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30/03/2023 | FRANCE | N°18/02878

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 30 mars 2023, 18/02878


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 2



ARRÊT DU 30/03/2023



****





N° de MINUTE :

N° RG 18/02878 - N° Portalis DBVT-V-B7C-RSHW



Jugement (2012/1208) rendu le 26 janvier 2018 par le tribunal de commerce d'Arras

Ordonnance (n°20/320) rendue le 26 novembre 2020 par la cour d'appel de Douai

Ordonnance (n°20/348) rendue le 17 décembre 2020 par la cour d'appel de Douai

Arrêt (n°21/300) rendu le 30 septe

mbre 2021 par la cour d'appel de Douai

Arrêt (n° 22/463) rendu le 06 octobre 2022 par la cour d'appel de Douai







APPELANTS



M. [Z] [CS]

né le [Date naissance 26] 1...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 30/03/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 18/02878 - N° Portalis DBVT-V-B7C-RSHW

Jugement (2012/1208) rendu le 26 janvier 2018 par le tribunal de commerce d'Arras

Ordonnance (n°20/320) rendue le 26 novembre 2020 par la cour d'appel de Douai

Ordonnance (n°20/348) rendue le 17 décembre 2020 par la cour d'appel de Douai

Arrêt (n°21/300) rendu le 30 septembre 2021 par la cour d'appel de Douai

Arrêt (n° 22/463) rendu le 06 octobre 2022 par la cour d'appel de Douai

APPELANTS

M. [Z] [CS]

né le [Date naissance 26] 1952 à [Localité 64], de nationalité française

demeurant [Adresse 35]

Mme [IN] [CS] épouse [Y]

née le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 67], de nationalité française

demeurant [Adresse 29] Royaume-Uni

M. [IM] [CS]

né le [Date naissance 10] 1954 à [Localité 66], de nationalité française

demeurant [Adresse 28]

M. [V] [CS]

né le [Date naissance 37] 1982 à [Localité 62], de nationalité française

demeurant [Adresse 52]

M. [UO] [CS]

né le [Date naissance 41] 1950 à [Localité 64], de nationalité française

demeurant [Adresse 51]

Mme [I] [CS] épouse [A]

née le [Date naissance 24] 1981 à [Localité 69], de nationalité française

demeurant [Adresse 46]

Mme [R] [CS] épouse [CU]

née le [Date naissance 5] 1983 à [Localité 59], de nationalité française

demeurant [Adresse 11]

M. [CV] [CS]

né le [Date naissance 6] 1984 à [Localité 59], de nationalité française

demeurant [Adresse 58]

Mme [J] [CS] épouse [US]

née le [Date naissance 34] 1987 à [Localité 59], de nationalité française

demeurant [Adresse 48]

M. [D] [CS]

né le [Date naissance 42] 1988 à [Localité 59], de nationalité française

demeurant [Adresse 14]

M. [UI] [CS]

né le [Date naissance 39] 1953 à [Localité 66], de nationalité française

demeurant [Adresse 56]

M. [UP] [CS]

né le [Date naissance 27] 1981 à [Localité 72], de nationalité française

élisant domicile chez son père [IM] [CS], [Adresse 28]

M. [T] [CS]

né le [Date naissance 44] 1982 à [Localité 61], de nationalité française

élisant domicile chez son père [IM] [CS], [Adresse 28]

M. [E] [CS]

né le [Date naissance 36] 1985 à [Localité 63], de nationalité française

élisant domicile chez son père [IM] [CS], [Adresse 28]

M. [L] [CS]

né le [Date naissance 8] 1988 à [Localité 70], de nationalité française

élisant domicile chez son père [IM] [CS], [Adresse 28]

Mme [IF] [CS]

née le [Date naissance 6] 1991 à [Localité 61], de nationalité française

élisant domicile chez son père [IM] [CS], [Adresse 28]

Mme [IE] [CS] épouse [K]

née le [Date naissance 38] 1957 à [Localité 66], de nationalité française

demeurant [Adresse 32]

M. [C] [K]

né le [Date naissance 7] 1955 à [Localité 64], de nationalité française

demeurant [Adresse 32]

M. [II] [K]

né le [Date naissance 33] 1982 à [Localité 74], de nationalité française

demeurant [Adresse 54]

M. [S] [K]

né le [Date naissance 16] 1984 à [Localité 74], de nationalité française

demeurant [Adresse 45]

M. [P] [K]

né le [Date naissance 13] 1989 à [Localité 74], de nationalité française

demeurant demeurant [Adresse 32]

M. [IL] [CS]

né le [Date naissance 22] 1961 à [Localité 66], de nationalité française

demeurant [Adresse 50]

Mme [O] [IK]

née le [Date naissance 30] 1995 à [Localité 67]

demeurant [Adresse 73]

M. [IP] [IK]

né le [Date naissance 21] 1997 à [Localité 67]

demeurant [Adresse 73]

Mme [UK] [IK]

née le [Date naissance 40] 1998 à [Localité 67]

demeurant [Adresse 73]

M. [N] [IK] ès qualités de représentant légal de son fils mineur M. [UJ] [IK] né le [Date naissance 4] 2005

né le [Date naissance 12] 1960 à [Localité 75]

demeurant [Adresse 19]

Mme [UL] [CS] Épouse [IK] ès qualités de représentante légale de son fils mineur M. [UJ] [IK]

née le [Date naissance 15] 1967 à [Localité 66]

demeurant [Adresse 19]

M. [U] [Y]

né le [Date naissance 31] 1964 à [Localité 71], de nationalité française

demeurant avec son épouse [Adresse 29] Royaume-Uni

La SAS Saint-Eloi, représentée par son Président

ayant son siège social [Adresse 20]

représentés par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistés de Me Marie-Aimée Peyron, avocat au barreau de Paris et Me Stéphane Dhonte, avocat au barreau de Lille, avocats plaidant

INTIMES

M. [X] [CS], assigné en sa qualité de président du conseil d'administration de la société Sager et de co-gérant de Gercap et par ailleurs administrateur de [CS] Frères, agissant ès qualités d'ayants-droits de Mme [UD] [H], assignée en sa qualité de co-gérante de Gercap, décédée à [Localité 68] le [Date décès 1] 2019.

né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 60], de nationalité française

demeurant [Adresse 43]

Mme [UD] [H] décédée le [Date décès 1] 2019

M. [UN] [CS] assigné en sa qualité de directeur général et administrateur de Sager, et en sa qualité de directeur général délégué et administrateur de la société Les Aulnes et en sa qualité de président de [CS] Frères, agissant ès qualités d'ayants-droits de Mme [UD] [H], assignée en sa qualité de co-gérante de Gercap, décédée à [Localité 68] le [Date décès 1] 2019.

né le [Date naissance 25] 1953 à [Localité 67], de nationalité française

demeurant [Adresse 17]

M. [W] [CS] assigné en sa qualité de président directeur général de la société les Aulnes, agissant ès qualités d'ayants-droits de Mme [UD] [H], assignée en sa qualité de co-gérante de Gercap, décédée à [Localité 68] le [Date décès 1] 2019.

né le [Date naissance 23] 1927 à [Localité 65], de nationalité française

demeurant [Adresse 47]

représentés par Me Gwendoline Muselet et Me Aurélie Salmon, avocats au barreau de Lille, avocats constitués

La SA [CS] Frères, agissant poursuites et diligences de ses dirigeants et représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, prise en cette qualité et, selon la déclaration d'appel, comme venant aux droits des sociétés Sager, Gercap, Les Aulnes, Saphir.

ayant son siège social [Adresse 9]

représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, constituée aux lieu et place de Me François Deleforge, avocat au barreau de Douai

assistée par Me Thierry Lorthiois, avocat au barreau de Lille et Me Nicolas Menesson, avocat au barreau de Paris, avocats plaidant

INTERVENANTS VOLONTAIRES

Mme [B] [CS] épouse [IJ] ès qualités d'ayants-droit de Mme [UD] [H] épouse [CS].

demeurant [Adresse 18]

M. [IO] [CS] ès qualités d'ayants-droit de Mme [UD] [H] épouse [CS].

demeurant [Adresse 53]

représentés par Me Marie-Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistés par Me Thomas Buffin, substitué par Me Ondine Prevoteau, avocats au barreau de Lille, avocat plaidant

M. [IH] [CS] ès qualités d'héritier de Mme [UD] [H] épouse [CS], assignée en sa qualité de co-gérante de Gercap décédée à [Localité 68] le [Date décès 1] 2019.

demeurant [Adresse 55]

M. [UT] [CS] ès qualités de Mme [UD] [H] épouse [CS], assignée en sa qualité de co-gérante de Gercap (décédée à [Localité 68] le [Date décès 1] 2019.

demeurant [Adresse 49]

M. [M] [F] [CS], agissant ès qualités d'ayants-droits de Mme [UD] [H], assignée en sa qualité de co-gérante de Gercap (décédée à [Localité 68] le [Date décès 1] 2019)

demeurant [Adresse 57]

représentés par Me Gwendoline Muselet et Me Aurélie Salmon, avocats au barreau de Lille, avocats constitués

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Samuel Vitse, président de chambre

Nadia Cordier, conseiller

Agnès Fallenot, conseiller

---------------------

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco

DÉBATS à l'audience publique du 15 décembre 2022 après rapport oral de l'affaire par Nadia Cordier, conseiller.

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 mars 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Samuel Vitse, président, et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 01 décembre 2022

****

Par exploits des 23 et 29 mai 2012 devant le tribunal de commerce d'Arras, la société Saint Éloi, Mme [IN] [CS] épouse [Y], MM. [Z] et [IM] [CS] ont assigné la société [CS] frères, en son nom et venant aux droits des sociétés Sager, Gercap et Les Aulnes, ainsi que MM. [X], [UN], [W] [CS] et Mme [UD] [CS], ès qualités d'anciens dirigeants ou administrateurs des sociétés Sager, Gercap, [CS] Frères et Les Aulnes et ont sollicité l'annulation de l'assemblée générale des actionnaires de la société Sager du 2 décembre 2011, considérant que les conditions de tenue et de vote de l'assemblée générale ayant conduit à des fusions, dont celle de la société Sager avec la société [CS] frères, étaient irrégulières.

Par conclusions des 5 février 2015, 17 juin 2016 et 02 juin 2017, Mme [I] [CS] épouse [A], Mme [R] [CS] épouse [CU], M [CV] [CS], Mme [J] [CS], MM. [D], [UI], [UP], [T], [E], [L] [CS], Mme [IF] [CS], Mme [IE] [CS] épouse [K], MM. [C], [II], [S], [P] [K], M. [IL] [CS], Mmes [O], [UK] [IK], M.[IP] [IK], M. [N] [IK] ès qualités de représentant légal de son fils mineur [UJ] [IK], Mme [UL] [CS] épouse [IK] ès qualités de représentante légale de son fils mineur [UJ] [IK], et M. [U] [Y] sont intervenus à l'instance.

Par jugement contradictoire et en premier ressort en date du 26 janvier 2018, le tribunal de commerce d'Arras :

-a reçu d'une part la société Saint Éloi, Mme [IN] [CS] épouse [Y], MM. [Z] et [IM] [CS], puis ensuite M. [V] [CS] et d'autre part les 23 co-demandeurs, en intervention volontaire, en leurs assignations,

- les a dits non-fondées,

- a débouté conséquemment l'ensemble des requérants de la totalité de leurs demandes, fins et conclusions,

- a condamné in solidum, la société Saint Éloi, Mme [IN] [CS] épouse [Y], MM [Z], [IM], [V] [CS], ainsi que les 23 co-demandeurs, en intervention volontaire à d'une part verser à la société [CS] Frères SA, à Mme [UD] [H] épouse de [F] [CS] et à MM [W], [X] et [UN] [CS] la somme de 50 000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et à d'autre part, supporter tous frais, dépens de la présente instance.

Par requête en date du 22 février 2018, les demandeurs à l'instance initiale ont déposé une requête en rectification et omission de statuer.

Le jugement précité du 26 janvier 2018 ayant été signifié alors que la procédure en rectification était en cours, appel a été interjeté le 18 mai 2018, sous le RG n°18/02878.

Par jugement du 6 février 2019, le tribunal de commerce d'Arras a, au visa des articles 100, 101, 102 et 462, 453 du code de procédure civile :

- débouté la SAS [CS] Frères de sa demande, à titre liminaire, de litispendance,

- rejeté la demande de rectification d'omission de statuer de la SAS Saint Éloi et des 27 autres demandeurs,

- dit qu'il n'y a pas lieu à modifier le jugement du 26 janvier 2018,

- rejeté toutes les autres demandes, fins et conclusions des demandeurs et des défendeurs,

- constaté l'appel interjeté, le 18 mai 2018, du jugement du 26 janvier 2018, auprès de la Cour d'appel de Douai qui aura à se prononcer sur cette même affaire,

- dit qu'il n'y a pas lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile pour aucune des parties,

- laissé aux demandeurs les entiers dépens de l'instance.

Par déclaration en date du 25 mars 2019, M [U] [Y], MM. [S], [C], [P], [II] [K], [N] [IK] ès qualités de représentant légal d'[UJ] [IK], Mmes [O] [IK], [UK] [IK], M.[IP] [IK], MM. [L], [E], [D] [CS], Mme [J] [CS], Mme [IN] [CS] épouse [Y], Mme [I] [CS] épouse [A], Mme [R] [CU] épouse [CS], Mme [UL] [CS] épouse [IK] ès qualités de représentante légale de [UJ] [IK], MM [T], [Z], [V], [CV], [IL], [UO], [UI], [UP] [CS], Mme [IF] [CS], M. [IM] [CS], la SAS Saint Éloi ont interjeté appel de la décision, l'objet de l'appel 'tendant à l'infirmation et/ou à l'annulation de la décision entreprise en ce qu'elle a rejeté la demande de rectification d'omission de statuer de la SAS SAINT Eloi et les 27 autres demandeurs; dit n'y avoir lieu à modifier le jugement du 26 Janvier 2018; rejeté toutes les autres demandes, fins et conclusions des demandeurs; laisse aux demandeurs les entiers dépens de l'instance'.

Cet appel a été enregistré sous le RG n°19/01810.

Madame [UD] [CS] est décédée le [Date décès 1] 2019, laissant en qualité d'héritiers 6 enfants, dont [B] [CS] épouse [IJ] et [IO] [CS]. La régularisation de la procédure à l'encontre de ses héritiers a été effectuée.

Par ordonnance en date 26 novembre 2020, rectifiée en raison d'une erreur dans le n° de RG reporté pour la jonction, le conseiller de la mise en état a :

- ordonné la jonction des procédures enregistrées sous les n° RG 18-2870 et RG 19-1810 sous le n° RG 18-2870 ;

- déclaré irrecevable comme tardive l'exception de sursis à statuer présentée par la société Saint Éloi, Mme [IN] [CS] épouse [Y], MM. [IM], [Z], [V], [UO] [CS], Mme [I] [CS] épouse [A], Mme [R] [CS] épouse [CU], M [CV] [CS], Mme [J] [CS], MM. [D], [UI], [UP], [T], [E], [L] [CS], Mme [IF] [CS], Mme [IE] [CS] épouse [K], MM. [C], [II], [S], [P] [K], M. [IL] [CS], Mmes [O], [UK] [IK], M.[IP] [IK], M. [N] [IK] et Mme [UL] [CS] épouse [IK], ès qualités de représentants légaux de leur fils mineur [UJ] [IK], M. [U] [Y] ;

- constaté que les parties ont rempli les exigences procédurales et que le dossier est en l'état d'être fixé,

- fixé le dossier à l'audience collégiale de plaidoirie du 27 mai 2021 ;

- dit que l'ordonnance de clôture sera rendue le 25 mars 2021 ;

- condamné in solidum la société Saint Eloi, Mme [IN] [CS] épouse [Y], MM. [IM], [Z], [V], [UO] [CS], Mme [I] [CS] épouse [A], Mme [R] [CS] épouse [CU], M. [CV] [CS], Mme [J] [CS], MM. [D], [UI], [UP], [T], [E], [L] [CS], Mme [IF] [CS], Mme [IE] [CS] épouse [K], MM. [C], [II], [S], [P] [K], M. [IL] [CS], Mmes [O], [UK] [IK], M.[IP] [IK], M. [N] [IK] et Mme [UL] [CS] épouse [IK], ès qualités de représentants légaux de leur fils mineur [UJ] [IK], M. [U] [Y], à payer à la société [CS] Frères, prise en son nom personnel et venant aux droits des sociétés Sager, Gercap, Les Aulnes et Saphir, la somme globale de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum la société Saint Eloi, Mme [IN] [CS] épouse [Y], MM. [IM], [Z], [V], [UO] [CS], Mme [I] [CS] épouse [A], Mme [R] [CS] épouse [CU], M [CV] [CS], Mme [J] [CS], MM. [D], [UI], [UP], [T], [E], [L] [CS], Mme [IF] [CS], Mme [IE] [CS] épouse [K], MM. [C], [II], [S], [P] [K], M. [IL] [CS], Mmes [O], [UK] [IK], M.[IP] [IK], M. [N] [IK] et Mme [UL] [CS] épouse [IK], ès qualités de représentants légaux de leur fils mineur [UJ] [IK], M. [U] [Y], à payer à M. [X] [CS], ayant droit de Mme [UD] [H] épouse [CS], en sa qualité de Président du conseil d'administration de la société Sager et de cogérant de la société Gercap et par ailleurs administrateur de [CS] Frères, M. [UN] [CS] en sa qualité de directeur général et administrateur de la société Sager, en sa qualité de directeur général délégué et administrateur de la société Les Aulnes et en sa qualité de Président de [CS] Frères, M. [W] [CS], en sa qualité de Président directeur général de la société Les Aulnes, MM. [UT] et [IH] [CS], en leur qualité d'héritiers de Mme [UD] [H], la somme globale de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum la société Saint-Eloi, Mme [IN] [CS] épouse [Y], MM. [IM], [Z], [V], [UO] [CS], Mme [I] [CS] épouse [A], Mme [R] [CS] épouse [CU], M. [CV] [CS], Mme [J] [CS], MM. [D], [UI], [UP], [T], [E], [L] [CS], Mme [IF] [CS], Mme [IE] [CS] épouse [K], MM. [C], [II], [S], [P] [K], M. [IL] [CS], Mmes [O], [UK] [IK], M.[IP] [IK], M. [N] [IK] et Mme [UL] [CS] épouse [IK], ès qualités de représentants légaux de leur fils mineur [UJ] [IK], M. [U] [Y] aux entiers dépens de l'incident de jonction et de sursis à statuer.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 avril 2021.

Le dossier a été plaidé à l'audience du 27 mai 2021.

Par arrêt en date du 30 septembre 2021, la cour d'appel de Douai, chambre 2 section 2, auquel il est renvoyé pour un exposé de la cause, a statué comme suit :

« DECLARE irrecevables les développements des appelants paragraphes 3 à 8 pages 1et 2 de la note du 2 septembre 2021 et de la société SA [CS] frères pages 1 à 5 de la note du 2 septembre 2021 jusqu'au point 3 intitulé : la question posée de la régularisation ;

ANNULE le jugement du tribunal de commerce d'Arras en date du 26 janvier 2018 ;

CONSTATE l'effet dévolutif de l'appel en date du 18 mai 2018 à l'encontre du jugement du 26 janvier 2018 ;

CONSTATE que les assignations délivrées le 23 et 29 mars 2012 à « M.[X] [CS], né... demeurant'., en sa qualité de président du conseil d'administration de la société Sager et co-gérant de Gercap, et par ailleurs administrateur de [CS] frères ; Mme [UD] [H] (épouse [F] [CS]), née ' demeurant ', en sa qualité de co-gérant de Gercap ; M. [UN] [CS], né ' demeurant..., en sa qualité d'administrateur de Sager et en sa qualité de Directeur général délégué et administrateur de la société Les aulnes, et en sa qualité de Président de [CS] frères ; M. [W] [CS], né ' demeurant'., en sa qualité de Président-directeur général de la société Les aulnes », ne citent pas ces personnes à titre personnel ;

DIT que la cour n'est valablement saisie d'aucune demande à titre personnel formée contre Mme [UD] [CS], MM. [X], [UN] et [W] [CS] ;

PRONONCE la nullité pour vice de fond des assignations du 23 et 29 mars 2012 en ce qu'elles citent Mme [UD] [H] (épouse [F] [CS]), née ' demeurant ', en sa qualité de co-gérant de Gercap ; M. [W] [CS], né ' demeurant.., en sa qualité de Président-directeur général de la société Les aulnes ; M. [UN] [CS], en sa qualité d'administrateur de Sager et en sa qualité de Directeur général délégué et administrateur de la société Les aulnes ; M. [X] [CS], né'. demeurant..., en sa qualité de président du conseil d'administration de la société Sager et co-gérant de Gercap et en qualité d'administrateur de la société [CS] frères ;

CONSTATE l'absence d'effet dévolutif de l'appel à l'égard des personnes précitées ;

REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription à agir en nullité des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 de la société Sager opposée à M. [V] [CS], M. [UO] [CS], Mme [I] [CS] épouse [A], Mme [R] [CS] épouse [CU], M [CV] [CS], Mme [J] [CS], MM. [D], [UI], [UP], [T], [E], [L] [CS], Mme [IF] [CS], Mme [IE] [CS] épouse [K], MM. [C], [II], [S], [P] [K], M. [IL] [CS], Mmes [O], [UK] [IK], M.[IP] [IK], M. [N] [IK] ès qualités de représentant légal de son fils mineur [UJ] [IK], Mme [UL] [CS] épouse [IK] ès qualités de représentante légale de son fils mineur [UJ] [IK], M. [U] [Y] au titre de leur intervention accessoire :

REJETTE la fin de non-recevoir opposée à MM. [IM] et [Z] [CS] ;

REJETTE la fin de non-recevoir tenant à l'absence de mise en cause de tous les auteurs de l'abus opposée à la demande d'annulation des délibérations et résolutions de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 de la société Sager au titre de l'abus de majorité ;

REJETTE la demande d'annulation de l'assemblée générale extraordinaire de Sager du 2 décembre 2011 pour :

- violation du mandat donné par l'assemblée générale du 15 avril 2011 ;

- défaut de mandat pour signer l'avenant du 2 novembre 2011 et défaut de publicité dudit avenant ;

- défaut d'information et vice du consentement ;

- tenue d'une feuille de présence irrégulière ;

- composition irrégulière du bureau ;

- défaut de constat du quorum ;

- participation irrégulière de la société Gercap au vote ;

- défaut de majorité ;

- défaut de communication de l'avis du comité d'entreprise de la société [CS] frères ;

- au titre du cumul des irrégularités ;

REJETTE la fin de non-recevoir opposée à la demande de sursis à statuer ;

REJETTE la demande de sursis à statuer ;

REJETTE la demande de nullité pour abus de majorité des résolutions votées lors l'assemblée générale des actionnaires du 2 décembre 2011 de la société Sager ;

REJETTE la fin de non- recevoir tirée de l'absence de tous les auteurs de l'abus opposée à la demande en réparation ;

DECLARE irrecevables les demandes en réparation, à titre principal en nature et à titre subsidiaire en espèces à l'encontre de [UD] [H] épouse [CS], [UN] [CS], [X] [CS], et [W] [CS] ;

DECLARE prescrite la demande en réparation à titre principal en nature et à titre subsidiaire en espèce à l'encontre de la société [CS] frères, venant aux droits des sociétés Sager, Gercap, Les Aulnes et Saphir ;

CONSTATE l'irrégularité entachant l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères du 2 décembre 2011 pour absence de communication de l'avis du comité d'entreprise extraordinaire de la société [CS] à l'assemblée ;

ACCORDE un délai pour porter remède à cette irrégularité et DIT en conséquence qu'il sera organisé par les organes de la société [CS] frères, dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt par la partie la plus diligente, une nouvelle assemblée générale extraordinaire, à laquelle sera convoquée l'intégralité des actionnaires actuels de la société, avec pour ordre du jour le vote, au vu de l'avis du comité central d'entreprise du 21 octobre 2011, sur les résolutions telles que soumises à l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 ;

DIT que l'affaire sera à nouveau évoquée à l'audience du Jeudi 30 juin 2022 à 13h30 en collégialité, avec réouverture des débats sur ce seul point, au vu des diligences qui auront éventuellement été effectuées, se prononcer sur la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères du 2 décembre 2011 ;

CONSTATE que l'appel du jugement du 6 février 2019 n'est pas soutenu ;

CONFIRME en conséquence le jugement du 6 février 2019 en toutes ses dispositions ;

RESERVE les dépens et accessoires ».

Par avis du 5 mai 2022, le greffe a avisé les parties que l'ordonnance de clôture sur les points objets de la réouverture interviendrait le 21 juin 2022 à 15 h.

L'ordonnance de clôture est intervenue à cette date. Elle a été notifiée par le greffe à 17h48.

À l'audience du 30 juin 2022, le dossier a été mis en délibéré, lequel a été avancé au 6 octobre 2022, après avis délivré par le greffe aux parties.

Par arrêt du 6 octobre 2022, la cour d'appel de Douai a :

Vu l'arrêt du 30 septembre 2021,

- ordonné la réouverture des débats, avec révocation de l'ordonnance de clôture initialement intervenue le 8 avril 2021, à l'audience du jeudi 15 décembre 2022 à 14 h en collégialité pour recueillir les observations des parties sur le caractère nul et non avenu de l'ordonnance de clôture rendue le 21 juin 2022 et pour trancher la question posée par l'arrêt de réouverture des débats du 30 septembre 2021 ;

- dit que la clôture interviendra le 1er décembre 2022 à 15h ;

- dit que l'affaire sera à nouveau évoquée à l'audience du jeudi 15 décembre 2022 à 13 heures 30 en collégialité ;

- réservé les dépens et accessoires.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er décembre 2022.

MOYENS ET PRÉTENTIONS :

Par conclusions récapitulatives remises au greffe et notifiées entre parties par voie électronique le 30 novembre 2022, la société Saint Éloi, Mme [IN] [CS] épouse [Y], MM. [IM], [Z], [V], [UO] [CS], Mme [I] [CS] épouse [A], Mme [R] [CS] épouse [CU], M. [CV] [CS], Mme [J] [CS] épouse [US], MM. [D], [UI], [UP], [T], [E], [L] [CS], Mme [IF] [CS], Mme [IE] [CS] épouse [K], MM. [C], [II], [S], [P] [K], M. [IL] [CS], Mmes [O], [UK] [IK], M.[IP] [IK], M. [N] [IK] ès qualités de représentant légal de son fils mineur [UJ] [IK], Mme [UL] [CS] épouse [IK] ès qualités de représentante légale de son fils mineur [UJ] [IK], M. [U] [Y], demandent à la cour, au visa des arrêts du 30 septembre 2021 et du 6 octobre 2022, de l'article 444 du code de procédure civile, de l'article 564 du code de procédure civile, de l'article L235-11 du code de commerce, de l'article L 235-8 du code de commerce, des articles L 235-1 et L 235-2-1 du code de commerce, des statuts de la société [CS] frères mis à jour au 17.03.2010, des délibérations de l'AGE du 03.12.2021 adoptées en application de l'arrêt du 30.09.2021:

- sur la réouverture des débats et statuant à nouveau :

- juger les conclusions d'intimé du 3 novembre 2022 de [CS] frères en leurs prétentions nouvelles, sans lien avec les diligences effectuées et donc l'évolution du litige, irrecevables ;

- débouter [CS] frères de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Au principal,

- prononcer l'annulation de l'ordonnance de clôture du 21 juin 2022 et à tout le moins sa révocation ;

- dire et juger au vu des diligences effectuées que : - par assemblée générale extraordinaire en date du 3 décembre 2021, la société [CS] frères a remédié à l'irrégularité retenue par la cour en son arrêt du 30 septembre 2021 affectant le vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale extraordinaire du 02.12.2011 de la société [CS] frères ;

- par vote souverain l'assemblée générale extraordinaire de [CS] frères a valablement rejeté les résolutions 1, 3 et 7 à savoir notamment le « projet de fusion entre les sociétés [CS] frères, Sager, Sogep et Sofip au moyen de l'absorption des sociétés Sager, Sogep et Sofip par la société, et de son avenant en date à [Localité 66] du 2 novembre 2011 » et les projet de statuts et de règlement intérieur ; et qu'en conséquence, ayant épuisé, les causes de l'arrêt du 30.09.2021, la société [CS] frères ne pouvait valablement procéder à une deuxième délibération en date du 8 avril 2022 ayant le même objet.

En conséquence :

- dire et juger que l'AGE du 3 décembre 2021 se substitue à cette date à l'AGE irrégulière du 2 décembre 2011, et/ou annule et remplace l'AGE irrégulière du 2 décembre 2011 ;

- écarter, et dire et juger sans effets le vote des résolutions 1 à 8 adoptées lors de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 en application de l'arrêt du 30 septembre 2021 ;

- débouter la société [CS] frères de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- condamner la société [CS] frères à procéder à ses frais, à l'exécution des délibérations régulièrement adoptées par l'AGE du 3 décembre 2021, et notamment à procéder à la ré-immatriculation de la société Sager avec les mêmes statuts, les mêmes actionnaires ' ou leurs ayants-droit ou leurs ayants-cause en cas de mutation intervenue entre le 2 décembre 2011 et la date de ré-immatriculation ' et les mêmes dirigeants- ou ayants droit- que ceux en fonction au moment de la réalisation au greffe du tribunal de commerce des formalités liées à la dissolution de cette société, sous peine d'astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification de la décision à intervenir ;

- débouter la société [CS] frères de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire,

- prononcer la nullité du vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2021

- à titre infiniment subsidiaire :

- prononcer un sursis à statuer dans l'attente de la décision judiciaire définitive à intervenir sur la validité de la partie extraordinaire de l'assemblée générale de la société [CS] frères tenue le 8 avril 2022 ;

En toutes hypothèses,

-condamner la société [CS] frères à payer à chacun des appelants la somme de 75 000 € au titre de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers frais et dépens.

Les appelants reviennent :

- sur les faits, précisant notamment que le jugement correctionnel sur les faits de complicité de délit d'achat de voix des actionnaires de la société civile Gercap, à l'encontre de M. [X] [CS], qui a fait l'objet d'une relaxe, a été frappé d'appel par le parquet et les parties civiles ;

- sur le fait qu'en application de la décision de la cour d'appel, avant toute signification de l'arrêt du 30 septembre 2021, la société [CS] frères a convoqué l'ensemble des actionnaires à une assemblée générale du 3 décembre 2021, qui a rejeté les résolutions 1,3 et 7 ( rejet de la fusions-absorption des sociétés Sager, Sogep et Sofip par [CS] frères, refonte des statuts et adoption d'un règlement intérieur) ;

- sur le fait que la société [CS] frères a rejeté dans un premier temps toute discussion et tout dialogue pour envisager la nouvelle gouvernance de la société et avait indiqué attendre la décision de la cour ;

- sur le fait que malgré l'arrêt qui prévoyait uniquement la convocation d'« une nouvelle assemblée générale extraordinaire », la société [CS] frères a pris l'initiative de convoquer à nouveau ses actionnaires pour leur soumettre les mêmes délibérations que celles rejetées par l'assemblée générale du 3 décembre 2021 ;

- sur l'ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Lille Métropole qui a rejeté la demande d'ajournement de la partie extraordinaire de l'assemblée générale mixte convoquée pour le 8 avril 2022, estimant que la cour d'appel s'était exclusivement réservée la compétence des suites de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 ;

- sur le fait que le 8 avril 2022, l'assemblée générale mixte a cette fois approuvé les 8 résolutions précédemment rejetées à l'assemblée générale extraordinaire du 3 décembre 2021 et sur le fait que le président de la société [CS] frères a refusé de convoquer une nouvelle assemblée extraordinaire.

Les appelants soulignent que la société [CS] frères tente d'obtenir la réformation par la cour de son propre arrêt du 30 septembre 2021 et que la seconde réouverture des débats est strictement délimitée, d'une part, par la question de la nullité de l'ordonnance de clôture du 21 juin 2022, qu'au demeurant aucune partie n'avait soulevée, d'autre part, par celle posée par l'arrêt du 30 septembre 2022, à savoir les diligences effectuées.

Ils estiment que, par son arrêt du 30 septembre 2021, la cour a déjà jugé de la recevabilité du bien-fondé des demandes de nullité des assemblées générales extraordinaires des sociétés Sager et [CS] frères du 2 décembre 2011, présentées par leurs soins. Les débats sur ces points sont clos et tranchés. La société [CS] frères, en application de l'article 444 du code de procédure civile, est irrecevable à soutenir des prétentions nouvelles sans lien avec les diligences qui auront éventuellement été effectuées, telles que la prescription de l'action, ou encore le caractère facultatif de la cause de nullité ou l'absence de grief.

Les nouvelles demandes se heurtent à l'autorité de la chose jugée, qui s'entend de ce qui est implicitement compris dans le dispositif, l'arrêt du 30 septembre 2021 ayant statué sur les fins de non-recevoir, puis constaté l'irrégularité. Ces demandes se heurtent également au principe de concentration des moyens, la société [CS] frères s'étant abstenue de présenter avant l'arrêt du 30 septembre 2021 son moyen tiré de la prescription préexistant à l'arrêt du 30 septembre 2021, de sorte qu'elle ne peut y revenir postérieurement à l'arrêt.

Les appelants concluent qu'en procédant avant tout pourvoi et toute signification, laquelle n'est intervenue que le 24 janvier 2022, à une convocation des actionnaires en exécution de l'invitation faite par la cour à procéder à un nouveau vote, la société [CS] frères a nécessairement acquiescé à la décision du 30 septembre 2021.

Ils en déduisent que la société [CS] frères est donc sur ce moyen également irrecevable à soutenir des prétentions nouvelles sans lien avec « les diligences qui auront éventuellement été effectuées », telles la prescription de l'action. Il en est de même pour les moyens tirés du caractère facultatif de la cause de nullité ou de l'absence de grief.

Ils soulignent ne pas avoir de cause d'opposition à l'annulation de l'ordonnance de clôture du 21 juin 2022 et à tout le moins sa révocation au 1er décembre 2022.

Ils plaident que remède a été porté à l'irrégularité affectant l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] Frères du 2 décembre 2011 par l'assemblée générale de la société [CS] Frères du 3 décembre 2021, de sorte que ce vote s'est substitué à l'assemblée générale du 2 décembre 2011, et qu'en conséquence les causes de l'arrêt du 30 septembre 2021 étant épuisées, la société [CS] frères n'était pas autorisée à provoquer une nouvelle assemblée générale mixte le 8 avril 2022.

Les appelants font valoir que :

- la régularisation de la cause de nullité par un nouveau vote de l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires est strictement encadrée par l'autorisation exceptionnelle accordée par le juge saisi ;

- le titre autorisant une nouvelle assemblée résulte de manière stricte du dispositif de l'arrêt, lequel avait d'ailleurs été remis aux actionnaires dans leur convocation ;

- le vote du 3 décembre 2021, adopté par les actionnaires, connaissance prise de l'avis du comité d'entreprise, en application de l'arrêt exécutoire, constitue le seul vote autorisé par la cour dans son arrêt du 30 septembre 2021 ;

- les actionnaires ont régulièrement rejeté le 3 décembre 2021 les opérations de fusions/absorptions, ainsi que les statuts et le règlement intérieur irrégulièrement adoptés le 2 décembre 2011 ;

- le vote du 3 décembre 2021, adopté connaissance prise de l'avis du comité d'entreprise, est régulier (ce qui n'est d'ailleurs pas contesté), de sorte que ce vote souverain de rejet des fusions a porté remède à l'irrégularité du vote du 02 décembre 2011.

Les appelants précisent en outre que :

- il y a désormais urgence à ce que plus d'une année après une adoption régulière, l'assemblée générale du 3 décembre 2021 produise ses effets et soit exécutée par la société [CS] frères ;

- le second vote organisé sur le même ordre du jour le 8 avril 2022, et toujours en application de l'arrêt du 30 septembre 2021, par la direction de la société [CS] frères ne peut donc constituer un nouveau vote de régularisation. Il constitue un vote illicite et nul.

Ils ajoutent que :

- la régularité du vote de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022, mis en avant par la société [CS] frères, relève de la seule compétence de la cour, qui s'est réservée le pouvoir de décision sur les instances ayant trait à l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 ;

- le titre exécutoire qui a servi de fondement à l'assemblée générale du 8 avril 2022 limitait expressément la possibilité d'une nouvelle votation sur les fusions-absorptions adoptées lors de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 à l'accomplissement d'une seule et unique formalité, à savoir une nouvelle assemblée générale extraordinaire ;

- cette deuxième assemblée, qui n'a pas été autorisée par décision de justice, s'avère en conséquence manifestement illicite ;

- le processus de régularisation envisagé par la cour vise à obtenir un vote souverain, et non un vote conforme à la décision du 2 décembre 2011, comme le fait plaider la société [CS] frères.

Les appelants déplorent un défaut d'information sincère et véritable des actionnaires, avec la recherche, coûte que coûte, d'un vote conforme, notamment en faisant croire que le vote du 3 décembre 2021 n'a pas régularisé la cause de nullité retenue par la cour.

Ils soulignent que :

- la cour, dont la motivation n'a pas été diffusée aux actionnaires votant le 8 avril 2022, précise à l'opposé de la convocation pour l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022, qu'il ne s'agit non pas d'un vote de « régularisation de la précédente assemblée générale du 2 décembre 2011 », mais bien d'un vote « souverain » en faveur ou non des fusions-absorptions présentées lors de l'assemblée générale du 2 décembre 2011 ;

- la communication à l'égard des actionnaires pour l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 était tronquée de sorte qu'elle a trompé le consentement de chacun des actionnaires à la fois sur la portée de leur vote et sur la liberté de celui-ci qui ne se limitait pas à régulariser le vote de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 ;

- sous couvert de l'arrêt de la cour, la société [CS] frères estimait qu'elle pouvait convoquer, autant de fois qu'il lui plaisait, les actionnaires pour obtenir d'eux le vote conforme aux résolutions 1 à 8 de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 ;

- ces agissements de la société [CS] frères et les affirmations de la direction contraires à la motivation de la décision du 30 septembre 2021 constituent des man'uvres dolosives qui ont eu pour objet de tromper les actionnaires, constituant un vice du consentement qui entre dans les prévisions de l'article L 235-1 alinéa 2 du code de commerce, de sorte que les résolutions 1 à 8 adoptées lors de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 doivent être déclarées nulles.

Les appelants se plaignent du dénigrement des actionnaires plaignants alors même que la société [CS] frères, qui mentionne une tromperie de la part des actionnaires minoritaires pour obtenir un vote de rejet, n'a pas agi en nullité des décisions de l'assemblée générale adoptées le 3 décembre 2021 dans les délais prévus par l'article L 235-7 du code de commerce. Ils reviennent sur la communication de M. [G] [CS], trompant les actionnaires sur la probité et l'objectif sociétal poursuivi.

Ils plaident que ces deux motifs tirés de la communication et de la présentation du vote de manière tronquée, parcellaire et partiale, sont à eux seuls et de façon indépendante de nature à amener la cour à prononcer la nullité des délibérations votées lors de l'assemblée générale mixte, non autorisée, du 8 avril 2022.

Ils indiquent qu'en procédant à une nouvelle votation, la société [CS] frères a porté atteinte aux droits acquis par le nouvel actionnariat qui devait être consécutivement mis en place en application du vote de l'assemblée générale du 3 décembre 2021.

La société [CS] frères a ainsi tenté par cette man'uvre d'échapper à la jurisprudence constante en la matière qui interdit à une assemblée générale d'annuler une décision prise par une assemblée précédente dès lors que la décision en cause a reçu soit publicité soit commencement d'exécution ou que son annulation porte atteinte à des droits acquis par les actionnaires, ce qui justifie l'annulation en outre du vote des résolutions 1 à 8 de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022.

Les appelants exposent que :

- en provoquant une nouvelle assemblée générale mixte le 8 avril 2022, la société [CS] frères, qui ne pouvait ignorer que ses statuts et son règlement intérieur en application desquels elle convoquait et organisait cette assemblée générale mixte avaient été rejetés avec effet immédiat, a pris le risque de l'adoption d'une nouvelle décision contraire à la précédente, alors même que l'actionnariat et les droits de vote avaient été modifiés en conséquence de l'assemblée générale du 3 décembre 2021 ;

- la résolution n° 7 de l'assemblée du 3 décembre 2021 tenant aux statuts était d'application immédiate et l'actionnariat et les droits de vote ont été modifiés à la suite de l'assemblée générale du 3 décembre 2021 ;

- faute d'avoir adopté les statuts de 2011 le 3 décembre 2021, les statuts régissant les votes de l'assemblée générale de la société [CS] frères étaient ceux applicables avant le 2 décembre 2011, lesquels prévoyaient que c'est le nu-propriétaire qui vote en assemblée générale extraordinaire ;

- de facto, le vote du 8 avril 2022 est irrégulier, pour avoir été adopté par des usufruitiers qui n'avaient pas de droit de vote selon les statuts applicables, ce vote par les usufruitiers en assemblée générale extraordinaire apparaissant de surcroît contraire à la dernière position de la Cour de cassation qui dénie la qualité d'associé aux usufruitiers, ou encore au nouveau texte de l'article 1844 du code civil.

À titre infiniment subsidiaire, les appelants sollicitent un sursis à statuer dans l'hypothèse où la cour considérerait que la loi ne lui attribue pas le pouvoir d'écarter les effets d'une assemblée générale d'actionnaire et qu'elle ne peut davantage en prononcer la nullité en premier ressort, puisque certains des appelants ont assigné, dans le délai de 6 mois, la société [CS] frères devant le tribunal de commerce en annulation de la partie extraordinaire de l'assemblée générale tenue le 8 avril 2022.

Ils ajoutent que si la cour estimait n'avoir pas compétence pour écarter les effets de ladite assemblée ni en prononcer la nullité, mais souhaitait motiver son arrêt à intervenir par référence à l'assemblée en question, elle devrait prononcer un sursis à statuer dans l'attente d'une décision définitive à intervenir sur la validité de ladite assemblée.

Par conclusions récapitulatives n°3 notifiées entre parties par voie électronique, et envoyées au greffe le 1er décembre 2022, réceptionnées le lendemain suite à la panne générale affectant le serveur de la cour d'appel, la SA [CS] frères demande à la cour, au visa des articles L. 225-105, L. 225-121, L. 235-8 et L. 235-9 du code de commerce, des articles 122 et 700 du code de procédure civile, des arrêts de la cour d'appel de Douai du 30 septembre 2021 et du 6 octobre 2022, de la régularisation de l'assemblée extraordinaire de la société [CS] Frères du 2 décembre 2011 par l'assemblée extraordinaire de la société [CS] Frères du 8 avril 2022, de :

- Vu l'arrêt rendu par la Cour d'appel du 6 octobre 2022 qui a énoncé très exactement :

ORDONNE la réouverture des débats, avec révocation de l'ordonnance de clôture initialement intervenue le 8 avril 2021, à l'audience du jeudi 15 décembre2022 à 14 h en collégialité pour recueillir les observations des parties sur le caractère nul et non avenu de l'ordonnance de clôture rendue le 21 juin 2022 et pour trancher la question posée par l'arrêt de réouverture des débats du 30 septembre 2021 ;

- Sur le caractère nul et non avenu de l'ordonnance de clôture du 21 juin 2022

- juger que l'ordonnance de clôture rendue le 21 juin 2022 est nulle et non avenue, et à défaut la révoquer au 1er décembre 2022.

- Sur la question posée par l'arrêt du 30 septembre 2021 qui

CONSTATE l'irrégularité entachant l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères du 2 décembre 2011 pour absence de communication de l'avis du comité d'entreprise extraordinaire de la société [CS] à l'assemblée ;

ACCORDE un délai pour porter remède à cette irrégularité et DIT en conséquence qu'il sera organisé par les organes de la société [CS] frères, dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt par la partie la plus diligente, une nouvelle assemblée générale extraordinaire, à laquelle sera convoquée l'intégralité des actionnaires actuels de la société, avec pour ordre du jour le vote, au vu de l'avis du comité central d'entreprise du 21 octobre 2011, sur les résolutions telles que soumises à l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 ;

DIT que l'affaire sera à nouveau évoquée à l'audience du Jeudi 30 juin 2022 à 13h30 en collégialité, avec réouverture des débats sur ce seul point, au vu des diligences qui auront éventuellement été effectuées, se prononcer sur la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères du 2 décembre 2011 ;

- Vu la révocation de l'ordonnance de clôture intervenue le 8 avril 2021

- déclarer [CS] Frères recevable en ses demandes de voir juger irrecevable et à défaut mal fondée la demande d'annulation de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] Frères du 2 décembre 2011 dont la Cour est saisie ;

- A titre principal,

- déclarer irrecevable comme prescrite la demande de prononcé de la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] Frères du 2 décembre 2011 ;

- Subsidiairement,

- déclarer irrecevable la demande de prononcé de la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] Frères du 2 décembre 2011, dès lors que cette assemblée a été régularisée par l'assemblée générale de la société [CS] Frères du 8 avril 2022 ;

- Très subsidiairement,

- rejeter comme infondée la demande de prononcé de la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] Frères du 2 décembre 2011, dès lors qu'il s'agit d'une nullité facultative dont le prononcé serait disproportionné au regard de l'irrégularité constatée ;

- A titre plus subsidiaire encore,

- rejeter comme infondée la demande de prononcé de la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] Frères du 2 décembre 2011, dès lors que même à supposer cette nullité obligatoire, elle ne peut être prononcée en l'espèce faute de grief causé par l'irrégularité.

- En tout état de cause,

- déclarer irrecevable comme prescrite la demande de renvoyer les parties pour leur permettre de fixer leur préjudice ;

- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions adverses y compris la demande de sursis à statuer ;

- condamner in solidum les appelants à verser à la société [CS] Frères la somme de 200 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La société [CS] frères soutient que :

- les plaignants ont provoqué l'échec de la première tentative de régularisation, instrumentalisant le procès pénal pour achat de voix ;

- lors de l'assemblée générale extraordinaire de 2021, certaines résolutions nécessaires à la régularisation ont été rejetées à quelques voix près, rejet qui a été instrumentalisé pour obtenir divers avantages dans le cadre d'une transaction ;

- malgré les décisions de la cour d'appel et du tribunal correctionnel qui ont confirmé la validité du vote sur les fusions, les plaignants ont instrumentalisé une irrégularité purement formelle et dépourvue de conséquences dans le but unique et affiché d'obtenir des avantages personnels.

Elle revient sur les risques liés à une éventuelle annulation des fusions, dont le régime juridique n'est pour l'essentiel pas défini, d'autant qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'une simple opération de fusion, mais d'une série de fusions indivisibles.

La société [CS] frères estime que :

- la cour n'a pas statué sur ses demandes et aucune autorité de la chose jugée par l'arrêt du 30 septembre 2021 ne peut lui être opposée, la thèse du dispositif virtuel ou implicite étant désormais condamnée par la jurisprudence majoritaire ; .

- la cour renvoie dans son dispositif « pour se prononcer sur la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères du 2 décembre 2011 » ;

- elle n'a pas pu se défendre sur cette demande de nullité avant l'arrêt du 30 septembre 2021, en ce que cela ne ressortait pas clairement de la formulation imprécise et défectueuse des appelants ;

- le principe de concentration des moyens est parfaitement inopérant dès lors qu'il ne s'applique qu'en présence d'une décision ayant autorité de la chose jugée sur la question en cause, ce qui n'est pas le cas, l'arrêt du 30 septembre 2021 n'ayant pas tranché la question de la nullité de l'assemblée générale de 2011 qui reste dans les débats.

Elle conteste avoir acquiescé à l'arrêt du 30 septembre 2021, lequel était exécutoire de droit ce qui exclut que son exécution puisse valoir acquiescement, étant précisé que dans sa communication elle avait réservé un éventuel pourvoi.

Elle estime que la cour reste saisie de toute demande se rattachant à la question de la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de 2011, la cour n'ayant pas limité les débats aux diligences accomplies mais afin de pouvoir au vu des diligences se prononcer sur la nullité. La question de la nullité non encontre tranchée demeure dans les débats. Ces demandes sont recevables du fait de la réouverture des débats sur la question de la nullité de l'assemblée générale de 2011 et de la révocation de l'ordonnance de clôture du 8 avril 2021.

Elle plaide que l'action en nullité de l'assemblée générale de 2011 est irrecevable comme prescrite, cette demande, à supposer qu'elle ait existé, ayant été formée par les appelants plus de 6 ans après les fusions, en tout état de cause plus de 3 ans après l'assemblée générale extraordinaire de 2011. La cour n'a nullement rejeté cette fin de non-recevoir.

Elle précise que l'assemblée générale mixte de 2022 a régularisé à une large majorité l'assemblée générale extraordinaire de 2011, ce qui rend irrecevable la demande de nullité ou à tout le moins infondée. En cas de régularisation, le vice à l'origine du droit de critique ayant disparu, celui-ci perd sa raison d'être.

La société [CS] frères ajoute sur le fond que :

- dans sa rédaction actuelle, le dernier alinéa de l'article L 225-121 du code de commerce érige l'absence de transmission de l'avis du CCE, prévue par l'article L 225-105 de ce code, en cause de nullité facultative, et non obligatoire ;

- en vertu du principe d'application immédiate de la loi nouvelle, la jurisprudence et la doctrine sont constantes pour affirmer que les pouvoirs du juge s'apprécient à la date où il statue et qu'une nouvelle loi de fond est d'application immédiate sauf lorsque cette application immédiate provoquerait une remise en cause des conditions d'acquisition des droits nés avant l'entrée en vigueur de la loi ;

- il n'existe pas de droit acquis à la nullité d'une délibération sociale avant la décision d'annulation et l'application immédiate de la loi nouvelle, qui rend facultative la nullité d'une décision sociale prise en violation de l'article L 225-10 du code de commerce, n'est pas susceptible de remettre en cause un droit acquis et n'a donc pas d'effet rétroactif ;

- en application de l'article L 225-121 du code de commerce dans sa rédaction actuelle, la cour aurait le pouvoir de ne pas annuler l'assemblée générale extraordinaire de 2011, le caractère disproportionné d'une telle annulation et les man'uvres par lesquelles les plaignants ont tenté de l'instrumentaliser à leur profit faisant obstacle au prononcé de la nullité.

La société [CS] frères plaide en outre que, sur le fondement du principe « pas de nullité sans grief », la jurisprudence, approuvée par la doctrine, a pu refuser de prononcer une nullité pourtant obligatoire lorsque le vice purement formel invoqué n'avait pas causé de grief.

La non-communication du rapport d'une page du CCE lors de l'assemblée générale extraordinaire de 2011, ne contenant aucune information que les associés n'avaient pas, n'a pu causer aucun grief, ce qui fait obstacle au prononcé de la nullité.

La société [CS] frères soutient que l'assemblée générale du 3 décembre 2021 n'a produit aucun effet et que l'assemblée générale du 8 avril 2022 est régulière aux motifs que :

- le mécanisme de la régularisation permet selon la doctrine de consolider un acte irrégulier et nécessite la réitération de la décision initiale, afin de permettre la réfection avec effet rétroactif en validant la délibération antérieure ;

- l'arrêt du 30 septembre 2021 l'a invitée à organiser une régularisation de l'assemblée générale extraordinaire de 2011, cette invitation résultant sans ambiguïté de ses motifs qui mentionnent « un processus de régularisation » et se fondent sur les dispositions de l'article L 235-8 du code de commerce comme de son dispositif qui a « accord[é] un délai pour porter remède à [l'irrégularité constatée] » ;

- l'interprétation de l'arrêt de la cour du 30 septembre 2021, selon laquelle le vote de l'assemblée générale du 3 décembre 2021 se « substitue » à celui de l'assemblée générale du 2011, est erronée, cette interprétation étant incompatible avec la notion de régularisation, avec les termes de l'arrêt du 30 septembre 2021, mais également avec les termes de la propre note en délibéré du 2 septembre 2021 des appelants ;

- le rejet d'une proposition de régularisation ne peut valoir régularisation et entraîner de manière rétroactive un rejet de fusion, la nullité ne pouvant résulter en droit des sociétés que d'une décision judiciaire ;

- l'interprétation extensive sur la portée de l'arrêt du 30 septembre 2021, en plus d'être contraire aux principes régissant la nullité et la régularisation en droit des sociétés, ouvrirait la porte à une remise en cause incontrôlable des droits acquis et, plus généralement, de la sécurité juridique que le droit des sociétés cherche pourtant à promouvoir.

La société [CS] frères estime que

- l'échec de la régularisation lors de l'assemblée générale du 3 décembre 2021 proposée aux actionnaires n'a produit aucun effet, n'interdisait pas une nouvelle tentative, n'a créé aucun droit acquis, et n'a pas modifié les statuts de [CS] Frères ;

- l'assemblée générale du 3 décembre 2021 n'a donc statué que sur la régularisation de l'assemblée générale de 2011, toute autre décision ayant été extérieure à l'ordre du jour et par conséquent nulle en application de l'article L 225-105 du code de commerce, notamment les décisions prises par l'assemblée générale de 2011, qui n'avaient rien à voir avec une régularisation et ne figuraient pas à l'ordre du jour ;

- la seule conséquence du rejet par les actionnaires des résolutions 1,3 et 7 est que la régularisation n'est pas intervenue lors de l'assemblée générale de 2021, les actionnaires n'y ayant pris aucune autre décision et n'en ayant retiré aucun droit, ce qui n'a entraîné qu'un statu quo ante ;

- comme pour toute régularisation, celle proposée aux actionnaires lors de l'assemblée générale du 3 décembre 2021, avant signification de l'arrêt, ne nécessitait aucune injonction judiciaire, pouvait à tout moment être réalisée spontanément et pouvait être tentée à nouveau par la suite, aucun texte ni aucune jurisprudence ne l'interdisant ;

- quant à l'arrêt de la Cour du 30 septembre 2021, il ne vise « une nouvelle assemblée générale extraordinaire » que pour indiquer l'organe devant être réuni (seule une assemblée générale extraordinaire pouvant remédier à l'irrégularité) et non pour limiter le nombre de ses réunions ;

- l'assemblée générale du 3 décembre 2021 n'a produit aucun effet juridique et en particulier n' a conféré aucun droit aux actionnaires de la société [CS] Frères, n'ayant pour objet que la régularisation qui a échoué ;

- l'assemblée générale du 3 décembre 2021 n'avait pour ordre du jour ni la modification des statuts ni leur révocation, ce qui lui interdisait de prendre de telles décisions, la majorité des deux-tiers nécessaire à la modification des statuts n'ayant pas en tout état de cause été atteinte et encore moins l'unanimité nécessaire à la révocation rétroactive de statuts ayant procuré des droits aux actionnaires ;

- contrairement à ce qu'affirment les appelants, ni l'article 1844 du code civil, qui n'est pas applicable aux sociétés anonymes, ni l'arrêt de la Cour de cassation du 16 février 2022 ne s'opposent à ce que les statuts d'une société par actions prévoient que le droit de vote soit détenu par les seuls usufruitiers, ce qui induit que ni les statuts en vigueur de la société [CS] Frères ni le vote lors de l'assemblée générale du 8 avril 2022 ne peuvent être critiqués de ce fait.

La société [CS] frères souligne que ses actionnaires ont été parfaitement informés sur la portée et le contexte de leur vote. Elle estime qu'une action en nullité de l'assemblée générale du 3 décembre 2021 aurait été vaine puisque celle-ci n'a produit aucun effet et que les plaignants sont de mauvaise foi lorsqu'ils affirment qu'aucune demande de contrepartie n'a jamais été formulée. Le comportement des appelants lors de l'assemblée générale du 3 décembre 2021 s'apparente à un véritable abus de minorité.

À toutes fins utiles, sur la demande subsidiaire des intervenants de « renvoyer les parties pour leur permettre de fixer leur préjudice », elle rappelle que la cour a jugé, dans son arrêt du 30 septembre 2021, que « la demande en réparation à titre principal en nature et à titre subsidiaire en espèce à l'encontre de la société [CS] frères, venant aux droits des sociétés Sager, Gercap, Les Aulnes et Saphir » était prescrite pour avoir été formée tardivement le 27 juin 2017. De toute évidence, cette demande des intervenants, apparue pour la première fois dans leurs conclusions du 21 juin 2022, est également irrecevable comme prescrite.

Par conclusions récapitulatives notifiées par RPVA et remises au greffe le 24 novembre 2022, Mme [B] [CS] épouse [IJ] et M. [IO] [CS], appelés en intervention forcée, demandent à la cour, au visa de l'article L 235-8 du code de commerce, de :

« S'en rapporter à justice sur la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 21 juin 2022

Au fond,

- Constater la nullité de ladite assemblée générale du 2 décembre 2011 et ordonner la remise en état .

- Dire que seuls les statuts applicables à la SA [CS] sont ceux appliqués antérieurement au 2 décembre 2011 ;

- A titre subsidiaire et au regard du préjudice engendré par l'application de la fusion, et renvoyer les parties pour leur permettre de fixer leur préjudice.

- Statuer sur les dépens comme de droit ».

Mme [B] [CS] épouse [IJ] et M. [IO] [CS] font valoir que :

- la cour n'a autorisé qu'une nouvelle assemblée générale, et non autant de nouvelles assemblées générales que nécessaire jusqu'à ce qu'une solution satisfaisant la société [CS] soit adoptée ;

- le manquement rendant nul la fusion n'a pas été levé et la cour ne pourra en conséquence qu'« annuler en toutes ses dispositions l'assemblée générale du 3 décembre 2021 »[ plutôt 2 décembre 2011] ;

- aux termes des statuts adoptés lors de l'assemblée générale du 2 décembre 2011, ce sont les nu-propriétaires qui ont le droit de vote ;

- à la suite de l'assemblée du 3 décembre 2021, les statuts ont été rejetés et dès lors, lors de l'assemblée générale du 8 avril 2022 ce sont les statuts antérieurs au 2 décembre 2011 qui devaient s'appliquer et donc ce sont les usufruitiers qui devaient voter alors que ce sont les nu-propriétaires qui ont voté, invalidant d'autant plus la seconde assemblée.

Mme [B] [CS] épouse [IJ] et M. [IO] [CS] sollicitent de la cour qu'elle prenne acte du préjudice subi par l'application de cette fusion et de dire en conséquence que les statuts applicables au sein de la société [CS] seront ceux antérieurs au 02 décembre 2011 et renvoit les parties pour leur permettre de fixer leur préjudice.

MM. [W], [X], [UN] [CS], intimés et MM. [IH], [UT] et [M] [CS], agissant ès qualités d'ayants-droit de Mme [UD] [H] épouse [CS], assignée en sa qualité de cogérant de la société Gercap, intervenants volontaires, n'ont pas pris de conclusions sur réouverture des débats.

***

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er décembre 2022.

Plaidée à l'audience du 15 décembre 2022, le dossier a été mis en délibéré au 30 mars 2023.

Par note en délibéré en date du 6 janvier 2023, la cour a souhaité recueillir les observations des parties sur le caractère nouveau de la demande d'annulation de l'assemblée générale du 8 avril 2022 et de la demande de renvoi pour fixer le préjudice à raison de l'application de la fusion, présentée par les consorts [IJ]-[CS], et a soulevé, en tant que de besoin, l'irrecevabilité des demandes.

Par note en délibéré en date du 12 janvier 2013, la société [CS] frères soutient que :

- la demande des intervenants tendant à ce que l'affaire soit renvoyée pour fixer le préjudice à raison de l'application de la fusion, qui a été formée pour la première fois dans les écritures du 21 juin 2021, est doublement irrecevable, comme contrevenant aux dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile et aux dispositions des articles 564 et suivants du code de procédure civile, pour ne pas avoir été présentée en première instance et ne bénéficiant d'aucune des exceptions prévues par ces articles ;

- la demande d'annulation de l'assemblée générale de 2022 n'est pas nouvelle, puisqu'elle tend aux mêmes fins que la demande initiale, si tant est qu'elle soit formulée, à savoir l'annulation de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011, et vise à obtenir le même avantage que la demande initiale, ayant pour seul effet d'écarter le moyen de défense de la société [CS] frères tenant à l'irrecevabilité de la demande de nullité de l'assemblée générale extraordinaire de 2011, précisant ainsi que cette demande serait tout de même recevable, puisqu'elle entrerait dans le champ des exceptions de l'article 564 et de l'article 566 du code de procédure civile, l'assemblée de 2022 constituant en outre un élément nouveau survenu postérieurement au jugement de première instance et en cours de l'instance d'appel.

Cette demande est recevable sur le fondement également de l'article 910-4 du code de procédure civile, puisqu'elle constitue une demande destinée à répliquer aux conclusions de la société [CS] frères.

Cette dernière précise cependant que ces développements impliquent toutefois une double réserve : la première, que la cour se considère saisie d'une demande d'annulation de l'assemblée de 2011, demande qui ne figurait pas dans leurs dernières conclusions, la seconde, que cette demande d'annulation de l'assemblée générale de 2011 ne soit pas jugée prescrite.

Dans la première hypothèse, la demande de nullité de l'assemblée générale de 2022 est alors une demande additionnelle irrecevable, comme dépourvue de tout lien avec les prétentions. Dans la seconde hypothèse, la demande de nullité de cette assemblée serait une demande additionnelle irrecevable comme se rattachant à une demande initiale elle-même irrecevable.

Par note en délibéré en date du 12 janvier 2013, les consorts [IJ]-[CS] précisent que la demande d'annulation de l'assemblée générale du 8 avril 2022 n'a pu qu'apparaître en cours de procédure, dans la mesure où cette assemblée a été convoquée après la première décision du 30 septembre 2021.

Ils soulignent que la demande au titre du préjudice ne pouvait être formée avant les conclusions notifiées le 21 juin 2022, qui visaient à dire que seuls les statuts applicables à la SA [CS] frères sont ceux appliqués antérieurement au 2 décembre 2011. Ils ne pouvaient le faire avant, l'assemblée du 8 avril 2022 n'ayant pas eu lieu.

Le principe de concentration des écritures n'interdit pas l'émission d'une prétention destinée à répliquer aux conclusions adverses ou à faire juger des questions nées postérieurement.

Si la cour statue favorablement sur l'annulation de l'assemblée générale du 2 décembre 2011, prétention qui a été toujours émise par leurs soins, ils soulignent qu'il en ressort comme conséquence immédiate et directe : l'application, toujours à ce jour des statuts antérieurs au 2 décembre 2011 et l'impossibilité de convoquer une assemblée le 8 avril 2022 avec un actionnariat différent de celui visé aux statuts applicables. C'est du reste le cas pour l'assemblée du 8 avril 2022 mais également pour toute assemblée postérieure au 2 décembre 2011 qui aurait été convoquée sur la base de statuts inapplicables car jamais régulièrement modifiés.

Mme [B] [CS] épouse [IJ] et M. [IO] [CS] ajoutent ceci : « l'évaluation de leur préjudice dont l'existence et la teneur dépendent de la décision à intervenir sur la nullité de(s) assemblées ». Ces demandes sont recevables tant au regard du principe de concentration des écritures que de l'effet dévolutif de l'appel.

Par note en délibéré en date du 12 janvier 2013, les appelants, s'étonnant des termes du message adressé, rappellent que, de leur point de vue, en dehors de la problématique d'une éventuelle régularisation, la question de la recevabilité de l'action a d'ores et déjà été tranchée par l'arrêt du 30 septembre 2021.

Concernant spécifiquement la demande d'annulation de l'assemblée générale du 8 avril 2022, ou encore celle de renvoi pour fixer le préjudice à raison de l'application de la fusion, les appelants estiment qu'il s'agit à l'évidence de demandes nouvelles. Tout comme la demande de la société [CS] frères consistant à faire juger que l'assemblée générale du 2 décembre 2011 a été régularisée par l'assemblée générale du 8 avril 2022.

Les appelants soulignent que ces deux assemblées ont toutes deux été convoquées par la société [CS] frères en application de l'arrêt du 30 septembre 2021. Il s'ensuit que les assemblées générales, tant du 3 décembre 2021 que celle du 8 avril 2022, sont les conséquences du litige initié devant les premiers juges et de l'arrêt de la cour d'appel du 30 septembre 2021.

Les appelants précisent que la demande d'annulation, nonobstant le fait qu'il s'agisse d'une demande nouvelle, constitue une réponse aux prétentions nouvelles de la société [CS] frères, s'appuyant sur un fait nouveau et dont la cour s'est réservée l'examen.

Les appelants pointent d'ailleurs que la demande d'annulation est strictement limitée aux délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2021 (plutôt 2022!), qui sont les délibérations similaires à celles du 2 décembre 2011.

Concernant la demande de renvoi pour fixer le préjudice, les appelants notent que le vote régulier du 3 décembre 2021, ayant rejeté les fusions, entraîne pour les consorts [IJ] comme pour la société Saint-Eloi et les consorts [CS], une nécessaire réparation de leurs droits couvrant la période du 2 décembre 2011 jusqu'au jour où la société Sager sera immatriculée.

MOTIVATION

- Sur l'annulation de l'ordonnance de clôture ou à tout le moins sa révocation

Aux termes de l'article 799 du code de procédure civile, rendu applicable à la procédure d'appel, sauf dans le cas où il est fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 781, le juge de la mise en état déclare l'instruction close dès que l'état de celle-ci le permet et renvoie l'affaire devant le tribunal pour être plaidée à la date fixée par le président ou par lui-même s'il a reçu délégation à cet effet. La date de la clôture doit être aussi proche que possible de celle fixée pour les plaidoiries.

Le dernier alinéa précise que le juge de la mise en état demeure saisi jusqu'à l'ouverture des débats ou jusqu'à la date fixée pour le dépôt des dossiers des avocats.

En vertu des dispositions de l'article 444 du code de procédure civile, le président peut ordonner la réouverture des débats. Il doit le faire chaque fois que les parties n'ont pas été à même de s'expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés. En cas de changement survenu dans la composition, il y a lieu de reprendre les débats.

Conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile alinéas 3 et 4, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. À défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

Il résulte de ces textes que la réouverture des débats emporte automatiquement révocation de l'ordonnance de clôture lorsque l'affaire est renvoyée à la mise en état et nécessite en présence de nouvelles écritures, la reprise des prétentions et moyens antérieurs tout en répondant aux interrogations de la cour.

Il a été jugé que même en présence d'un arrêt de réouverture des débats, avec révocation de l'ordonnance de clôture, les parties ne sont pas tenues de reprendre, dans les conclusions par lesquelles elles se bornent à répondre à des questions posées par un arrêt avant dire droit, les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs écritures antérieures, qui ne sont pas réputées avoir été abandonnées.

Enfin, la réponse à une question précise posée par un arrêt de réouverture avant dire droit qui ne prévoit pas la révocation de la clôture n'entraîne pas la perte du bénéfice des précédentes écritures.

En l'espèce, par arrêt du 30 septembre 2021, dont le dispositif est ci-dessus rappelé, la cour a, usant des prérogatives offertes par l'article 444 du code de procédure civile, ordonné la réouverture des débats, autorisant la réalisation éventuelle de diligences dans un délai et permettant aux parties, au vu des éventuelles diligences, de se prononcer sur la demande de nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 de la société [CS] frères pour l'audience collégiale du 30 juin 2022.

L'arrêt du 30 septembre 2021 se bornant à rouvrir les débats, l'ordonnance de clôture du 8 avril 2021 continuait à produire ses effets, de sorte qu'aucune nouvelle ordonnance de clôture ne pouvait valablement être prononcée par un conseiller de la mise en état, qui se trouvait dessaisi.

Ainsi, l'ordonnance de clôture en date du 21 juin 2022 est nulle et de nul effet.

Par ailleurs, l'arrêt du 6 octobre 2022 ayant cette fois révoqué la clôture intervenue le 8 avril 2021 et l'ordonnance de clôture du 21 juin 2022 étant non avenue, l'ordonnance de clôture du 1er décembre 2022, dont la date avait été annoncée aux parties dans le cadre de l'arrêt de réouverture du 6 octobre 2022, s'en trouve être rétroactivement validée, sans qu'il y ait lieu de répondre aux demandes de révocation de la clôture du 21 juin 2022.

- Sur la portée de l'arrêt du 30 septembre 2021 et la prescription

1) sur la fin de non-recevoir

En vertu des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen du fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfixe, la chose jugée.

Cette liste n'est pas limitative et la règle de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, ci-dessus rappelée, s'applique également aux fins de non-recevoir qui doivent être exprimées dans le dispositif des conclusions sous peine que la juridiction n'en soit pas saisie.

Il a été jugé que lorsqu'une partie se bornait devant la cour d'appel à conclure à l'irrecevabilité de demandes sur un fondement précis, la cour d'appel n'était pas saisie des autres fondements qui auraient pu permettre d'accueillir cette fin de non-recevoir.

De manière sibylline, les appelants, aux termes de leur dispositif, demandent de «  juger les conclusions d'intimé du 3 novembre 2022 de [CS] frères en leurs prétentions nouvelles, sans lien avec les diligences effectuées et donc l'évolution du litige, irrecevables ». Outre que la cour n'est saisie de la part des intimées d'aucun jeu d'écritures en date du 3 novembre 2022, cette fin de non-recevoir ne peut se comprendre que comme visant à déclarer irrecevables les « prétentions nouvelles » contenues dans les dernières écritures de la SA [CS] frères dont est saisie la cour, étant observé que dans le corps des écritures trois motifs distincts sont développés par les appelants, à savoir l'acquiescement à l'arrêt du 30 septembre 2021, l'autorité de la chose jugée de cette même décision ainsi que les demandes nouvelles et la concentration des demandes et moyens.

Il ne saurait être question, sous la formulation précitée, d'englober un incident d'instance tiré d'un acquiescement à l'arrêt du 30 septembre 2021 et la cour n'en est donc pas valablement saisie, étant outre observé de manière tout à fait superfétatoire qu'aucune reconnaissance certaine de la nullité de l'assemblée générale du 2 décembre 2011 et renonciation à l'action ne saurait résulter de la mise en 'uvre du processus de régularisation au vu du caractère exécutoire de l'arrêt du 30 septembre 2021 ayant fait l'objet d'un pourvoi et des réserves émises par le conseil d'administration dans le cadre de son rapport pour l'assemblée générale extraordinaire du 3 décembre 2021.

Ce chef ne saurait pas plus s'analyser comme visant expressément une irrecevabilité tirée de l'autorité de la chose jugée, fin de non-recevoir d'ordre privé.

Cependant, le jugement qui a autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche en vertu des dispositions de l'article 480 du code de procédure civile, dessaisit, dès son prononcé, le juge de cette contestation, suivant l'article 481 du même code, et lui interdit de revenir sur sa décision, l'article 125 alinéa 1 du code de procédure civile imposant au juge de relever d'office la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à une décision précédemment rendue dans la même instance.

La cour se doit donc, au regard de ces principes, d'examiner la portée de son arrêt et l'autorité y attachée, l'ensemble des parties débattant d'ores et déjà contradictoirement de cette question.

En vertu des dispositions de l'article 1351 du code civil, l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la demande soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité.

De manière constante, il est jugé que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif, les motifs d'un jugement, fussent-ils le soutien nécessaire de la décision, étant dépourvus de l'autorité de la chose jugée.

Il est toutefois admis qu'un dispositif ambigu, obscur ou incomplet puisse être interprété à la lumière des motifs sans pour autant conférer à ceux-ci l'autorité de la chose jugée.

Aucun chef du dispositif de l'arrêt 30 septembre 2021, lequel, s'agissant d'une décision mixte, tranche diverses exceptions de procédure et fins de non-recevoir, opposées notamment à l'action en nullité des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 de la société Sager et à la demande en réparation au titre de l'abus de majorité, et rejette la demande d'annulation de l'assemblée générale extraordinaire de la société Sager du 2 décembre 2011 ainsi que la demande de nullité pour abus de majorité des résolutions votées lors l'assemblée générale des actionnaires du 2 décembre 2011 de la société Sager, ne concerne la recevabilité de la demande en nullité de l'assemblée générale de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011.

Concernant cette prétention, la cour a «constat[é] l'irrégularité entachant l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères du 2 décembre 2011 pour absence de communication de l'avis du comité d'entreprise extraordinaire de la société [CS] à l'assemblée » et « accord[é] un délai pour porter remède à cette irrégularité et dit en conséquence qu'il sera organisé par les organes de la société [CS] frères, dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt par la partie la plus diligente, une nouvelle assemblée générale extraordinaire, à laquelle sera convoquée l'intégralité des actionnaires actuels de la société, avec pour ordre du jour le vote, au vu de l'avis du comité central d'entreprise du 21 octobre 2011, sur les résolutions telles que soumises à l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 », précisant que «  l'affaire sera à nouveau évoquée à l'audience du Jeudi 30 juin 2022 à 13h30 en collégialité, avec réouverture des débats sur ce seul point, au vu des diligences qui auront éventuellement été effectuées, se prononcer sur la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères du 2 décembre 2011 » .

Ainsi, elle ne s'est pas prononcée, aux termes ni de son dispositif ni de ses motifs, sur la demande en nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères et sa recevabilité, puisqu'elle a uniquement «constat[é] l'irrégularité entachant l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères du 2 décembre 2011 » et n'a pas tranché la prétention soumise.

Il ne peut pas plus être soutenu que la cour se serait déjà prononcée, en tout ou partie, sur les conséquences juridiques à tirer des faits constatés et aurait reconnu implicitement la recevabilité de la demande de nullité puisqu'au contraire, aux termes de ses motifs, la cour a souligné que s'agissant de l'action principale des 4 demandeurs, sur laquelle se greffe l'action des intervenants volontaires, « nul ne soutient qu'elle soit prescrite pour avoir été formée par voie de conclusions plus de 6 mois après la dernière inscription au registre du commerce (L 235-9 alinéa 2), le juge ne pouvant suppléer d'office le moyen résultant de la prescription, fusse cette règle d'ordre public ».

Seules les questions litigieuses soumises au juge et contradictoirement débattues devant lui peuvent recevoir autorité de la chose jugée, ce qui ne saurait en l'espèce être retenu, faute pour l'une quelconque des parties d'avoir soumis cette fin de non-recevoir à la cour, qui avait pointé ne pas en être saisie.

Aucune autorité de la chose jugée attachée au précédent arrêt de la cour, rendu dans la même instance, ne saurait s'opposer à l'examen de la recevabilité de la demande en nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011.

Plus spécifiquement et aux termes même de leur dispositif, les appelants évoquent une irrecevabilité pour « prétentions nouvelles, sans lien avec les diligences effectuées et donc l'évolution du litige », évoquant pêle-mêle dans leurs écritures les notions de demandes nouvelles, concentration des demandes et concentration des moyens.

Aux termes des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou la révélation d'un fait.

La prétention n'est pas nouvelle si elle tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, même si son fondement juridique est différent. L'article 565 du code de procédure civile complète et précise ainsi la distinction entre les moyens nouveaux qui sont autorisés par l'article 563 et la demande nouvelle. De même ne sont pas considérées comme nouvelles en application de l'article 566 du même code, les demandes qui sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises au premier juge.

Conformément à l'article 910-4 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées les prétentions ultérieures. Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Or, la demande de la société [CS] frères arguée de nouveauté, tendant à voir déclarer prescrite la demande en nullité de son assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011, constitue une fin de non-recevoir, laquelle, conformément aux dispositions de l'article 123 du code de procédure civile, peut être proposée en tout état de cause et échappe ainsi au régime énoncé aux articles 564 et suivants du code de procédure civile.

Ainsi, quand bien même aucune irrecevabilité n'aurait été soutenue en première instance, la cour se trouve valablement saisie de cette fin de non-recevoir, et ce nonobstant le fait selon les appelants que « la société [CS] s'est abstenue de présenter avant l'arrêt du 30 septembre 2021 son moyen tiré de la prescription préexistant à l'arrêt du 30 septembre 2021 ».

Par ailleurs, à supposer que les appelants fondent leur irrecevabilité sur les dispositions, non visées expressément par leurs écritures, de l'article 910-4 du code de procédure civile, dispositions que la cour doit relever d'office, ce texte ne concerne que « l'ensemble de leurs prétentions sur le fond », ce qui s'entend comme les demandes fondées sur des moyens de fond, et non les fins de non-recevoir, lesquelles tendent précisément à faire déclarer l'adversaire irrecevable en ses demandes sans examen au fond et peuvent être proposées en tout état de cause, conformément aux dispositions de l'article 123 du code précité.

Dès lors, aucune irrecevabilité tirée du caractère nouveau des demandes, soulevées par les appelants, ou que la cour aurait dû soulever d'office au titre de la concentration des demandes, ne peut être utilement opposée à la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande en nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011.

Enfin, la référence au principe de concentration des moyens, dont les appelants déduiraient que les demandes, notamment celle tirée de la prescription, sont irrecevables, est totalement inopérante dès lors que ce principe n'a vocation à s'appliquer que dans le cadre d'un débat sur l'autorité de la chose jugée.

Or, tel n'est pas le cas, comme démontré précédemment, l'arrêt du 30 septembre 2021 n'ayant pas tranché la question de la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] du 2 décembre 2011 et celle de la recevabilité de la demande en nullité.

Ainsi, la fin de non-recevoir opposée par les appelants ne peut qu'être rejetée.

2) sur la prescription

Aux termes de l'article L 235-8 du code de commerce, la nullité d'une opération de fusion ou de scission ne peut résulter que de la nullité de la délibération de l'une des assemblées qui ont décidé l'opération ou du défaut de dépôt de la déclaration de conformité mentionnée au troisième alinéa de l'article 236-6.

Lorsqu'il est possible de porter remède à l'irrégularité susceptible d'entraîner la nullité, le tribunal saisi de l'action en nullité d'une fusion ou d'une scission accorde aux sociétés intéressées un délai pour régulariser la situation.

En vertu des dispositions de l'article L 235-9 du code de commerce, les actions en nullité de la société ou d'actes et délibérations postérieurs à sa constitution se prescrivent par trois ans à compter du jour où la nullité est encourue, sous réserve de la forclusion prévue à l'article L 235-6.

Toutefois, l'action en nullité d'une fusion ou d'une scission de sociétés se prescrit par six mois à compter de la date de la dernière inscription au registre du commerce et des sociétés rendue nécessaire par l'opération.

Il sera préalablement rappelé que s'agissant d'une action introduite en 2012, en procédure orale, les dispositions applicables de l'article 446-2 du code de procédure civile sont celles antérieures au décret n°2017-892 du 6 mai 2017.

Des pièces du dossier on peut retenir que :

- l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères s'inscrit dans le cadre d'une opération de fusion qui a été approuvée par délibérations du 2 décembre 2011 ;

- les assignations délivrées en mai 2012, ainsi rédigées notamment dans leur dispositif : « constater que les conditions de déroulement et du vote de l'assemblé générale du 2 décembre 2011 entachent la validité de l'assemblée du 2 décembre 2011 ; que les décisions prises le 2 décembre 2011 dans les résolutions 5 à 10 par les actionnaires majoritaires de Sager sont contraires à l'intérêt social de Sager et ont été prises au détriment des actionnaires minoritaires ; en conséquence dire et juger que l'assemblée générale des actionnaires est nulle pour violation des dispositions régissant les règles de tenu des assemblées et qu'en conséquence la fusion doit être annulée, subsidiairement, dire et juger que toutes les résolutions votées lors de l'assemblée générale du 2 décembre 2011 sont nulles pour violation des dispositions attaché aux actions, et qu'en conséquence la fusion doit être annulée, très subsidiairement, dire et juger en toutes hypothèses, si l'assemblée n'est pas nulle et si les résolutions ne sont pas nulles, que la majorité nécessaire à l'adoption des résolutions n'a été atteinte pour aucune d'entre elles et donc qu'aucune des résolutions n'a été adoptée, et qu'en conséquence la fusion doit être annulée, infiniment subsidiairement dire et juger que l'adoption des résolutions 5 à 11 décidée lors de l'assemblée générale des actionnaires de Sager tenue le 2 décembre 2011 est constitutive d'un abus de droit et que ces résolutions sont nulles, et qu'en conséquence la fusion doit être annulée », ne contiennent que la demande en nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 de la société Sager, et ce tant dans le dispositif que dans les motifs ;

- les conclusions de la société Saint Eloi, M. [Z] et [IM] [CS] et Mme [IN] [CS], appelants principaux, en date du 13 décembre 2013, ne concernent là encore que l'assemblée générale extraordinaire de la société Sager du 2 décembre 2011 dont il est demandé l'annulation pour violation des règles régissant la tenue des assemblées, violation du droit de vote attachée aux actions et abus de droit ;

- les conclusions des appelants, portant en outre notamment intervention volontaire d'un certain nombre de protagonistes, versées en pièce 67 par la société [CS] frères et communiquées selon celle-ci en date du 5 février 2015, reproduisent un dispositif presque similaire à celui présenté devant la présente cour concernant les demandes de nullités, et envisagent expressément dans les motifs comme dans le dispositif la nullité de l'assemblée générale des actionnaires de la société Sager en date du 2 décembre 2011 mais également de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011, demande notamment stipulée en gras au milieu de la page 11 et figurant dans le dispositif ainsi rédigé : « constaté les conditions de déroulement et du vote de l'assemblée générale de Sager en date du 2 décembre 2011 et du vote de [CS] frères en date du 2 décembre 2011 entachent la validité de celles-ci ; ['] dire et juger que les résolutions de l'assemblée générale des actionnaires de Sager en date du 2 décembre 2011 ont été adoptées en violation.... ; dire et juger que les résolutions de l'assemblée générale des actionnaires de [CS] frères en date du 2 décembre 2011 ont été adoptées en violation des dispositions régissant l'indispensable information des actionnaires sur la position du comité d'Entreprise en cas de modification de l'organisation de l'activité ; [...]en conséquence prononcer l'annulation desdites résolutions et ordonner la réimmatriculation de la société Sager ['] ;

- les extraits des K-bis produits pour l'ensemble des sociétés ayant participé à la fusion, versés en pièces 43-1 à 43-16 par la société [CS] frères, permettent de constater que les inscriptions au registre du commerce pour toutes les sociétés participant à l'opération de fusion se sont étalées entre le mois de mai 2011 (les Aulnes), puis à compter de novembre 2011 (sociétés Rubis et Saphir) pour les plus anciennes, et à la fin du mois de février 2012 (société Sogefi et Osiris), pour les plus récentes.

Ainsi, même si dans le dossier du tribunal de commerce d'Arras, régulièrement transmis à la cour à raison du présent appel, ne figure pas l'ensemble des jeux de conclusions déposés et soutenus par les parties dans cette instance, il n'est pas soutenu que des conclusions antérieures au 5 février 2015 aient comporté la demande en nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011. Plus de 6 mois après la dernière inscription au registre du commerce, la juridiction n'était d'ailleurs saisie, par conclusions du 13 décembre 2013, que de demandes visant la société Sager, et elle seule.

Ainsi, la juridiction n'a été saisie des demandes visant à obtenir la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères qu'après l'expiration d'un délai de 6 mois suivant la dernière inscription au registre du commerce et des sociétés rendue nécessaire par l'opération de fusion.

En conséquence, il convient de dire prescrite la demande en nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011.

Il s'ensuit que les chefs du dispositif des appelants ainsi rédigés :

« - dire et juger au vu des diligences effectuées que : - par assemblée générale extraordinaire en date du 3 décembre 2021, la société [CS] frères a remédié à l'irrégularité retenue par la cour en son arrêt du 30 septembre 2021 affectant le vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale extraordinaire du 02.12.2011 de la société [CS] frères ;

- par vote souverain l'assemblée générale extraordinaire de [CS] frères a valablement rejeté les résolutions 1, 3 et 7 à savoir notamment le « projet de fusion entre les sociétés [CS] frères, Sager, Sogep et Sofip au moyen de l'absorption des sociétés Sager, Sogep et Sofip par la société, et de son avenant en date à [Localité 66] du 2 novembre 2011 » et les projet de statuts et de règlement intérieur ; et qu'en conséquence, ayant épuisé, les causes de l'arrêt du 30.09.2021, la société [CS] frères ne pouvait valablement procéder à une deuxième délibération en date du 8 avril 2022 ayant le même objet.

En conséquence :

- dire et juger que l'AGE du 3 décembre 2021 se substitue à cette date à l'AGE irrégulière du 2 décembre 2011, et/ou annule et remplace l'AGE irrégulière du 2 décembre 2011 ;

- écarter, et dire et juger sans effets le vote des résolutions 1 à 8 adoptées lors de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 en application de l'arrêt du 30 septembre 2021 ;

- débouter la société [CS] frères de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- condamner la société [CS] frères à procéder à ses frais, à l'exécution des délibérations régulièrement adoptées par l'AGE du 3 décembre 2021, et notamment à procéder à la ré-immatriculation de la société Sager avec les mêmes statuts, les mêmes actionnaires ' ou leurs ayant-droits ou leurs ayant-causes en cas de mutation intervenue entre le 2 décembre 2011 et la date de ré-immatriculation ' et les mêmes dirigeants- ou ayants droits- que ceux en fonction au moment de la réalisation au greffe du tribunal de commerce des formalités liées à la dissolution de cette société, sous peine d'astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification de la décision à intervenir », sans qu'il y ait lieu d'y répondre plus avant, puisqu'ils ne visent qu'à saisir la cour de demandes en vue de répondre à l'invitation faite par cette dernière concernant la demande de nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frère du 2 décembre 2011, sont sans objet, au vu de la prescription de la demande en nullité accueillie.

- Sur les demandes relatives à l'assemblée générale du 8 avril 2022 et sur la demande des consorts [IJ]-[CS]

Aux termes des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou la révélation d'un fait.

La prétention n'est pas nouvelle si elle tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge, même si son fondement juridique est différent.

L'article 565 du code de procédure civile complète et précise ainsi la distinction entre les moyens nouveaux qui sont autorisés par l'article 563 et la demande nouvelle.

De même ne sont pas considérées comme nouvelles en application de l'article 566 du code de procédure civile, les demandes qui sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises au premier juge.

1) sur les demandes relatives à l'assemblée générale du 8 avril 2022

La cour ayant déclaré prescrite l'action en nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] en date du 2 décembre 2011, elle n'a pas à examiner l'ensemble des demandes subsidiaires formulées par la société [CS] frères, et notamment celles demandant que soit déclarée infondée la demande en nullité de l'assemblée générale du 2 décembre 2011, motif pris d'une régularisation par l'assemblée générale du 8 avril 2022.

La demande des appelants ainsi formulée : « à titre subsidiaire prononcer la nullité du vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2021 (!) et à titre infiniment subsidiaire prononcer un sursis à statuer dans l'attente de la décision judiciaire à intervenir sur la validité de la partie extraordinaire de l'assemblée générale [CS] frères tenue le 8 avril 2022 », est présentée, aux termes du dispositif, comme une demande autonome, sans lien avec la demande de nullité de l'assemblée générale du 2 décembre 2011, contrairement à la présentation choisie pour les chefs précédents de leur dispositif ci-dessus rappelé, qui liaient l'assemblée générale du 3 décembre 2021 et celle du 2 décembre 2011, évoquant en leur sein d'ailleurs d'ores et déjà cette assemblée du 8 avril 2022.

Il ne peut être sérieusement soutenu que cette demande ne soit pas nouvelle, et encore moins au prétexte que cette demande tendrait aux mêmes fins que la demande de nullité dont était initialement saisie la cour, s'agissant de demandes de nullités concernant des assemblées générales différentes, à savoir une assemblée de 2011 et une autre de 2022.

Cette demande n'est pas plus l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises au premier juge.

Cette demande ne peut pas plus s'analyser en une demande nouvelle recevable pour s'opposer à une quelconque demande adverse relative à l'assemblée générale du 8 avril 2022, dont se trouverait saisie la cour, laquelle a fait droit à la demande principale de la société [CS] frères relative à la prescription de la demande de nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011 et n'est donc pas saisie des demandes subsidiaires.

En outre, au vu de sa présentation autonome aux termes du dispositif précité, en faisant une demande indépendante sans lien avec la demande de nullité dont était initialement saisie la cour, il ne peut être retenu qu'elle soit en lien avec la survenance et la révélation d'un fait, d'autant que la fin de non-recevoir, tirée de la prescription de la demande de nullité de l'assemblée générale extraordinaire du 2 décembre 2011, interdit à la cour d'examiner le processus de régularisation mis en 'uvre et rend dès lors sans objet l'examen des différentes assemblées qui auraient été réalisées dans le cadre, selon les parties, de l'invitation faite par la cour.

Il n'y a pas plus lieu pour ce motif de prononcer un sursis dans l'attente de la décision judiciaire définitive à intervenir sur la validité de la partie mixte de l'assemblée générale de la société [CS] frères tenue le 8 avril 2022.

En conséquence, la demande relative à la nullité de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 est irrecevable, tandis que celle visant à obtenir un sursis à statuer est rejetée.

2) sur la demande de renvoi pour fixer le préjudice

La demande d'annulation de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011 ayant été jugée prescrite, les demandes des consorts [IJ]-[CS] visant à « constater la nullité de ladite assemblée générale du 2 décembre 2011 et ordonner la remise en état » et à « dire que seuls les statuts applicables à la société [CS] sont ceux appliqués antérieurement au 2 décembre 2011 » sont sans objet.

La cour se doit donc d'examiner la demande des consorts [IJ]-[CS] formée « à titre subsidiaire et au regard du préjudice engendré par l'application de la fusion, et renvoyer les parties pour leur permettre de fixer leur préjudice ».

La société [CS] frères ne peut se retrancher derrière l'arrêt du 30 septembre 2021, jugeant prescrite la demande en réparation à titre principal en nature ou à titre subsidiaire, laquelle n'était pas formulée par les intervenants forcés et concernait une demande en réparation distincte, à raison d'un préjudice né de l'irrégularité constatée et d'un abus de majorité.

La demande, formulée en l'espèce, vise à obtenir réparation d'un préjudice né de l'application d'une fusion qui se trouverait en définitive remise en cause par l'assemblée générale du 3 décembre 2021, et ne peut donc être prescrite, le préjudice apparaissant éventuellement à la date de la décision qui remettrait en cause la fusion.

En toute hypothèse, outre qu'une demande de renvoi n'est pas une prétention, force est de constater que la demande de nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011 ayant été jugée prescrite, l'opération de fusion ne s'en trouve pas remise en cause, ce qui ne peut donc que conduire au rejet de la « demande » précitée.

- Sur les dépens et accessoires

En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, les appelants succombant principalement en leurs prétentions, il convient de les condamner aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, justifiant le rejet des demandes d'indemnité procédurale présentées par chacune des parties.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu l'arrêt du 30 septembre 2021,

Vu l'arrêt du 6 octobre 2022,

PRONONCE la nullité de l'ordonnance de clôture rendue le 21 juin 2021 et la DIT de nul effet ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 1er décembre 2022,

REJETTE la fin de non- recevoir opposée par les appelants ;

DECLARE la demande de prononcé de la nullité de l'assemblée générale extraordinaire de la société [CS] frères en date du 2 décembre 2011 prescrite ;

en conséquence, DIT sans objet les demandes des appelants visant à :

 - dire et juger au vu des diligences effectuées que :

- par assemblée générale extraordinaire en date du 3 décembre 2021, la société [CS] frères a remédié à l'irrégularité retenue par la cour en son arrêt du 30 septembre 2021 affectant le vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale extraordinaire du 02.12.2011 de la société [CS] frères ;

- par vote souverain l'assemblée générale extraordinaire de [CS] frères a valablement rejeté les résolutions 1, 3 et 7 à savoir notamment le « projet de fusion entre les sociétés [CS] frères, Sager, Sogep et Sofip au moyen de l'absorption des sociétés Sager, Sogep et Sofip par la société, et de son avenant en date à [Localité 66] du 2 novembre 2011 » et les projet de statuts et de règlement intérieur ; et qu'en conséquence, ayant épuisé, les causes de l'arrêt du 30.09.2021, la société [CS] frères ne pouvait valablement procéder à une deuxième délibération en date du 8 avril 2022 ayant le même objet.

En conséquence :

- dire et juger que l'AGE du 3 décembre 2021 se substitue à cette date à l'AGE irrégulière du 2 décembre 2011, et/ou annule et remplace l'AGE irrégulière du 2 décembre 2011 ;

- écarter, et dire et juger sans effets le vote des résolutions 1 à 8 adoptées lors de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 en application de l'arrêt du 30 septembre 2021 ;

- débouter la société [CS] frères de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- condamner la société [CS] frères à procéder à ses frais, à l'exécution des délibérations régulièrement adoptées par l'AGE du 3 décembre 2021, et notamment à procéder à la ré-immatriculation de la société Sager avec les mêmes statuts, les mêmes actionnaires ' ou leurs ayant-droits ou leurs ayant-causes en cas de mutation intervenue entre le 2 décembre 2011 et la date de ré-immatriculation ' et les mêmes dirigeants- ou ayants droits- que ceux en fonction au moment de la réalisation au greffe du tribunal de commerce des formalités liées à la dissolution de cette société, sous peine d'astreinte de 5 000 euros par jour de retard passé un délai d'un mois après la signification de la décision à intervenir »

ainsi que les demandes des consorts [IJ]-[CS] visant à « constater la nullité de ladite assemblée générale du 2 décembre 2011 et ordonner la remise en état ; dire que seuls les statuts applicables à la SA [CS] sont ceux appliqués antérieurement au 2 décembre 2011 » ;

DECLARE irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande relative à la nullité du vote des délibérations 1 à 8 de l'assemblée générale mixte du 8 avril 2022 présentée par les appelants ;

REJETTE la demande de suris à statuer dans l'attente de la décision judiciaire à intervenir sur la validité de la partie extraordinaire de l'assemblée générale [CS] frères tenue le 8 avril 2022 ;

REJETTE la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande des consorts [IJ]-[CS] de renvoi pour fixer leur préjudice ;

REJETTE la 'demande' « subsidiaire, et au regard du préjudice engendré par l'application de la fusion, [de] renvoyer les parties pour leur permettre de fixer leur préjudice » ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les demandes respectives d'indemnité procédurale ;

CONDAMNE les appelants aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier

Marlène Tocco

Le président

Samuel Vitse


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 18/02878
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;18.02878 ?
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