La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/03/2023 | FRANCE | N°21/01180

France | France, Cour d'appel de Douai, Sociale b salle 1, 31 mars 2023, 21/01180


ARRÊT DU

31 Mars 2023







N° 516/23



N° RG 21/01180 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TXHG





MLBR/AL

































Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE-SUR-MER

en date du

08 Juin 2021

(RG F 19/00042 -section )











































GROSSE :



aux avocats



le 31 Mars 2023





République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-





APPELANTE :



Mme [M] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Manuel BUFFETAUD, avocat au barreau de LILLE assisté de Me Amandine HERTAULT, avocat au barreau d'AM...

ARRÊT DU

31 Mars 2023

N° 516/23

N° RG 21/01180 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TXHG

MLBR/AL

Jugement du

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE-SUR-MER

en date du

08 Juin 2021

(RG F 19/00042 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 31 Mars 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

- Prud'Hommes-

APPELANTE :

Mme [M] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Manuel BUFFETAUD, avocat au barreau de LILLE assisté de Me Amandine HERTAULT, avocat au barreau d'AMIENS substitué par Me Marion COINTE, avocat au barreau d'AMIENS

INTIMÉE :

S.E.L.A.S. CLINIQUE VETERINAIRE DES [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Alex DEWATTINE, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER substitué par Me Guillaume BAILLARD, avocat au barreau de BOULOGNE-SUR-MER

DÉBATS : à l'audience publique du 10 Janvier 2023

Tenue par [L] [R]

magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Gaetan DELETTREZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

[L] [R]

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Alain MOUYSSET

: CONSEILLER

Patrick SENDRAL

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, signé par [L] [R], Président et par Séverine STIEVENARD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 10 Janvier 2023

EXPOSÉ DU LITIGE :

Mme [M] [Z] a été embauchée au sein de la SELARL Clinique Vétérinaire des [Localité 6] (la Clinique des [Localité 6]) située à [Localité 5], en tant que vétérinaire salarié, par contrat de travail à durée déterminée en date du 2 mai 2017 d'une durée de 6 mois comprenant une rémunération suivant un forfait jours.

La relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er novembre 2017, Mme [Z], recrutée en tant que vétérinaire, échelon 3 avec le statut de cadre autonome, étant rémunérée sur la base d'un forfait annuel en jours de 156 jours sur une année civile, 'selon une répartition en journées et demi-journées déterminée sur l'année selon un planning mensuel devant être convenu entre les parties', le contrat prévoyant par ailleurs une rémunération annuelle brute forfaitaire de 32 760 euros intégrant les éventuelles heures supplémentaires et congés payés, outre la soumission à des astreintes et gardes dont les modalités étaient également définies au contrat.

Laconvention collective nationale des cabinets et cliniques vétérinaires est applicable à la relation de travail.

Le 18 juin 2018, Mme [Z] a été placée en arrêt maladie qui a été par la suite prolongé.

Suivant un avis du 18 février 2019, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste de travail.

Alléguant d'une situation de harcèlement moral et du non-respect de la convention de forfait-jours, Mme [Z] a saisi le conseil des prud'hommes de [Localité 4] par requête du 6 mars 2019 aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et d'obtenir diverses indemnités en lien avec l'exécution et la rupture de son contrat.

Suivant lettre recommandée du 15 mars 2019, et suite à un entretien préalable auquel elle ne s'est pas présentée, Mme [Z] a été licenciée pour inaptitude d'origine non professionnelle avec impossibilité de reclassement.

Par jugement contradictoire rendu le 8 juillet 2021, le conseil de prud'hommes de Boulogne-sur-Mer a :

-dit la convention de forfait en jours sur l'année valide,

-constaté l'absence de harcèlement moral,

-condamné la Clinique des [Localité 6] à payer à Mme [Z] la somme de 610,34 euros au titre de rappel d'indemnité au titre des astreintes,

-débouté Mme [Z] de toutes ses autres demandes,

-débouté Mme [Z] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-débouté la Clinique des [Localité 6] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-laissé les dépens à la charge respective des parties.

Par déclaration reçue au greffe le 8 juillet 2021, Mme [Z] a interjeté appel du jugement en toutes ses dispositions.

Dans ses dernières conclusions déposées le 9 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, Mme [Z] demande à la cour de :

-infirmer le jugement entrepris en son intégralité,

-dire que la convention de forfait-jours régularisée à l'initiative de l'employeur devra être déclarée comme étant nulle et en tout état de cause sera dépourvue de tout effet,

-condamner la Clinique des [Localité 6] à lui verser :

* 5574,99 euros à titre de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, outre la somme de 557,50 euros à titre de congés payés y afférents,

* 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité de la convention de forfait jours,

* 5000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du dépassement régulier de la durée maximale hebdomadaire de travail, du non respect des temps de repos et des temps de pause,

* 18 022,44 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

* 852,80 euros à titre de remboursement des frais de formation,

* 610,34 euros titre de rappel d'indemnité au titre des astreintes,

* Sauf communication par l'employeur des éléments permettant le calcul des frais de déplacement et des rappels de salaire dus au titre des actes réalisés durant les astreintes, 2500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'impossibilité de chiffrer les rappels qui sont dus,

* 868,48 euros à titre de rappel d'allocation de formation,

-dire et juger qu'elle a été victime de faits de harcèlement moral,

-condamner la Clinique des [Localité 6] à lui verser une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

-prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts et griefs de l'employeur,

-dire et juger que ladite résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement nul,

-condamner la Clinique des [Localité 6] à lui verser les sommes suivantes :

*36 008,88 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la nullité du licenciement,

* 1 187,78 euros à titre d'indemnité de licenciement (à parfaire),

* 9 011,22 euros à titre d'indemnité de préavis, outre la somme de 901,13 euros à titre de congés payés y afférents,

-condamner la Clinique des [Localité 6] à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner la Clinique des [Localité 6] aux entiers dépens de l'instance.

Dans ses dernières conclusions déposées le 9 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, la Clinique des Marroniers demande à la cour de :

-infirmer le jugement en ce qu'il a :

* l'a condamnée à verser à Mme [Z] la somme de 610,34 euros à titre de rappel d'indemnité au titre des astreintes ;

* l'a déboutée de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de condamnation de Mme [Z] à supporter les frais et dépens de première instance ;

-confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [Z] de l'intégralité de ses autres demandes ;

-débouter Mme [Z] de l'intégralité de ses demandes ;

-condamner Mme [Z] à lui verser une indemnité de 4 560 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance, et une indemnité de 3 500 euros au titre de l'appel sur ce même fondement ;

-condamner Mme [Z] aux entiers frais et dépens des deux instances.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

- sur la convention de forfaits-jours :

Mme [Z] sollicite l'annulation de la convention forfaits-jours prévue à l'article 6 de son contrat de travail en faisant valoir que les conditions légales et conventionnelles n'ont pas été respectées pour les motifs suivants :

- en dépit du qualificatif 'cadre autonome' figurant sur son contrat, elle ne bénéficiait d'aucune liberté et autonomie dans l'organisation de son travail et la détermination de ses horaires de travail qui lui étaient en réalité imposés, ainsi que les astreintes, par son employeur, celui-ci établissant unilatéralement les plannings de travail sans même respecter un délai de prévenance,

- les dispositions de l'article 58 de la convention collective sont insuffisantes à assurer son droit à la santé et au repos, en ce que rien n'est prévu pour garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition du travail,

- la Clinique des [Localité 6] n'apporte aucun élément tel un document individuel de suivi ou des compte-rendus d'entretien, pour justifier des contrôles et du suivi régulier mis en place concernant sa charge de travail, l'amplitude horaire et le respect des temps de repos, ce qui prive d'effet la convention de forfait jours.

Elle dénie toute force probante aux attestations produites par la Clinique des [Localité 6] qui selon elle ne peuvent valoir preuve de sa supposée autonomie et du respect par son employeur de son obligation légale susvisée.

En réponse, la Clinique des [Localité 6] fait valoir en substance que :

- les plannings ont toujours été établis en concertation et selon les disponibilités de Mme [Z] et en les lui adressant plusieurs semaines à l'avance,

- Mme [Z] disposait d'une grande liberté dans l'organisation de son travail puisqu'assistée dans sa mission de plusieurs auxiliaires spécialisés, elle pouvait répartir les patients à son choix, et bénéficiait ainsi d'une charge de travail raisonnable et réalisable dans les temps d'ouverture de la clinique,

- le suivi de la charge de travail était garanti puisque Mme [T], sa dirigeante, était toujours présente au cabinet pour s'en assurer et demeurait à la disposition des salariés, soutenant également que Mme [Z] tenait un tableau personnel de sa charge de travail,

- qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir organisé un entretien spécifique sur la charge de travail dès lors que Mme [Z] a été placée en arrêt de travail en juillet 2018, soit avant l'échéance annuelle du contrat de travail, rappelant également que le sujet de l'organisation et la charge de travail a pu être abordé à l'occasion d'autres entretiens.

Sur ce,

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.

Lorsque l'employeur ne démontre pas avoir respecté les stipulations de l'accord collectif qui avait pour objet d'assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié et de son droit au repos, la convention de forfait en jours est privée d'effet de sorte que le salarié peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires dont le juge doit vérifier l'existence et le nombre.

Il est en l'espèce constant que Mme [Z] a été engagée aux termes du contrat à durée indéterminée en tant que vétérinaire salarié échelon III, statut cadre autonome, rémunéré au forfait annuel en jours. Il est également acquis aux débats que le contrat à durée déterminée initial comprenait également une convention de forfait jours.

L'article 55 de la convention collective définit le cadre autonome comme étant ceux ne relevant pas de l'horaire collectif de travail, car disposant d'une réelle autonomie dans l'organisation du travail qui rend impossible leur intégration dans des horaires prédéterminés, fixes.

Pour prétendre ne bénéficier d'aucune autonomie, Mme [Z] entend prouver par des échanges de SMS et des attestations que son employeur fixait unilatéralement son emploi du temps et ses horaires.

Il sera d'abord rappelé qu'une convention individuelle de forfait annuel en jours n'instaure pas au profit du salarié un droit à la libre fixation de ses horaires de travail indépendamment de toute contrainte liée à l'organisation du travail par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction.

Or, s'il ressort de l'ensemble des plannings mensuels produits par les parties qu'étaient fixées les journées ou demi-journées de travail de Mme [Z], il n'est cependant fait mention d'aucun horaire particulier imposé par Mme [T], dirigeante de la Clinique des [Localité 6].

Aucune des pièces produites par l'appelante n'établit par ailleurs que celle-ci n'était pas libre, en dehors des urgences et contraintes (gardes et astreintes) liées à l'activité de la clinique, de définir ses horaires et plages de RDV quotidiens, le fait qu'en raison de sa charge de travail, son amplitude horaire soit importante et son heure de sortie souvent tardive étant sans incidence sur l'appréciation de son autonomie dans l'organisation de son travail et de ses RDV.

Il sera en conséquence retenu qu'elle exerçait bien des fonctions de cadre autonome, susceptible d'être soumis à une convention de forfait jours au sens de la convention collective.

Par ailleurs, les dispositions des articles 21, 56 à 58 de la convention collective, qui déterminent précisément les repos quoditiens et hebdomadaires ainsi que les modalités de suivi de la charge de travail rappelées ci-dessous, garantissent suffisamment le respect par l'employeur de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires, de sorte que le moyen de nullité avancé par Mme [Z] ne peut prospérer et que le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire à ce titre.

En revanche, l'article 58 de la convention collective des cabinets et cliniques vétérinaires dispose que 'pour les salariés rémunérés en forfait jours, les journées ou demi-journées de travail et de repos seront comptabilisées sur un livre ou registre paginé tenu par l'employeur, signé mensuellement par l'employeur et le salarié et conservé dans l'entreprise. Ces documents de comptabilisation seront tenus à la disposition de l'inspection du travail pendant une durée de 3 ans. Conformément à l'article L. 3121-46, un entretien annuel individuel est organisé avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié'.

Force est de constater qu'en l'espèce, la Clinique des [Localité 6] ne produit aux débats aucun extrait de livre ou registre tel qu'exigé par ces dispositions et signé mensuellement par elle et Mme [Z].

Contrairement à ce qu'elle soutient, le fait que Mme [T], sa dirigeante, soit toujours présente au cabinet est insuffisant à garantir un suivi effectif et objectivé de la charge de travail de sa salariée pendant toute la relation de travail, étant au surplus observé que contrairement à ce que prétend l'intimée, aucune de ses pièces ne justifie de la réalité des entretiens qui auraient eu lieu sur l'organisation et la charge de travail, indépendamment de l'entretien annuel prévu par la convention collective qui n'a pu avoir lieu compte tenu de l'arrêt de travail de Mme [Z].

De même, dès lors que la charge du contrôle de la charge de travail incombe à l'employeur seul, le prétendu tableau qui aurait été tenu par Mme [Z] à ce sujet, à supposer même qu'il existe, ce qui est contesté par cette dernière, n'exonère en rien l'employeur de son obligation.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de dire la convention de forfait jours insérée aux 2 contrats de travail est inopposable à Mme [Z] compte tenu de la défaillance de la Clinique des [Localité 6] à rapporter la preuve du respect des dispositions conventionnelles précitées concernant le suivi de la charge de travail.

Le salarié qui a été soumis à tort à une convention de forfait jours peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires dont l'existence et le nombre sont vérifiés sur la base d'une durée légale de 35 heures par semaine et conformément aux dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail selon lesquelles, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande de rappel de salaire, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments, le juge formant sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires.

En l'espèce, Mme [Z] sollicite un rappel de salaire de 5 574,99 euros au titre des heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents, en s'appuyant principalement sur un relevé d'heures établi par ses soins (pièce 26) et sur des attestations confirmant son amplitude horaire importante et ses pauses déjeuner très tardives.

Ce décompte, qui porte sur la durée globale de la relation de travail, précise notamment pour chaque jour ses heures de début et de fin de journée et son temps de pause, ainsi que la durée de travail pour chaque semaine, les heures supplémentaires en résultant et les sommes dues à ce titre après application des majorations. Il est suffisamment précis pour permettre à la Clinique des [Localité 6] d'y répondre utilement par ses propres éléments tirés du contrôle des heures de travail effectuées, le fait qu'il ait été établi par l'appelante en vue de la présente instance étant sans incidence.

Pour s'opposer à cette demande, la Clinique des [Localité 6] produit pour chaque mois concerné les plannings des RDV clients (pièce 1) et pour attester de la véracité des RDV, les extraits du logiciel client, pièces sur la base desquelles elle prétend que les horaires accomplis, notamment sur la demi-journée, étaient beaucoup plus réduits qu'allégués.

Il ressort des plannings produits dont il sera observé qu'il manque certaines périodes comme août 2017, que les RDV étaient fixés à partir de 8h30, et jamais au delà de 18h45, avec un plage horaire blanche sur la pause de midi, généralement entre 12h45 et 14h, ce qui correspond a minima à une amplitude horaire quotidienne de 9h15, sachant que le cabinet était également ouvert le samedi matin.

En outre, ce document ne permet pas de connaître les heures réellement faites et n'exclut nullement des dépassements horaires par rapport à la durée légale du travail, Mme [Z] faisant notamment à raison observer que du retard peut s'accumuler au fil de la journée en raison de RDV d'une durée supérieure aux 15 minutes annoncés, et qu'outre les consultations, elle doit également accomplir certaines tâches administratives, ce qui n'est pas contesté par l'intimée.

Si comme le soutient la Clinique des [Localité 6], les RDV étaient partagés entre Mme [Z] et Mme [T], le planning présenté ne permet pas de connaître leur répartition, notamment en début et fin de journée.

Ainsi que Mme [Z] le fait apparaître sur son relevé, elle a par ailleurs assumé seule l'intégralité de certains jours de rendez-vous en l'absence de Mme [T] notamment en mars 2018 et fin août 2017, ceci étant confirmé par les plannings de RDV produits par l'intimée ou sa pièce 24.

Dès lors, si la comparaison des plannings de RDV et du relevé d'heures de Mme [Z] permettent d'écarter certaines heures prétendument faites notamment en février 2018 ou sur certaines pauses déjeuner, il n'en demeure pas moins qu'à l'examen de l'ensemble des pièces produites par les parties, il est établi que Mme [Z] a accompli sur la période litigieuse des heures supplémentaires au delà de la durée hebdomadaire de travail de 35 heures.

Est sans incidence le fait, comme le suggèrent certaines attestations produites par la Clinique des [Localité 6] que Mme [Z] serait 'mal organisée', dès lors que sa présence à la Clinique se justifiait par les missions qui lui étaient confiées, étant rappelé qu'il incombe à l'employeur de s'assurer de la charge de travail de son salarié, même s'il est cadre autonome.

Est aussi sans portée, le tableau de simulation de bulletin de paie établi par la Clinique des [Localité 6] pour contester les sommes réclamées dès lors qu'il ne tient pas compte des heures supplémentaires réalisés par Mme [Z].

Au regard de l'ensemble de ces éléments, et après déduction des heures alléguées qui n'apparaissent pas établies au moment notamment des pauses déjeuner, il convient de condamner la Clinique des [Localité 6] à payer à Mme [Z] un rappel de salaire de 4 674,99 euros au titre des heures supplémentaires accomplies, outre 467,49 euros de congés payés y afférents.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

- sur la demande indemnitaire au titre du dépassement de la durée maximale de travail et du non-respect des temps de repos et temps de pause :

Mme [Z] sollicite le paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice tiré du non-respect de la durée maximale de travail hebdomadaire et des temps de pause et de repos, rappelant que certaines de ses semaines de travail atteignaient 64 heures.

La Clinique des [Localité 6] s'appuie sur les plannings de RDV (pièce 1) pour contester les griefs allégués, affirmant que la durée hebdomadaire de travail n'a jamais dépassé 48 heures.

Sur ce,

L'article 56 de la convention collective dispose que le cadre autonome doit bénéficier d'un temps de repos d'au moins 11 heures pouvant être porté à 9 heures consécutives en cas de circonstances particulières justifiées pour répondre aux obligations de service de la profession en santé animale et en sécurité sanitaire. Il doit bénéficier d'un temps de repos hebdomadaire de 24 heures auquel s'ajoute le repos quotidien. Chaque repos quotidien limité à 9 heures ouvre droit à un repos de 2 heures pris en plus des 11 heures obligatoires dans les deux mois qui suivent le repos dérogatoire.

Il ressort du relevé d'heures établi par Mme [Z] en sa pièce 26 que celle-ci a toujours bénéficié d'un repos hebdomadaire de 35 heures principalement le dimanche, et d'un repos quotidien supérieur à 11h, même en partant du principe qu'elle terminait sa journée à 20h30 puisqu'elle déclare elle-même ne reprendre à 8h30. Elle ne produit donc aucun élément suffisamment précis concernant le supposé non-respect des temps de repos et de pause, étant rappelé sur ce dernier point qu'en tant que cadre autonome, elle fixait seule son temps de pause de midi.

En revanche, il ressort de ce relevé que Mme [Z] aurait dépassé la durée maximale de travail hebdomadaire de 48 heures à 5 reprises, soit 2 semaines en août 2017, une semaine en octobre 2017, une semaine en février 2018 et la dernière semaine effectuée en juin 2018.

Etant relevé que la Clinique des [Localité 6] ne produit aucun planning de RDV pour justifier des heures de travail de Mme [Z] en août 2017 et donc du respect sur cette période des dispositions légales au titre de la durée maximale de travail hebdomadaire, ceux présentés pour les autres semaines susvisées confirment l'amplitude horaire importante exécutée au cours de celles-ci, et ne peuvent donc suffire à exclure un dépassement de la durée maximale de 48 heures hebdomadaire, sachant qu'il incombe à l'employeur de justifier du respect des dispositions légales et conventionnelles en matière de temps de repos.

S'il en est nécessairement résulté pour Mme [Z] un préjudice compte tenu de la fatigue engendrée, celui-ci demeure moindre que celui allégué compte tenu du nombre limité de semaines concernées. Il convient dès lors de lui accorder une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef. Le jugement sera infirmé en ce sens.

- sur le paiement des astreintes et des actes effectués pendant les gardes :

En s'appuyant sur un décompte personnel de ses astreintes et sur ses bulletins de salaire, Mme [Z] soutient qu'il lui resterait dû une somme de 610,34 euros au titre de l'indemnité forfaitaire devant lui être versées pour les astreintes.

Elle reproche également à la Clinique des [Localité 6] de ne pas l'avoir rémunérée comme prévu à l'article 9 de son contrat de travail pour les actes accomplis au cours de certaines périodes d'astreinte, citant septembre 2017 ainsi que février et avril 2018, et sollicite à titre de dédommagement une somme de 2 500 euros.

En réponse et en soutien à son appel incident, la Clinique des [Localité 6] explique que sur les bulletins de salaire, certaines astreintes ont été converties en temps de travail et réglées comme tel, de sorte qu'aucune somme ne serait en réalité due à Mme [Z].

Elle reconnaît donc à travers son argumentation que certaines astreintes n'ont pas donné lieu au versement de l'indemnité compensatrice prévue aux 2 contrats qui devait pourtant être versée en plus du salaire forfaitaire de base dont il sera rappelé qu'il s'élevait à 1 476 euros dans le cadre du CDD puis à 2 730 euros par mois, et ce indépendamment du nombre de jours travaillés chaque mois.

Il ressort notamment du bulletin de salaire du mois d'août 2017 que Mme [Z] n'a perçu que son salaire de 1 476 euros, alors pourtant que la Clinique des [Localité 6] reconnaît dans une pièce annexe l'exécution de 197 heures d'astreintes.

Il en est de même en octobre 2017 alors que sa pièce 24 fait état de 30 heures d'astreinte.

Outre le fait qu'une telle compensation entre heures d'astreinte et heures 'non travaillées' n'est pas légalement possible, l'intimée ne justifie nullement de l'accord qui aurait été donné par Mme [Z] pour y procéder.

Au vu de ces seuls constats et sans qu'il soit nécessaire de pointer l'ensemble des astreintes omises au cours de la relation de travail, Mme [Z] rapporte la preuve de sa créance de 610,34 euros au titre des astreintes non indemnisées, l'indemnité étant de 42,80 euros pour 12 heures d'astreinte. Le jugement sera confirmé de ce chef.

S'agissant de la supposée non-rémunération d'actes qui auraient été réalisés au cours de certaines astreintes et devaient donner lieu à une indemnisation spécifique, il appartient à Mme [Z] d'établir la réalité desdits actes pour caractériser sa créance, étant précisé que les contrats de travail prévoyaient leur indemnisation à hauteur de 30% du coût de l'acte réalisé.

Or, selon sa pièce 27 aux termes de laquelle elle détaille ses astreintes et gardes, Mme [Z] exprime de simples 'souvenirs' qui demeurent très imprécis, voire incertains selon ses propres dires, et que les très courts échanges de SMS les 4 février et 24 avril 2018 auxquels elle se réfère ne permettent pas d'étayer pour établir que des actes ont été réellement accomplis à ces dates.

A défaut d'élément plus précis, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande financière à ce titre.

- sur la demande indemnitaire pour travail dissimulé :

L'octroi de dommages et intérêts pour travail dissimulé suppose la démonstration que l'employeur a intentionnellement dissimulé l'accomplissement d'un travail en se soustrayant notamment à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent, ou en mentionnant sur de tels documents un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Le seul non-paiement d'heures supplémentaires ne constitue pas la preuve d'une telle intention de dissimulation.

Or, en l'espèce, contrairement à ce que prétend Mme [Z] au soutien de sa demande indemnitaire de 18 022,44 euros pour travail dissimulé, aucun des éléments produits ne tend à démontrer l'intention de la Clinique des [Localité 6] de dissimuler des heures travaillées.

En effet, les astreintes téléphoniques à son domicile n'étant pas assimilables à du travail effectif dès lors que Mme [Z], qui ne prétend pas le contraire, restait libre de se consacrer à ses activités personnelles, l'omission de certaines d'entre elles sur les bulletins de salaire ne peut caractériser un travail dissimulé.

Par ailleurs, l'élément intentionnel ne se déduit pas du seul non-respect par une négligence fautive des dispositions conventionnelles et légales en matière de forfait jours ou de l'omission de déclaration de certaines astreintes du fait de la compensation irrégulièrement appliquée.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Z] de ce chef.

- sur le remboursement des frais de formation et le rappel d'allocation de formation :

Mme [Z] sollicite une somme de 852,80 euros à titre de remboursement de ses frais de formation, faisant valoir que certains d'entre eux ne lui auraient pas été remboursés par son employeur.

Or, ainsi que l'ont justement relevé les premiers juges, les factures relatives au coût de la formation ont toutes été adressées à la Clinique des [Localité 6], Mme [Z] ne justifiant pas les avoir réglées aux lieu et place de son employeur, pour établir sa créance à ce titre.

Par ailleurs, la Clinique des [Localité 6] justifie du réglement des frais d'hébergement et de repas visés à la fois dans les factures produites par Mme [Z] (sa pièce 18) et dans sa note de frais (pièce 27 de l'intimée), à travers le solde de tout compte que Mme [Z] ne prétend pas ne pas avoir encaissé.

Enfin, s'agissant de la supposée allocation formation au titre de laquelle elle réclame le paiement d'une somme de 868,48 euros, Mme [Z] ne produit aucune pièce permettant d'en connaître les modalités de calcul et de versement, de sorte qu'elle ne rapporte pas la preuve de sa créance à ce titre à l'égard de la Clinique des [Localité 6].

A défaut d'élément produit de nature à prouver sa créance, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande de ces 2 chefs.

- sur le harcèlement moral :

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Il résulte des dispositions de l'article L. 1154-1 du code du travail que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, pour dénoncer le harcèlement moral qu'elle dit avoir subi, Mme [Z] invoque dans ses conclusions les faits suivants :

- sa surcharge de travail à laquelle s'ajoutaient les astreintes nombreuses notamment en l'absence de Mme [T], générant une importante fatigue et la contraignant à ne pas participer à des journées de formations,

- une dégradation de ses conditions de travail après l'annonce de sa grossesse à Mme [T], celle-ci lui tenant des remarques désobligeantes destinées à la culpabiliser et à lui mettre la pression,

- l'attitude de Mme [T] pendant son arrêt de travail, celle-ci ayant fait vérifier la réalité de cet arrêt par une société de contrôle, et ayant tenté de la contraindre à venir à la clinique pendant son arrêt pour signer des papier et se faire remettre son salaire habituellement versé par virement,

- le retard dans la régularisation de ce versement qui n'est intervenu qu'après la mise en demeure de son avocat le 25 septembre 2018.

Elle allègue par ailleurs de la dégradation de son état de santé à la suite de ces agissements, en produisant les attestations de proches et des pièces médicales.

Au vu de ce qui a été précédemment statué, il est matériellement établi que Mme [Z] a subi une surcharge de travail importante, devant par ailleurs assumer des astreintes très régulièrement dont notamment 197 heures en août 2017. Par sa pièce 45-8 qui contient un échange de SMS du 7 août 2017, elle justifie également que Mme [T] lui a demandé de ne pas aller en formation le vendredi 15 septembre 2017 sans explication particulière.

Par sa pièce 24, Mme [Z] justifie de la contre-visite médicale organisée le 27 juillet 2018 à la demande de la Clinique des [Localité 6] alors qu'elle était en arrêt depuis quelques semaines et que son employeur savait que celui-ci était lié à sa grossesse ainsi que cela résulte de l'échange de SMS du 18 juin 2018.

Il ressort également des échanges de SMS contenus en la pièce 16-39 datés du 13 juillet 2018 que Mme [T] a insisté pour remettre en mains propres à Mme [Z], qui était pourtant déjà en arrêt, une attestation mutuelle et 'des papiers' sans autre précision, ainsi et surtout qu'un chèque en paiement de son salaire de juin aux lieu et place d'un virement, en lui proposant pour ce faire, un RDV un matin à 8h alors que Mme [Z] lui demandait de lui envoyer le tout.

Il est matériellement établi que le salaire de juin n'a finalement été versé que le 27 septembre 2018 (pièce 14 de l'intimée), soit après la lettre de mise en demeure du conseil de Mme [Z], Mme [T] prétendant qu'il aurait été envoyé une première fois par lettre de simple du 3 juillet 2018.

En revanche, Mme [Z] n'établit pas la matérialité des attitudes désobligeantes et culpabilisantes de Mme [T] après l'annonce de sa grossesse. En effet, les proches et amis ayant attesté n'ont pas directement été témoins de tels agissements et se limitent à reprendre les propos relayés par Mme [Z]. En outre, compte tenu du fort conflit opposant Mme [V], ancienne collègue, à Mme [T], l'attestation de Mme [V] ne présente pas les garanties suffisantes d'impartialité.

Il résulte enfin du certificat médical du 21 août 2018 du docteur [S] ainsi que des attestations du 14 août 2018 de M. [H] psychothérapeuthe, que l'arrêt de travail est dû à la persistance de son épuisement professionnel dans un contexte de stress, avec une tristesse de l'humeur, M. [H] évoquant 'un très fort sentiment de d'auto-dévalorisation, de non-reconnaissance'.

Il s'ensuit que Mme [Z] dénonce des faits qui, pour certains ne sont pas matériellement établis, et qui, pour ceux qui le sont, à savoir la surcharge de travail tout au long de la relation de travail, l'annulation d'une journée de formation, les possibles pressions pendant son arrêt à travers le contrôle du bien fondé de son arrêt de travail et la volonté de la faire venir à la clinique ainsi que le retard dans le paiement du salaire de juin 2018, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral, compte tenu de leur incidence négative sur les conditions de travail et l'état de santé de Mme [Z] attestée par les pièces médicales.

Il incombe dès lors à l'employeur de prouver que les agissements dénoncés sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Sans reprendre les précédents développements quant aux horaires de travail de Mme [Z], il sera d'abord relevé que la Clinique des [Localité 6] ne donne aucune explication pertinente et objective quant à la surcharge de travail assumée par Mme [Z], ajoutée aux nombreuses astreintes, se bornant à dire que sa charge de travail était en adéquation avec sa qualification de vétérinaire confirmée, sans par exemple donner d'éléments de comparaison pour justifier que cette charge était la même pour tous. Elle ne donne également aucune explication quant à l'annulation à l'initiative de Mme [T] de la journée de formation de Mme [Z] en septembre 2017.

Elle prétend par ailleurs que Mme [T] n'a pas pu procéder au virement du salaire de juin en raison de ses propres congés, préférant envoyer un chèque par lettre de simple malgré les risques d'un tel envoi sans garantie de sa reception. Si elle produit la copie dudit chèque daté du 2 juillet 2018, elle n'explique cependant pas le retard pris après les échanges de SMS du 13 juillet 2018, pour procéder dans les meilleurs délais au versement de la rémunération de juin après avoir appris que Mme [Z] n'avait pas reçu son premier chèque, ce paiement n'étant finalement intervenu que le 27 septembre 2018, soit avec 2 mois de retard, et concomitamment à la lettre de mise en demeure de l'avocat de sa salariée.

Si comme elle le rappelle, l'organisation à l'initiative de l'employeur d'une contre-visite médicale est régulière, la Clinique des [Localité 6] demeure en revanche taisante sur les motifs de cette décision qui tend à remettre en cause la loyauté de sa salariée alors qu'elle reconnaît avoir reçu la première prolongation d'arrêt de Mme [Z] jusqu'en septembre 2018. Elle ne démontre donc pas que cette décision est étrangère à une situation de harcèlement moral. Elle ne donne également aucune explication objective sur sa volonté, susceptible d'être ressentie comme une pression, de la faire venir pendant son arrêt à la clinique pour 'des papiers'.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, la Clinique des [Localité 6] échoue à démontrer que les faits allégués par Mme [Z] et matériellement établis, sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute situation de harcèlement moral.

Au regard de la nature des agissements et des conséquences sur l'état de santé de Mme [Z], celle-ci justifie d'un préjudice moral qu'il convient de réparer par l'octroi d'une somme de 5 000 euros de dommages et intérêts.

- sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

Mme [Z] sollicite le prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail, rappelant que cette demande est recevable dès lors qu'elle a été formulée avant son licenciement.

Elle fait valoir en substance que les faits de harcèlement moral ont rendu impossible la poursuite du contrat de travail, la résiliation judiciaire devant dès lors être prononcée aux torts de son employeur et produire les effets d'un licenciement nul.

Par renvoi à ses précédents arguments, la Clinique des [Localité 6] conteste le bien fondé de cette demande à défaut de harcèlement moral établi.

Sur ce,

La rupture du contrat de travail de la salariée n'étant pas acquise au jour de sa requête devant la juridiction prud'homale, elle est recevable à en solliciter la résiliation judiciaire aux torts de son employeur.

Il sera rappelé que le salarié qui souhaite se prévaloir d'une résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur doit caractériser l'existence d'un ou de plusieurs manquements de son employeur d'une gravité suffisante rendant impossible la poursuite du contrat de travail.

Il a été précédemment démontré l'existence d'une situation de harcèlement moral à l'égard de Mme [Z].

De tels faits sont par leur nature et leurs conséquences sur les conditions de travail de la salariée, d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite de la relation de travail et que soit prononcée la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [Z] aux torts de la Clinique des [Localité 6], avec effet rétroactif au 15 mars 2019, date du licenciement de Mme [Z].

Conformément aux dispositions des articles L. 1235-3-2 et L. 1235-3-1 du code du travail, cette rupture au torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement nul.

Mme [Z] sollicite les sommes suivantes :

- 36 008,88 euros de dommages et intérêts pour la perte injustifiée de son emploi,

- 9 011,22 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents,

- 1 187,78 euros à titre d'indemnité de licenciement.

En application des dispositions conventionnelles plus favorables que les dispositions légales, l'indemnité compensatrice de préavis est équivalente à 3 mois de salaire.

Au vu du salaire moyen perçu au cours des 3 derniers mois précédent son arrêt maladie, étant observé que la Clinique des [Localité 6] ne formule aucune critique sur le montant réclamé, il convient de faire droit à la demande d'indemnité compensatrice de préavis réclamée par Mme [Z], et aux congés payés y afférents.

En l'absence de critique sur le principe et le montant de l'indemnité légale de licenciement sollicitée, il y sera également fait droit.

S'agissant de l'indemnisation de la perte injustifiée de son emploi, il convient de rappeler qu'en application de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, celle-ci ne saurait être inférieure à l'équivalent des 6 derniers mois de salaire.

Au regard de l'âge de Mme [Z] au jour de la rupture de la relation de travail (30 ans) et de l'absence d'élément produit quant à sa situation professionnelle postérieure et aux éventuelles difficultés à retrouver un emploi, il convient de condamner la Clinique des [Localité 6] à lui payer une somme de 19 000 euros en réparation du préjudice subi, à défaut d'autres éléments sur l'ampleur du préjudice allégué.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

- sur les demandes accessoires :

Au vu de ce qui précède, le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance qui devront être supportés par la Clinique des [Localité 6].

Partie perdante, la Clinique des [Localité 6] devra également supporter les dépens d'appel.

L'équité commande par ailleurs de la condamner à payer à Mme [Z] une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement entrepris en date du 8 juin 2021 sauf en ses dispositions relatives :

- à la convention de forfait jours et au rappel de salaire au titre des heures supplémentaires,

- au non-respect de la durée maximale de travail hebdomadaire,

- au harcèlement moral,

- à la résiliation judiciaire du contrat de travail et aux demandes financières subséquentes,

- aux dépens de première instance ;

statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

DIT que les conventions de forfait-jours insérés aux contrats de travail successifs sont inopposables à Mme [M] [Z] ;

PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [M] [Z] aux torts de la SELARL Clinique Vétérinaire des [Localité 6], avec effet à la date du 15 mars 2019 ;

CONDAMNE la SELARL Clinique Vétérinaire des [Localité 6] à payer à Mme [M] [Z] les sommes suivantes :

- 4 674,99 euros au titre des heures supplémentaires accomplies, outre 467,49 euros de congés payés y afférents,

- 500 euros de dommages et intérêts pour non-respect de la durée maximale de travail hebdomadaire,

- 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral,

- 19 000 euros de dommages et intérêts pour la perte injustifiée de son emploi,

- 9 011,22 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 901,12 euros de congés payés y afférents,

- 1 187,78 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

CONDAMNE la SELARL Clinique Vétérinaire des [Localité 6] à payer à Mme [M] [Z] une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT que la SELARL Clinique Vétérinaire des [Localité 6] supportera les dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER

Séverine STIEVENARD

LE PRESIDENT

[L] [R]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Sociale b salle 1
Numéro d'arrêt : 21/01180
Date de la décision : 31/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-31;21.01180 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award