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22/06/2023 | FRANCE | N°17/01033

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 1 section 2, 22 juin 2023, 17/01033


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 1 SECTION 2



ARRÊT DU 22/06/2023



****





N° de MINUTE :

N° RG 17/01033 - N° Portalis DBVT-V-B7B-QOVQ



Jugement (N° 15/09002) rendu le 16 Janvier 2017 par le Tribunal de grande instance de Lille







APPELANTS





Madame [S] [H], en qualité d'héritière de M [H] [J]

née le 22 Février 1957 à [Localité 16]

Madame [O] [H], en qualité

d'héritière de M [H] [J]

née le 22 Mars 1958 à [Localité 17]

Madame [C] [H], en qualité d'héritière de M [H] [J]

née le 09 Mai 1962 à Birkesdorf (Allemagne)

Monsieur [W] [H] en qualité d'héritier de M [H] [...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 1 SECTION 2

ARRÊT DU 22/06/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 17/01033 - N° Portalis DBVT-V-B7B-QOVQ

Jugement (N° 15/09002) rendu le 16 Janvier 2017 par le Tribunal de grande instance de Lille

APPELANTS

Madame [S] [H], en qualité d'héritière de M [H] [J]

née le 22 Février 1957 à [Localité 16]

Madame [O] [H], en qualité d'héritière de M [H] [J]

née le 22 Mars 1958 à [Localité 17]

Madame [C] [H], en qualité d'héritière de M [H] [J]

née le 09 Mai 1962 à Birkesdorf (Allemagne)

Monsieur [W] [H] en qualité d'héritier de M [H] [J]

né le 03 Décembre 1967 à [Localité 15]

Monsieur [B] [H], en qualité d'héritier de M [H] [J]

né le 11 Octobre 1974 à [Localité 15]

Madame [X] [H] en qualité d'héritière de M [H] [J]

née le 11 Juillet 1979 à [Localité 14] (Allemagne)

demeurant tous, [Adresse 4]

[Localité 12]

- intervenants volontaires-

représentés par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistés de Me Patrick Drancourt, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

INTIMÉS

Le Département du Nord, pris en la personne du président du Conseil Départemental en exercice

en l'hôtel de département, [Adresse 10]

[Localité 11]

- intervenant forcé -

représenté par Me Catherine Degandt, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

La Métropole Européenne de [Localité 11], prise en la personne de son président en exercice

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 11]

défaillante, assignée en intervention forcée le 9 février 2018, remis à personne habilitée

La SNC Lidl, prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 7]

[Localité 13]

représentée par Me Ludovic Denys, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

assistée de Me Arnaud Houssain, avocat au barreau de Strasbourg, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Catherine Courteille, président de chambre

Jean-François Le Pouliquen, conseiller

Véronique Galliot, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Anaïs Millescamps

DÉBATS à l'audience publique du 03 avril 2023.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 22 juin 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Catherine Courteille, président, et Anaïs Millescamps, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 27 mars 2023

****

Vu la décision rendue par le tribunal de grande instance de Lille du 16 janvier 2017 ;

Vu la déclaration d'appel de M. [J] [H] reçue au greffe de la cour d'appel de Douai le 10 février 2017 ;

Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 26 juin 2018,

Vu l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 9 mai 2019,

Vu les conclusions de Mmes [S], [X] et [C] [H] ainsi que MM. [W], [B] et [O], en qualités d'ayant-droit de [J] [H] déposées au greffe le 10 mars 2023,

Vu les conclusions de la société Lidl déposées au greffe le 2 décembre 2022,

Vu les conclusions du département du Nord déposées au greffe le 29 novembre 2022,

Vu l'ordonnance de clôture du 27 mars 2023,

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique du 22 juillet 2013, [J] [H] a acquis un terrain cadastré AH n°[Cadastre 2], situé à [Localité 18], au prix de 14 000 euros.

Par acte authentique du 19 juin 2015, la société Lidl a acquis auprès de la SCI Pareit Verpoort deux parcelles cadastrées AH n° [Cadastre 8] et n° [Cadastre 9] à [Localité 18].

La société Lidl est également propriétaire de la parcelle cadastrée n° [Cadastre 5].

Par acte d'huissier du 21 août 2015, [J] [H] a fait assigner la société Lidl afin de voir constater l'état d'enclave de son terrain et de solliciter à son profit une servitude de passage.

Par jugement du 16 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Lille a :

déclaré irrecevables les pièces communiquées par [J] [H] après la clôture et l'audience de plaidoirie ;

débouté [J] [H] en l'état de l'ensemble de ses demandes ;

condamné ce dernier à payer à la société Lidl la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 10 février 2017, [H] a interjeté appel de la décision.

Par acte d'huissier du 4 octobre 2017, [H] a assigné en intervention forcée le département du Nord, en qualité de propriétaire des parcelles AH n° [Cadastre 6] et [Cadastre 3].

Par acte d'huissier signifié le 9 février 2018, [H] a assigné en intervention forcée la Métropole européenne de [Localité 11].

Par ordonnance du 26 juin 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions déposées le 14 février 2018 par le département du Nord et l'a condamné aux dépens de l'incident.

Par arrêt du 9 mai 2019, la cour d'appel de Douai a dit irrecevables les conclusions d'intervention volontaire du Département du Nord, infirmé le jugement déféré et au visa de l'article 682 du code civil a :

dit M. [H] recevable et fondé en sa demande de désenclavement de sa parcelle et d'obtention d'un droit de passage sur les propriétés riveraines ;

ordonné avant dire droit une mesure d'expertise judiciaire au contradictoire de la société Lidl, du Département du Nord et de la MEL ;

désigné à cet effet M. [R] [Z] ayant pour mission de :

fournir à la cour tous éléments permettant de fixer, selon les critères définis à l'article 683 du code civil, l'assiette du passage propre à assurer la desserte par véhicules de tourisme depuis la voie publique de la parcelle AH [Cadastre 2] de M. [H] destinée à la construction d'une maison d'habitation, dans le respect des contraintes d'urbanisme, de la réglementation à laquelle est assujettie la société Lidl dans le cadre de l'exploitation de son supermarché, du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique sinon dans l'endroit le moins dommageable pour le fonds servant ;

déterminer les aménagements nécessaires et leur coût ainsi que l'indemnité compensatrice des dommages occasionnés par ce passage.

L'expert judiciaire, M. [M] [A] finalement désigné, a déposé son rapport le 2 décembre 2021.

Le 30 décembre 2021, [J] [H] est décédé laissant pour héritiers : Mme [S] [H], Mme [O] [H], Mme [C] [H], M. [W] [H], M. [B] [H], Mme [X] [H]. Chacun a hérité d'un sixième de la succession.

Par acte du 3 mai 2022, les héritiers de [J] [H] ont cédé à Mme [X] [H] à titre de licitation, faisant cesser l'indivision, tous leurs droits indivis en pleine propriété sur le terrain situé à [Adresse 19], fabrique à papiers, ledit immeuble cadastré section AH n° [Cadastre 2].

Par ordonnance du 5 mai 2022, le magistrat chargé de la mise en état a constaté l'interruption de l'instance par la notification du décès de [J] [H].

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe le 10 mars 2023, Mme [S] [H] , Mme [X] [H] et Mme [C] [H] ainsi que M. [W] [H], M. [B] [H] et M. [O] [H], en qualités d'ayant-droit de [J] [H], demandent à la cour de :

réformer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Lille en date du 16 janvier 2017 ;

déclarer irrecevables les conclusions après expertise 2 du Département du Nord ;

débouter le Département du Nord de toutes ses demandes fins et conclusions ;

débouter la société Lidl de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

donner acte aux concluants de leur intervention volontaire ès qualité d'héritiers de leur père, M. [J] [H] ;

statuant à nouveau, constater l'accord des parties, sur les modalités de l'aménagement du droit de passage, selon la solution préconisée par l'expert [M] [A] dans son rapport définitif du 30 novembre 2021 ;

statuant à nouveau, juger que la parcelle AH n° [Cadastre 5] appartenant à la société Lidl permet un passage propre à assurer la desserte par véhicules de tourisme depuis la voie publique de la parcelle AH [Cadastre 2] appartenant à Mme [X] [H] ; et que ce passage est le trajet le plus court du fonds enclavé à la voie publique ;

statuant à nouveau, juger que la parcelle AH [Cadastre 2] appartenant à Mme [X] [H] bénéficiera d'un droit de passage propre, sur la parcelle AH n° [Cadastre 5] appartenant à la société Lidl ; et ce pour assurer la desserte par véhicules de tourisme depuis la voie publique de la parcelle AH [Cadastre 2] de Mme [X] [H] ;

déclarer commun et opposable au département du Nord, et à la métropole européenne de [Localité 11], l'arrêt à intervenir ;

débouter la société Lidl de sa demande tendant à dire et juger que seule Mme [X] [H], le cas échéant solidairement avec les consorts [H], appelant, devra/devront prendre en charge le coût des aménagements nécessaires au droit de passage, estimé selon devis de travaux annexés au rapport d'expertise à une somme de 18 618,20 euros sauf à parfaire ;

dire et juger que le coût des aménagements nécessaires au droit de passage sera partagé par moitié entre Mme [X] [H] et la société Lidl selon le devis de travaux, annexé au rapport d'expertise, qui a estimé les travaux à la somme de 18 618,20 6 euros sauf à parfaire.

débouter la société Lidl de sa demande tendant à condamner les appelants, notamment Mme [X] [H], solidairement à verser à la société Lidl en contrepartie de l'aménagement du droit de passage, une somme de 107 601,60 euros sauf à parfaire.

À titre subsidiaire, si la Cour faisait droit à la demande de la société Lidl de ramener à de plus justes proportions l'indemnité compensatrice sollicitée par la société Lidl en contrepartie de l'aménagement du droit de passage :

ordonner la publication de l'arrêt à intervenir au service de la publicité foncière ;

condamner la société Lidl à payer à Mme [X] [H] la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Lidl au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel en ce compris le coût du rapport d'expertise.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 2 décembre 2022, la société Lidl demande à la cour de :

constater l'accord des parties sur les modalités de l'aménagement du droit de passage au bénéfice des consorts [H] selon la solution préconisées par l'expert judiciaire dans son rapport définitif ;

dire et juger en conséquence que la parcelle AH n° [Cadastre 5] lui appartenant constituera l'assiette du droit de passage des consorts [H], et ce pour assurer la desserte uniquement par des véhicules de tourisme depuis la voie publique sur la parcelle AH n° [Cadastre 2] appartenant à Mme [X] [H] ;

déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable au département du Nord et à la métropole européenne de [Localité 11] ;

Statuant sur ses demandes concernant les frais d'aménagement du droit de passage et les demandes indemnitaires compensatoire :

dire et juger que seule Mme [X] [H], le cas échéant solidairement avec les consorts [H], appelants, devra / devront prendre en charge le coût des aménagements nécessaires au droit de passage, estimé selon devis de travaux annexé au rapport d'expertise à une somme de 18 618,26 euros, sauf à parfaire ;

dire et juger en tout état de cause que tous les coûts et frais relatifs à cet aménagement seront supportés par les appelants, notamment Mme [X] [H] ;

Statuant sur le montant de l'indemnité compensatrice lui étant due par les appelants :

condamner les appelants notamment Mme [X] [H], solidairement à lui verser en contrepartie de l'aménagement du droit de passage, une somme de 107 601,6 euros sauf à parfaire ;

condamner les appelants aux entiers frais et dépens de la procédure, outre un montant de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées au greffe le 29 novembre 2022, le département du Nord demande à la cour de le mettre hors de cause et condamner solidairement les ayant-droits de M. [J] [H] à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers frais et dépens de l'instance.

Par acte du 17 mars 2023, les consorts [H] ont signifié leurs dernières conclusions à la Métropole Européenne Lilloise.

Bien que citée, la métropole européenne de [Localité 11] n'a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l'audience et rappelées ci-dessus.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 27 mars 2023.

EXPOSE DES MOTIFS

1) -Sur l'intervention volontaire en qualité d'héritiers de leur père [J] [H]

Aux termes de l'article 554 du code de procédure civile, Peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties, ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.

La recevabilité de l'intervention volontaire des héritiers de [J] [H] ne fait pas l'objet de contestation.

Il y a lieu de la déclarer recevable.

2) -Sur la recevabilité des conclusions du département du Nord

Par ordonnance du 20 juin 2018, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Douai a déclaré irrecevables les conclusions du département du Nord déposées le 14 février 2018 et l'a condamné aux dépens de l'incident.

Par arrêt du 9 mai 2019, la cour d'appel a déclaré irrecevables les conclusions d'intervention volontaire du département du Nord déposées le 11 septembre 2018.

Le département du Nord a, à nouveau, déposé le 29 novembre 2022 des conclusions en tant qu'intervenant forcé à la procédure.

Néanmoins, étant déjà partie à l'instance d'appel en tant qu'intervenant forcé le département du Nord n'est pas recevable à déposer des conclusions au fond alors que ses premières conclusions déposées le 14 février 2018 ont été déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état dans son ordonnance du 20 juin 2019, pour non respect de l'article 910 du code de procédure civile.

Il y a lieu de déclarer irrecevables les conclusions du département du Nord déposée le 29 novembre 2022.

3) -Sur l'assiette de la servitude

L'article 682 du code civil dispose :

« Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.

De plus, cette bande située dans la partie Sud de la parcelle AH n° [Cadastre 5] correspond au trajet le plus court, réalisable, du fonds enclavé à la voie publique. Cette bande non bâtie et hors de l'enceinte est également l'endroit le moins dommageable pour le fonds servant.»

L'article 683 du code civil ajoute :

« Le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique. Néanmoins, il doit être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé »

L'expert indique ceci dans son rapport :

« Seule la partie Sud de la parcelle AH n° [Cadastre 5] permet un passage propre à assurer la desserte, par véhicules de tourisme, depuis la voie publique de la parcelle AH [Cadastre 2] de M. [H] destinée à la construction d'une maison d'habitation, dans le respect des contraintes d'urbanisme, de la réglementation à laquelle est assujettie la société Lidl dans le cadre de l'exploitation de son supermarché ».

Il y a lieu de constater que les consorts [H] et la société Lidl demandent à la cour d'entériner l'aménagement du droit de passage selon la solution préconisée par l'expert M. [M] [A].

La cour fait sien l'avis de l'expert judiciaire concernant la pertinence de prévoir un passage propre à assurer la desserte par véhicules de tourisme depuis la voie publique de la parcelle AH n° [Cadastre 2] des consorts [H] destinée à la construction d'une maison d'habitation, dans le respect des contraintes d'urbanisme, de la réglementation à laquelle est assujettie la société Lidl dans le cadre de l'exploitation de son supermarché. De plus, cette bande située dans la partie sud de la parcelle AH n° [Cadastre 5] correspond au trajet le plus court, réalisable, du fonds enclavé à la voie publique. Cette bande non bâtie et hors de l'enceinte est également l'endroit le moins dommageable pour le fonds servant.

Enfin, les dimensions d'emprise retenues par l'expert judiciaire (largeur, circonférence de la zone de demi-tour) sont tout à fait adaptées pour le passage et la man'uvre d'un véhicule de tourisme.

Il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté [J] [H] de l'ensemble de ses demandes et consacrer l'assiette du droit passage préconisée par l'expert judiciaire et repris dans un plan annexe n° 3 à son rapport. Ledit plan sera annexé à la minute de l'arrêt.

4) -Sur les frais de l'aménagement du droit de passage

Les consorts [H] sollicitent que les frais, estimés selon devis annexé au rapport d'expertise à une somme de 18 618,26 euros, soient partagés par moitié entre Mme [X] [H] et la société Lidl.

La société Lidl s'y oppose.

Ce passage est créé uniquement afin que Mme [X] [H] puisse accéder à son terrain. La société Lidl n'y a aucun intérêt.

Il y donc lieu de dire que les frais d'aménagement, de constitution et de création de cette servitude seront supportés par Mme [X] [H].

-5) Sur l'indemnité compensatrice

La société Lidl sollicite la condamnation solidaire des appelants à lui verser la somme de 107 601,60 euros en contrepartie de l'aménagement du droit de passage. Au soutien de cette prétention, elle fait valoir qu'elle ne pourra jouir d'aucune façon de ce passage puisque cette nouvelle route reliera exclusivement le rond-point au terrain des consorts [H]. Elle affirme qu'elle perdra totalement l'usage de son terrain ce qui l'empêchera de l'utiliser pour l'exploitation de son supermarché et constitue un manque à gagner. Elle estime que l'indemnité doit être égale à l'entièreté de la valeur du terrain, soit la somme de 107 601,60 euros. Elle justifie des captures d'écran précisant la valeur de terrains situés dans le même secteur et leur prix de vente.

Les consorts [H] sollicitent le rejet de cette demande, non fondée selon eux. Subsidiairement, ils demandent de ramener l'indemnité compensatrice à plus juste proportion.

Dans ses conclusions, l'expert affirme : « concernant l'indemnité compensatrice des dommages occasionnés par ce passage, je la considère nulle. En effet, cette zone « abandonnée » est située hors de l'enceinte du magasin Lidl, entre le muret béton et la RD n° 549. La création de l'accès n'occasionnera donc aucun dommage ni aucune gêne à la propriété Lidl».

Néanmoins, il convient de souligner que la jouissance du fonds servant en sera nécessairement affectée en sorte que la valeur de ladite parcelle sera nécessairement diminuée.

En revanche, la société Lidl ne justifie pas d'un projet d'utilisation, d'exploitation du terrain litigieux.

En réponse aux dires du conseil de la société Lidl, l'expert a affirmé que l'estimation de la valeur du terrain faite par la société Lidl était exagérée, qu'il a été acquis le 7 octobre 2015 pour la somme de 6 300 euros soit un prix de 3,05 euros/m². Il précise également qu'une parcelle du même type a été vendue pour un montant de 42 000 euros, soit un prix de 11,88 euros/m². Il estime l'indemnité correspondant à 50 % de la valeur du terrain, soit la somme de 2067,12 euros.

Les éléments apportés par la société Lidl ne permettent pas d'apprécier le montant de l'indemnité compensatoire à une somme si importante. En effet, la parcelle AH n° [Cadastre 5] a une surface de 2065m, elle est difficilement constructible en ce qu'elle est située entre un muret en béton et la route départementale n° 549. En outre, si dans son dire envoyé à l'expert le 19 novembre 2021, la société Lidl indique que la valeur du terrain serait approximativement à 120 euros/m², dans ses conclusions le prix est désormais de 309 euros/m² sans qu'aucune explication ne soit donnée.

Il y a lieu de retenir le montant de l'indemnité proposée par l'expert, soit la somme de 2067,12 euros.

-6) Sur les demandes accessoires

Le jugement entrepris sera infirmé de ces chefs.

La société Lidl est condamnée aux entiers dépens, de l'instance du premier ressort et de l'appel, en ce compris les frais d'expertise, ainsi qu'à payer aux consorts [H] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt sera déclaré opposable et commun au département du Nord et à la Métropole Européenne de [Localité 11].

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE recevable l'intervention volontaire de Mme [S] [H], Mme [O] [H], Mme [C] [H], M. [W] [H], M. [B] [H], Mme [X] [H] en qualité d'héritiers de [J] [H], ;

DÉCLARE irrecevables les conclusions du département du Nord déposée le 29 novembre 2022 ;

INFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lille le 16 janvier 2017 en ce qu'il a :

débouté [J] [H] en l'état de l'ensemble de ses demandes ;

condamné ce dernier à payer à la société Lidl la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

FIXE l'assiette du droit passage permettant l'accès à la propriété de Mme [X] [H] parcelle cadastrée AH n° [Cadastre 2], conformément à la proposition de M. [M] [A] dans son rapport déposé le 2 décembre 2021, en ce qu'il se situe sur la parcelle AH n° [Cadastre 5] appartenant à la société Lidl, repris dans un plan annexe n° 3 à son rapport ;

DIT que Mme [X] [H] supportera les frais de constitution et d'aménagement de cette servitude ;

CONDAMNE solidairement Mme [S] [H], Mme [O] [H], Mme [C] [H], M. [W] [H], M. [B] [H], Mme [X] [H] à payer à la société Lidl la somme de 2067,12 euros au titre de l'indemnité compensatrice ;

DÉCLARE le présent arrêt opposable et commun au département du Nord et à la Métropole Européenne de [Localité 11] ;

CONDAMNE la société Lidl à payer à Mme [S] [H], Mme [O] [H], Mme [C] [H], M. [W] [H], M. [B] [H], Mme [X] [H] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, s'agissant de l'instance en premier ressort et en appel ;

CONDAMNE la société Lidl aux entiers dépens des procédures de premier ressort et d'appel, en ce compris les frais d'expertise.

Le greffier

Delphine Verhaeghe

Le président

Catherine Courteille


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 1 section 2
Numéro d'arrêt : 17/01033
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;17.01033 ?
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