La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/03/2023 | FRANCE | N°20/01042

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 30 mars 2023, 20/01042


République Française

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 30/03/2023



N° de MINUTE : 23/325

N° RG 20/01042 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S5LB

Jugement (N° 19-002291) rendu le 10 Janvier 2020 par le Tribunal Judiciaire de Lille



APPELANTE



SA Cofidis prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 9]

[Localité 5]



Représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Dou

ai, avocat constitué et Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant



INTIMÉS



Monsieur [D] [R]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 8] - ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 30/03/2023

N° de MINUTE : 23/325

N° RG 20/01042 - N° Portalis DBVT-V-B7E-S5LB

Jugement (N° 19-002291) rendu le 10 Janvier 2020 par le Tribunal Judiciaire de Lille

APPELANTE

SA Cofidis prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 9]

[Localité 5]

Représentée par Me Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué et Me Xavier Hélain, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant

INTIMÉS

Monsieur [D] [R]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 8] - de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 4]

Madame [P] [Z] [X]

née le [Date naissance 2] 1970 - de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentés par Me Guillaume Ghestem, avocat au barreau de Lille, avocat constitué et Me Audric Dupuis, avocat au barreau de Paris

Selarl Legrand François devenue Selarl Exip'es qualité de liquidateur judiciaire de la société C2NE

[Adresse 3]

[Localité 7]

Défaillante, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 18 juin 2020 par acte remis à personne morale

DÉBATS à l'audience publique du 14 décembre 2022 tenue par Yves Benhamou magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Gaëlle Przedlacki

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Yves Benhamou, président de chambre

Catherine Ménegaire, conseiller

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT REPUTE CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 mars 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Yves Benhamou, président et Gaëlle Przedlacki, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 14 décembre 2022

- FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Dans le cadre d'un démarchage à domicile, le 8 novembre 2016, M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] ont conclu avec la société CENTRE NATIONAL DES NOUVELLES ENERGIES (C2NE) un contrat afférent à une prestation relative à l'installation de panneaux photovoltaïques, d'un système GSE et d'un chauffe-eau thermodynamique pour un montant TTC de 26.900 euros.

Pour financer ces installations, M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] selon offre préalable acceptée en date du 8 novembre 2016 se sont vu consentir par la société COFIDIS un crédit d'un montant de 26.900 euros remboursable en 156 mensualités précédées d'un différé de paiement de 11 mois, incluant les intérêts au taux nominal annuel de 4,61 %.

Par acte d'huissier en dates des 16 et 18 mai 2018, M. [D] [R] et Mme [P] [X]-[Z] épouse [R] ont fait assigner en justice la société C2NE ainsi que la société COFIDIS afin notamment de voir prononcer la nullité ou à défaut la résolution des contrats de vente et de crédit affecté.

Par acte d'huissier en date du 13 septembre 2018, M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] ont fait assigner en intervention forcée la SELARL LEGRAND es qualité de liquidateur judiciaire de la société C2NE.

Par jugement réputé contradictoire en date du 10 janvier 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lille, a:

- ordonné la jonction des dossiers n°11 19-2291 et 11 19-3520 sous le n°11 19-2291,

- déclaré recevable la demande de Mme [P] [X] [Z] épouse [R] tendant au prononcé de la nullité et subsidiairement au prononcé de la résolution du contrat de vente conclu le 8 novembre 2016 avec la société C2NE,

- prononcé la nullité du contrat de vente conclu entre M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] d'une part et la société C2NE d'autre part suivant bon de commande n°26699,

- constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société COFIDIS et M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] en date du 8 novembre 2016,

- condamné la société COFIDIS à restituer à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 8 novembre 2016,

- ordonné à la société C2NE de procéder à la désinstallation du matériel suivant bon de commande du 8 novembre 2016 et à la remise en état de la toiture de M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] à ses frais,

- ordonné à la société COFIDIS de procéder à la radiation de M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] du FICP,

- débouté M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] du surplus de leurs demandes,

- débouté la société COFIDIS de l'ensemble de ses demandes,

- condamné in solidum les sociétés COFIDIS et C2NE à payer à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les sociétés COFIDIS et C2NE aux dépens.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 20 février 2020, la SA COFIDIS a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a :

' déclaré recevable la demande de Mme [P] [X] [Z] épouse [R] tendant au prononcé de la nullité et subsidiairement au prononcé de la résolution du contrat de vente conclu le 8 novembre 2016 avec la société C2NE,

' prononcé la nullité du contrat de vente conclu entre M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] et la société C2NE suivant bon de commande n°26699,

' constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société COFIDIS et M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] en date du 8 novembre 2016,

' condamné la société COFIDIS à restituer à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 8 novembre 2016,

' ordonné à la société C2NE de procéder à la désinstallation du matériel suivant bon de commande du 8 novembre 2016 et à la remise en état de la toiture de M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] à ses frais,

' débouté la société COFIDIS de ses demandes,

' condamné in solidum les sociétés COFIDIS et C2NE à payer à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamné in solidum les sociétés COFIDIS et C2NE aux dépens.

Vu les dernières conclusions de la SA COFIDIS en date du 21 novembre 2022, et tendant à voir:

- dire la SA COFIDIS recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

Y faisant droit,

- réformer le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- débouter M. [D] [R] et Mme [P] [X] [R] née [Z] de l'intégralité de leurs demandes,

- condamner solidairement M. [D] [R] et Mme [P] [X] [R] née [Z] à payer à la société COFIDIS la somme de 31.030,36 euros au taux contractuel de 4,38 % l'an à compter du 18 juillet 2018,

A titre subsidiaire,

- condamner solidairement M. [D] [R] et Mme [P] [X] [R] née [Z] à rembourser à la SA COFIDIS le capital emprunté d'un montant de 26.900 euros au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction faite des échéances payées,

En tout état de cause,

- condamner solidairement M. [D] [R] et Mme [P] [X] [R] née [Z] à payer à la société COFIDIS une indemnité d'un montant de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement M. [D] [R] et Mme [P] [X] [R] née [Z] aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions de M. [D] [R] et Mme [P] [X] [R] née [Z] en date du 29 novembre 2022, et tendant à voir:

- juger infondé l'appel formé par la SA COFIDIS à l'encontre du jugement entrepris,

- débouter la SA COFIDIS de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement querellé en ce qu'il a prononcé l'annulation du contrat conclu entre M. [R] et la société C2NE le 8 novembre 2016,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé l'annulation de plein droit du contrat de crédit affecté conclu entre les consorts [R]-[Z]-[X] et la SA COFIDIS le 8 novembre 2016, annulation qui a pour effet de déchoir la SA COFIDIS de son droit aux intérêts,

- et confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la SA COFIDIS à restituer aux consorts [R]-[Z]-[X] le montant total des échéances du prêt affecté déjà remboursé par eux,

- mais infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société C2NE à procéder à la désinstallation du matériel vendu et à la remise de la toiture dans l'état antérieur à la signature du bon de commande du 8 novembre 2016,

Statuer à nouveau, et donner acte aux consorts [R]-[Z]-[X] de ce qu'à leurs frais exclusifs de toute nature ils tiendront à disposition de la SELARL LEGRAND FRANCOIS, es qualité de liquidateur de la société C2NE, les matériels vendus au titre du bon de commande annulé, et qu'ils les lui livreront à sa simple demande,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la SA COFIDIS a commis des fautes dans le cadre de son déblocage de fonds,

Puis, à titre principal dans le cas certain où la cour d'appel de Douai confirmera l'annulation des contrats:

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a privé la SA COFIDIS de la totalité de sa créance de restitution du capital du contrat de crédit affecté à l'encontre des consorts [R]-[Z]-[X] en réparation de la faute extracontractuelle commise par elle,

Ou à titre subsidiaire, dans le cas où la cour d'appel de Douai confirmera l'annulation des contrats mais ne confirmerait pas la privation de la SA COFIDIS de la totalité de sa créance de restitution du capital du contrat de crédit affecté à l'encontre des consorts [R]-[Z]-[X]:

- réformer le jugement déféré en ce qu'il a privé la SA COFIDIS de la totalité de sa créance de restitution du capital du contrat de crédit affecté à l'encontre des consorts [R]-[Z]-[X],

STATUER A NOUVEAU ET:

- priver la SA COFIDIS de sa créance de restitution à l'encontre des consorts [R]-[Z]-[X] à hauteur de 26.631 euros en réparation du préjudice de ce montant causé à ces derniers par sa faute extracontractuelle,

Ou à titre très subsidiaire, dans le cas extraordinaire où la cour d'appel de Douai ne confirmerait pas l'annulation des contrats,

- réformer le jugement querellé en ce qu'il a privé la SA COFIDIS de la totalité de sa créance de restitution du capital du contrat de crédit affecté à l'encontre des consorts [R]-[Z]-[X],

STATUER A NOUVEAU ET:

- juger que la faute commise par la SA COFIDIS est de nature contractuelle,

- condamner la SA COFIDIS à payer aux consorts [R]-[Z]-[X] la somme de 26.900 euros de dommages intérêts en réparation du préjudice causé à ces derniers par sa faute contractuelle,

En tout état de cause,

- condamner la SA COFIDIS à payer à M. [R] et Mme [Z]-[X] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre le paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.

Pour sa part la SELARL LEGRAND-FRANÇOIS es qualité de liquidateur judiciaire de la société C2NE a été assignée devant la cour par acte d'huissier en date du 18 juin 2020 signifié à personne morale. Cette intimée subséquemment n'a pas constitué avocat ni donc conclu en cause d'appel.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties qui ont constitué avocat et conclu devant la cour, il convient de se référer à leurs écritures respectives.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 décembre 2022.

- MOTIFS DE LA COUR:

- SUR LA NULLITÉ DU CONTRAT PRINCIPAL DE VENTE:

L'article L221-5-1° du code de la consommation s'agissant des contrats conclus hors établissement prévoit en substance que préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1.

L'article L 111-1 du même code dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et applicable au présent litige, dispose quant à lui:

«Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes:
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État.
Les dispositions du présent article s'appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d'eau, de gaz ou d'électricité, lorsqu'ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d'une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l'environnement.»

L'article L 221-9 du dit code dispose quant à lui:

«Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.
Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.
Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation.
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.»

Par ailleurs l'article L 242-1 du même code prévoit en ce qui le concerne que les dispositions de l'article L 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Au cas particulier la nature complexe de l'opération contractuelle en question implique que soit précisées certaines caractéristiques essentielles. Faute de telles précisions le consommateur ne sera pas en mesure de procéder ' comme il peut légitimement en ressentir la nécessité - à une comparaison entre diverses offres de même nature proposées sur le marché.

En l'espèce le bon de commande litigieux ne mentionne pas avec précision le calendrier des travaux ni la date exacte de livraison. Il est simplement précisé en page 2 du bon de commande en termes très nébuleux et de manière très parcellaire: 'Date de début des travaux: au plus tard 120 jours après la signature du bon de commande'.

Par ailleurs s'agissant des panneaux photovoltaïques ce bon de commande ne spécifie pas le type de tels panneaux comme 'monocristallin' ou 'polycristallin' alors même que cela a une incidence manifeste sur la performance et le rendement de ce matériel.

De plus il n'est fourni dans le bon de commande litigieux aucune précision quant à la surface des panneaux photovoltaïques ce qui est important pour vérifier la conformité des stipulations du bon de commande à ce qui est de facto déclaré en mairie.

Il ressort des observations qui précédent que les consommateurs en question n'ont pas été suffisamment informés sur la prestation qu'ils entendaient obtenir dans le cadre du contrat en cause. Du reste la mention du calendrier des travaux et de la date de livraison apparaît incontestablemlent comme un des éléments essentiels de la prestation fournie; sans cette précision il est pour le moins difficile sinon impossible d'opérer une comparaison pertinente avec des prestations effectuées par d'autres fournisseurs. Il est ainsi incontestable que le bon de commande litigieux ne satisfait pas aux exigences protectrices du consommateur résultant des dispositions précitées du code de la consommation sans qu'il soit besoin d'apprécier si ces éléments ont été déterminants du consentement s'agissant d'une nullité d'ordre public.

En outre il ne résulte d'aucun élément objectif du dossier que M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] aient eu connaissance des irrégularités affectant le bon de commande, et qu'ils aient eu la volonté non équivoque de couvrir ces irrégularités ainsi que la nullité qui en découle. En outre force est de constater qu'il s'agissait au cas particulier de simples profanes qui par essence ne connaissaient pas les exigences exactes du droit de la consommation et la sanction dont elles étaient assorties.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu entre M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] d'une part et la société C2NE d'autre part suivant bon de commande n°26699.

- SUR LA NULLITÉ DU CONTRAT DE CRÉDIT:

En application des dispositions de l'article L 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui même judiciairement résolu ou annulé.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre la société COFIDIS et M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] en date du 8 novembre 2016.

- SUR LES CONSÉQUENCES DE LA NULLITÉ DU CONTRAT PRINCIPAL ET DU CONTRAT DE CRÉDIT AFFECTÉ:

L'annulation du bon de commande et du contrat de crédit affecté ne conduit pas automatiquement au rétablissement du statu quo ante. Tel peut être le cas dans l'hypothèse où, du fait des circonstances particulières de l'espèce, la banque est privée de sa créance de restitution.

Il résulte d'une jurisprudence bien établie que commet une faute la banque qui verse les fonds prêtés au vendeur de panneaux photovoltaïques sans avoir dûment et préalablement vérifié la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation. La banque commet également une faute en ne s'assurant pas au moyen de toutes démarche utiles, de la bonne exécution des travaux par le vendeur des panneaux photovoltaïques conformément à ses engagements contractuels avant de débloquer les fonds prêtés.

Au cas particulier l'objectivité commande de constater que la SA COFIDIS a commis une faute en ne vérifiant pas la conformité du bon de commande litigieux aux dispositions d'ordre public du code de la consommation lorsqu'elle a débloqué les fonds du crédit affecté.

Il convient de plus de mettre en exergue cette évidence que le crédit affecté conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile prends place dans une opération commerciale unique. Force est dès lors de constater que dans ce cadre, chacun des deux contrats n'existe que par l'autre, de telle manière que le déséquilibre s'en trouve d'autant plus accentué vis à vis du consommateur. Par suite, au cas particulier la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse objectivement comme la sanction tant des fautes commises par la banque elle même que de la faute commise par le professionnel dans le cadre du contrat principal. Ces fautes ont incontestablement occasionné un préjudice pour M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] dont l'exacte étendue doit être appréciée souverainement par le juge du fond et qui ne saurait être réduit à la seule chance qu'ils ont ainsi perdu de ne pas contracter. De plus dans le cas présent la déconfiture de la société installatrice des panneaux photovoltaïques, cause aux consorts [R] un incontestable préjudice car elle va rendre impossible - ou à tout le moins extrêmement difficile - la restitution du prix du matériel ainsi que la désinstallation du matériel - points qui auraient dû être la conséquence normale et automatique de l'annulation du contrat. Par ailleurs les consorts [R] ont également subi un préjudice lié au fait qu'ils ont utilisé un matériel qui faute d'informations préalables suffisantes, pouvait n'était pas en parfaite adéquation avec leurs souhaits. De telles fautes en l'espèce ont causé à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] un préjudice qui doit être justement et exactement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution.

Il est donc logique au regard des observations qui précédent, que la SA COFIDIS soit privée de sa créance de restitution.

Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la SA COFIDIS à restituer à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté conclu le 8 novembre 2016.

Par ailleurs par des motifs pertinents que la cour adopte, c'est à bon droit que le premier juge dans la décision déférée, a:

- ordonné à la société C2NE de procéder à la désinstallation du matériel suivant bon de commande du 8 novembre 2016 et à la remise en état de la toiture de M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] à ses frais [ même si cette désinstallation apparaît pour le moins aléatoire au regard de la faillite de la société C2NE],

- ordonné à la société COFIDIS de procéder à la radiation de M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] du FICP,

- débouté M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] du surplus de leurs demandes,

- débouté la société COFIDIS de l'ensemble de ses demandes,

- condamné in solidum les sociétés COFIDIS et C2NE à payer à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les sociétés COFIDIS et C2NE aux dépens.

De plus les éléments et justificatifs dont se prévalent les parties devant la cour, ne permettent pas de battre en brèche les appréciations objectives et nuancées du premier juge.

Le jugement querellé sera donc confirmé sur ces points.

- SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE AU TITRE DE L'INSTANCE D'APPEL:

Il, apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] les frais irrépétibles exposés par eux devant la cour et non compris dans les dépens.

Il convient dès lors de condamner la SA COFIDIS à payer à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] la somme de 900 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.

En revanche il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA COFIDIS les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.

Il y a lieu en conséquence de débouter la SA COFIDIS de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.

- SUR LE SURPLUS DES DEMANDES:

Au regard des considérations qui précédent, il convient de débouter les parties du surplus de leurs demandes.

- SUR LES DEPENS D'APPEL:

Il convient de condamner la SA COFIDIS qui succombe, aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort, et par mise à disposition au greffe,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement querellé,

Y ajoutant,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SA COFIDIS à payer à M. [D] [R] et Mme [P] [X] [Z] épouse [R] la somme de 900 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,

La déboute de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,

La condamne aux entiers dépens d'appel.

Le greffier

Gaëlle PRZEDLACKI

Le président

[S] [K]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 8 section 1
Numéro d'arrêt : 20/01042
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;20.01042 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award