La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2023 | FRANCE | N°21/01908

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 14 avril 2023, 21/01908


ARRÊT DU

14 Avril 2023







N° 602/23



N° RG 21/01908 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T54X



MLBR/VM

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT OMER

en date du

15 Octobre 2021

(RG F 20/00111 -section 2)





































<

br>




GROSSE :



aux avocats



le 14 Avril 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



S.A.S. MERCK SERONO

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Patricia POUILLART, avocat au barreau de LILLE, et assistée de Me Stéphanie TONDREAU, avocat a...

ARRÊT DU

14 Avril 2023

N° 602/23

N° RG 21/01908 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T54X

MLBR/VM

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT OMER

en date du

15 Octobre 2021

(RG F 20/00111 -section 2)

GROSSE :

aux avocats

le 14 Avril 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

S.A.S. MERCK SERONO

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Patricia POUILLART, avocat au barreau de LILLE, et assistée de Me Stéphanie TONDREAU, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

M. [M] [L]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Marie Hélène LAURENT, avocat au barreau de DOUAI, et assisté de Me Laurence MASCART DUSART, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l'audience publique du 07 Mars 2023

Tenue par Marie LE BRAS

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Anne STEENKISTE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie LE BRAS

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 14 Février 2023

EXPOSÉ DU LITIGE':

Initialement embauché à compter du 3 mars 2003 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée par la société Serono France en qualité de délégué commercial spécialiste, M. [M] [L] a vu son contrat transféré à compter du 1er juillet 2007 à la société Merck Lipha Santé devenue la SAS Merck Serono à la suite du rachat de la société Serono France par le groupe Merck.

Au dernier état de la relation contractuelle, M. [L] a exercé les fonctions de délégué spécialiste neurologie et immunologie niveau 6 échelon B de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique, qui est applicable à la relation de travail, la société Merck Serono produisant et commercialisant des produits pharmaceutiques.

Par courrier daté du 5 décembre 2019, M. [L] a été convoqué à un entretien fixé au 13 décembre suivant, son employeur l'informant envisager à son encontre une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'à son licenciement.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 janvier 2020, la société Merck Serono a notifié à M. [L] son licenciement pour faute grave lui reprochant en substance des déclarations de frais professionnels incohérentes et injustifiées, certains frais ayant notamment été engagés hors de son secteur de prospection sans validation préalable de sa hierarchie.

Par requête du 29 avril 2020, M. [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Omer afin de contester son licenciement et d'obtenir diverses indemnités liées à la rupture du contrat de travail.

Par jugement contradictoire du 15 octobre 2021, le conseil de prud'hommes de Saint-Omer a':

- jugé le licenciement de M. [L] sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Merck Serono à payer à M. [L] les sommes suivantes':

*16 639,35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 1 663,93 euros au titre des congés payés y afférents,

*39 788,01 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

*66 557,40 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Merck Serono à établir et à faire parvenir à M. [L] la fiche de paie afférente aux créances salariales susvisées et l'attestation destinée à Pôle emploi corrigée conformément à la décision,

- condamné la société Merck Serono aux intérêts judiciaires selon droit ainsi qu'aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté M. [L] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Merck Serono de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Par déclaration reçue au greffe le 3 novembre 2021, la société Merck Serono a interjeté appel du jugement rendu sauf en ses dispositions déboutant M. [L] du surplus de ses demandes.

Dans ses dernières conclusions déposées le 12 juillet 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, la société Merck Serono demande à la cour de':

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

à titre principal,

- infirmer le jugement rendu sauf en ce qu'il a débouté M. [L] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire,

- en conséquence, le débouter de l'ensemble de ses demandes,

à titre subsidiaire, si le licenciement était jugé comme sans cause réelle et sérieuse,

- fixer le salaire de référence de M. [L] à la somme de 5 546,45 euros bruts,

- limiter la condamnation au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 16 639,35 euros,

- débouter M. [L] du surplus de ses demandes,

en tout état de cause,

- condamner M. [L] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions déposées le 21 avril 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, M. [L] demande à la cour de':

- confirmer le jugement rendu sauf sur le montant des indemnités octroyées et en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de circonstances vexatoires du licenciement,

- condamner la société Merck Serono à lui payer les sommes suivantes':

*25 812 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 2 581,20 euros au titre des congés payés y afférents,

*53 015,26 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

*86 618 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail,

*36 900 euros en réparation du préjudice résultant de circonstances vexatoires du licenciement,

*6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- juger qu'en l'application de l'article 1231-7 du code civil, les sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts à compter de la date de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation de la juridiction, ou, subsidiairement, à compter de la date du prononcé du jugement par la juridiction,

- juger qu'en application de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts dus pendant une année entière seront capitalisés par anatocisme,

- condamner la société Merck Serono aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, lesquels comprendront l'intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution du jugement par voie d'huissier et, en particulier, tous les droits de recouvrement ou d'encaissement à la charge du créancier en application des dispositions des articles 10 à 12 du décret n°96-1080 du 12 septembre 1996, modifié par le décret 2001-212 du 8 mars 2001, portant fixation du tarif des huissiers en matière civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION:

- observations liminaires :

Il convient de constater en liminaire qu'aux termes du dispositif de ses dernières conclusions qui seul saisit la cour des prétentions sur lesquelles elle doit statuer, M. [L] conclut uniquement à la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et ne formule aucune demande tendant à déclarer son licenciement nul sur le fondement de l'article L. 1132-3-3 du code du travail, de sorte que la cour n'étant saisie d'aucune demande à ce dernier titre, il n'y a pas lieu d'examiner les moyens et arguments échangés par les parties de ce chef.

- sur le prétendu licenciement verbal de M. [L] :

La société Merck Serono fait grief au jugement d'avoir retenu que M. [L] avait fait l'objet d'un licenciement verbal avant réception de la lettre lui notifiant officiellement son licenciement.

Elle soutient que le contenu et la chronologie des messages dont se prévaut M. [L] ainsi que le simple fait de l'avoir dispensé, après l'entretien du 13 décembre 2019, de se rendre au séminaire d'[Localité 5], ne peuvent suffire à valoir preuve d'un tel licenciement verbal de manière non-équivoque, faisant valoir en substance qu'aucun des messages ne porte l'annonce claire d'un licenciement en dehors de celui du 8 janvier 2020 de M. [B], directeur régional, qui est toutefois postérieur à l'envoi de la lettre de licenciement, l'intéressé n'ayant par ailleurs selon l'appelante, aucune délégation de pouvoir pour procéder à des mesures disciplinaires.

En réponse, M. [L] prétend au contraire que la notification verbale de son licenciement ressort clairement des messages échangés à compter du 3 janvier 2020 avec Mme [S], responsable des relations sociales, et M. [B], aucun des deux n'ayant d'ailleurs réagi à ses propres SMS et courrier des 3 et 6 janvier 2020 par lesquels il prenait acte de son licenciement avant même d'avoir reçu la lettre de notification.

Il ajoute que son licenciement se déduit aussi sans équivoque possible de l'annulation de sa participation au séminaire, qui lui a été présentée comme étant la conséquence directe de la décision prise.

M. [L] précise également pour étayer ses dires que sa connexion Internet a été coupée le 8 janvier 2020 à 8h00, soit avant même la réception de la lettre de licenciement.

Sur ce,

En vertu de l'article L. 1232-6 du code du travail, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans une lettre de licenciement qu'il doit notifier au salarié. Ainsi, un licenciement notifié verbalement équivaut à un licenciement non motivé, et ce faisant, est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Il incombe au salarié de rapporter la preuve qu'il a fait l'objet d'un licenciement verbal, celui-ci devant résulter d'une annonce non équivoque et définitive de mettre fin à la relation de travail.

Il est en l'espèce constant que l'entretien préalable auquel M. [L] a été convoqué le 5 décembre 2019 s'est tenu le 13 décembre 2019 en présence de Mme [S], responsable relations sociales, et de Mme [F], directrice de la Franchise neurologie et Immunologie (N+3) dont dépend l'intéressé.

Il est également acquis aux débats que la lettre de licenciement de M. [L] est datée du 6 janvier 2020, signée par Mme [F], et a été reçue par l'intimé le 8 janvier 2020, l'exemplaire produit par chacune des parties ne permettant pas de connaître la date précise de son envoi.

Pour démontrer qu'il a en réalité fait l'objet d'un licenciement verbal avant même la réception de sa lettre de licenciement, M. [L] s'appuie sur :

- un courriel émanant de Mme [H] [S] reçu le vendredi 3 janvier 2020 à 15h41, libellé comme suit : 'Ce message pour vous informer que suite à notre entretien du 13 décembre dernier, nous avons pris notre décision laquelle vous sera notifiée en recommandé en début de semaine prochaine. Dans cette attente, nous vous prions de ne pas vous rendre au séminaire prévu à [Localité 5] la semaine prochaine. Je me tiens à votre disposition pour toute question relative au présent message', étant observé que Mme [F] est en copie de ce courriel, ce qui en confirme le caractère officiel,

- un procès-verbal de constat par lequel l'huissier instrumentaire relate le message vocal de Mme [H] [S] reçu par M. [L] ce même 3 janvier 2020 à 16h46 dont les termes suivent : 'je vous appelle parce que je vous ai adressé un message,...concernant la suite de notre entretien du 13 décembre dernier,... je vous laisserais soin d'en prendre connaissance, sa conséquence directe c'est que je voulais vous alerter sur le fait de ne pas vous rendre au séminaire d'[Localité 5] la semaine prochaine..on va vous notifier notre décision début semaine prochaine, le courrier partira très probablement lundi...vous ne l'aurez pas avant mardi ou mercredi...si jamais vous avez des questions, vous n'hésitez pas, vous me rappeler',

Comme le fait observer la société Merck Serono, Mme [S] n'utilise pas le mot 'licenciement' dans ces 2 messages. Toutefois, M. [L] produit un courrier recommandé (sa pièce 16) dont l'appelante ne prétend que ses services ne l'auraient pas reçu, qu'il a adressé à Mme [S] dès le 6 janvier 2020, soit avant la réception de la lettre officielle de licenciement, dans laquelle il relate leur discussion téléphonique intervenue juste après les courriel et message vocal susvisés, soit le 3 janvier 2020 à 17h37, en ces termes : 'vous m'avez fait savoir par téléphone, vendredi 3 janvier à 17h37 que mon licenciement était décidé. J'ai effectivement reçu le mail que vous m'annonciez, me demandant de ne pas participer au séminaire...Vous n'avez pas été en mesure de me préciser qu'elle serait la faute justifiant mon licenciement ce qui, selon vos mots, dépendrait du service juridique ce lundi...j'en retiens être licencié verbalement, sans motif'.

La réalité et le contenu de cette discussion téléphonique, au demeurant cohérente avec le contenu des 2 messages qui l'ont précédée, sont d'ailleurs confirmés par un SMS reçu le 8 janvier 2020 à 11h09, ainsi que cela résulte du procès-verbal de constat, émanant de M. [R] [B], directeur régional, avec le contenu suivant : 'Bonjour [M], comme [H] te l'a indiqué au téléphone vendredi soir, ta notification de licenciement t'a été adressé ce lundi 6 janvier 2020. Elle devrait te parvenir ce jour..[R]'.

C'est d'ailleurs aussi à M. [R] [B] que M. [L], dès le 3 janvier 2020 à 17h46, adressait un SMS dont le contenu sans équivoque 'Bon...je suis viré...', apparaît directement en réaction aux annonces faites par Mme [S] quelques minutes plus tôt au téléphone.

Il ressort de ces différentes pièces que dès le 3 janvier 2020, soit avant même la rédaction d'une lettre de licenciement motivée et de son envoi le 6 janvier 2020, M. [L] a été verbalement et officiellement informé de manière claire et non-équivoque par la responsable des ressources humaines ayant assisté à l'entretien préalable, de la décision prise de le licencier pour faute, cette annonce quelque peu précipitée s'expliquant de manière cohérente par le fait que la société Merck Serono ne voulait pas que M. [L] participe au séminaire devant se tenir quelques jours plus tard, ce qui lui a d'ailleurs été notifié à la même occasion.

Rappel étant fait que la rupture de la relation de travail prend effet à la date où l'employeur a manifesté sa décision d'y mettre fin, c'est bien en l'espèce par cette notification verbale et non équivoque du 3 janvier 2020 que la société Merck Serono, par l'intermédiaire de sa responsable des relations sociales dont elle ne prétend pas qu'elle n'avait pas délégation de pouvoir, a informé M. [L] de sa décision de le licencier.

Il convient donc, au regard de l'ensemble de ces éléments, de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que ce licenciement verbal de M. [L], qui équivaut à un licenciement non motivé, est dépourvu de cause réelle et sérieuse, la lettre de licenciement ultérieure, même motivée, ne pouvant constituer une régularisation a posteriori.

- sur les demandes financières de M. [L] en lien avec son licenciement :

Dans le cadre de son appel incident, M. [L] sollicite des indemnités liées à la rupture de son contrat de travail d'un montant supérieur à celles accordées par le jugement.

Il soutient d'abord que le salaire de référence à prendre en compte, correspondant à la moyenne des 3 derniers mois précédant son licenciement, est de 6 453 euros, les premiers juges ayant omis de tenir compte de la prime de campagne de 2222 euros versées en mars 2020 au titre de la période de septembre à décembre 2019.

Toutefois, s'il est exact qu'il y a lieu de tenir compte de cette prime, proratisée sur 3 mois, soit 1 666,50 euros, c'est à tort que M. [L] a tenu compte dans son calcul des primes versées en novembre et décembre 2019 alors qu'elles concernaient les mois de mai à août 2019, non compris dans la période de 3 mois précédant son licenciement.

Au vu des salaires bruts des mois d'octobre à décembre 2019 (3x5 110,80 euros) figurant sur les bulletins de salaire et attestation Pôle emploi, et de la prime de campagne de mars 2020 proratisée (1 666,50), le salaire moyen desdits mois est de 5 666,30 euros, soit d'un montant supérieur à la moyenne des douze derniers mois retenue par M. [L] et les premiers juges à hauteur de 5 546,45 euros. Le salaire de référence sera donc de 5 666,30 euros.

* sur l'indemnité compensatrice de préavis :

M. [L] réclame une indemnité compensatrice de préavis correspondant à 4 mois de salaire, estimant que le seul motif qu'il ait été engagé avant le 1er juillet 2009 ne peut justifier que celle-ci soit limitée à 3 mois de salaire comme le prévoit la convention collective pour les contrats signés antérieurement à cette date.

Toutefois, ces dispositions conventionnelles dont la remise en cause de la validité, au demeurant non demandée par M. [L], ne relève pas du pouvoir de la cour, s'imposent de sorte que l'indemnité compensatrice de préavis sera fixée à la somme de 16 998,90 euros, outre 1 699,89 euros de congés payés y afférents.

* sur l'indemnité conventionnelle de licenciement :

Les parties s'accordent pour dire que les dispositions conventionnelles sont plus favorables que les dispositions légales concernant le calcul de l'indemnité de licenciement.

L'intéressé ayant une ancienneté de 17 ans et un mois à l'expiration du préavis de 3 mois, il convient de lui accorder en application des dispositions de la convention collective une indemnité de licenciement de 46 314 euros, conformément à la méthode de calcul non critiquée par la société Merck Serono, détaillée par M. [L].

* sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

M. [L] sollicite en réparation de son préjudice une somme de 86,618 euros, correspondant à 14 mois de salaire, faisant état de ses pertes financières liées notamment à la perte de ses droits à participation sur les bénéfices de l'entreprise ainsi qu'à sa période de chômage jusqu'en janvier 2022, expliquant n'avoir pas pu s'inscrire à Pôle emploi avant juillet 2020 en raison d'une attestation Pôle emploi incomplète.

La société Merck Serono lui oppose en substance le fait qu'il a retrouvé un contrat à durée déterminée de 8 mois dès mai 2020, avant de retrouver un emploi stable au sein de la société Advanz. Elle conteste la prise en compte du préjudice tiré de la perte de chance de ne pas pouvoir bénéficier de ses droits à participation sur les bénéfices de l'entreprise. Selon elle, l'indemnisation devra être réduite au plancher de 3 mois défini par l'article L. 1235-3 du code du travail, soit 16 639,35 euros.

M. [L] était âgé de 47 ans au jour de son licenciement et bénéficiait de près de 17 ans d'ancienneté. S'il justifie de la perception d'indemnité chômage après son licenciement, cette période de chômage a été toutefois interrompue par l'exécution à partir de mai 2020 d'un contrat à durée déterminée d'une durée de 8 mois avec une rémunération significative, puis de l'obtention en 2022 d'un emploi stable avec une rémunération fixe annuelle de 60 000 euros, outre une part variable.

Les premiers juges ont accordé à M. [L] une somme de 66 557,40 euros à titre d'indemnisation. Toutefois, au regard des éléments susvisés qui limitent l'ampleur du préjudice subi, il convient en application de l'article L. 1235-3 du code du travail de réduire le montant de l'indemnité accordée à M. [L] pour la perte injustifiée de son emploi à la somme de 39 664,10 euros.

* sur les dommages et intérêts en raison des circonstances vexatoires du licenciement :

M. [L] sollicite une somme de 36 900 euros de dommages et intérêt, alléguant du trouble anxio dépressif provoqué par la brutalité de son licenciement et la remise en cause de son honnêteté après 17 ans de collaboration.

Compte tenu de son ancienneté au sein de l'entreprise et l'absence d'antécédent disciplinaire, le lancement de la procédure disciplinaire, sans avertissement ou discussion préalable qui aurait été pourtant parfaitement envisageable au regard de la nature des griefs allégués, ainsi que la brutalité de l'annonce par voie téléphonique de son licenciement, constituent des circonstances particulièrement vexatoires, M. [L] justifiant du trouble que cela lui a occasionné par la prescription de tranquilisants le lendemain de l'entretien préalable. Il convient en réparation du préjudice subi de lui accorder une somme de 2 000 euros.

- sur les autres demandes :

Il convient de faire droit à la demande de M. [L] tendant à la capitalisation des intérêts assortissant les condamnations pécuniaires susvisées, en application de l'article 1343-2 du code civil, les premiers juges ayant omis de statuer sur cette demande dont les avait pourtant saisis l'intéressé.

Les conditions de l'article L. 1235-4 du code du travail étant applicables au cas d'espèce, il convient d'ordonner d'office le remboursement par la société Merck Serono aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées à M. [L], dans la limite de 4 mois.

La société Merck Serono devra également remettre à M. [L] un bulletin de salaire récapitulatif et une attestation destinée à Pôle emploi, rectifiés conformément au présent arrêt.

Au vu de ce qui a été statué, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Partie perdante, la société Merck Serono supportera les dépens d'appel, en ce non compris les frais liés à l'éventuelle exécution forcée de la présente décision.

L'équité commande en outre de condamner la société Merck Serono à payer à M. [L] une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de débouter l'appelante de sa demande sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement entrepris en date du 15 octobre 2021 sauf en ce qui concerne le montant des sommes accordées au titre de la rupture du contrat de travail et la demande indemnitaire en raison des circonstances vexatoires du licenciement ;

statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la société Merck Serono à payer à M. [M] [L] les sommes suivantes :

- 39 664,10 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 16 998,90 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 699,89 euros de congés payés y afférents,

- 46 314 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 2 000 euros en raison des circonstances vexatoires du licenciement ;

DIT que la société Merck Serono devra remettre à M. [M] [L] un bulletin de salaire récapitulatif et une attestation destinée à Pôle emploi corrigés conformément à la présente décision ;

ORDONNE le remboursement par la société Merck Serono aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées à M. [M] [L], dans la limite de 4 mois ;

DIT qu'il sera fait application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil relatives à la capitalisation des intérêts échus ;

CONDAMNE la société Merck Serono à payer à M. [M] [L] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

DIT que la société Merck Serono supportera les dépens d'appel, en ce non compris les frais liés à l'éventuelle exécution forcée de la présente décision.

LE GREFFIER

Serge LAWECKI

LE PRÉSIDENT

Marie LE BRAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 21/01908
Date de la décision : 14/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-14;21.01908 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award