COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 23/01045 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U6M5
N° de Minute : 1053
Ordonnance du samedi 17 juin 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. [K] [Z]
né le 26 Décembre 2001 à [Localité 2] ( ALGERIE)
de nationalité Algérienne
Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 1]
dûment avisé, non comparant
représenté par Me Lilia LAMBERT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office
INTIMÉ
M. LE PREFET DU NORD
dûment avisé, absent non représenté
PARTIE JOINTE
M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant
MAGISTRAT(E) DELEGUE (E) : Clotilde VANHOVE, conseillère à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assisté(e) de Farid FERDI, greffier
DÉBATS : à l'audience publique du samedi 17 juin 2023 à 13 h 30
ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai, le samedi 17 juin 2023 à
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'ordonnance rendue le 14 juin 2023 par le Juge des libertés et de la détention de LILLE prolongeant la rétention administrative de M. [K] [Z] ;
Vu l'appel interjeté par M. [K] [Z] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 16 juin 2023sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;
Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;
EXPOSE DU LITIGE
Par décision en date du 16 mai 2023, M. [K] [Z], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative.
Par ordonnance du 18 mai 2023, le juge des libertés et de la détention a autorisé la prolongation de ladite rétention pour une durée de vingt-huit jours.
Cette décision a été confirmée par ordonnance du magistrat délégué de la cour d'appel de Douai du 21 mai 2023.
Par ordonnance du 15 juin 2023, notifiée à 16h21, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lille a ordonné la prolongation de la rétention administrative de M. [Z] pour une durée de 30 jours (seconde prolongation).
Par requête reçue au greffe de la cour d'appel de Douai le 16 juin 2023 à 15h38, M. [Z] a relevé appel de cette ordonnance. Il demande à la cour d'accueillir son appel, de le dire recevable et bien-fondé, d'infirmer l'ordonnance et de dire et juger qu'il doit bénéficier, au regard des irrégularités soulevées, d'une remise en liberté.
Au titre des moyens soutenus en appel M. [Z] soulève:
- l'irrégularité de la requête au regard de la compétence de son signataire,
- une erreur de fondement juridique dans la saisine du juge des libertés et de la détention,
- l'absence de démonstration par l'administration de l'applicabilité de l'article L.742-4 2° du CESEDA,
- le défaut de diligences de l'administration pour justifier une prorogation,
- l'incompétence de l'auteur de la demande de laisser passer consultaire,
- l'absence de moyen de transport.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur la compétence de l'auteur de la requête saisissant le premier juge
M. [Z] soutient qu'il appartient au juge judiciaire de vérifier la compétence du signataire de la requête et qu'il est effectivement fait mention des empêchements éventuels des délégataires de signature.
En application de l'article 9 du code de procédure civile, il appartient cependant à l'appelant de démontrer en quoi son moyen est fondé et notamment en quoi le délégataire de l'autorité préfectorale ne disposait pas de mandat spécial aux fins de saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de prolongation de la rétention.
Une telle preuve n'étant pas rapportée, le moyen ne peut qu'être écarté.
2) Sur l'erreur de fondement juridique dans la saisine du juge des libertés et de la détention, l'application de l'article L.742-4 du CESEDA, les diligences aux fins d'éloignement et l'absence de transport
L'article L. 742-4 du CESEDA que : 'Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu'à l'article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;
2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;
b) de l'absence de moyens de transport.
L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.'
Il convient de rappeler que lorsque la procédure se situe dans le cadre de l'article L.742-4 du CESEDA précité et concerne une demande de seconde prolongation du placement en rétention administrative, il n'existe aucune obligation de 'bref délai' concernant la levée des obstacles.
Ainsi, il suffit qu'il ait été décidé par la première décision judiciaire de prolongation de la rétention administrative, que l'administration avait effectué toutes les diligences nécessaires à l'exécution de la mesure d'éloignement, et qu'il soit démontré que ces diligences n'avaient pas encore reçu satisfaction de la part des autorités étrangères requises, et ce sans faute ou négligence de la part de l'état requérant, pour que l'autorité judiciaire autorise la seconde prolongation du placement en rétention administrative.
Il doit en premier lieu être relevé que, contrairement à ce qu'affirme M. [Z], l'autorité préfectorale a précisément détaillé les hypothèses de l'article précité qu'elle estimait s'appliquer en l'espèce.
En outre, il ressort des pièces produites par l'administration qu'une demande de laisser passer consulaire a été effectuée auprès des autorités algériennes le 16 mai 2023, qu'une demande de routing a été effectuée le 17 mai 2023, qu'une relance concernant la demande de laissez-passer consulaire a été effectuée le 14 juin 2023, en l'absence de retour des autorités algériennes, et qu'un vol est prévu le 30 juin 2023.
En conséquence, il est démontré que la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé, hypothèse visée par l'article précité pour justifier la prolongation de la rétention. Aucun manque de diligences ne peut être reproché à l'administration et un vol est prévu à brève échéance.
Les moyens sont donc inopérants.
3) Sur la compétence de l'auteur de la demande de laisser passer consulaire
Il sera considéré comme constant que la demande de laisser passer consulaire n'étant ni un acte administratif faisant grief au sens du droit public, ni une demande en justice, ni un acte de procédure pénale soumis à des règles spécifiques, elle peut être faite par tout agent public requis par sa hiérarchie pour ce faire, sans qu'il soit nécessaire de disposer d'une habilitation spécifique.
Ce moyen sera donc rejeté.
Les conditions permettant une prolongation de la rétention étant par ailleurs réunies, l'ordonnance sera en conséquence confirmée.
PAR CES MOTIFS,
DÉCLARE l'appel recevable ;
CONFIRME l'ordonnance entreprise.
DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l'appelant, à son conseil et à l'autorité administrative ;
LAISSE les dépens à la charge de l'Etat.
[N] [I],
greffier
Clotilde VANHOVE, conseillère
N° RG 23/01045 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U6M5
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 1053 DU 17 Juin 2023 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le samedi 17 juin 2023 :
- M. [K] [Z]
- l'interprète
- l'avocat de M. [K] [Z]
- l'avocat de M. LE PREFET DU NORD
- décision notifiée à M. [K] [Z] le samedi 17 juin 2023
- décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU NORD et à Maître Lilia LAMBERT le samedi 17 juin 2023
- décision communiquée au tribunal administratif de Lille
- décision communiquée à M. le procureur général :
- copie à l'escorte, au Juge des libertés et de la détention de LILLE
Le greffier, le samedi 17 juin 2023
N° RG 23/01045 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U6M5