la peine, je ne m'adresse qu'aux gens compétents» et vous lui avez raccroché au nez. En d'autres termes, non seulement vous vous êtes permis d'être irrespectueux et impolis envers [R], mais vous avez également critiqué et dénigré vos supérieurs hiérarchiques ce qui est tout à fait inacceptable. Ce comportement est d'autant plus inexcusable que vous avez déjà été sanctionné en janvier 2018 pour des agissements similaires. Le service d'exploitation est en quelque sorte le donneur d'ordre, aussi vous vous devez de le respecter et de suivre ses instructions sans contester. Vous pouvez bien sur émettre une suggestion dans la mesure où vous restez courtois et non agressif. Quant aux commentaires dirigés envers vos supérieurs hiérarchiques, ils sont inexcusables. Par ailleurs, le lundi 07 janvier 2019 vous avez effectué une livraison à 5h50. Ensuite votre Tom-Tom était coupé. Ne sachant pas si vous étiez en pause, nous n'avons pas insisté. Mais à 14h30 lorsque j'ai moi-même essayé de vous joindre, le Tom-Tom était toujours coupé. Je vous ai donc laissé un message pour vous indiquer qu'un chargement devait être effectué à [Localité 7] à destination du Nord. Sans retour de votre part, [K] le Responsable de l'exploitation a tenté à son tour de vous joindre vers 15h45 mais en vain. De ce fait, notre agence de [Localité 7] a dû trouver une autre solution plus onéreuse et nous-même avons perdu une course. Cette situation a donc été préjudiciable à l'entreprise. Pour rappel, votre Tom-Tom est un outil de travail et vous devez donc être joignable en permanence durant vos heures de travail. Dans le cas contraire c'est une faute de votre part. Ce n'est pas non plus la première fois que nous avons à vous reprocher ce genre d'incident. Pour ces motifs nous vous adressons donc cet ultime avertissement. Si de tels faits venaient à se reproduire, nous serions amenés à envisager à votre encontre une sanction beaucoup plus sévère. Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées.»

Sans qu'il y ait lieu d'examiner le grief pris de la tenue de propos irrespectueux il résulte des éléments versés aux débats et il n'est pas utilement contesté que le 7 janvier 2019 M. [B] n'a pas fait le nécessaire pour être joint à tout moment par sa direction, ce alors qu'il était prévu comme devant effectuer urgemment les livraisons commandées par sa direction. M. [B] prétend à la fois qu'à l'époque des faits aucun appareil TOMTOM n'était en service dans l'entreprise et qu'il n'a reçu aucun message sur le TOM TOM mis à sa disposition, ce qui est incohérent. Il appert avec suffisamment d'évidence que les tentatives de sa direction pour lui confier un transport urgent sont restées vaines. Les débats ne font pas apparaître de cause exonératoire ni d'impossibilité matérielle d'être joint et encore moins de recontacter l'employeur dans un délai raisonnable.

M. [B] fait valoir que la sanction est datée du 4 février et que la convocation à l'entretien préalable lui a été adressée après mais outre que l'avertissement pouvait être prononcé sans entretien préalable la convocation du 11 février lui a adressée en raison de faits distincts. La sanction, régulière, proportionnée et justifiée par le pouvoir de l'employeur exercé sans abus, ne pourra donc être annulée.

Le bien-fondé du licenciement pour faute grave

La lettre de licenciement fixant les termes du litige est ainsi rédigée :

«'suite aux faits constatés le 21 Août 2019 consécutifs à une répétition de comportements fautifs, nous vous avons convoqué à un entretien préalable qui devait se tenir le 5 Septembre 2019 avec Monsieur [H] [O]. Vous ne vous êtes pas présenté à cet entretien. En effet, le 21 Août 2019, alors que nous avions deux transports à honorer, nous avons essayé de vous joindre toute la matinée sur votre téléphone professionnel, en vain. Sans nouvelle de votre part, malgré nos nombreux rappels, nous avons été dans l'obligation de proposer d'autres solutions de transport à nos clients, générant des prestations et une qualité de travail dégradées, des coûts supplémentaires et impactant fortement l'image de notre société. Vous ne nous avez finalement recontactés qu'en fin de matinée, en justifiant votre indisponibilité par le défaut de charge de votre téléphone professionnel ! D'ajouter qu'en plus de votre Indisponibilité, vous avez tenu des propos inappropriés et agressifs envers nos équipes, comme l'atteste M. [K] [U], le Responsable d'exploitation. Ce que nous ne pouvons tolérer.

Ce manque de professionnalisme et de respect de vos obligations d'une part et votre comportement agressif d'autre part, s'ajoutent aux deux avertissements précédents en date du 26 Janvier 2018 puis du 4 Février 2019, lesquels évoquaient déjà des problèmes de comportement Irrespectueux, d'insubordination et notamment d'agressivité envers les membres du personnel de l'entreprise. Force est de constater que vous n'avez pas pris la mesure des griefs qui vous étaient opposés et que vous n'avez pas modifié votre comportement. Les nouveaux faits reprochés et réitérés constituent notamment un non-respect de votre obligation de bonne exécution des activités professionnelles prévue dans notre règlement intérieur en son article 7'.1 et non-respect de vos horaires de travail (article 2) et sont constitutifs d'une faute grave. Cet acte de malveillance ainsi que la multiplication d'actes d'insubordination dont vous faites preuve représentent clairement une violation de vos obligations contractuelles et sont constitutifs d'une faute grave, rendant impossible votre maintien dans l'entreprise. Votre absence lors de l'entretien préalable au licenciement ne nous ayant pas permis d'éclairer ces agissements, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave...»

Il résulte des explications des parties et des justificatifs, notamment les attestations concordantes des chefs de service, qu'alors qu'il n'était ni en congé ni en position d'absence régulière M. [B] n'a pas répondu aux nombreuses sollicitations téléphoniques de sa direction entre 8 heures et 10 heures le 21 août 2019.

Il met en avant :

- le fait que son téléphone professionnel n'était pas chargé en raison d'une défectuosité du cordon

cette défense est contredite par le fait qu'il déclare qu'à son réveil il a ouvert son téléphone et «constaté un appel manqué à 7 h 30»

- son droit à déconnexion

ce droit, ouvert sous certaines conditions, ne saurait empêcher l'employeur de tenter de joindre urgemment un salarié et exonérer ce dernier de toute responsabilité s'il n'a pas tenté de recontacter sa direction dans des délais admissibles

- son droit à repos

ce moyen n'est pas fondé puisqu'il devait se tenir à la disposition de son employeur au plus tard avant 10 heures suite à la fin de son service la veille à 21 h 30

- l'absence de communication du règlement intérieur

l'employeur lui reproche une violation d'obligations élémentaires découlant du contrat de travail sans qu'elles aient besoin de figurer au règlement

- l'absence de preuve de la saisie d'une course par l'employeur dans la matinée

ce point est indifférent puisqu'il est acquis que M. [B] est resté inactif et qu'il ne s'est pas tenu à sa disposition

- le fait que l'employeur n'a pas tenté de le joindre sur son téléphone personnel

l'employeur n'en avait pas l'obligation.

L'ensemble des moyens mis en avant par le salarié pour justifier sa négligence sont donc inopérants. Il sera ajouté que les attestations établissent de manière concordante sa particulière agressivité à l'endroit de son chef de service lorsqu'il lui a fait part de son mécontentement.

Ces faits sont de même nature que ceux déjà sanctionnés et ils constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement. Vu leur gravité et leur réitération ils rendaient impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même durant le délai congé.

Pour l'ensemble de ces raisons il convient de confirmer le jugement.

Les demandes reconventionnelles

Aucun élément circonstancié ne caractérise l'acharnement procédural et l'abus de droit que prête l'employeur à son ancien salarié et il ne justifie d'aucun préjudice particulier qui en serait directement issu. Sa demande de dommages-intérêts sera donc rejetée mais il n'est pas inéquitable de condamner l'appelant à lui payer une indemnité de procédure au titre des frais exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

DECLARE irrecevable l'action en contestation de l'avertissement du 26 janvier 2018

CONFIRME le jugement

CONDAMNE M. [B] à payer à la société ATS NORD la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE le surplus des demandes

CONDAMNE M. [B] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER

Cindy LEPERRE

LE PRESIDENT

Marie LE BRAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 3
Numéro d'arrêt : 22/00439
Date de la décision : 07/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-07;22.00439 ?
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