COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 23/01035 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U6LN
N° de Minute : 1036
Ordonnance du vendredi 16 juin 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. [C] [D]
né le 03 Juin 1995 à [Localité 4] - IRAK
de nationalité Irakienne
Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]
dûment avisé, comparant en personne par visioconférence
assisté de Me Stéphanie GALLAND, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d'office et de M. [T] [P] interprète assermenté en langue arabe, tout au long de la procédure devant la cour
INTIMÉ
M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS
dûment avisé, absent représenté par Maître Mitche-Axel BIBALOU, cabinet Mathieu, barreau de Paris, présent en salle d'audience du centre de rétention administratif de Coquelles
PARTIE JOINTE
M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant
MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Bertrand DUEZ, conseiller à la cour d'appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assisté(e) de Véronique THÉRY, greffière
DÉBATS : à l'audience publique du vendredi 16 juin 2023 à 13 h 30
Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe
ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le vendredi 16 juin 2023 à
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;
Vu l'aricle L 743-8 du CESEDA ;
Vu la demande de l'autorité administrative proposant que l'audience se déroule avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ;
Vu l'accord du magistrat délégué ;
Vu l'ordonnance rendue le 15 juin 2023 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [C] [D] ;
Vu l'appel motivé interjeté par M. [C] [D] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 15 juin 2023 ;
Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;
Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;
EXPOSE DU LITIGE
Le 13 juin 2023 à 08h20 les services de police de [Localité 1] intervenaient au niveau de la plage de la commune suite à la présence d'une quarantaine de personnes entrant dans l'eau avec l'intention évidente de rejoindre une embarcation arrivant du large en vue de les embarquer à destination présumée de la Grande Bretagne.
Deux personnes de nationalité irakienne et somalienne restent sur la plage et indiquent leurs nationalité aux policiers qui procèdent alors à un contrôle d'identité et de titre aux visas des article 78-2 al 8 du code de procédure pénale et L. 812-1 et L. 812-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
C'est dans ce cadre que M. [C] [D] de nationalité irakienne a fait l'objet d'un placement en rétention administrative ordonné par monsieur le Préfet du Pas-de-Calais le 13 juin 2023 à 17h10 pour l'exécution d'un éloignement vers la Grèce ou l'Autriche en vertu d'une demande de réadmission effectuée au visa du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Un recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative a été déposé au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
' Vu l'article 455 du code de procédure civile
' Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-Mer en date du 15 juin 2023 (12h00),ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 28 jours et rejetant la requête en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative.
' Vu la déclaration d'appel du 15 juin 2023 à 16h38 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative
Au titre de sa déclaration d'appel l'appelant soutient les moyens suivants :
Violation du droit d'asile en ce que M. [C] [D] indique avoir sollicité l'asile en France en audition de retenue et ne pas avoir bénéficié du statut de demandeur d'asile et du droit au séjour provisoire y afférent.
Défaut d'information du fait qu'il ne peut pas déposer une demande d'asile en France puisqu'il est en rétention dans le cadre d'un transfert vers le pays en charge du traitement de sa demande d'asile. (Article R. 754-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
MOTIFS DE LA DÉCISION
1/ Sur le moyen tiré de la demande d'asile
A) Il résulte de l'article L 521-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu' au moment de sa présentation auprès de l'autorité administrative en vue de l'enregistrement d'une première demande d'asile en France, l'étranger ne peut être regardé comme présentant le risque non négligeable de fuite défini à l'article L. 751-10.
Toutefois, cet article ne trouve a s'appliquer que lorsque l'étranger effectue une demande d`asile devant l`autorité administrative compétente, ce qui n'est pas le cas des services de police ou de gendarmerie, lorsque l' intéressé ne s'est pas présenté devant eux à cette fin.
En effet, il sera rappelé que l'obligation d'orientation vers 1'autorité compétente pour instruire la demande d'asile ne s'exerce à l'égard des policiers ou gendarmes que lorsque l'étranger s'est présenté a eux spontanément en vue de demander l'asile, comme le dispose l'article R521-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et non lorsque l'étranger a été interpellé puis placé en retenue et exprime à titre incident sa volonté de demander l'asile en France au cours de son audition.
Dans cette dernière hypothèse, l'examen des critères légaux permettant le placement en rétention d'un étranger demeurent inchangés par rapport aux articles L 741-1, L 612-3 et L 751-9 et L 751-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
B) Par ailleurs lorsqu'un étranger a déposé une demande d'asile dans un pays de l'UE et se trouve placé en rétention en France aux fins de transfert vers ce pays en vertu du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013, l'article R. 754-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile demande à l'autorité préfectorale d'informer l'étranger que le dépôt d'une nouvelle demande d'asile en France est inutile puisqu'irrecevable.
Aucune disposition légale ne précise que cette information est donnée à peine de main-levée du placement en rétention administrative.
L'absence d'information de ces disposition ne peut qu'entraîner, le cas échéant, un dépôt de demande d'asile en France et en rétention, demande qui sera déclarée irrecevable par l'OFPRA et ce, en procédure accélérée.
Il ne peut donc raisonnablement être considéré que le fait d'avoir omis de donner à l'étranger l'information contenue dans l'article L. 754-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, entraîne un grief pour ce dernier.
Le moyen sera rejeté en ses deux branches.
Pour le surplus, la cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qui seront intégralement adoptés au visa de l'article 955 du code de procédure civile, que le premier juge a statué sur le fond en ordonnant la prolongation de la rétention en l'attente de la réponse à recevoir des autorités grecques et autrichienne sur la demande de réadmission de M. [C] [D].
PAR CES MOTIFS
DÉCLARE l'appel recevable ;
CONFIRME l'ordonnance entreprise.
DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [C] [D] par l'intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d'un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l'autorité administrative ;
LAISSE les dépens à la charge de l'État.
Véronique THÉRY, greffière
Bertrand DUEZ, conseiller
A l'attention du centre de rétention, le vendredi 16 juin 2023
Bien vouloir procéder à la notification de l'ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l'interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : M. [T] [P]
Le greffier
N° RG 23/01035 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U6LN
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 1036 DU 16 Juin 2023 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 3]) :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le
- M. [C] [D]
- par truchement téléphonique d'un interprète en tant que de besoin
- nom de l'interprète (à renseigner) :
- décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [C] [D] le vendredi 16 juin 2023
- décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS et à Maître Stéphanie GALLAND Maître Bruno MATHIEU le vendredi 16 juin 2023
- décision communiquée au tribunal administratif de Lille
- décision communiquée à M. le procureur général
- copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER
Le greffier, le vendredi 16 juin 2023
N° RG 23/01035 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U6LN