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14/04/2023 | FRANCE | N°20/00898

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale d salle 2, 14 avril 2023, 20/00898


ARRÊT DU

14 Avril 2023







N° 612/23



N° RG 20/00898 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S4JS



LB/MB/NB

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARRAS

en date du

18 Décembre 2019

(RG F18/00289 - section )






































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GROSSE :



aux avocats



le 14 Avril 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [Z] [E]

[Adresse 1]

[Adresse 4] (BELGIQUE)

représenté par Me David BROUWER, avocat au barreau de DUNKERQUE





INTIMÉE :



S.A.R.L. PIPE CONCEPT

[Adresse 2]

...

ARRÊT DU

14 Avril 2023

N° 612/23

N° RG 20/00898 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S4JS

LB/MB/NB

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ARRAS

en date du

18 Décembre 2019

(RG F18/00289 - section )

GROSSE :

aux avocats

le 14 Avril 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [Z] [E]

[Adresse 1]

[Adresse 4] (BELGIQUE)

représenté par Me David BROUWER, avocat au barreau de DUNKERQUE

INTIMÉE :

S.A.R.L. PIPE CONCEPT

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Maud SIEDLECKI, avocat au barreau d'ARRAS

DÉBATS : à l'audience publique du 02 Février 2023

Tenue par Laure BERNARD

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Valérie DOIZE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Virginie CLAVERT

: CONSEILLER

Laure BERNARD

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 19/01/2023

EXPOSE DU LITIGE

La SARL Pipe Concept exerce une activité de soudure ; elle est soumise à la convention collective de la métallurgie du Pas-de-Calais.

M. [Z] [E] a été engagé par la société Pipe Concept par contrat à durée déterminée à compter du 16 janvier 2018 en qualité d'agent de maintenance, niveau 1 coefficient 140, moyennant une rémunération mensuelle brute de 1.668,37 euros et dont le terme était fixé au 16 février 2018.

Le 26 janvier 2018, M. [Z] [E] a été victime d'un accident du travail. Il a été placé en arrêt de travail à compter de cette date.

Le 16 février 2018, la société Pipe Concept a remis à son salarié une attestation pôle emploi mentionnant que le contrat à durée déterminée était rompu.

M. [Z] [E] a travaillé à nouveau pour la société Pipe Concept à compter du 2 mai 2018 jusqu'au 25 mai 2018, date à laquelle il s'est vu remettre des documents de rupture pour fin de contrat à durée déterminée.

Le 12 décembre 2018, M. [Z] [E] a saisi le conseil de prud'hommes d'ARRAS aux fins principalement de voir requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée, de dire nulle la rupture intervenue le 25 mai 2018 et d'obtenir des indemnités afférentes.

Par jugement rendu le 18 décembre 2019, la juridiction prud'homale a :

- débouté M. [Z] [E] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société Pipe Concept de sa demande formulée au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [Z] [E] aux dépens.

M. [Z] [E] a régulièrement interjeté appel contre ce jugement par déclaration du 6 février 2020.

Aux termes de ses conclusions transmises par RPVA le 10 novembre 2021, M. [Z] [E] demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré,

- requalifier la relation du travail en contrat de travail à durée indéterminée avec toutes conséquences de droit,

- dire nulle la rupture intervenue le 25 mai 2018,

- condamner la société Pipe Concept à lui payer 1 668 euros d'indemnité de requalification,

- ordonner sa réintégration,

- condamner la société Pipe Concept à lui payer 1 668 euros du 25 mai 2018 jusqu'à la date de la réintégration effective, ou à titre subsidiaire 20 016 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Pipe Concept à lui payer 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Pipe Concept aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions transmises par RPVA le 11 juin 2020, la société Pipe Concept demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré,

- débouter M. [Z] [E] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. [Z] [E] à lui payer 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [Z] [E] aux entiers dépens.

Par ordonnance du 25 mars 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la demande subsidiaire formée par M. [Z] [E] tendant à la condamnation de la société Pipe Concept à lui payer 20.106 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites transmises par RPVA en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée

M. [Z] [E] fait valoir que l'employeur ne rapporte pas la preuve de la réalité du motif du recours à un contrat à durée déterminée pour le premier contrat conclu le 16 janvier 2018, à savoir un accroissement temporaire d'activité ; que par ailleurs, la relation de travail s'est poursuivie au-delà du 16 février 2018, sans que les parties ne régularisent de nouveau contrat à durée déterminée, en violation des dispositions légales ; qu'il n'a jamais refusé de signer de nouveau contrat de travail et que l'employeur ne le démontre aucunement.

La société Pipe Concept en défense expose qu'elle a engagé M. [Z] [E] le 16 janvier 2018 en raison d'un accroissement temporaire d'activité lié à un nouveau chantier situé en Belgique pour l'entreprise Ecofrost, ce dont elle justifie ; que les deux contrats de travail sont bien indépendants et séparés de plusieurs mois ; que s'agissant du deuxième contrat de travail, c'est M. [Z] [E] qui a refusé de le signer, et que lors de la survenance du terme de celui-ci, le salarié n'a pas contesté le principe de la rupture dans ses échanges par mail avec elle.

Sur ce,

En application de l'article L.1242-1 du code du travail, le contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'employeur ou de l'entreprise utilisatrice.

Cet article L.1242-1 établit une liste limitative des motifs de recours au contrat à durée déterminée parmi lesquels figure notamment l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

Ce texte prévoit également que lorsqu'il est fait droit à la demande de requalification d'un contrat à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, il est accordé au salarié une indemnité à la charge de l'employeur ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.

En cas de litige sur le motif du recours au contrat à durée déterminée, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat.

En l'espèce, les parties ont signé un contrat à durée déterminée le 16 janvier 2018 aux termes duquel M. [Z] [E] était engagé en qualité d'agent de maintenance, moyennant une rémunération mensuelle brute de 1.668,37 euros au motif d'un accroissement temporaire d'activité. Le terme de ce contrat était fixé au 16 février 2018.

Le 16 février 2018, la société Pipe Concept a remis à son salarié une attestation pôle emploi mentionnant que le contrat à durée déterminée était rompu car il était arrivé à son terme.

M. [Z] [E] a travaillé à nouveau pour la société Pipe Concept du 2 mai 2018 au 25 mai 2018, sans qu'un contrat de travail écrit ne soit signé.

Pour justifier de l'accroissement d'activité lié au contrat signé le 16 janvier 2018, la société Pipe Concept verse aux débats une attestation qu'elle a établi au profit de M. [Z] [E] le 15 janvier 2018 dans lequel elle indique qu'il sera affecté au chantier de l'entreprise Ecofrost en Belgique à compter du 16 janvier 2018, ainsi qu'un relevé des pointages du salarié faisant apparaître qu'il a bien travaillé sur ce chantier du 16 janvier 2018 au 26 janvier 2018, date de son arrêt de travail.

Cependant, l'affectation de la société Pipe Concept à un chantier spécifique ne permet pas de caractériser en soi un accroissement temporaire de l'activité de la société, celle-ci n'apportant aucun élément démontrant que le chantier de l'entreprise Ecofrost n'entrait pas dans son activité normale et permanente.

Dans ces conditions, la relation de travail doit être requalifiée en relation de travail à durée indéterminée à compter du 16 janvier 2018 et M. [Z] [E] est bien fondé à obtenir une indemnité de requalification d'un montant de 1.668 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.

Sur la demande de nullité de la rupture

M. [Z] [E] soutient qu'il a été en arrêt de travail pendant plus de trois mois en suite de son accident de travail (du 26 janvier 2018 au 2 mai 2018) ; que pourtant, il n'a fait l'objet d'aucune visite de reprise lors de son retour dans l'entreprise le 2 mai 2018 ; que dès lors, lorsque la rupture du contrat de travail est intervenue le 25 mai 2018, son contrat de travail était encore suspendu, de sorte que la rupture est nulle, en application des articles L.1226-9 et L.1226-13 du code du travail.

La société Pipe Concept répond que seul le premier contrat à durée déterminée était suspendu lorsqu'est intervenue la rupture le 16 février 2018, laquelle était parfaitement valable, puisque la suspension n'a pas pour effet de prolonger le terme d'un contrat à durée déterminée ; que c'est une nouvelle relation de travail qui a débuté le 2 mai 2018, et non le contrat initial qui s'est poursuivi. Elle observe que M. [Z] [E] ne justifie pas de la durée de son arrêt de travail invoquée.

Sur ce,

L'article L.1226-7 1er alinéa du code du travail prévoit que le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie.

La suspension du contrat prend fin à l'issue de la visite de reprise lorsque le salarié est soumis à une visite de reprise obligatoire et dans les autres cas à la fin de l'arrêt de travail.

Conformément à l'article R.4624-31 du code du travail dans sa rédaction applicable, le travailleur bénéficie d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail notamment après une absence d'au moins trente jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel.

Selon l'article L.1226-9 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail pour accident de travail ou maladie professionnelle, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.

Aux termes de l'article L.1226-13 du code du travail, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L.1226-9 et L.1226-18 est nulle.

En l'espèce, M. [Z] [E] a été engagé par la société Pipe Concept à compter du 16 janvier 2018 et a été victime d'un accident de travail le 26 janvier 2018, date à compter de laquelle il a été placé en arrêt de travail.

La relation de travail requalifiée en relation de travail à durée indéterminée a pris fin de manière définitive le 25 mai 2018.

M. [Z] [E] fait état d'un arrêt de travail de plus de trente jours en suite de son accident de travail mais ne verse aux débats que la déclaration d'accident de travail datée du 26 janvier 2016 mentionnant un coup reçu sur le pied et ses bulletins de paie mentionnant son absence pour accident du travail du 26 janvier 2018 au 16 février 2018.

A la date de la signature du second contrat à durée déterminée, l'employeur ne disposait d'aucun moyen de connaître les suites de l'arrêt de travail ayant débuté le 26 janvier 2018. En l'absence d'élément au dossier faisant apparaître que M. [Z] [E] a fait l'objet d'une absence d'une durée d'au moins trente jours pour cause d'accident du travail, de maladie ou d'accident non professionnel, l'employeur n'était donc pas tenu d'organiser de visite de reprise.

Il se déduit de ces éléments que le contrat de travail n'était plus suspendu au jour de la rupture intervenue le 25 mai 2018, et que celle-ci n'est donc pas nulle.

M. [Z] [E] sera donc débouté de sa demande de nullité de la rupture, et partant, de sa demande de réintégration et de paiement d'un salaire de 1.668 euros par mois du 25 mai 2018 à la date de sa réintégration, le jugement de première instance étant confirmé sur ces points.

La cour constate par ailleurs qu'aucune demande indemnitaire fondée sur le caractère abusif de la rupture n'est recevable.

Sur les dépens et l'indemnité de procédure

Le jugement de première instance sera infirmé concernant le sort des dépens et l'indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, sauf en ce qu'il a débouté la société Pipe Concept de sa demande sur ce fondement.

La société Pipe Concept sera condamnée aux dépens sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à M. [Z] [E] la somme de

2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement rendu le 18 décembre 2019 par le conseil de prud'hommes d'ARRAS sauf en ce qu'il a débouté M. [Z] [E] de sa demande de requalification en contrat de travail à durée indéterminée, de sa demande d'indemnité de requalification, a condamné M. [Z] [E] aux dépens et l'a débouté de sa demande d'indemnité procédurale ;

Statuant à nouveau,

REQUALIFIE les contrats à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 janvier 2018 ;

CONDAMNE la SARL Pipe Concept à payer à M. [Z] [E] la somme de

1 668 euros à titre d'indemnité de requalification;

CONDAMNE la SARL Pipe Concept aux dépens ;

CONDAMNE la SARL Pipe Concept à payer à M. [Z] [E] la somme de

2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER

Serge LAWECKI

LE PRESIDENT

Pierre NOUBEL


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale d salle 2
Numéro d'arrêt : 20/00898
Date de la décision : 14/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-14;20.00898 ?
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