ARRÊT DU
30 Juin 2023
N° 1010/23
N° RG 21/00067 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TMDP
MLB/CH
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LENS
en date du
17 Décembre 2020
(RG F19/00409 -section )
GROSSE :
aux avocats
le 30 Juin 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANTE :
Association LE CERCLE D'ESCRIME D'[Localité 2]
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Bruno WECXSTEEN, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉ :
M. [T] [K]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Stéphane SCHÖNER, avocat au barreau de BETHUNE
DÉBATS : à l'audience publique du 03 Mai 2023
Tenue par Muriel LE BELLEC
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Séverine STIEVENARD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Soleine HUNTER-FALCK
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Muriel LE BELLEC
: CONSEILLER
Gilles GUTIERREZ
: CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Juin 2023,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Muriel LE BELLEC, conseiller et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 12 avril 2023
EXPOSE DES FAITS
Par jugement en date du 4 juillet 2019 le conseil de prud'hommes de Lens a notamment :
- Condamné l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] à payer à M. [K] les sommes de :
2 861,19 euros brut à titre de rappel de salaire depuis le 1er décembre 2014
693,36 euros brut à titre d'indemnité de requalification
1 073,20 euros net au titre de la prise en charge à hauteur de 50 % des frais engagés pour une mutuelle santé depuis le 1er janvier 2016
1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- Ordonné à l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] :
d'annuler les avertissements disciplinaires des 28 mars 2018 et 4 avril 2018
de proposer un contrat de mutuelle à M. [K]
de fournir les fiches de paie rectifiées à partir du 1er décembre 2014
de requalifier le contrat à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel depuis le 1er décembre 2014
- Fixé l'astreinte à 50 euros par document et par jour de retard à compter du 30ème jour de la notification de la décision et ce durant 30 jours en se réservant le droit de liquider l'astreinte.
Par requête reçue le 28 novembre 2019, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Lens pour obtenir la liquidation de l'astreinte à hauteur de 82 500 euros, la régularisation des 55 bulletins de salaire concernés pour la période de décembre 2014 à juin 2019 sous astreinte, la transmission des DADS ou DSN 2017, 2018, 2019 et la justification de la déclaration des salaires de ces trois années sous le bon numéro de sécurité sociale sous astreinte, le paiement de dommages et intérêts pour travail dissimulé et un rappel de prime d'ancienneté.
Par jugement en date du 17 décembre 2020 le conseil de prud'hommes a condamné l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] à payer à M. [K] :
4 500 euros au titre de la liquidation d'astreinte fixée au jugement du 4 juillet 2019
1 000 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Il a précisé que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la demande pour toutes les sommes de nature salariale et à compter du prononcé du jugement pour toute autre somme, renvoyé M. [K] à mieux se pourvoir sur ses autres demandes et débouté l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] de ses autres demandes.
Le 12 janvier 2021, l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] a interjeté appel de ce jugement.
L'ordonnance rendue le 27 avril 2022 par le conseiller de la mise en état, faisant injonction aux parties de rencontrer un médiateur, est restée sans suite.
Par ses conclusions reçues le 27 septembre 2021 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] sollicite de la cour qu'elle déclare son appel recevable et bien fondé, réforme le jugement du 17 décembre 2020 en ce qu'il l'a condamnée à payer des sommes à M. [K], déclare les demandes de M. [K] relatives aux documents sociaux et
aux dommages et intérêts irrecevables et en tout cas mal fondées, le déboute par conséquent de toutes ses demandes et le condamne à lui verser les sommes de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses conclusions reçues le 27 septembre 2021 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, M. [K] sollicite de la cour qu'elle confirme le jugement en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer la somme de 4 500 euros au titre de la liquidation d'astreinte et la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a débouté l'employeur du reste de ses demandes et, en tout état de cause, qu'elle déboute l'employeur de l'ensemble de ses demandes et le condamne à lui transmettre sans délai l'ensemble des documents sociaux corrigés demandés au cours de l'instance et à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de la rétention abusive et la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour d'appel.
La clôture de la procédure a été ordonnée le 12 avril 2023.
MOTIFS DE L'ARRET
Sur la liquidation de l'astreinte
Aux termes de l'article L.131-4 du code des procédures civiles d'exécution, le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère.
Par son jugement du 4 juillet 2019 le conseil de prud'hommes de Lens a condamné l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] à payer à M. [K] notamment la somme de 2 861,19 euros brut à titre de rappel de salaire depuis le 1er décembre 2014 et à lui fournir les fiches de paie rectifiées à partir du 1er décembre 2014 sous astreinte de 50 euros par jour document et par jour de retard à compter du 30ème jour de la notification de la décision et ce durant 30 jours.
L'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] justifie avoir adressé à M. [K], par lettre recommandée en date du 31 juillet 2019, un «bulletin de paie clarifié» mentionnant le rappel de salaire de décembre 2014 à août 2015 pour la somme de 2 861,19 euros et une ancienneté au 1er décembre 2014.
Le courrier indique que sont également transmises à M. [K] les fiches de paie rectifiées du 1er décembre 2014 au 31 juillet 2019.
Il est toutefois constant que si les bulletins de salaire de février 2015 à juillet 2019 ont bien tous été transmis à M. [K] avec la mention de l'ancienneté au 1er décembre 2014, aucun bulletin de salaire n'a été transmis à M. [K] pour les mois de décembre 2014 et janvier 2015.
Les premiers juges ont liquidé l'astreinte au constat que les bulletins de salaire de décembre 2014 et janvier 2015 n'avaient pas été fournis et que le bulletin de salaire de février 2015 ne faisait pas mention des heures de travail de décembre 2014 et janvier 2015 (3 bulletins de salaire x 50 euros x 30 jours).
L'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] explique qu'aucun bulletin de salaire n'a été établi en décembre 2014 et janvier 2015 puisque le salarié attendait son homologation pour organiser son emploi du temps et commencer son activité et que le bulletin de salaire de février 2015 a été établi sur la base des déclarations du salarié lui-même au titre des heures effectuées et des déplacements de décembre 2014, janvier 2015 et février 2015.
Elle produit à l'appui de ses explications :
- le contrat de travail de M. [K] à effet du 1er décembre 2014. Selon ce contrat, M. [K] a été engagé pour exercer les fonctions d'animateur diplômé d'Etat à temps partiel pour développer la pratique de l'escrime dans les 14 communes de la communauté d'agglomération [Localité 5], l'enveloppe globale afférente à sa mission étant de 560 heures (40 heures par 14 communes) maximum sur une année civile. Aux termes de ce contrat, M. [K] devait notamment fournir chaque mois un récapitulatif de ses interventions. Sa rémunération était fixée à 13,50 euros de l'heure, à laquelle s'ajoutait un forfait de 3 euros d'indemnité par déplacement sur chaque intervention.
- un mail de M. [K] en date du 2 janvier 2015 par lequel le salarié a expliqué en substance que son prédécesseur lui avait transmis son emploi du temps écoulé ainsi qu'une prévision pour le 1er trimestre 2015, qu'il allait lui-même rencontrer des difficultés administratives, à savoir son homologation auprès des différents services d'inspections académiques et qu'il ne pourrait pas intervenir avant au moins 15 jours après dépôts des demandes d'homologation, de sorte qu'«il faudra donc compter fin janvier pour moi commencer dans de bonnes conditions».
- le mail de M. [K] du 24 février 2014 indiquant : «Pour ma fiche de paie décembre janvier février, j'ai effectué en tout 20 heures (soit 270 euros bruts) et 13 déplacements (39 euros).»
Le bulletin de salaire établi pour le mois de février 2015 est en tout point conforme aux indications du salarié. Il inclut l'ensemble des heures effectuées par M. [K] de décembre 2014 à février 2015. L'employeur a donc satisfait au jugement du 4 juillet 2019 s'agissant du bulletin de salaire de février 2015.
Le salarié avait annoncé à son employeur qu'il ne pourrait pas faire d'interventions avant fin janvier 2015 et il ne lui a d'ailleurs transmis aucun récapitulatif identifiant des interventions en décembre 2014 d'une part et en janvier 2015 d'autre part, le seul document fourni pour cette période étant celui décrit ci-dessus. L'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] ne justifie pas pour autant que cette situation s'opposait à l'établissement de bulletins de salaire pour ces deux mois de la relation de travail, même pour mentionner un salaire nul, faute d'interventions. Le courrier de son cabinet comptable en date du 12 décembre 2019 n'évoque aucune impossibilité d'exécuter le jugement sur ce point.
Cependant, l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] ne s'est pas désintéressée de l'exécution du jugement comme il résulte du courrier adressé à M. [K] dès le 31 juillet 2019.
En tenant compte de son comportement, il convient de dire qu'il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte au montant provisoirement atteint et qu'il convient de limiter cette liquidation à la somme de 600 euros.
Les deux bulletins de salaire de décembre 2014 et janvier 2015 n'ayant pas encore été transmis et M. [K] n'étant pas plus explicite sur la notion d' «ensemble des documents sociaux corrigés demandés au cours de l'instance» dont il sollicite la remise, il convient d'ordonner à l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] de lui transmettre les deux bulletins de salaire de décembre 2014 et janvier 2015.
Sur la demande d'indemnité de M. [K] pour rétention abusive
M. [K] invoque au titre de son préjudice un impact sur ses prétentions à certaines prestations sociales et droits futurs.
Cette demande nouvelle est recevable en appel en application de l'article 566 du code de procédure civile comme étant l'accessoire de la demande soumise au premier juge. Toutefois, M. [K] ne justifie pas du préjudice qu'il invoque et sera débouté.
Sur la demande d'indemnité de l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] pour procédure abusive
La demande de M. [K], partiellement fondée, ne présente pas de caractère abusif. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] de ce chef de demande.
Sur les autres demandes
Le jugement sera confirmé du chef de ses dispositions sur les intérêts de retard et l'article 700 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu de faire application de ce texte en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après débats en audience publique par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré, sauf sur le montant de la liquidation de l'astreinte, statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant :
Condamne l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] à verser à M. [K] la somme de 600 euros au titre de la liquidation de l'astreinte.
Ordonne à l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] de transmettre à M. [K] ses deux bulletins de salaire de décembre 2014 et janvier 2015.
Dit recevable la demande d'indemnité pour rétention abusive formée par M. [K] mais l'en déboute.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Condamne l'association le Cercle d'Escrime d'[Localité 2] aux dépens.
Le Greffier
Valérie DOIZE
Pour le Président empêché
Muriel LE BELLEC, Conseiller