ARRÊT DU
14 Avril 2023
N° 630/23
N° RG 20/01315 - N° Portalis DBVT-V-B7E-TASE
LB/CH
Jugement du
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LILLE
en date du
06 Mars 2020
(RG 18/00053 -section 4)
GROSSE :
aux avocats
le 14 Avril 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre Sociale
- Prud'Hommes-
APPELANTE :
Mme [C] [H] [J]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Laurence PIPART-LENOIR, avocat au barreau de LILLE
INTIMÉS :
M. [O] ès qualités de liquidateur amiable de STAR 59
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Isabelle SAFFRE, avocat au barreau de LILLE
S.A.R.L. STAR 59 en liquidation amiable
DÉBATS : à l'audience publique du 02 Février 2023
Tenue par Laure BERNARD
magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,
les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER : Valérie DOIZE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Pierre NOUBEL
: PRÉSIDENT DE CHAMBRE
Virginie CLAVERT
: CONSEILLER
Laure BERNARD
: CONSEILLER
ARRÊT : Contradictoire
prononcé par sa mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023,
les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 01 février 2023
EXPOSE DU LITIGE
La société Star 59 a été créée le 17'juin'2014 par M. [L] [O] et Mme [C] [J], cette dernière étant désignée aux termes des statuts comme gérante de la société.
M. [L] [O] détenait 90 % des parts de la société Star 59 et Mme [C] [J] en détenait 10 %.
La société exerçait une activité de vente de détail de bijoux fantaisie de luxe et argentés et exploitait le magasin Star situé à [Localité 4].
La convention collective applicable est celle de l'horlogerie, bijouterie (commerce de détail).
A compter du 1er juillet 2014, Mme [C] [J] a été engagée par la société Star 59 par contrat de travail écrit à durée indéterminée en qualité de directrice de boutique.
Lors d'une assemblée générale du 20 juillet 2016, Mme [C] [J] a démissionné de son mandat social et a cédé ses parts dans la société la société Star 59 à M. [L] [O], unique associé, qui en est devenu le gérant.
Par courrier du 1er'août 2016, Mme [C] [J] s'est vue notifier une mise à pied à titre conservatoire et a été convoquée à un entretien préalable fixé au 18 août 2016'; elle a été licenciée pour faute lourde par courrier en date du 30'août'2016 rédigé en ces termes':
«Vous avez eu une conduite constitutive d'une faute lourde. En effet, vous avez utilisé la trésorerie de la société indûment pour des dépenses personnelles (estimées actuellement à 36 000 euros) ou pour une société vous appartenant (sommes estimées actuellement à 44 000 euros).
Ces faits ont gravement mise en cause la bonne marche de l'entreprise. C'est pourquoi, compte tenu de leur gravité et malgré vos explications lors de notre entretien préalable, nous sommes au regret de devoir procéder à votre licenciement pour faute lourde»
Le 8 décembre 2016, Mme [C] [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Lille aux fins principalement de contester la rupture du contrat de travail et d'obtenir des indemnités afférentes.
Par jugement rendu le 6'mars'2020, la juridiction prud'homale a':
- constaté la nullité du contrat de travail,
- condamné Mme [C] [J] à payer à la société Star 59 les sommes suivantes':
- 75'850'euros au titre des salaires indûment perçus,
- 750'euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Mme [C] [J] de l'ensemble de ses demandes,
- débouté la société Star 59 du surplus,
- condamné Mme [C] [J] aux entiers dépens.
Mme [C] [J] a régulièrement interjeté appel contre ce jugement par déclaration du 11'juin'2020.
M. [L] [O] a été désigné liquidateur amiable de la société Star 59.
Aux termes de ses conclusions transmises par RPVA le 17'janvier'2023, Mme [C] [J] demande à la cour de':
- déclarer le liquidateur amiable de la société Star 59 irrecevable en ses prétentions reprises au dispositif de ses conclusions, en application de l'article 4 du code de procédure civile,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de travail,
- dire qu'elle était liée avec la société Star 59 par un contrat de travail,
- débouter le liquidateur amiable de la société Star 59 de l'intégralité de ses demandes,
- juger la procédure de licenciement pour faute lourde irrégulière et infondée,
- juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamner M. [O] ès qualités à lui payer':
- 29'745,60'euros à titre de préavis,
- 1'409,45'euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
- 9'461,97'euros d'indemnité compensatrice de congés payés,
- 9'094,45'euros d'indemnités de congés payés sur dimanches et jours fériés,
- 8'319,20'euros à titre de rappel de salaire dû pendant la mise à pied conservatoire du 1er août au 29 septembre 2016,
- 24'957,60'euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2'000'euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonner la rectification des fiches de paie et de l'attestation Pôle emploi,
- condamner M. [O] ès qualités aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions transmises par RPVA le 6'janvier'2023, M. [O] en qualité de liquidateur amiable demande à la cour de':
A titre principal, confirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,
A titre subsidiaire,
- juger que le licenciement pour faute lourde de Mme [C] [J] est justifié,
- débouter Mme [C] [J] de l'intégralité de ses demandes,
- condamner Mme [C] [J] au paiement des entiers frais et dépens d'instance,
- condamner Mme [C] [J] à lui payer 2'000'euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites transmises par RPVA en application de l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er février 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'irrecevabilité des demandes de la société Star 59
Mme [C] [J] fait valoir que les demandes aux fins de 'constater' et 'dire et juger' sont irrecevables, faute de constituer des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
Dans la mesure où le liquidateur, dans le dispositif de ses conclusions demande à la cour notamment de confirmer la décision déférée et où elle sollicite le débouté des demandes de Mme [C] [J] et la condamnation de celle-ci à lui payer certaines sommes, la cour est saisie de demandes parfaitement recevables ; elle n'est simplement pas saisie des demandes tendant à 'constater', qui ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
Sur la nullité du contrat de travail
Mme [C] [J] fait grief au jugement entrepris d'avoir annulé son contrat de travail et de l'avoir condamnée à rembourser les sommes perçues à titre de salaire alors qu'il existait un contrat de travail écrit ; que l'existence d'un mandat social n'est pas exclusif d'un contrat de travail, sachant que M. [L] [O], titulaire de 90 % des parts, disposait d'un pouvoir de révocation ; que de la même manière, l'indépendance dans l'exercice de ses missions de directrice de magasin n'est pas exclusive d'un lien de subordination ; qu'en l'occurrence, la société Star 59 ne rapporte pas la preuve de l'absence de lien de subordination ; qu'en effet, M. [L] [O] contrôlait l'activité de la société et notamment l'évolution du chiffre d'affaires et qu'il a exercé son pouvoir disciplinaire en la licenciant pour faute lourde. Mme [C] [J] ajoute que ses fonctions de directrice de magasin étaient bien réelles puisqu'elle était en charge de l'achat et l'étiquetage des produits, mise à disposition de la marchandise, tenue des locaux, réalisation bimensuelle des vitrines, accueil de la clientèle suivi du service après-vente, direction du personnel, tenue de la caisse et remise en banque des produits des ventes, tenue du livre de caisse et du livre des mouvements d'espèces, et qu'il s'agissait de fonctions techniques distinctes de celles de gérante de la société.
Le liquidateur amiable invoque la nullité du contrat de travail conclu avec Mme [C] [J], faisant valoir que les trois critères jurisprudentiels (fonction distincte de celles du mandat social, rémunération distincte et lien de subordination) qui conditionnent le cumul d'un mandat social et d'un contrat de travail ne sont pas remplies ; que M. [L] [O], qui avait un emploi à part entière comme directeur informatique dans une autre société, n'a fait qu'investir dans la création de la société Star 59 mais que c'est Mme [C] [J] qui a négocié l'acquisition du fonds de commerce, qui a engagé M. [I] et qui a décidé d'augmenter son propre salaire ; que la rémunération de celle-ci était disproportionnée par rapport à celle fixée par la convention collective applicable, et correspondait en réalité à la rémunération de son mandat social. Il souligne que la société n'exerçait aucun pouvoir de contrôle et de direction, que M. [L] [O] ne donnait pas de directives ni d'instruction et se faisait seulement communiquer le chiffre d'affaire ; que celui-ci n'est devenu titulaire du pouvoir disciplinaire seulement en juillet 2016 lorsqu'il est devenu le gérant de la société.
Sur ce,
Le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s'engage à travailler pour le compte d'une autre et sous sa subordination moyennant une rémunération.
En présence d'un contrat de travail écrit, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d'en apporter la preuve.
En l'espèce, la société Star 59 a été créée le 17'juin'2014 par M. [L] [O] et Mme [C] [J], cette dernière étant désignée aux termes des statuts comme gérante de la société'; la société exerçait une activité de vente de détail de bijoux fantaisie de luxe et argentés.
M. [L] [O] détenait 90 % des parts et Mme [C] [J] en détenait 10 %.
La société exploitait le magasin Star situé à [Localité 4].
A compter du 1er juillet 2014, Mme [C] [J] a été engagée par la société Star 59 par contrat de travail écrit à durée indéterminée en qualité de directrice de boutique, moyennant une rémunération mensuelle de 2 800 euros net, porté ensuite à 3 250 euros net.
Lors d'une assemblée générale du 20 juillet 2016, Mme [C] [J] a démissionné de son mandat social et a cédé ses parts dans la société la société Star 59 à M. [L] [O], qui en est devenu l'unique associé et le gérant.
Mme [C] [J] a été licenciée pour faute lourde par courrier du 30 août 2016.
Mme [C] [J] ayant été engagée en qualité de directrice de magasin par la société Star 59 par la signature d'un contrat de travail écrit, il appartient à cette dernière, qui conteste la réalité de ce contrat de travail, d'en rapporter le caractère fictif.
La réalité de l'exécution d'un travail par Mme [C] [J] pour le compte de la société Star 59 est avérée, l'intimé ne contestant pas que celle-ci avait notamment la charge de l'achat et l'étiquetage des produits, de la tenue des livres de caisse et du livre des fournisseurs, et de la direction du personnel. Il ressort des attestations d'autres employées de magasins du centre ville de [Localité 4] et de M. [I], vendeur au sein du magasin Star, que Mme [C] [J], même si elle se rendait régulièrement à [Localité 3] où elle était propriétaire d'une boutique, était très souvent présente dans la boutique Star et s'occupait, en plus des tâches précitées, de recevoir les clients et d'installer la vitrine. Les missions de Mme [C] [J] en qualité de directrice de magasin étaient donc bien distinctes de celles de gérante de la société.
S'agissant de la rémunération de Mme [C] [J], au regard de son statut de cadre (qui est mentionné expressément dans le registre du personnel) et de son expérience professionnelle (soulignée dans son contrat de travail), le montant du salaire fixé et effectivement perçu par Mme [C] [J] (2 800 net puis 3 250 euros net) est en adéquation avec son poste de directrice de magasin.
Le fait que Mme [C] [J] soit gérante de la société et qu'elle soit à l'initiative du projet d'acquisition du fonds de commerce ne sont pas en soi exclusifs d'un lien de subordination étant observé que M. [L] [O], détenait 90 % des parts et avait tout pouvoir pour la révoquer. De la même manière, le fait que Mme [C] [J] dispose d'une autonomie dans la réalisation de ses missions et dans la constitution de son équipe de vendeurs est conforme à ses fonctions de directrice de magasin. En outre, si Mme [C] [J] a bénéficié d'une augmentation de salaire sans que M. [L] [O] n'en soit informé au préalable, c'est en application de la clause de son contrat de travail qui prévoyait une indexation sur l'évolution du chiffre d'affaire.
Les nombreux échanges de mails entre Mme [C] [J] et M. [L] [O] font apparaître que celui-ci contrôlait l'activité de la société, et demandait des comptes à Mme [C] [J] sur l'évolution du chiffre d'affaires. Le liquidateur admet d'ailleurs dans ses écritures que M. [L] [O] a exercé son pouvoir disciplinaire lors du licenciement de Mme [C] [J]. Or l'exercice d'un pouvoir disciplinaire induit l'existence d'un lien de subordination.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la société Star 59 ne démontre pas le caractère fictif du contrat de travail de Mme [C] [J], qui cumulait bien les fonctions distinctes de gérante, non rémunérée, et celle de directrice de magasin, salariée.
Le jugement de première instance doit dès lors être infirmé en ce qu'il a annulé ce contrat et condamné Mme [C] [J] à rembourser à la société Star 59 la somme de 75'850'euros au titre des salaires indûment perçus.
Sur le bien fondé du licenciement
Mme [C] [J] conteste le bien fondé de son licenciement. Elle fait valoir que le bilan 2015 a été approuvé en assemblée générale, et qu'il lui en a été donné quitus, or, les achats de bijoux qui lui sont reprochés auprès de la société Histoire de Femmes n'ont jamais été dissimulés (des factures et bons de livraison ayant été établis), de même que son augmentation de salaire ; que les prélèvements personnels qu'elle a réalisés correspondaient au paiement de ses salaires, qu'elle percevait au moyen de prélèvement perlés, fait qui n'a jamais été dissimulé ; que les faits reprochés ne revêtent donc aucun caractère fautif et qu'en tout état de cause ils concernent son activité de gérante et non de directrice de magasin ; qu'en outre, M. [L] [O], qui contrôlait les comptes de la société avait parfaitement connaissance de ces faits plus de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement, de sorte qu'ils étaient prescrits lors de l'engagement de la procédure.
M. [L] [O] en qualité de liquidateur amiable de la société Star 59 soutient que le licenciement de Mme [C] [J] pour faute lourde est parfaitement justifié ; que cette dernière a en effet utilisé la trésorerie de la société pour ses dépenses personnelles (supermarché, pharmacie...) et pour enrichir la société Histoire de Femmes, dont elle et propriétaire ; que le but de Mme [C] [J] était de conduire la société Star 59 à la liquidation judiciaire et de bénéficier ainsi de l'intervention de l'AGS, ce qui caractérise une intention de nuire à la société, dans son intérêt personnel. L'intimé précise que la société n'a eu connaissance des faits reprochés à Mme [C] [J] que lorsque M. [L] [O] en a pris la gérance.
Sur ce,
Aux termes de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est motivé dans les conditions définies par le présent chapitre.
Il est justifié par une cause réelle et sérieuse.
Pour que le licenciement disciplinaire soit justifié, l'existence d'une faute avérée et imputable au salarié doit être caractérisée.
La faute lourde est celle commise par le salarié dans l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise.
Aux termes de l'article L.1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.
En l'espèce, Mme [C] [J] qui exerçait les fonctions de gérante non salariée de la société Star 59 et de directrice du magasin de Bijoux Star à [Localité 4] depuis le 1er juillet 2014 a été licenciée le 30 août 2016 pour faute lourde, le courrier de licenciement, qui fixe les limites du litige, mentionnant les griefs suivants :
- l'utilisation de la trésorerie de la société indûment pour des dépenses personnelles (estimées à 36 000 euros),
- l'utilisation de la trésorerie de la société pour une société lui appartenant (sommes estimées à 44 000 euros).
Si Mme [C] [J] invoque la prescription des faits qui lui sont reprochés, il ressort des mails versés aux débats que M. [L] [O] n'opérait qu'un contrôle général de l'activité de la société (évolution du chiffre d'affaires et bilans) mais que le détail de la comptabilité était transmis directement par Mme [C] [J] à l'expert comptable. Ainsi, les faits reprochés à Mme [C] [J] n'ont été portés à la connaissance de la société que lorsque M. [L] [O] en est devenu le gérant le 20 juillet 2016, et ces faits n'étaient pas prescrits lorsque la procédure de licenciement a été engagée le 1er août 2016.
Les extraits du grand livre des fournisseurs versés aux débats font apparaître que de nombreuses commandes de bijoux ont été réalisées pour le compte de la société Star 59 auprès de la société Histoire de Femmes, magasin de bijoux appartenant à Mme [C] [J]. Ces achats n'ont fait l'objet d'aucune dissimulation. Si le liquidateur soutient que ces achats étaient d'un montant inconsidéré au regard du chiffre d'affaires de la société, il n'apporte aucune pièce permettant de faire le lien entre ces achats et les difficultés financières de l'entreprise. Le caractère fautif de ces achats de bijoux n'est donc pas démontré.
En ce qui concerne l'utilisation de la trésorerie de la société Star 59 à des fins personnelles, celle-ci est démontrée par la production du relevé des grands livres des comptes généraux qui fait apparaître de nombreuses dépenses pour les besoins de la vie courante de Mme [C] [J]. Si celle-ci fait valoir l'absence de dissimulation de ces faits et l'absence de détournement puisque le montant de ces dépenses correspondait à celui de son salaire, ces faits caractérisent une absence totale de rigueur dans la tenue de la comptabilité du magasin. Ils revêtent un caractère fautif, qui, au regard des responsabilités exercées par Mme [C] [J] en tant que directrice du magasin justifiaient son licenciement.
Cependant, aucune intention de nuire à la société Star 59 n'étant démontrée, et aucun détournement de fonds n'étant établi, il y a lieu de requalifier le licenciement de Mme [C] [J] en licenciement pour cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.
Sur les conséquences du licenciement
Le licenciement de Mme [C] [J] étant justifié, celle-ci sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Aucune faute lourde ni aucune faute grave n'ayant été retenue à l'encontre de Mme [C] [J], celle-ci est bien fondée à obtenir la somme de 29'745,60'euros à titre de préavis et 1'409,45'euros à titre d'indemnité de licenciement
Il lui sera également alloué la somme de 4 031,03 euros à titre de rappel de salaire du 1er août 2016 au 30 août 2016, la mise à pied conservatoire étant injustifiée.
Aucun rappel de salaire n'est dû du 31 août 2016 au 29 septembre 2016.
Les sommes allouées à Mme [C] [J] seront fixées au passif de la liquidation amiable de la société Star 59.
Sur l'indemnité de congés payés
Le bulletin de paie du mois de juillet 2016 fait état de 58 jours de congés payés acquis et non pris.
Mme [C] [J] a été mise à pied à titre conservatoire à compter du 1er août 2016.
Faute pour la société Star 59 de démontrer que Mme [C] [J] a effectivement pris 38 jours de congés payés comme indiqué sur sa fiche de paie du mois d'août 2016, elle est bien redevable de 58 jours de congés payés jusqu'au 31 juillet 2016, auxquels s'ajoutent ceux dus pour le mois d'août 2016 et ceux dus jusqu'à la fin du préavis.
Mme [C] [J] est donc bien fondée à obtenir la somme de 9'461,97'euros d'indemnité de congés payés, somme qui sera fixée au passif de la liquidation amiable de la société.
Sur l'indemnité de congés payés sur dimanches et jours fériés
Conformément à l'article 954 du code de procédure civile les conclusions doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée.
Mme [C] [J] forme une demande d'indemnité de congés payés sur dimanche et jours fériés sans expliciter aucunement cette demande.
Faute de moyen de droit et de fait développé à l'appui de cette demande, celle-ci sera rejetée.
Sur la communication des documents de fin de contrat
Il sera ordonné à M. [L] [O], en qualité de liquidateur amiable, de communiquer à Mme [C] [J] une fiche de paie et une attestation Pôle Emploi rectifiée, sans qu'il soit nécessaire, en l'état, d'assortir cette obligation d'une astreinte.
Sur les dépens et l'indemnité de procédure
Le jugement de première instance sera infirmé concernant le sort des dépens et l'indemnité procédurale.
Le liquidateur sera condamné aux dépens qui seront recouvrés selon les règles applicables en matière de liquidation amiable et il sera fixé au passif de la liquidation amiable de la société Star 59 la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
INFIRME le jugement rendu le 6'mars'2020 par le conseil de prud'hommes de Lille sauf en ce qu'il a débouté Mme [C] [J] de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande d'indemnité de congés payés sur dimanches et jours fériés;
Statuant à nouveau,
DECLARE recevables les prétentions de M. [L] [O] en qualité de liquidateur amiable de la société Star 59 ;
DEBOUTE M. [L] [O] en qualité de liquidateur amiable de la société Star 59 de sa demande de nullité du contrat de travail de Mme [C] [J] ;
DIT que le licenciement de Mme [C] [J] est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
FIXE au passif de la liquidation amiable de la SARL Star 59, les sommes suivantes dues à Mme [C] [J] :
- 29'745,60'euros à titre d'indemnité de préavis,
- 1'409,45'euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 9'461,97'euros d'indemnité compensatrice de congés payés,
- 4 031,03 euros à titre de rappel de salaire du 1er août 2016 au 30 août 2016,
- 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DEBOUTE Mme [C] [J] du surplus de sa demande de rappel de salaire ;
ENJOINT à M. [L] [O] en qualité de liquidateur amiable de communiquer à Mme [C] [J] une fiche de paie et une attestation Pôle Emploi rectifiées ;
CONDAMNE M. [L] [O] en qualité de liquidateur amiable de la SARL Star 59 aux dépens qui seront recouvrés selon les règles applicables an matière de liquidation amiable.
LE GREFFIER
Serge LAWECKI
LE PRESIDENT
Pierre NOUBEL