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30/06/2023 | FRANCE | N°21/00413

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 30 juin 2023, 21/00413


ARRÊT DU

30 Juin 2023







N° 891/23



N° RG 21/00413 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TQAW



MLBR/CH















AJ

















Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

18 Février 2021

(RG 20/00599 -section )






































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GROSSE :



aux avocats



le 30 Juin 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [B] [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Laurence PIPART-LENOIR, avocat au barreau de LILLE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 5917800...

ARRÊT DU

30 Juin 2023

N° 891/23

N° RG 21/00413 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TQAW

MLBR/CH

AJ

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE

en date du

18 Février 2021

(RG 20/00599 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 30 Juin 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [B] [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Laurence PIPART-LENOIR, avocat au barreau de LILLE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 591780022021003211 du 13/04/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)

INTIMÉE :

S.A.S. DU BARBIER

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI, assisté de Me Patricia JEANNIN, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Chloé POUMAILLOUX, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l'audience publique du 09 Mai 2023

Tenue par Marie LE BRAS

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Valérie DOIZE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie LE BRAS

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 11 avril 2023

EXPOSÉ DU LITIGE':

La SAS du Barbier exploite deux restaurants sous la dénomination «Le barbier qui fume», l'un situé dans le vieux [Localité 4] et l'autre situé à proximité de la gare [Localité 4]-Europe.

La convention collective applicable est celle des hôtels, cafés et restaurants.

M. [B] [K] a été embauché par la société du Barbier dans le cadre de plusieurs contrats 'd'extra' à durée déterminée entre septembre 2019 et mars 2020 en qualité de plongeur.

Un nouveau contrat a été conclu entre les parties du 18 au 30 juin 2020 avant de prendre fin de manière anticipée le 21 juin 2020 à l'initiative du salarié qui dans un courrier du même jour, a expliqué sa décision à travers certaines critiques sur ses conditions de travail et sa rémunération.

Par requête du 21 juillet 2020, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Lille afin d'obtenir la requalification de ses contrats d'extra en un contrat à durée indéterminée, des rappels de salaire ainsi que des indemnités au titre de l'exécution du contrat de travail.

Par jugement contradictoire du 18 février 2021, le conseil de prud'hommes de Lille a':

- jugé qu'il n'y a pas lieu de prononcer la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

- constaté le paiement de la somme de 66,87 euros payée par chèque par la société du Barbier à M. [K] au titre du rappel de salaire minimum conventionnel,

- débouté M. [K] de sa demande à titre de rappels de salaire pour la période de septembre 2019 à mars 2020 et de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect du taux horaire conventionnel et pour non-respect du contrat de travail,

- condamné M. [K] à payer à la société du Barbier la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture anticipée, brutale et abusive de son contrat de travail,

- condamner M. [K] à payer à la société du Barbier la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 15 mars 2021, M. [K] a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a constaté le paiement de la somme de 66,87 euros payée par chèque par la société du Barbier au titre du rappel de salaire minimum conventionnel

Par ordonnance du 25 mars 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les demandes de M. [K] à hauteur d'appel tendant à la condamnation de la société du Barbier au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dans ses dernières conclusions déposées le 12 décembre 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, M. [K] demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu,

- le dire bien fondé sur les chefs critiqués et repris dans sa déclaration d'appel du 15 mars 2021,

statuant à nouveau,

- requalifier les contrats d'extra dits d'usage en contrat à durée indéterminée sur la base d'un temps plein et ce à compter du 1er septembre 2019 jusqu'au 21 juin 2020,

- condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes':

*1 715,35 euros à titre d'indemnité pour requalification du contrat,

*6 708,96 euros à titre de rappel de salaire, outre 670,89 euros au titre des congés payés y afférents du 1er septembre 2019 jusqu'au 21 juin 2020 avec intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,

*2 598 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des obligations légales (taux horaire et recours abusif au contrat d'extra),

- ordonner la rectification des bulletins de paie, de l'attestation Assedic et du certificat de travail,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 1 000 euros pour rupture anticipée du contrat et 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter en cause d'appel la société du Barbier de l'ensemble de ses demandes,

- condamner l'employeur au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées le 2 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, la société du Barbier demande à la cour de':

à titre liminaire,

- juger que M. [K] ne formule, dans le dispositif de ses premières conclusions d'appelant aucune demande de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles et du contrat de travail, ni aucune demande d'infirmation du jugement en ce qu'il a condamné M. [K] à lui verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale d'un CDD,

En conséquence,

- juger comme étant irrecevables toutes demandes que M. [K] pourrait formuler à ce titre, sur le fondement des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile,

sur le fond,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- prendre acte de ce que les demandes nouvelles formulées par M. [K] en cause d'appel relatives à la rupture de son contrat de travail ont été déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état par ordonnance du 25 mars 2022,

- débouter intégralement M. [K] de l'ensemble de ses demandes,

- à titre reconventionnel, condamner M. [K] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les procédures de première instance et d'appel ainsi qu'aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 avril 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION':

- sur la recevabilité des demandes :

L'article 910-4 du code de procédure civile dispose qu'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Au visa de cette disposition et de l'article 954 du même code, la société du Barbier soulève l'irrecevabilité des prétentions de M. [K] au titre d'une part du non-respect des dispositions légales et du contrat de travail, et d'autre part de la condamnation prononcée à son encontre pour rupture brutale du contrat à durée déterminée.

Elle fait valoir que ces 2 prétentions qui tendent à l'infirmation du jugement de ces 2 chefs, sont irrecevables en ce qu'elles ne figurent pas dans les premières conclusions de l'appelant du 14 juin 2021 et ont été formulées pour la première fois dans le dispositif de ses dernières conclusions responsives du 12 décembre 2022.

M. [K] ne développe aucun moyen en réponse à l'irrecevabilité soulevée.

Sur ce,

Si M. [K] a bien visé les 2 chefs de jugement susvisés dans sa déclaration d'appel, il n'a en revanche saisi la cour d'aucune prétention à ce titre aux termes du dispositif de ses premières conclusions déposées le 14 juin 2021, libellé comme suit :

'- déclarer mal jugé et bien appelé,

- dire y avoir lieu à la requalification des contrats d'extra dits d'usage en contrat à durée indéterminée sur la base d'un temps plein et ce à compter du 1er septembre 2019 jusqu'au 21 juin 2020,

- condamner l'employeur au paiement d'une indemnité pour requalification du contrat à hauteur de 1 715,35 euros,

- condamner l'employeur au paiement des rappels de salaire à hauteur de 6 708,96 euros, outre 670,89 euros au titre des congés payés, du 1er septembre 2019 jusqu'au 21 juin 2020,

- dire et arrêter que la rupture du contrat de travail s'analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner l'employeur au paiement de 2 mois de préavis (...),

- condamner l'employeur au paiement de dommages et intérêts à hauteur de 3 430,70 euros,

- ordonner la rectification des bulletins de paie, de l'attestation Assedic et du certificat de travail,

- condamner l'employeur au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux dépens.'

Ses demandes aux fins de condamnation de la société du Barbier à lui payer 2 598 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des obligations légales (taux horaire et recours abusif au contrat d'extra), d'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 1 000 euros pour rupture anticipée du contrat et de débouté de la société du Barbier à ce dernier titre, ont effectivement été énoncées pour la première fois dans ses dernières conclusions du 12 décembre 2022, sans que cette saisine tardive ne puisse se justifier par un des motifs prévus par le second alinéa de l'article 910-4 précité, ce qui d'ailleurs n'est pas prétendu par M. [K].

Ces prétentions n'ayant ainsi pas été énoncées dès les premières conclusions de l'intéressé, il convient de les déclarer irrecevables en application de l'article 910-4 du code de procédure civile et par voie de conséquence de confirmer le jugement sur ces 2 chefs de jugement.

- sur la requalification des contrats de M. [K] :

M. [K] fait grief au jugement de ne pas avoir requalifié ses contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée alors que selon lui, son employeur en a fait un recours abusif pour éviter de pourvoir durablement le poste de plongeur qu'il a occupé sans discontinuer de septembre 2019 à mars 2020, participant ainsi au fonctionnement permanent de l'entreprise jusqu'à la fermeture du restaurant pendant la période de confinement liée à la crise sanitaire du Covid.

Il fait également valoir qu'ayant travaillé plus de 60 jours sur le dernier trimestre 2019, il est en droit de demander la requalification de ses contrats conformément aux dispositions de l'article 14-1 de la convention collective.

L'appelant sollicite également la requalification de son temps partiel en un temps plein au regard de l'importance des heures accomplies depuis septembre 2019, arguant du fait qu'il travaillait régulièrement jusqu'à la fermeture du restaurant à 1h du matin et qu'il était à la totale disposition de son employeur, acceptant toutes les permutations qui lui étaient demandées.

En réponse, la société du Barbier fait d'abord valoir que la convention collective ne prévoit pas de requalification de plein droit et que pour y prétendre, M. [K] doit justifier d'une période de travail excédant 60 jours sur un trimestre civil au sein du même établissement, ce qui selon elle n'est pas le cas en l'espèce.

Elle ajoute que les contrats d'usage n'ont jamais eu pour objet de pourvoir durablement à un emploi, expliquant que la plonge est habituellement réalisée au sein de ses 2 restaurants par les cuisiniers et que ce n'est qu'en raison d'une augmentation temporaire significative de son activité qu'elle a eu recours au service de M. [K] pour décharger les cuisiniers de cette charge.

S'agissant de la requalification sur une base de 39 heures hebdomadaires à laquelle elle s'oppose également, la société du Barbier soutient que M. [K] n'a jamais effectué de telles heures et qu'il ne se tenait pas à sa disposition permanente contrairement à ce qu'il prétend puisqu'il recevait ses plannings à l'avance.

Sur ce,

S'il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail que dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, dont fait partie le secteur de la restauration, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats de travail à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, il doit cependant être établi par l'employeur que le recours à l'utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi.

Il est en l'espèce constant que la société du Barbier a engagé M. [K] en tant que plongeur (N1 E1) et pour le motif allégué d'un accroissement d'activité dans le cadre de 7 contrats d'extra qui se sont succédés de manière ininterrompue, le premier portant sur la période du 12 au 30 septembre 2019, puis s'agissant des suivants, chacun d'une durée d'un mois, du 1er au dernier jour de chaque mois et ce jusqu'au 31 mars 2020.

Un dernier contrat a été conclu pour le même motif et même emploi pour la période du 18 juin au 30 juin 2020.

Au regard de l'activité exercée par la société du Barbier, l'emploi de plongeur ne peut être en soi qualifiée d'activité temporaire, s'agissant d'une tâche réalisée nécessairement chaque jour d'ouverture des 2 restaurants.

Par ailleurs, l'intimée prétend que l'embauche de M. [K] dans le cadre de ces contrats d'usage est liée à un accroissement temporaire d'activité qui ne permettait plus aux cuisiniers d'assumer la charge de la plonge mais elle ne produit aucune pièce pour établir d'une part que cette tâche était habituellement affectée aux cuisiniers et d'autre part, l'accroissement temporaire de l'activité alléguée.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de requalifier les contrats de travail à durée déterminée successifs de M. [K] en un contrat à durée indéterminée.

En outre, il sera relevé que les contrats ne précisent pas la durée de travail mais uniquement le nombre de jours maximum travaillés et le taux horaire, alors qu'en son article 15, la convention collective stipule que 'le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit. Il est régi par les dispositions légales et réglementaires en vigueur', l'article 14 sur l'emploi d'extra ne prévoyant aucune dérogation spécifique en la matière.

Or, en l'espèce, aucun des contrats litigieux ne fait mention, contrairement aux exigences de l'article L. 3123-6 du code du travail, de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail ou encore des modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiquées par écrit au salarié.

Le contrat à durée indéterminée issu de la requalification de ces contrats d'extra est donc présumé à temps complet, à charge pour la société du Barbier de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

Or, la société du Barbier ne donne aucune indication de la durée de travail convenue, affirmant simplement qu'elle était inférieure à 39 heures hebdomadaire et qu'il était rémunéré sur la base des heures réellement effectuées, dans la limite du nombre de jours maximum de travail précisé dans chaque contrat, ce dont il ne se déduit pas une durée de travail journalière et surtout hebdomadaire convenue pour les périodes considérées.

Par ailleurs, la seule attestation de l'adjoint de direction qui précise que les plannings ont toujours été affichés sur 2 semaines, ne suffit pas à établir, en l'absence de garantie d'impartialité suffisante liée aux fonctions exercées par l'intéressé, que M. [K] pouvait prévoir son rythme de travail, sachant qu'il résulte des échanges de SMS produits par les parties qu'à plusieurs reprises, la société du Barbier a modifié les horaires de travail de M. [K] dans un délai parfois inférieur à 48 heures sans allégation d'urgence particulière.

La société du Barbier échoue ainsi à renverser la présomption évoquée plus haut.

Au surplus, il ressort des bulletins de salaire de M. [K] qu'il a travaillé :

- 153 heures en novembre 2019,

- 154,50 heures en décembre 2019,

ce qui implique qu'il a nécessairement excédé pendant ces mois la durée légale hebdomadaire du travail de 35 heures, et a aussi pour effet d'entraîner la requalification du temps partiel en un temps complet.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il sera retenu que M. [K] a été engagé dès le premier contrat sur la base d'un temps complet correspondant nécessairement à la durée légale du travail et non à la durée éventuellement supérieure autorisée par la convention collective, sachant qu'en l'espèce, M. [K] ne produit aucun élément précis de nature à considérer qu'il a travaillé en permanence 39 heures par semaine.

Il convient dès lors, par voie d'infirmation, de requalifier les contrats de travail à durée déterminée de M. [K] en un contrat de travail à durée indéterminée sur une base horaire de 35 heures hebdomadaire, et ce à compter du 12 septembre 2019, date de conclusion du premier contrat.

- sur les demandes financières subséquentes :

Aux termes du dispositif de ses conclusions, M. [K] sollicite une indemnité de requalification d'un montant de 1 715,35 euros, étant observé qu'il la fixe à 1 528,10 euros en page 7 de ses conclusions, sans expliquer cette différence.

Les parties s'accordant sur un taux horaire conventionnel minimum en 2020 de 10,15 euros, il convient en vertu de l'article L. 1245-2 du code du travail d'accorder à M. [K] une indemnité de requalification d'un montant de 1 540 euros.

Compte tenu des requalifications prononcées, M. [K] demande par ailleurs le versement d'un rappel de salaire 6 708,96 euros, outre les congés payés y afférents, pour la période entre le 1er septembre 2019 et la rupture du contrat le 21 juin 2020, en ce compris pour les mois non travaillés d'avril et mai 2020 entre les contrats conclus en mars et juin.

Au vu des pièces contractuelles produites, le contrat signé le 1er mars 2020 a pris fin à son terme fixé au 31 mars 2020, et non le 14 mars comme suggéré par l'intimée, à défaut de justificatif d'une rupture anticipée du contrat.

M. [K] ne prétend pas, ni ne justifie être resté à la disposition de la société du Barbier pendant la période interstitielle comprise entre le 1er avril 2020 et le 31 mai 2020.

Par ailleurs, il prétend avoir repris le travail dès le 2 juin 2020 mais ne produit aucune pièce pour en justifier, le dernier contrat n'ayant été conclu que le 18 juin 2020 avec effet au même jour, ce qui est cohérent avec le bulletin de salaire et les échanges de SMS pendant cette période, le dirigeant de la société du Barbier ne l'ayant sollicité pour reprendre le travail qu'à partir du 15 juin 2020.

Ainsi, à défaut de rapporter la preuve qu'il s'est tenu à la disposition de son employeur pendant la période interstitielle comprise entre le 1er avril et le 17 juin 2020, M. [K] ne peut prétendre à un rappel de salaire pour cette période. Il sera en outre rappelé que l'intéressé a pris l'initiative de cesser le travail dès le 20 juin avant sa prise de service par SMS confirmé par son courrier du 21 juin 2020 de sorte qu'il ne peut prétendre à aucun salaire pour ces 2 jours.

Après déduction de l'ensemble des salaires déjà perçus durant la relation de travail qui n'a débuté que le 12 septembre 2019, et au vu des taux conventionnels minima applicables en 2019 (10,03 euros) et en 2020 (10,15 euros) sur lesquels s'accordent les parties ainsi que de la requalification du temps partiel en un temps complet de 35 heures, il convient de condamner la société du Barbier à payer à M. [K], pour le surplus de la période de travail, un rappel de salaire de 1967,24 euros, outre 196,72 euros de congés payés y afférents.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

- sur les demandes accessoires :

Au vu de ce qui précède, le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

M. [K] ayant été accueilli en plusieurs de ses demandes, la société du Barbier devra supporter les dépens de première instance et d'appel. Elle sera déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est en outre inéquitable de laisser à M. [K] la charge des frais irrépétibles qu'il a exposés. La société du Barbier est condamnée sur ce même fondement à lui payer une indemnité de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

DECLARE M. [K] irrecevable en ses demandes aux fins de condamnation de la société du Barbier à lui payer 2 598 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des obligations légales (taux horaire et recours abusif au contrat d'extra) et d'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 1 000 euros pour rupture anticipée du contrat ;

CONFIRME en conséquence le jugement entrepris en date du 18 février 2021 sur ces 2 chefs ;

L'INFIRME sur le surplus de ses dispositions ;

statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

REQUALIFIE les contrats à durée déterminée conclus entre M. [B] [K] et la société du Barbier en un contrat à durée indéterminée à temps complet, avec effet au 12 septembre 2019 ;

CONDAMNE la société du Barbier à payer à M. [B] [K] les sommes suivantes :

- 1 540 euros d'indemnité de requalification,

- 1967,24 euros à titre de rappel de salaire, outre 196,72 euros de congés payés y afférents,

- 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNE à la société du Barbier de transmettre à M. [B] [K] un bulletin de salaire récapitulatif, une attestation Pôle emploi et un certificat de travail rectifiés conformément au présent arrêt ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

DIT que la société du Barbier supportera les dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER

Valérie DOIZE

LE PRESIDENT

Marie LE BRAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 21/00413
Date de la décision : 30/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-30;21.00413 ?
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