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06/07/2023 | FRANCE | N°22/05429

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 06 juillet 2023, 22/05429


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 06/07/2023





****





N° de MINUTE :

N° RG 22/05429 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTN6



Ordonnance (N° 20/01408) rendue le 10 Novembre 2022 par le tribunal judiciaire de Douai





APPELANTE



SA CNP Assurances entreprise régie par le Code des Assurances, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adre

sse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Raphaël Thery, avocat au barreau de Douai, avocat plaidant

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République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 06/07/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 22/05429 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UTN6

Ordonnance (N° 20/01408) rendue le 10 Novembre 2022 par le tribunal judiciaire de Douai

APPELANTE

SA CNP Assurances entreprise régie par le Code des Assurances, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Raphaël Thery, avocat au barreau de Douai, avocat plaidant

INTIMÉE

Commune Ville de [Localité 2]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Hugues Senlecq, avocat au barreau de Dunkerque, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 13 avril 2023 tenue par Guillaume Salomon magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de chambre

Claire Bertin, conseiller

Yasmina Belkaid, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023 après prorogation en date du 15 juin 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 27 mars 2023

EXPOSE DU LITIGE :

La commune de [Localité 2] a souscrit un contrat d'assurance auprès de la SA Cnp Assurances en couverture de ses obligations statutaires d'employeur au profit de ses agents permanents.

Les indemnités journalières versées par la commune de [Localité 2] au titre d'un arrêt de travail de Mme [I], agent municipal, résultant d'un accident de la circulation survenu le 4 septembre 2003, ont été pris en charge par Cnp Assurances.

Mme [I] est devenue agent de la commune d'[Localité 4].

Alors que le contrat d'assurance a été résilié fin 2004, la commune de [Localité 2] a sollicité en 2010 auprès de Cnp Assurances la prise en charge d'un nouvel arrêt de travail de Mme [I], qu'elle imputait à une rechute.

L'expert [P], désigné par le juge des référés, a conclu en mars 2014 que l'arrêt de travail de 2010 ne constitue pas une rechute de l'accident de 2003.

Par acte du 16 février 2015, la commune de [Localité 2] a sollicité à titre principal la condamnation de Mme [I] à lui restituer la somme de 138 036,02 euros correspondant aux sommes qu'elle estime avoir remboursé à tort à la commune d'[Localité 4] au titre d'arrêts de travail sans lien avec l'accident de 2003 et subsidiairement, si l'avis de l'expert n'était pas suivi, la condamnation in solidum de Cnp Assurances et d'Aviva (assureur du véhicule impliqué dans l'accident) à lui payer cette même somme.

Par jugement du 15 mars 2018, le tribunal de grande instance de Douai a :

- dit que le litige à titre principal relatif à la détermination d'une créance détenue par la commune de [Localité 2] sur Mme [I] et sur la commune d'[Localité 4] relevait de la compétence de la juridiction administrative,

- dit que l'appréciation du bien-fondé de la demande de garantie de la commune de [Localité 2] contre les sociétés Cnp et Aviva dépendait de l'appréciation du bien-fondé du recours pécuniaire susvisé de la commune de [Localité 2],

- renvoyé en conséquence les parties à mieux se pourvoir,

- laissé à chacune des parties la charge de ses dépens,

- débouté leurs parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les appels formés par la commune de [Localité 2] à l'encontre de ce jugement ont été déclarés irrecevables.

Par acte du 29 septembre 2020, Mme [I] a fait assigner Aviva assurances, la commune d'[Localité 4] et la commune de [Localité 2] devant le tribunal judiciaire de Douai, notamment aux fins d'annulation du rapport de l'expert [P], et de condamnation de Aviva à garantir les conséquences de ses lésions.

Par acte du 25 août 2021, la commune de [Localité 2] a appelé en intervention forcée Cnp Assurances aux fins de condamnation de cet assureur à lui payer la somme de 138 036,02 euros. Les deux instances ont été jointes.

Par ordonnance rendue le 10 novembre 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Douai a :

- déclaré à ce jour sans objet la demande formée par Cnp Assurances, tendant à voir déclarer irrecevable, en raison de l'autorité de la chose jugée, la demande en paiement de la somme de 138 036,02 euros formée à son encontre par la commune de [Localité 2] à l'appui de l'assignation que cette dernière a fait délivrer le 25 août 2021';

- débouté Cnp Assurances et la commune de [Localité 2] de leurs demandes respectives en paiement des frais irrépétibles';

- condamné Cnp Assurances aux dépens de l'incident';

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état.

Par déclaration du 25 novembre 2022, Cnp Assurances a formé appel de l'intégralité du dispositif de cette ordonnance.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 6 mars 2023, Cnp Assurances demande à la cour d'infirmer l'ordonnance critiquée et, statuant à nouveau de':

- déclarer irrecevables les demandes et prétentions émises par la commune de [Localité 2] à son encontre devant le tribunal judiciaire de Douai';

- débouter la commune de [Localité 2] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions dirigées à son encontre';

- condamner la commune de [Localité 2] à lui payer la somme de 2 618,20 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme se décomposant comme suit :

o 854,20 euros pour les frais irrépétibles exposés en première instance,

o 1764 euros pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel

- condamner la commune de [Localité 2] aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Marie Hélène Laurent, avocat.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que :

- la demande dont est à nouveau saisi le tribunal judiciaire de Douai par la commune de [Localité 2] est identique à celle ayant donné lieu au jugement du 15 mars 2018'; aucun jugement du tribunal administratif n'est produit';

- en considération d'une identité de parties, de causes et d'objet, l'irrecevabilité tirée d'une autorité de chose jugée est établie';

- contrairement à la motivation de l'ordonnance critiquée, la commune de [Localité 2] n'a pas notifié de conclusions le 5 juillet 2022, qui sont pourtant visées par le juge de la mise en état'; en l'absence de toute conclusions par lesquelles la commune de [Localité 2] aurait renoncé à sa demande indemnitaire à son encontre, le tribunal judiciaire reste ainsi saisi de la demande de condamnation à payer la somme de

138 036,02 euros. La fin de non-recevoir invoquée conserve par conséquent un objet.

Aux termes de ses conclusions notifiées le 9 février 2023, la commune de [Localité 2], intimés et appelants incidents, demande à la cour d'infirmer l'ordonnance critiquée en ce qu'elle :

- déclare sans objet la demande formée par Cnp assurances, tendant à voir déclarer irrecevable, en raison de l'autorité de la chose jugée, la demande en paiement de la somme de 138.036,02 euros formée à son encontre par la commune de [Localité 2] à l'appui de l'assignation qui cette dernière a fait délivrer le 25 août 2021,

- déboute Cnp Assurances et la commune de [Localité 2] de leurs demandes respectives en paiement de frais irrépétibles,

et statuant de nouveau de':

- rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée formulée par Cnp Assurances en première instance ;

- la déclarer recevable en ses demandes ;

- débouter Cnp assurances de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner Cnp assurances au paiement d'une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'incident et de l'appel.

A l'appui de ses prétentions, elle fait valoir que :

- si le juge de la mise en état s'est trompé sur la date de notification des conclusions, il existe toutefois des conclusions notifiées le 7 mai 2021 dans lesquelles les demandes formulées à l'encontre de la Cnp ne figurent plus ; ces conclusions ont cependant été prises dans l'instance n°20/4108, à laquelle Cnp assurances n'était pas partie à la date de leur notification ;

- s'il est admis que les conclusions notifiées le 7 mai 2021 ne pouvaient contenir de prétentions à l'encontre d'une partie qui n'étaient pas encore en cause, l'autorité de chose jugée ne peut toutefois être invoquée dès lors qu'il n'existe pas d'identité de parties et d'objet': les demandes n'émanent pas d'elle, mais de Mme [I]'; il appartient à la cour de statuer sur cette fin de non-recevoir, y compris par voie d'évocation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les parties s'accordent sur la réformation de l'ordonnance critiquée, estimant que la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée n'est pas privée d'objet par des conclusions notifiées à Cnp assurances et par lesquelles les demandes indemnitaires formulées à l'encontre de cette dernière auraient été abandonnées par la commune de [Localité 2].

Sur la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée :

Aux termes de l'article 1355 du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité.

En l'espèce, l'instance en cours devant le tribunal judiciaire présente une triple identité de parties, de cause et d'objet avec celle ayant donné lieu au jugement définitivement rendu le 15 mars 2018 par le tribunal de grande instance de Douai':

d'une part, tant la Cnp assurances que la commune de [Localité 2] sont parties à chacune des instances'; la seule circonstance que la commune de [Localité 2] soit demandeur principal dans l'instance clôturée par le jugement du 15 mars 2018, alors qu'elle est défenderesse dans la nouvelle instance, et corrélativement que Cnp assurances soit appelée en intervention forcée au lieu d'être défenderesse est indifférente, dès lors que ces parties y figurent dans leurs relations respectives en leur qualité de cocontractantes résultant de la souscription par la commune de [Localité 2] du contrat d'assurance couvrant ses obligations de maintien du traitement de son agent pendant son arrêt de travail.

d'autre part, l'objet de la demande vise dans les deux instances la condamnation de Cnp assurances à payer à la commune de [Localité 2] la somme identique de 138 036,02 euros'; à cet égard, il est indifférent d'examiner la demande formée par Mme [I], alors qu'aucune fin de non-recevoir n'est opposée à celle-ci et que seule la demande formulée par la commune de [Localité 2] à l'encontre de Cnp assurances doit être prise en compte pour apprécier une telle identité d'objet.

enfin, la cause de la demande est identique dans ces deux instances, dès lors qu'elle vise l'exécution du même contrat d'assurance groupe souscrit par cette dernière et en couverture de l'accident subi en 2003 par Mme [I]';

Il en résulte que le jugement ayant renvoyé la commune de [Localité 2] à mieux se pourvoir a autorité de chose jugée s'agissant de la demande d'indemnisation formulée par la commune de [Localité 2] à l'encontre de Cnp Assurances.

Une telle demande est par conséquent irrecevable. L'ordonnance ayant déclaré sans objet la fin de non-recevoir invoquée par Cnp Assurances est par conséquent réformée de ce chef.

Sur les dépens et les frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile :

Le sens du présent arrêt conduit :

d'une part à infirmer l'ordonnance attaquée sur ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,

et d'autre part, à condamner la commune de [Localité 2], outre aux entiers dépens de première instance et d'appel, à payer à CNP assurances les sommes de 854,20 euros et de 1 764 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure respectivement au titre des procédures devant les premiers juges et d'appel.

En application de l'article 699 du code de procédure civile, la cour autorisera Me Marie-Hélène Laurent à recouvrer directement contre la personne condamnée les dépens d'appel dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Réforme l'ordonnance rendue le 10 novembre 2022 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Douai dans toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Déclare irrecevables les demandes formées par la commune de [Localité 2] à l'encontre de la SA Cnp Assurances dans le cadre des instances enregistrées sous les numéros de répertoire général 20/1408 et 21/1227 et jointes devant le tribunal judiciaire de Douai, au titre de l'autorité de chose jugée qui s'attache au jugement rendu le 15 mars 2018 par le tribunal de grande instance entre la commune de [Localité 2] et la SA Cnp Assurances';

Condamne la commune de [Localité 2] aux dépens de première instance et d'appel ;

Autorise Me Marie-Hélène Laurent à recouvrer directement contre la commune de [Localité 2] les dépens de première instance et d'appel dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision';

Condamne la commune de [Localité 2] à payer à la SA Cnp Assurances les sommes de 854,20 euros et de 1 764 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure respectivement au titre des procédures devant les premiers juges et d'appel.

Le Greffier

Harmony Poyteau

Le Président

Guillaume Salomon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 22/05429
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;22.05429 ?
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