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31/03/2023 | FRANCE | N°22/00856

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 31 mars 2023, 22/00856


ARRÊT DU

31 Mars 2023







N° 473/23



N° RG 22/00856 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UKKX



MLBR/AL

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CALAIS

en date du

06 Février 2020

(RG F1900122 -section )











































GROSSE :



aux avocats



le 31 Mars 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANT :



M. [X] [F]

[Adresse 4]

[Localité 3]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2020/002110 du 10 mars 2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de D...

ARRÊT DU

31 Mars 2023

N° 473/23

N° RG 22/00856 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UKKX

MLBR/AL

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CALAIS

en date du

06 Février 2020

(RG F1900122 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 31 Mars 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANT :

M. [X] [F]

[Adresse 4]

[Localité 3]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2020/002110 du 10 mars 2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de DOUAI)

représenté par Me Guillaume GUILLUY, avocat au barreau de DUNKERQUE

INTIMÉE :

S.A.S.U. INDUSTEAM NORD

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Eric LAFORCE, avocat au barreau de DOUAI assisté de Me Alexandra DUQUESNE-THEOBALD, avocat au barreau de METZ

DÉBATS : à l'audience publique du 14 Février 2023

Tenue par Marie LE BRAS

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Gaetan DELETTREZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Marie LE BRAS

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par Marie LE BRAS, Président et par Séverine STIEVENARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 24 Janvier 2023

EXPOSÉ DU LITIGE':

La SAS Industeam Nord, qui appartient au groupe industriel Industeam, a une activité de tuyauterie industrielle, chaudronnerie et maintenance industrielle.

M. [X] [F] a été embauché par la société Industeam Nord dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 16 janvier 2017 en qualité de chargé d'affaires.

Le contrat de travail a pris fin le 15 mai 2017, à l'issue de la période d'essai, sur décision de l'employeur notifiée au salarié suivant courrier du 9 mai 2017.

Arguant du fait que la relation de travail se serait poursuivie jusqu'en mars 2019, la société Industeam Nord s'étant engagée à régulariser la situation et à lui verser les salaires dus depuis mai 2017, M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Calais par requête du 10 septembre 2019, afin de contester la régularité de la rupture de la relation de travail et d'obtenir diverses indemnités au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement contradictoire du 6 février 2020, le conseil de prud'hommes de Calais a':

- dit le contrat de travail liant M. [F] à la société Industeam Nord a pris fin le 15 mai 2017 suite à la rupture de la période d'essai,

- dit que la procédure relative à la rupture du contrat de travail signé le 13 janvier 2017 n'est pas entaché de nullité,

- dit que M. [F] a travaillé après le 15 mai 2017 pour le compte de la société EIC prestataire extérieur de la société Industeam Nord,

- débouté M. [F] de l'ensemble de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à ordonner la remise des documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte,

- débouté les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé aux parties la charge de leurs propres dépens.

Par déclaration reçue au greffe le 14 février 2020, M. [F] a interjeté appel du jugement rendu en toutes ses dispositions.

Par un arrêt rendu le 5 avril 2022, la cour d'appel de Douai a ordonné la radiation de l'affaire et son retrait du rôle.

A la demande de M. [F], l'affaire a été réinscrite au rôle de la cour sous le n°RG 22-856.

Dans ses dernières conclusions déposées le 2 juin 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaille des prétentions et moyens, M. [F] demande à la cour de':

- ordonner le rétablissement de l'affaire l'opposant à la société Industeam Nord enregistrée sous le numéro RG 20/00949 et la réinscrire au rôle des affaires en cours,

- infirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- condamner la société Industeam Nord à lui payer les sommes suivantes':

*3 500 euros pour non-respect de la procédure de licenciement,

*77 000 euros au titre des arriérés de salaires de mai 2017 à mars 2019, outre 7 700 euros au titre des congés payés y afférents,

*7 000 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 700 euros au titre des congés payés y afférents,

*35 000 euros à titre de dommage-intérêts pour licenciement abusif,

*1 968,75 euros à titre d'indemnité de licenciement,

*21 000 euros pour travail dissimulé,

*21 800 euros à titre de frais de déplacement,

*7 000 euros au titre des 13èmes mois non versés, outre 700 euros au titre des congés payés y afférents,

*4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que la société Industeam Nord devra supporter les dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions déposées le 15 juin 2022 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, la société Industeam Nord demande à la cour de confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions, et de':

- juger que le contrat de travail l'ayant lié à M. [F] a pris fin suite à la notification de rupture de la période d'essai le 9 mai 2017,

- juger qu'aucun contrat de travail n'a lié les parties postérieurement,

- débouter M. [F] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. [F] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION':

Il n'y a pas lieu de répondre à la demande de M. [F] tendant à la réinscription de son affaire au rôle de la cour, cette demande étant devenue sans objet.

- sur la nature de la relation contractuelle entre les parties :

M. [F] prétend que la relation de travail avec la société Industeam Nord s'est poursuivie après le terme de la période d'essai, son employeur ayant abusé de sa position dominante en s'abstenant de le rémunérer tout en lui faisant croire que la situation serait régularisée avec le versement rétroactif des salaires dus. Il estime avoir été abusivement licencié en mars 2019.

Il précise que les sommes versées à la société EIC d'un montant global de 21 000 euros correspondent uniquement à ses frais de déplacement que la société Industeam Nord avait acceptés de lui rembourser, par l'intermédiaire de la société EIC, dans l'attente de la régularisation de la situation. Il conteste la pertinence des bons de commande et factures produits par la partie adverse pour tenter de démontrer qu'il était un prestataire et non un salarié, ceux-ci n'ayant selon lui rien à voir avec la réalité du travail considérable accompli au quotidien sur de nombreux chantiers dont certains n'ont donné lieu à aucune facturation.

Pour établir le lien de subordination juridique le liant à la société Industeam Nord, il ajoute qu'il était identifié aux yeux des clients et de ses collègues comme 'Project Manager Industream', qu'il avait une adresse de messagerie et des cartes de visite 'Industeam Nord', qu'il travaillait en équipe notamment avec M. [D] à qui il devait rendre des comptes de ses échanges avec les clients et sous-traitants ainsi qu'au directeur, M. [E].

M. [F] explique enfin que le 21 mars 2019 pour une raison qu'il ignore, il s'est vu retirer l'accès à la messagerie, les objets et cartes d'identification Industeam et n'a plus eu le droit d'intervenir sur les chantiers, ce qui selon lui caractérise l'exercice à son égard du pouvoir disciplinaire.

En réponse, la société Industeam Nord expose qu'au terme du contrat de travail qui a pris fin le 15 mai 2017 à l'issue de la période d'essai, les relations entre les parties se sont poursuivies dans un cadre commercial, M. [F], qui faisait l'objet d'une interdiction de gérer depuis juin 2018, réalisant à son profit des prestations d'apport d'affaires, d'assistance technique et de travaux d'étude, par l'intermédiaire de la société EIC qui exerçait une activité d'ingénieurie et dont sa compagne était la gérante.

Elle produit les bons de commande et factures pour justifier de la réalité de ces relations commerciales et conteste les arguments adverses visant à établir qu'ils concernaient uniquement des frais de déplacement, rappelant par ailleurs qu'elle n'est pas responsable des libellés des factures éditées par la société EIC. La société Industeam Nord fait également observer que M. [F] ne lui a jamais réclamé un quelconque salaire alors que leurs relations contractuelles se sont poursuivies pendant près de 2 ans.

Elle ajoute que dans un courrier du 25 mars 2019, M. [F] a reconnu qu'il ne détenait aucune délégation de pouvoir lui permettant d'engager la société auprès des clients, ni le pouvoir de gérer, valider ou accepter des commandes, cette mission relevant des chargés d'affaires de la société, ni encore les mots de passe pour accéder à la gestion des affaires, et qu'il ne participait pas aux réunions sur leur suivi.

La société Industeam Nord soutient que l'appelant échoue à rapporter la preuve du lien de subordination, aucune des pièces produites n'établissant l'existence de consigne de travail, la fixation d'horaires de travail et leur contrôle, l'intéressé n'ayant en outre pas de bureau au sein de l'entreprise, l'utilisation de l'adresse de messagerie étant selon elle insuffisante à établir le lien de subordination juridique.

Sur ce,

L'existence d'un contrat de travail dépend, non pas de la volonté manifestée par les parties ou de la dénomination de la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur.

Il résulte des articles L.1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail.

En l'absence d'écrit ou d'apparence de contrat, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d'en rapporter la preuve.

Il est en l'espèce constant que M. [F] a conclu avec la société Industeam Nord le 13 janvier 2017 un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de chargé d'affaires, avec pour mission de développer l'activité tuyauterie et d'accomplir certaines tâches précisées au contrat, la rémunération étant fixée à 3 500 euros bruts, outre une prime d'objectifs équivalent à un 13ème mois de salaire versée en fin d'année sous certaines conditions. Il est également prévu au contrat une période d'essai de 4 mois, renouvelable.

Contrairement à ce que prétend M. [F] qui évoque une notification verbale de la fin du contrat, la société Industeam Nord justifie qu'elle a mis fin à cette relation de travail au terme de la période d'essai par un courrier recommandé du 9 mai 2017 qu'elle produit, outre l'accusé réception y afférent, motif pris que M. [F] n'a pu justifier d'aucune commande à son actif, ni présenter le moindre chiffrage attestant d'affaires en cours de négociation. Elle justifie également de l'établissement des documents de fin de contrat portant mention des indemnités de rupture versées au salarié, M. [F] ne prétendant pas ne pas les avoir perçues.

Il est acquis aux débats que les parties ont cependant entretenu à nouveau des relations contractuelles en cours d'année 2017 et jusqu'en mars 2019.

Les parties s'accordent sur le fait qu'au cours de cette période, M. [F] a exécuté au profit de la société Industeam Nord diverses prestations, M. [F] évoquant des 'suivi de chantier, négociation de contrat, gestion du personnel, des sous-traitants, transports, etc...' qui recoupent les formulations plus générales utilisées par la société Industeam Nord d'assistance technique et négociation d'affaires.

Il est constant que M. [F] ne produit aucun écrit ayant l'apparence d'un nouveau contrat de travail pour la période litigieuse, l'intimée présentant quant à elle la copie de 6 commandes de prestations de service et surtout des factures y afférentes établies entre le 31 août 2017 et le 20 septembre 2018 par la société EIC dont il est acquis aux débats qu'elle est officiellement dirigée par la compagne de M. [F]. Il sera observé que ce dernier ne prétend pas que cette société, créée en juillet 2017, l'a été à la demande de la société Industeam Nord pour donner l'apparence d'une activité indépendante et non salariale.

Il ressort de l'analyse des bons de commande et factures qu'ils portent tous sur des prestations de service intitulés 'assistance technique sur travaux Eolienne', 'étude contrat Total', 'étude contrat Total/ suivi de chantier' ou encore 'prestation sur affaire Total'.

En l'absence de document écrit ayant l'apparence d'un nouveau contrat de travail, il incombe donc à M. [F] de rapporter la preuve qu'en dépit des documents contractuels susvisés, les prestations litigieuses ont en fait été accomplies dans le cadre d'une relation de travail salariée et n'ont pas donné lieu à rémunération.

M. [F] verse à cet effet aux débats :

- une carte de visite,

- des photographies de chantiers sur lesquels il est intervenu,

- des bons de validation émanant de la société Total, qui sont des compléments au plan de prévention mis en place pour le chantier Total, signés par ses soins en tant que 'responsable' pour le compte de l'entreprise extérieure 'Industream'

- plus d'une centaine de pages réunies en sa pièce n°5, consistant en des courriels signés par ses soins en tant que 'project Manager' de la société Industeam Nord, et échangés soit avec des membres de la société Industeam Nord, soit des représentants des entreprises intervenant ou devant intervenir sur le chantier Total, soit enfin avec des clients potentiels.

Il soutient d'abord que les factures susvisées n'avaient pour objet que de le rembourser de ses frais de déplacement, le travail proprement dit accompli selon lui en tant que salarié de la société Industeam Nord n'ayant donné lieu à aucune rémunération pendant toute cette période.

Outre le fait qu'il apparaît surprenant que la société EIC facture et se fasse payer des frais de déplacement pour des prestations auxquelles elle serait étrangère puisque M. [F] prétend les avoir exécutées en tant que salarié de la société Industeam Nord, il sera relevé que les 6 factures de la société EIC ne font nullement mention de frais de déplacement.

Mme [G], salariée au service administratif et comptabilité de la société, atteste que M. [F] venait très rarement dans l'entreprise et que c'était 'soit pour réclamer des commandes, soit pour réclamer des paiements'.

Ceci est conforté par plusieurs courriels produits par M. [F] par lesquels il réclame les commandes (ex : mail des 13 juin 2018, 19 septembre 2018) ou transmet au service comptabilité les 'factures EIC' pour virement à réception (mail des 6 mars 2018, 12 mars 2018, 14 juin 2018, 21 septembre 2018), sans d'ailleurs faire jamais référence au versement d'un salaire ou au remboursement de frais de déplacement.

De manière générale, en dehors du courrier du 12 avril 2019 postérieur à la rupture des relations contractuelles, aucune des pièces produites ne portent sur le prétendu engagement de la société Industeam Nord de régulariser la situation avec versement rétroactif d'un salaire, sur une réclamation à ce titre, ou encore sur la prise en charge de frais de déplacement.

L'ensemble des pièces de M. [F] confirment la réalité des prestations exécutées pour le compte ou le profit de la société Industeam Nord, et le fait qu'il utilisait une adresse de messagerie 'Industeam'. Ceci n'est pas contesté par l'intimée, M. [D], chargé d'affaires au sein de la société Industeam Nord, qui a été, au vu des nombreux mails échangés, un de ses principaux interlocuteurs, confirmant dans une attestation produite aux débats par l'intimée, qu'une adresse de messagerie 'industeam' avait été laissée à la disposition de l'intéressé pour traiter les affaires concernant la société Industeam Nord.

Il ressort cependant d'un courriel produit par M. [F] du 23 octobre 2018 avec M. [Z], salarié au service informatique de la société Industeam Nord, que cette adresse de messagerie n'a toutefois pas été en permanence à sa disposition comme pour tout salarié, puisque son interlocuteur explique l'avoir recréée sur demande après l'avoir supprimée à la suite d'une précédente demande, aucun historique des mails n'ayant été conservé, ce qui apparaît correspondre à la mise à disposition d'une adresse de messagerie pendant le temps d'une mission et non en permanence.

M. [F] ne prétend pas non plus, ni ne justifie avoir un bureau dans les locaux de la société Industeam Nord.

De même, il ne se déduit pas de la détention d'une carte de visite en tant que chargé d'affaires pour la société Industeam Nord qu'il était salarié pendant la période litigieuse, cette carte pouvant parfaitement datée de l'époque du contrat de travail initial au titre duquel il avait effectivement cette fonction, sachant qu'il n'a signé aucun des mails produits avec le titre de 'chargé d'affaires'.

Il sera en outre relevé que dans son courrier du 25 mars 2019, M. [F] reconnaît 'qu'à aucun moment, il ne pouvait engager la société' au plan financier et contractuel, qu'il n'avait notamment 'pas le pouvoir de gérer ou valider des commandes et en accepter, de valider les chiffrages et offres de prix, des chargés d'affaires en avaient la mission', ce qui au demeurant confirme qu'il ne se considérait pas alors comme un chargé d'affaires contrairement à l'intitulé de la carte de visite qu'il produit aux débats, M. [F] précisant enfin 'j'effectuais pour ma part le relationnel avec les sous-traitants et les clients; à aucun moment vous m'avez donné les mots de passe pour accèder à la gestion des affaires; je ne pouvais participer aux réunions et connaître les chiffres de gains ou perte'.

A travers ses propos, M. [F] contredit son affirmation en pages 7 et 9 de ses conclusions selon laquelle il occupait un poste à responsabilités, dans la mesure où il admet lui-même un niveau de responsabilité inexistant au sein de la société Industeam Nord en dépit de sa dénomination de 'Project Manager', ses missions étant principalement axées sur le relationnel avec les partenaires ou futurs clients de la société Industeam Nord, ce qui corrobore un rôle d'assistant ou conseil technique et de négociateurs d'affaires, sans prise de décision à son seul niveau quant au chantier lui-même, parfaitement compatible avec un contrat de prestations de service.

Ce positionnement est d'ailleurs parfaitement illustré par les mails relatifs à la tentative de réglement du litige opposant la société Industeam Nord à la société Total en début d'année 2019, les mails produits montrant que seul M. [D], chargé d'affaires, est alors intervenu pour signifier à son partenaire la position et les décisions prises par la société Industeam Nord.

Enfin et surtout, les pièces de M. [F], pourtant très nombreuses, sont insuffisantes à démontrer la relation de travail salariée dès lors que, contrairement à ce qu'il soutient, aucune d'elles ne vient établir l'existence d'un lien de subordination juridique entre lui et la société Industeam Nord pendant ladite période.

En effet, M. [F] apparaît à travers l'ensemble de ces pièces avoir bénéficié d'une totale liberté d'action et d'organisation, lui-même ne faisant d'ailleurs pas état d'horaires ou d'emploi du temps imposé ou dont il devait justifier.

Aucun des quelques courriels échangés avec M. [E], directeur de la société Industeam Nord, ou de ceux plus nombreux avec M. [D], ne contient en outre des directives imposées ou des ordres à exécuter, leur contenu consistant plutôt en des échanges d'informations relatives au chantier Total, ainsi que sur les contacts en cours avec d'autres sociétés pour de potentielles affaires (ex: mail destiné à au PDG et à M. [E] du 13 juin 2017, ou destiné à M. [E] le 14 septembre 2018), contacts dont il avait pris l'initiative sans qu'une liste de prospects lui soit par exemple imposée et qu'il doive en rendre compte de manière régulière.

Enfin, le seul courrier du 25 mars 2019 de M. [F] ne peut constituer à lui seul la preuve qu'en lui interdisant l'accès à l'entreprise et au chantier quelques jours plus tôt et en lui retirant l'usage de l'adresse de messagerie, la société Industeam Nord a exercé à son encontre son pouvoir disciplinaire, une telle décision pouvant également s'analyser en une rupture du contrat de prestations de service dont l'appréciation du bien fondé ne relève pas du pouvoir de cette cour.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il n'est pas démontré par M. [F] qu'il était soumis à des conditions d'exécution de son travail unilatéralement fixées par la société Industeam Nord et sous la subordination juridique de celle-ci, de sorte qu'il ne saurait être retenu que les relations contractuelles entretenues avec l'intimée après mai 2017 constituent une relation de travail salariée.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [F] de l'ensemble de ses demandes.

- sur les demandes accessoires :

Au vu de ce qui précède, le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.

Partie perdante, M. [F] devra supporter les dépens d'appel et sera débouté de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande en outre de débouter la société Industeam Nord de sa demande sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement entrepris en date du 6 février 2020 en toutes ses dispositions;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

DIT que M. [X] [F] supportera les dépens d'appel.

LE GREFFIER

Séverine STIEVENARD

LE PRESIDENT

Marie LE BRAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 22/00856
Date de la décision : 31/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-31;22.00856 ?
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