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06/07/2023 | FRANCE | N°20/05397

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 06 juillet 2023, 20/05397


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 06/07/2023



****





N° de MINUTE :

N° RG 20/05397 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TLOC

& N° RG 21/00290 (procédures jointes par ordonnance de jonction en date du 07 octbre 2021)



Jugement n°2019017609 rendu le 17 novembre 2020 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance de référé n° 52/21 rendue le 10 mai 2021 par le premier président de la cour d

'appel de Douai

Ordonnance n° 22/154 rendue le 28 avril 2022 par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Douai





APPELANTE aux deux procédures



SAS N...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 06/07/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 20/05397 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TLOC

& N° RG 21/00290 (procédures jointes par ordonnance de jonction en date du 07 octbre 2021)

Jugement n°2019017609 rendu le 17 novembre 2020 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance de référé n° 52/21 rendue le 10 mai 2021 par le premier président de la cour d'appel de Douai

Ordonnance n° 22/154 rendue le 28 avril 2022 par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Douai

APPELANTE aux deux procédures

SAS Ntico Technology prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 1]

représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée par Me Hélène Bernard, avocat plaidant, substituée à l'audience par Me Dimitri Lecuyer, avocats au barreau de Lille

INTIMÉE aux deux procédures

SAS Newcod agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 2]

représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée par Me Sandrine Minne, avocat plaidant, substituée à l'audience par Me Justine Cordonnier, avocats au barreau de Lille

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Dominique Gilles, président de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Clotilde Vanhove, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

DÉBATS à l'audience publique du 06 avril 2023 après rapport oral de l'affaire par Pauline Mimiague, conseiller

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 06 juillet 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président, et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 22 mars 2023

****

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [Y] [S] et la société Newcod (SARL ayant pour gérant M. [N] [B]) ont créé en 2011 la société Ntico Technologie, qui aura pour président M. [B] et pour directeur général M. [S].

Suivant un protocole d'accord en date du 12 juillet 2018, la société Newcod a cédé les titres qu'elle détenait dans le capital de la société Ntico Technology à M. [S].

Au mois de décembre 2018 les sociétés Ntico Technology et Newcod ont conclu un 'contrat de prestation de services' prenant effet au 1er janvier 2019, ayant pour objet, tel que défini à son article 1, l'engagement de la société Newcod 'à intervenir auprès de la Direction Générale du groupe Ntico Technology dans le cadre de conseil en Stratégie Commerciale, Organisationnelle ou de Ressources Humaines'.

La société Newcod a adressé des factures au titre des 'prestations de conseil en organisation et stratégie commerciale' pour les mois de janvier et février 2019 qui ont été réglées par la société Ntico Technology.

Considérant que la société Newcod n'avait en réalité exécuté aucune prestation, la société Ntico Technology l'a mise en demeure le 25 juin 2019 de réaliser l'accompagnement prévu dans la convention puis s'est prévalue le 9 juillet 2019 de la 'résiliation' du contrat aux torts de la société Newcod.

Par acte du 23 septembre 2019 la société Newcod, devenue une société par action simplifiée (SAS), a assigné la société Ntico Technology devant le tribunal de commerce de Lille Métropole afin de contester la 'résolution' du contrat et de demander la condamnation de la société Ntico Technology au paiement des sommes prévues dans celui-ci.

Par jugement contradictoire du 17 novembre 2020 le tribunal de commerce de Lille Métropole a :

- dit injustifiée la résolution du contrat de prestation de services du 19 décembre 2018 par la société Ntico Technology,

- débouté cette société de l'ensemble de ses moyens, fins et conclusions, y compris de ses demandes reconventionnelles,

- condamné la société Ntico Technology à payer à la société Newcod la somme de 264 000 euros portant trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 12 juillet 2019,

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- condamné la société Ntico Technology à payer à la société Newcod la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné la société Ntico Technology aux dépens, taxés et liquidés à la somme de 73,24 euros en ce qui concerne les frais de greffe.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 23 décembre 2020 et par déclaration rectificative remise le 12 janvier 2021, la société Ntico Technology a relevé appel du jugement en toutes ses dispositions ; les deux procédures, enrôlées séparément, ont été jointes par ordonnance du 7 octobre 2021.

Par ordonnance du 28 avril 2022 le conseiller de la mise en état a :

- constaté que la société Newcod se désiste de sa demande tendant à voir ordonner la radiation de l'affaire du rôle,

- débouté la société Newcod de ses demandes tendant à voir déclarer irrecevables comme nouvelles au sens de l'article 524 (ou plutôt 564) du code de procédure civile les demandes de la société Ntico Technology aux fins de voir 'juger que l'acte introductif d'instance devant le tribunal de commerce de Lille Métropole en date du 23 septembre 2019 est entaché d'une irrégularité de fond qui affecte sa validité en sorte qu'il sera déclaré nul et de nul effet, et partant celle de l'ensemble des actes subséquents en ce compris le jugement entrepris qui sera également déclaré nul et de nul effet, les parties devant être invitées à mieux se pourvoir', 'dire et juger que l'indemnité de résiliation dont se prévaut la société Newcod présente le caractère de clause pénale' et 'dire et juger que la clause pénale litigieuse présente un caractère disproportionné et que la société Newcod ne fait état d'aucun préjudice'.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 28 septembre 2021 la société Ntico Technology demande à la cour de :

avant tout débat sur le fond :

- juger que l'acte introductif d'instance devant le tribunal de commerce de Lille Métropole en date du 23 septembre 2019 est entaché d'une irrégularité de fond qui affecte sa validité en sorte qu'il sera déclaré nul et de nul effet, et partant celle de l'ensemble des actes subséquents en ce compris le jugement entrepris qui sera également déclaré nul et de nul effet, les parties devant être invitées à mieux se pourvoir,

subsidiairement :

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter la société Newcod de l'ensemble de ses demandes,

- juger que la convention d'accompagnement a été régulièrement résolue aux torts exclusifs de la société Newcod,

- la condamner à lui rembourser la somme de 20 000 euros HT soit 24 000 euros TTC indûment payée au titre des factures de janvier et février 2019,

- condamner la société Newcod à lui payer la somme de 70 000 euros au titre du préjudice financier qu'elle lui a causé,

à titre plus subsidiaire :

- constater l'existence d'une erreur-obstacle empêchant la rencontre de volontés des parties et partant, la valable formation du contrat d'accompagnement litigieux,

- juger la convention nulle et de nul effet,

- condamner la société Newcod à lui rembourser la somme de 24 000 euros qu'elle lui a indûment versée,

à titre infiniment subsidiaire :

- dire et juger que l'indemnité de résiliation dont se prévaut la société Newcod présente le caractère d'une clause pénale,

- dire et juger qu'elle présente un caractère disproportionné et que la société Newcod ne fait état d'aucun préjudice,

- juger y avoir lieu de limiter le montant de l'indemnisation à la somme de 24 000 euros d'ores et déjà réglée par elle,

en tout état de cause :

- condamner la société Newcod au paiement d'une somme de 12 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec droit pour la SCP Processuel de se prévaloir des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'appelante conclut à la nullité de l'assignation initiale à raison d'une irrégularité de fond du fait du défaut de pouvoir de l'organe dirigeant représentant la société mentionné dans l'acte ; elle explique que l'assignation a été délivrée pour la 'SARL Newcod', ayant son siège social [Adresse 3] à [Localité 4] et représentée par son 'représentant légal', que, dès lors qu'il est mentionné qu'il s'agit d'une SARL, son organe représentatif ne peut qu'être un gérant, à savoir M. [B], or celui-ci n'avait plus le pouvoir de la représenter la société ayant été transformée en SAS, son siège social transféré, la démission de M. [B] actée et son épouse désignée comme président ; l'action aurait alors été introduite par un organe qui n'existait plus.

Sur le fond, elle conclut, en application de l'article 1133 du code civil, à la nullité du contrat à raison d'une 'erreur obstacle' ayant empêché la rencontre des volontés et la formation du contrat, compte tenu du désaccord des parties sur l'objet même du contrat.

Au sujet de la résolution du contrat, elle reproche au premier juge d'avoir mal interprété le contenu du contrat et dénaturé la convention : selon elle, la commune intention des parties était de confier à M. [B] la mission d'accompagner, assister et former son successeur désigné parmi les salariés historiques du Groupe Ntico Technology mais il ne s'agissait pas d'un contrat cadre dont le contenu aurait dû être déterminé par des contrats d'application successifs. Elle soutient que la société Newcod n'a pas réalisé la moindre prestation ainsi déterminée, que M. [B] n'a d'ailleurs jamais eu l'intention de l'exécuter, puisqu'il estimait que la convention n'était destinée qu'à habiller artificiellement le prix de cession de ses actions dans un but exclusivement fiscal, et qu'elle ne pouvait plus l'être après la démission de M. [B] de ses fonctions de gérant en mai 2019. Elle soutient en outre que la résolution est régulière en la forme.

L'appelante réclame en conséquence de la résolution la restitution des sommes payées en vertu de la convention, qui ne correspondent à aucune prestation, et une indemnisation à raison de la désorganisation (perte de client et impossibilité de satisfaire aux attentes de nouveaux clients) résultant de l'absence d'accompagnement par la société Newcod.

Subsidiairement, elle sollicite la réduction de l'indemnité de résiliation, précisant qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle en appel mais d'un moyen pour s'opposer à la demande adverse, faisant valoir que la clause dont la société Newcod sollicite application est clause pénale, et non d'une clause de dédit, dont l'application est disproportionnée en l'espèce dès lors que le cocontractant n'a réalisé aucune prestation et ne subit aucun préjudice.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 21 octobre 2021, la société Newcod demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter la société Ntico Technology de sa demande tendant à voir déclarer nul et de nul effet l'acte introductif d'instance et partant l'ensemble des actes subséquents, y compris le jugement,

- la débouter de sa demande visant à dire et juger que l'indemnité de résiliation présente le caractère d'une clause pénale et qu'elle présente un caractère disproportionné,

- à titre subsidiaire, condamner la société Ntico Technology à lui payer la somme de 264 000 euros portant trois fois le taux d'intérêts légal à compter du 12 juillet 2019,

- à titre très subsidiaire, condamner la société Ntico Technology à lui payer :

- la somme de 84 000 euros au titre de l'exécution du contrat pour la période de janvier 2019 à juillet 2019 portant trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 12 juillet 2019,

- la somme de 153 000 euros au titre du manque à gagner pour la période d'août 2019 à décembre 2020,

- en tout état de cause, débouter la société Ntico Technology de ses demandes et la condamner à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Pour s'opposer à la demande de nullité de l'assignation introductive d'instance, elle fait valoir, d'une part, que le défaut de désignation de l'organe représentant la société, comme l'omission de sa forme, constituent des vices de forme nécessitant la preuve d'un grief, non rapportée en l'espèce, et, d'autre part, que ni son numéro de RCS, ni sa personnalité juridique n'ont été modifiés de sorte qu'elle conserve sa capacité d'ester en justice.

S'agissant de la résolution du contrat, elle fait valoir en premier lieu qu'elle est irrégulière parce que la mise en demeure adressée le 25 juin 2019 ne répond pas aux exigences de l'article 1226 du code civil en ne lui permettant pas de s'exécuter dans un délai raisonnable. En second lieu, elle soutient qu'elle est injustifiée dans la mesure où le contrat était un contrat cadre devant donner lieu à des contrats d'application que la société Ntico Technology n'a jamais voulu formaliser. Selon elle, il ne peut y avoir d'inexécution contractuelle de sa part que s'il était démontré que la société Newcod l'avait initialement sollicitée pour la mise en place de contrats d'application.

L'intimée soutient qu'en conséquence, et s'agissant d'un contrat à durée déterminée qui ne pouvait être résilié, la société Ntico Technology est tenue de régler l'intégralité des sommes correspondant à l'exécution du contrat. Subsidiairement, elle se prévaut de l'article 5 du contrat prévoyant une indemnité de résiliation à la charge de la société Ntico Technology, équivalente à la facturation restant à courir, qui ne s'analyse pas en une clause pénale. Plus subsidiairement, elle sollicite des dommages-intérêts en raison du manque à gagner du fait de la résiliation fautive.

Enfin, la société Newcod s'oppose à la demande reconventionnelle de la société Ntico Technology aux motifs qu'elle ne démontre pas le préjudice financier allégué et n'est pas fondée à en demander réparation dans la mesure où elle est à l'origine de la rupture du contrat.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé du surplus de leurs moyens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 mars 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience de plaidoiries du 28 avril suivant.

MOTIFS

Sur la nullité du jugement

Selon l'article 114 du code de procédure civile, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle d'ordre public et la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité.

L'article 117 du même code dispose que constitue une irrégularité de fond affectant la validité d'un acte le défaut de pouvoir d'une partie ou d'une personne figurant au procès comme représentant soit d'une personne morale, soit d'une personne atteinte d'une incapacité d'exercice, et l'article 119 que les exceptions de nullité fondées sur l'inobservation des règles de fond doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d'un grief.

Il est mentionné sur l'assignation du 23 septembre 2019 qui saisit le tribunal de commerce qu'elle est faite à la requête de 'la SARL Newcod (...) ayant son siège social [Adresse 3], sous le numéro 529 905 796, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège'.

Selon procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 mai 2019, il avait été décidé du changement de forme de la société Newcod, qui est devenu une SAS, avec transfert de son siège social à l'adresse [Adresse 2] à [Localité 5] et nomination de Mme [X] [B] en qualité de présidente de la société, en remplacement de M. [B] 'gérant sortant'.

Il ne peut se déduire de la mention erronée de la forme de la société ou de l'adresse de son siège social, l'un et l'autre ne constituant que des vices de formes, au motif que la société était antérieurement une SARL ayant pour gérant M. [B], que l'acte aurait été accompli par ce dernier, alors qu'il est mentionné que la société est représentée par son 'représentant légal', et non un 'gérant'.

En outre, l'erreur dans la désignation de l'organe qui représente légalement une personne morale dans un acte de procédure ne constitue qu'un vice de forme qui ne peut entraîner la nullité de l'acte que sur justification d'un grief.

Or la société Ntico Technology, qui se borne à soutenir qu'il s'agit d'une irrégularité de fond, n'invoque ni ne justifie d'un grief que lui causerait l'irrégularité qu'elle invoque.

Il convient dès lors de rejeter la demande d'annulation de l'acte introductif d'instance et, par voie de conséquence, du jugement déféré.

Sur la demande en paiement de la société Newcod

S'agissant en premier lieu de la nullité du contrat, invoquée par l'appelante, il convient d'approuver les premiers juges qui ont rejeté l'ensemble de ses demandes, y compris au titre de la nullité du contrat, retenant que le contrat avait été régularisé par les dirigeants dûment habilités de chacune des deux sociétés et que les deux premiers mois du contrat avaient été payés par la société Ntico Technology conformément aux dispositions contractuelles, la cour relevant en outre que la société Ntico Technology a réclamé l'exécution du contrat et effectué les paiements évoqués ci-dessus, alors même qu'elle avait déjà connaissance de ce qui, selon elle, caractérise un désaccord sur l'objet même du contrat, à savoir la position de M. [B] qui dans un courrier électronique du 18 décembre 2018 évoque une prestation 'fictive' qui ne recouvrirait que la 'finalisation de la vente' des parts sociales.

S'agissant en second lieu de la résolution du contrat, c'est à bon droit que le premier juge a retenu qu'à défaut de demande de 'mission' adressée par la société Ntico Technology au prestataire, la société Newcod, il n'était pas rapporté la preuve d'une inexécution ou d'une faute de cette dernière justifiant une 'résiliation', alors que :

- le contrat, même s'il ne se définit pas comme un 'contrat cadre' nécessitant la signature d'autres contrats pour son exécution, stipule :

- dans son 'exposé', qu' 'il est convenu que chaque société appartenant majoritairement à Ntico Technology pourra faire appel aux services de la société Newcod',

- au titre des obligations de la société prestataire, que celle-ci 's'engage à mettre en oeuvre, pour l'exécution de l'ensemble des tâches et prestations à sa charge en vertu des présentes, toute la diligence requise et à faire tout ce qui sera en son pouvoir pour que les prestations rendues au bénéficiaire ainsi que les conseils et l'assistance qu'il sera amené à lui apporter répondent au mieux à ses besoins et attentes.'

- à son article 3 relatif aux 'obligations de la société bénéficiaire', que celle-ci 's'oblige notamment, chaque fois que les prestations demandées le rendront nécessaire, à laisser au prestataire libre accès à ses locaux et installation et à mettre à la disposition dudit personnel tous moyens susceptibles de faciliter son intervention (...)',

termes desquels il résulte que l'intervention de la société Newcod, prestataire, se fait sur demande de la société Ntico Technology, et ce, quand bien même l'objet de l'assistance serait parfaitement déterminable, au regard notamment du protocole de cession de parts sociales qui prévoit que 'M. [N] [B] s'engage à faciliter la reprise de la Société et à accompagner le Cessionnaire dans le cadre de son développement précisé ci-après de manière à apporter tout soutien technique et commercial au Cessionnaire (la 'Période d'Accompagnement')' et renvoie à la signature d'un contrat de prestations (article 5.2),

- les courriers électroniques échangés entre les parties avant comme après la mise en demeure adressée par la société Ntico Technology le 25 juin 2019 ne contiennent pas de demande précise d'intervention qui pourrait donner lieu à une exécution ; si M. [S] évoque des sollicitations et des relances d'employés auprès de M. [B] (par exemple dans un courrier électronique du 16 mai 2019), aucune pièce ne vient confirmer ces sollicitations ou relances,

- même si le dirigeant de la société Newcod avait manifesté initialement son intention de ne pas effectuer de prestation, le 27 mai 2019 elle a proposé un rendez-vous pour faire le point, puis, dans un courrier électronique daté du 5 juillet 2019, répondant à la mise en demeure, a indiqué se tenir 'à [sa] disposition pour discuter des modalités d'exécution de cette prestation (...) qui peut démarrer dès la semaine prochaine', auquel M. [S] a répondu par un courrier électronique du 6 juillet rappelant seulement leurs divergences de vue quant au contentu de la convention, et enfin, dans une lettre de son conseil du 12 juillet 2019 la société Newcod'réitère officiellement sa disponibilité' et met en demeure la société Ntico Technologie de 'formaliser expressément toute demande de conseils [qu'elle] pourrait avoir'.

S'agissant des sommes mises à la charge de la société Ntico Technology, dès lors que l'obligation est à durée déterminée (24 mois à compter du 1er janvier 2019), si le contrat n'est pas résolu pour un juste motif avant le terme, la société Ntico Technology reste tenue de l'exécuter jusqu'à son terme, en conséquence, au paiement de l'intégralité des sommes dues en vertu du contrat, soit la somme de 10 000 euros hors taxe par mois (rémunération mensuelle forfaitaire fixée à l'article 4 du contrat) sur vingt-deux mois, soit 264 000 euros TTC. La cour relève à titre surabondant que l'article 5 du contrat qui stipule que 'toute dénonciation de la part de Ntico Technology donnera lieu à une indemnité équivalente à la facturation restant à courir jusqu'au terme du contrat', et dont le premier juge a fait application, fixe une règle équivalente et s'analyse en une clause de dédit et non une clause pénale sanctionnant une inexécution.

La résolution du contrat ayant été jugée non justifiée, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que la société Ntico Technology ne peut ni solliciter le remboursement des rémunérations déjà versées, ni se prévaloir d'une faute de la société Newcod lui ayant causé un préjudice.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement qui déboute la société Ntico Technology de ses demandes et la condamne au paiement des rémunérations restant dues avec intérêts lesquels ne font l'objet d'aucune contestation.

Sur les demandes accessoires

Vu les articles 696 du code de procédure civile, il convient de confirmer le jugement s'agissant des dépens et de mettre les dépens d'appel à la charge de l'appelante, qui succombe.

Eu égard aux circonstances du litige, l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance ou en cause d'appel. Le jugement sera infirmé en conséquence.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette la demande tendant à voir annuler l'assignation délivrée le 23 septembre 2019 à la requête de la société Newcod et le jugement déféré ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la société Ntico Technology à payer à la société Newcod la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

Déboute la société Newcod de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile formée en première instance ;

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Ntico Technology aux dépens d'appel.

Le greffier

Valérie Roelofs

Le président

Dominique Gilles


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 20/05397
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;20.05397 ?
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