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01/06/2023 | FRANCE | N°22/05067

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 01 juin 2023, 22/05067


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ARRÊT DU 01/06/2023





****





N° de MINUTE : 23/195

N° RG 22/05067 - N° Portalis DBVT-V-B7G-USDT



Ordonnance (N° 22/00056) rendue le 27 Septembre 2022 par le Président du tribunal judiciaire de Cambrai







APPELANTE



Madame [N] [M]

née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2

]

[Localité 5]



Représentée par Me Nicolas Pelletier, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 59178/02/22/010009 du 18/11/2022 accordée par le bureau d'...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 01/06/2023

****

N° de MINUTE : 23/195

N° RG 22/05067 - N° Portalis DBVT-V-B7G-USDT

Ordonnance (N° 22/00056) rendue le 27 Septembre 2022 par le Président du tribunal judiciaire de Cambrai

APPELANTE

Madame [N] [M]

née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Nicolas Pelletier, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 59178/02/22/010009 du 18/11/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de Douai)

INTIMÉE

Le Syndicat Mixte Communal Siden-sian inscrit sous le numéro SIRET 200 017 598, ayant siège [Adresse 3] pris en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Emmanuel Masson, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, assisté de Me Eric Landot, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

DÉBATS à l'audience publique du 23 mars 2023 tenue par Guillaume Salomon magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de chambre

Claire Bertin, conseiller

Yasmina Belkaid, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 01 juin 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 27 février 2023

****

EXPOSE DU LITIGE :

1. Les faits et la procédure antérieure :

Mme [N] [M] est propriétaire d'un immeuble qu'elle a garanti par une police d'assurance habitation souscrite auprès de la société Generali iard (Generali).

Le 27 mai 2019, elle a constaté que sa cave était inondée et que le sol de sa chambre s'affaissait. Mme [M] a dès lors prévenu l'établissement public [L], en charge du réseau de distribution de l'eau, ainsi que les pompiers afin que l'eau stagnante de sa cave puisse être pompée et que le réseau puisse être vérifié.

Un arrêté municipal du 6 juin 2019 de péril grave et imminent a mise en demeure de procéder au vidage et au curage du rez-de-chaussée de son habitation et de faire vérifier par un bureau d'études techniques ou un bureau de contrôle la stabilité structurelle de l'immeuble.

Mme [M] a déclaré le sinistre à son assureur afin de mettre en 'uvre sa garantie recherche de fuites et de déterminer les éventuelles responsabilités.

A l'issue d'une expertise amiable, Generali a opposé un refus de garantie à Mme [M] au motif que l'origine du sinistre n'a pas été déterminée et qu'un tel sinistre ne pouvait se produire de manière accidentelle dès lors qu'une infiltration d'eau latente et continue était à l'origine du sinistre.

Aucun rapport d'expertise ne lui ayant été communiqué et considérant que les explications de son assureur étaient contradictoires, Mme [M] a assigné Generali par acte du 1er juin 2021 devant le juge des référés de Cambrai aux fins d'obtenir la désignation d'un expert judiciaire.

Par ordonnance du 28 septembre 2021, le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire, qu'elle a confié à M. [S].

Par acte du 26 juin 2022, Mme [M] a assigné l'Etablissement public syndical mixte communal Siden sian, pris en la personne de son établissement secondaire Siden sian [L] [Localité 5](la régie [L]), afin d'étendre les opérations d'expertise à cet établissement public en charge du réseau de distribution des eaux.

2. L'ordonnance dont appel :

Par ordonnance du 27 septembre 2022, le juge des référés de Cambrai a :

débouté Mme [M] de sa demande d'extension des opérations d'expertise à la régie [L] ;

débouté Mme [M] de sa demande de communication du rapport d'enquête menée par la régie [L] ;

condamné Mme [M] à payer à la régie [L] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné Mme [M] aux entiers dépens.

3. La déclaration d'appel :

Par déclaration du 28 octobre 2022, Mme [M] a formé appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions.

4. Les prétentions et moyens des parties :

4.1 Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 25 novembre 2022, Mme [M], demande à la cour, au visa de l'article 145 de code de procédure civile, de :

=$gt; infirmer l'ordonnance du tribunal judiciaire de Cambrai du 27 septembre 2022 en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

ordonner l'extension des opérations d'expertise ordonnées par l'ordonnance du 28 septembre 2021 par le « tribunal judiciaire » de Cambrai à la société [L] et son assureur selon la demande de M. [G] [S], expert judiciaire ;

ordonner la communication du rapport d'enquête mené par [L] à la suite de l'inondation du 27 mai 2019 dans le bien sis [Adresse 2] appartenant à Mme [N] [M], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'ordonnance à intervenir

condamner la régie [L] à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et la somme de 2 000 euros pour la procédure d'appel ;

condamner la régie [L] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

A l'appui de ses prétentions, Mme [M] fait valoir que :

elle dispose d'un motif légitime, au sens de l'article 145 du code de procédure civile, en ce que l'expert judiciaire a souhaité étendre les opérations d'expertise à [L] et son assureur au motif que cette dernière aurait procédé à des travaux de réparation sur le réseau de distribution face à son domicile, sur lesquels [L] n'a apporté aucune information ;

le représentant de [L] a indiqué dans la presse que [L] avait diligenté une enquête et avait filmé la canalisation pour avoir connaissance de l'état du réseau au moment du sinistre ;

l'expert judiciaire n'a pas simplement donné son aval mais sollicite bien l'extension des opérations d'expertise.

4.2 Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 2 décembre 2022, la régie [L], demande à la cour, au visa de l'article 145 de code de procédure civile, de :

=$gt; confirmer en tous points l'ordonnance de référé ;

par conséquent,

débouter Mme [M] de ses demandes sollicitant l'extension des opérations d'expertise ;

la débouter de sa demande sollicitant sa condamnation à communiquer un rapport d'enquête inexistant sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

la débouter de sa demande de condamnation au titre des frais irrépétibles ;

à titre subsidiaire,

lui donner acte de ce qu'elle émet les protestations et réserves d'usage sur la demande d'extension de la mission d'expertise confiée à M. [S] formulée par Mme [M] ;

en tout état de cause,

condamner Mme [M] à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

Elle soutient que :

un avis favorable émis par l'expert judiciaire ne suffit pas à caractériser un motif légitime au sens de l'article 145 du code de procédure civile ;

en l'espèce, Mme [M] ne justifie d'aucun motif légitime et n'établit aucun lien de causalité entre le sinistre et l'intervention sur le réseau de distribution, laquelle a eu lieu presque trois ans après le sinistre ; ces travaux consistaient uniquement à renouveler les compteurs et non à procéder à une réfection des réseaux : plus précisément, pour l'habitation en face de celle de Mme [M], il s'agissait d'un changement de robinet d'un branchement à la suite du changement de compteur sur ce branchement ;

s'agissant de son intervention au moment du sinistre, le but était de réaliser un contrôle par caméra du compteur et de son environnement afin de s'assurer qu'ils ne présentaient aucun désordre. Cette inspection n'a révélé aucune anomalie et a permis d'en conclure que la fuite était localisée après le compteur, en partie privative et Mme [M] en a été informée ;

le rapport dont Mme [M] sollicite la communication n'existe pas. Si une inspection par caméra a bien été faite, aucun rapport n'a en revanche été établi en l'absence d'anomalie détectée ;

enfin, plus de trois ans après les faits, il est désormais impossible de déterminer avec certitude l'origine de l'inondation et l'expertise amiable de l'assureur a conclu que la cause se trouverait dans un défaut d'entretien imputable à Mme [M].

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'extension de la mission de l'expert :

En application de l'article 145 du code de procédure civile, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées en référé s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige.

Les articles 236 et 245 du même code offrent par ailleurs la possibilité d'étendre les opérations d'expertise.

En l'espèce, la demande d'extension de l'expertise à des travaux réalisés par Noréade repose sur un avis émanant de l'expert [S], qu'il a émis « par anticipation » par courrier le 3 mai 2022 et confirmé par courrier du 7 novembre 2022.

À cet égard, l'article 245 alinéa 3 du code de procédure civile dispose d'une part que le juge ne peut, sans avoir préalablement recueilli les observations du technicien commis, étendre la mission de celui-ci. Cet avis constitue par conséquent un préalable à l'appréciation par la juridiction de l'existence d'un motif légitime à solliciter l'extension de la mesure d'instruction, et non une pièce établissant l'existence d'un tel motif, qu'il appartient au demandeur à l'extension d'établir, étant observé que l'avis de l'expert ne lie pas la juridiction.

D'autre part, l'expert [S] n'indique pas les motifs pour lesquels il émet un avis favorable à une telle mise en cause de Noréade et de son assureur.

Mme [M] n'établit ainsi pas, contrairement à ses allégations, que «l'expert a personnellement constaté que le réseau de distribution avait fait l'objet d'une intervention en face de la maison de Mme [M], alors que la distribution d'eau est interrompue depuis l'inondation de 2019 et l'expert s'interroge sur les raisons de cette intervention pour son rapport à venir ».

En outre, tant la date que la nature des travaux allégués ne sont pas précisées par Mme [M].

Alors qu'une telle preuve incombe à Mme [M], [L] produit à l'inverse une fiche récapitulative de travaux réalisés à proximité de l'immeuble de celle-ci, qui établit qu'un changement de compteur y est intervenu en janvier 2022, soit près de 18 mois après le sinistre. Aucun lien de causalité entre ces travaux et l'inondation survenue dans la cave de Mme [M] n'est ainsi établi.

L'article de presse locale qu'invoque également Mme [M] indique enfin que :

« La fuite pourrait provenir de la cave et donc impliquer la responsabilité de la propriétaire. (') faute de pouvoir se rendre sur place en raison de problème de sécurité, une équipe de techniciens a « fait passer une caméra par un soupirail de la rue » pour accéder à la cave au niveau du compteur. Cet outil est régulièrement utilisé pour « inspecter les canalisations d'assainissement », notamment les espaces étroits. Aucune fuite n'a été détectée lorsqu'ils ont rouvert le branchement d'eau avant le compteur, côté rue. Cependant, de l'eau s'est écoulée au niveau d'une canalisation dans la cave, située après le compteur. On ignore encore depuis quand la fuite existait. ».

Il en résulte qu'au moment du sinistre, seule une fuite dans la propre cave de Mme [M] a été constatée, alors que les techniciens ont indiqué au journaliste qu'aucune fuite n'affectait le réseau public.

L'ordonnance ayant rejeté la demande d'extension, faute d'établir un motif légitime, est par conséquent confirmée.

Sur la communication d'un rapport d'inspection :

Il est illogique de solliciter la communication d'un rapport après avoir sollicité l'extension de la mesure d'instruction, alors qu'une telle pièce a vocation à étayer l'existence d'un motif légitime et doit par conséquent être produite à l'appui d'une demande d'extension, et non être sollicitée simultanément à une telle demande.

En l'espèce, le premier juge a valablement retenu que l'existence même du rapport d'inspection par [L] n'est pas établie, alors qu'aucun élément n'établit l'obligation pour cette dernière de dresser un tel rapport à l'issue d'un contrôle des canalisations.

L'ordonnance critiquée ayant rejeté la demande de communication est confirmée, en l'absence de motif légitime à exiger la production d'une pièce dont l'existence n'est pas prouvée par Mme [M].

Sur les dépens et les frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile :

Le sens du présent arrêt conduit :

à confirmer l'ordonnance attaquée sur ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile,

à condamner Mme [M], aux entiers dépens d'appel et à payer la régie [L] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme l'ordonnance rendue le 27 septembre 2022 par le tribunal judiciaire de Cambrai en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Mme [N] [M] aux dépens d'appel,

Condamne Mme [N] [M] à payer à l'Etablissement public syndical mixte communal Siden sian, pris en la personne de son établissement secondaire Siden sian [L] Beauvois, la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier

Harmony Poyteau

Le Président

[I] [H]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 22/05067
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;22.05067 ?
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