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09/03/2023 | FRANCE | N°19/06494

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 2, 09 mars 2023, 19/06494


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 2



ARRÊT DU 09/03/2023





****





N° de MINUTE :

N° RG 19/06494 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SXSG



Ordonnance de référé (N° 19/01021) rendue le 26 novembre 2019 par le président du tribunal de grande instance de Lille

Arrêt (n°20/345) rendu le 10 décembre 2020 par la cour d'appel de Douai







APPELANTE



SCI des [Adresse 2], agissan

t par sa gérante Madame [N] [D] domiciliée en cette qualité audit siège.

ayant son siège social, [Adresse 3]



représentée par Me Clotilde Hauwel, avocat au barreau de Lille, avocat constitué





INTIMÉ...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 2

ARRÊT DU 09/03/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 19/06494 - N° Portalis DBVT-V-B7D-SXSG

Ordonnance de référé (N° 19/01021) rendue le 26 novembre 2019 par le président du tribunal de grande instance de Lille

Arrêt (n°20/345) rendu le 10 décembre 2020 par la cour d'appel de Douai

APPELANTE

SCI des [Adresse 2], agissant par sa gérante Madame [N] [D] domiciliée en cette qualité audit siège.

ayant son siège social, [Adresse 3]

représentée par Me Clotilde Hauwel, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉE

LA SARL Euro Chimie Industrie, agissant en la personne de son représentant légal domiciliés en cette qualité audit siège.

ayant son siège social, [Adresse 2]

représentée par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, avocat constitué

assistée de Me Delphine Chambon, avocat plaidant, substituée par Me Gaëlla Kerrar, avocats au barreau de Lille

DÉBATS à l'audience publique du 17 janvier 2023 tenue par Nadia Cordier, magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe;

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Samuel Vitse, président de chambre

Nadia Cordier, conseiler

Agnès Fallenot, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 mars 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Samuel Vitse, président et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 20 décembre 2022

****

La SCI des [Adresse 2] est propriétaire d'un immeuble situé [Adresse 2].

Suivant bail conclu par acte authentique le 12 avril 2003, la SCI a donné à bail à la société Euro Chimie industrie un local à usage commercial d'une surface de 1 065 m².

Un nouveau bail a été régularisé le 26 avril 2010 portant le loyer annuel à la somme de 11 400 euros HT.

Un avenant au bail a été conclu par acte authentique le 21 octobre 2014 (et par un acte rectificatif du 12 décembre 2014) portant la surface louée à 1 200 m² et le loyer à la somme annuelle de 22 000 euros TTC.

La SCI a fait délivrer un congé sans offre de renouvellement le 28 septembre 2018 à effet au 31 mars 2019.

Par acte du 29 janvier 2019, la SCI des 1 et [Adresse 2], propriétaire de locaux commerciaux situés [Adresse 1], a assigné en référé son locataire, la SARL Euro Chimie industrie, pour obtenir la désignation d'un expert afin d'évaluer le montant de l'indemnité d'éviction due au défendeur à la suite du congé délivré.

La procédure a été retirée du rôle le 7 mai 2019 à la demande des parties puis remise et retenue à l'audience du 15 octobre 2019.

Par ordonnance contradictoire et en premier ressort en date du 26 novembre 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lille a :

- renvoyé les parties à se pourvoir sur le fond du litige,

- par provision, tous moyens des parties étant réservés,

- désigné en qualité d'expert [U] [R], [Adresse 4], inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Douai, avec mission, conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile, de :

- s'adjoindre en cas de besoin un sapiteur de son choix dans une spécialité différente de la sienne, après en avoir avisé le juge chargé du contrôle des expertises et les parties ;

- se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l'accomplissement de sa mission ;

- s'entourer, si besoin est, de tout sachant et technicien de son choix;

- visiter les lieux sis [Adresse 1], les décrire, les photographier en cas de contestation les mesurer, dresser la liste des salariés employée par SARL Euro Chimie industrie dans ces locaux et sur ce fonds ;

- rechercher en tenant compte de la nature des activités professionnelles autorisées par le bail, de la situation et de l'état des locaux, tous éléments permettant de déterminer le montant de l'indemnité d'éviction :

a) apprécier si l'éviction entraînera la perte du fonds ou son transfert;

b) dans le cas d'une perte de fonds (valeur marchande déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, des frais et droits de mutation, de la réparation du trouble commercial et de tous autres postes de préjudice, ainsi que de la plus-value en résultant) ;

c) dans le cas de la possibilité d'un transfert de fonds sans perte conséquente de clientèle sur un emplacement de qualité équivalente (coût du transfert, acquisition d'un titre locatif ayant les mêmes avantages que l'ancien, frais et droits de mutation, de déménagement et de réinstallation, réparation du trouble commercial et de tous autres préjudices éventuels) ;

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation due par la SCI des 1 et [Adresse 2] à la SARL Euro Chimie, en chiffrant l'ensemble des facteurs minorants de l'indemnité et singulièrement le coefficient de précarité ;

- dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport en un exemplaire original au greffe du tribunal de grande instance de Lille, service du contrôle des expertises, dans le délai de six mois à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle des expertises ;

- dit que l'expert devra, lors de |'établissement de sa première note aux parties, indiquer les pièces nécessaires à sa mission, le calendrier de ses opérations et le coût prévisionnel de la mesure d'expertise ;

- dit que, sauf accord contraire des parties, l'expert devra adresser à celles-ci un pré-rapport de ses observations et constatations ;

- dit que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappelons qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives ;

- désigné le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents ;

- dit que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile ;

- fixé à la somme de 2 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée par la SCI des 1 et [Adresse 2] entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de ce tribunal, dans le délai de six semaines à compter de la présente ordonnance, sans autre avis ;

- dit que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l'expert sera caduque et privée de tout effet ;

- condamné la SCI des 1 et [Adresse 2] à payer à la SARL Euro Chimie industrie la somme provisionnelle de 150 000 euros à valoir sur l'indemnité d'éviction ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- laisse les dépens à la charge de la SCI des [Adresse 2].

Par déclaration en date du 10 décembre 2019, la SCI des 1 et [Adresse 2] a interjeté appel de la décision, limitant la portée de son appel aux chefs suivants : « condamnons la SCI de 1 et [Adresse 2] à payer la SARL Euro chimie industrie la somme provisionnelle de 150 000 euros à valoir sur l'indemnité d'éviction ».

Par arrêt du 10 décembre 2020, la cour d'appel de Douai, section 2, chambre 2, a statué en ces termes :

« Vu l'appel limité,

Vu l'évolution du litige, INFIRME l'ordonnance du juge des référés de Lille en date du 26 novembre 2019 en ce qu'elle a condamné la SCI des 1 et [Adresse 2] à payer à la SARL Euro Chimie industrie la somme provisionnelle de 150.000 euros à valoir sur l'indemnité d'éviction ;

y ajoutant,

CONSTATE que la demande de condamnation à une indemnité provisionnelle d'éviction est devenue sans objet ;

CONSTATE que la demande de désignation d'un expert en vue de fixer l'indemnité d'occupation est justifiée par l'évolution du litige ; Nomme M. [R], [Adresse 5], inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Douai, avec mission, conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile, de :

- se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l'accomplissement de sa mission ;

- s'entourer, si besoin est, de tout sachant et technicien de son choix;

- visiter les lieux sis [Adresse 1], les décrire, les photographier en cas de contestation les mesurer, dresser la liste des salariés employés par SARL Euro Chimie industrie dans ces locaux et sur ce fonds ;

- déterminer le montant de l'indemnité d'occupation due par la société SARL Euro Chimie industrie, pour la période du 1er avril 2019 au 28 septembre 2020, indemnité qui se devra d'être chiffrée conformément aux dispositions de l'article L 145-28 du code de commerce, en prenant en compte l'ensemble des facteurs minorants l'indemnité et notamment le coefficient de précarité ;

DIT que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu'il déposera son rapport en un exemplaire original au greffe de la cour d'appel de Douai, service du contrôle des expertises, dans le délai de 4 mois à compter de l'avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle des expertises ;

DIT que l'expert devra, lors de l'établissement de sa première note aux parties, indiquer les pièces nécessaires à sa mission, le calendrier de ses opérations et le coût prévisionnel de la mesure d'expertise ;

DIT que, sauf accord contraire des parties, l'expert devra adresser à celles-ci un pré-rapport de ses observations et constatations ;

DIT que l'expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l'article 276 du code de procédure civile et rappelons qu'il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives ;

DÉSIGNE le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents ;

DIT que l'expert devra rendre compte à ce magistrat de l'avancement de ses travaux d'expertise et des diligences accomplies et qu'il devra l'informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l'exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile ;

FIXE à la somme de 1 500 euros la provision à valoir sur la rémunération de l'expert qui devra être consignée par la SCI des 1 et [Adresse 2] entre les mains du régisseur d'avances et de recettes de la cour, dans le délai de 3 semaines à compter de la présente ordonnance, sans autre avis ;

DIT que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l'expert sera caduque et privée de tout effet ;

CONDAMNE la société SCI 1 et [Adresse 2] à payer à la SARL Euro Chimie Industrie la somme provisionnelle globale de 17 000 euros au titre des frais non taxables de l'article L 145-58 du code de commerce ;

DEBOUTE la société SCI 1 et [Adresse 2] de sa demande d'indemnité procédurale ;

CONDAMNE la société SCI [Adresse 2] aux dépens, lesquels comprendront les frais d'expertises relatifs à la fixation de l'indemnité d'éviction et objets de la décision infirmée ainsi que ceux relatifs à l'expertise ordonnée par la présente cour en vue de fixer l'indemnité d'occupation ».

MOYENS ET PRÉTENTIONS :

Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 23 février 2022, la société civile immobilière des 1 et [Adresse 2] demande à la cour, de :

« Vu le droit de repentir signifié le 28 septembre 2020

Vu les dispositions de l'article L145-12 du Code de commerce

- Réformer l'ordonnance rendue par le Juge des référés du Tribunal de grande instance de Lille en date du 26 novembre 2019

o en ce qu'elle a condamné la SCI [Adresse 2] au paiement de la somme provisionnelle de 150.000 € au profit de la SARL EURO CHIMIE INDUSTRIE à valoir sur l'indemnité d'éviction ;

- Statuant à nouveau

o Dire n'y avoir lieu à condamnation provisionnelle de la SCI [Adresse 2] au paiement d'une somme provisionnelle de la SARL EURO CHIMIE INDUSTRIE sur l'indemnité d'éviction ;

o Débouter la société EURO CHIMIE INDUSTRIE de sa demande de condamnation provisionnelle au titre des frais visés à l'article L145-58 du Code de commerce,

compte tenu de l'existence d'une contestation sérieuse ;

o Subsidiairement la réduire à de plus justes proportions ;

o Dire que cette somme sera consignée sur un compte séquestre CARPA dans l'attente de la décision ou de la transaction fixant définitivement le montant des frais liés à l'exercice du droit de repentir ;

o Dire que la société EURO CHIMIE INDUSTRIE est redevable d'une indemnité d'occupation égale à la valeur locative de l'immeuble entre le 1er avril 2019 et le 28 septembre 2020 ;

o Désigner Monsieur [U] [R], expert judiciaire, avec pour mission de déterminer la valeur locative des locaux loués à la société EURO CHIMIE INDUSTRIE par la SCI 1 ET [Adresse 2] et situés [Adresse 2] ;

o Statuer ce que de droit s'agissant des dépens de première instance et d'appel ;

o Débouter la société EURO CHIMIE INDUSTRIE de sa demande au titre des frais irrépétibles ».

Elle fait valoir que :

- pour la période comprise entre le 1er avril 2019, date d'effet du congé avec refus de renouvellement, et le 28 septembre 2020, le locataire est tenu au paiement d'une indemnité d'occupation égale à la valeur locative de l'immeuble ;

- elle sollicite la désignation de M. [R], lequel a déjà officié dans ce litige, un pré-rapport ayant été déposé le 15 octobre 2020.

Elle estime que la condamnation du bailleur au paiement d'un somme provisionnelle de 20 000 euros, outre les frais d'expertise, se heurte à une contestation sérieuse. Les sommes réclamées correspondent à des frais qui auraient de toute évidence été engagés, la société ayant réalisé en outre un très important chiffre d'affaires au titre du début d'année 2020.

Par conclusions signifiées par voie électronique en date du 26 avril 2022, la SARL Euro Chimie Industrie demande à la cour de :

« Vu l'article 809 ancien et 564 du Code de procédure civile,

Vu le statut des baux commerciaux et singulièrement les articles L.145-14 et L.145-28 du Code de Commerce,

Vu l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance le 26 novembre 2019,

Vu le bail du 26 Avril 2010 et le congé du 28/09/2018,

Vu l'exercice du droit de repentir par la SCI bailleresse du 28 septembre 2020,

Vu le rapport de Monsieur [R] en date du 23 septembre 2021,

Vu l'arrêt du 10/12/2020

A titre principal

Vu l'effet dévolutif de l'appel,

Vu l'arrêt rendu le 10/12/2020,

Constater que la Cour a vidé sa saisine et répondu à toutes les demandes dont elle était saisie

En conséquence,

DECLARER IRRECEVABLES les demandes de la SCI [Adresse 2]

A titre subsidiaire

RETENIR un abattement de précarité de 20 %

En toutes hypothèses

DEBOUTER la SCI [Adresse 2] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER la SCI [Adresse 2] à payer à la société EURO CHIMIE INDUSTRIE une somme complémentaire de 1.000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'en tous les frais et dépens ».

Elle fait valoir que :

- l'appel ne porte que sur la provision et son montant, un arrêt de l'exécution provisoire ayant été sollicité puis refusé par le premier président ;

- deux ans après la date de délivrance de son congé, soit le 28 septembre 2020, le bailleresse a finalement exercé son droit de repentir, lequel est irrévocable ;

- l'exercice du droit de repentir anéantit, indépendamment de toute décision de réformation, les décisions antérieures relatives à l'indemnité d'éviction et toute éventuelle provision ou condamnation provisionnelle, mais du seul fait de la SCI bailleresse.

Elle estime les demandes contenues dans les conclusions du 23 février 2022 irrecevables, l'arrêt de décembre 2020 étant définitif, pour avoir été signifié le 6 mai 2021 et la cour ayant vidé son délibéré totalement.

S'agissant en outre d'une ordonnance de référé, le juge des référés n'est pas compétent pour fixer le montant de l'indemnité d'occupation au sens de l'article L 145-228 du code de commerce. Cela ne figurait pas dans les demandes faites, et constitue une demande nouvelle. Il appartient à la SCI le cas échéant de saisir la juridiction compétente de premier degré au fond pour une éventuelle suite à l'expertise de M. [R].

À titre subsidiaire et par seul souci d'exhaustivité sur l'expertise, elle plaide que :

- le bailleur peut exercer le droit de repentir mais à charge d'en supporter tous les frais ;

- l'indemnité d'occupation due est une demande nouvelle, et à ce titre non recevable ;

- cette indemnité n'est certainement pas fixée à la valeur locative mais est l'indemnité qui résulte de l'article L 145-28 de commerce ;

- l'indemnité d'occupation ne saurait être supérieure au montant du loyer et des charges de l'ancien bail et doit même être fixée de manière inférieure en prenant en compte un coefficient de précarité et un abattement ;

- le preneur conteste l'évaluation faite par l'expert de l'indemnité d'occupation du 1er avril 2019 au 20 septembre 2020, arrondie par l'expert à une somme de 22 374,50 €/ an ;

- elle évoque la valeur locative retenue et l'abattement de 10 % pour la situation des locaux, qui devrait être d'au moins 20 %, l'abattement de 5 % pour l'état des locaux, qui devrait être de 10 % au vu de l'état des toitures et des interventions très ponctuelles et minimalistes du bailleur, enfin l'abattement de 15 % pour précarité, qui est à fixer à 20 %, peut important l'augmentation du chiffre d'affaires liée à un contexte sanitaire porteur pour ce secteur d'activité.

MOTIVATION 

Aux termes des dispositions de l'article 561 du code de procédure civile, l'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel. Il est statué à nouveau en fait et en droit dans les conditions et limites déterminées aux livres premier et deuxième du présent code.

En vertu des dispositions de l'article L 145-58 du code de commerce, le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité, à charge pour lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail dont les conditions en cas de désaccord sont fixées conformément aux dispositions réglementaires prises à cet effet. Ce droit ne peut être exercé qu'autant que le locataire est encore dans les lieux et n'a pas loué ou acheté un autre immeuble destiné à sa réinstallation.

Aux termes de l'article L 145-28 du code de commerce, aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue. Jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. Toutefois, l'indemnité d'occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d'appréciation.

Les faits dont dépend la solution du litige peuvent être l'objet, à la demande des parties ou d'office, de toute mesure d'instruction légalement admissible, et notamment d'une expertise judiciaire, ordonnée par le juge des référés.

En l'espèce, après la délivrance d'un congé sans offre de renouvellement le 28 septembre 2018 à effet au 31 mars 2019, par acte extrajudiciaire du 28 septembre 2020, le bailleur a exercé son droit de repentir auprès du locataire, ce qui a justifié la réformation par la cour, dans le cadre de l'appel limité à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue, de sa condamnation à une somme provisionnelle de 150 000 euros à valoir sur l'indemnité d'éviction.

Au vu de cette évolution du litige et du nouveau point de départ du bail renouvelé, à savoir le 28 septembre 2020, la cour, qui ne disposait pas de plus de pouvoirs que le juge des référés, a ordonné une nouvelle expertise aux fins de déterminer le montant de l'indemnité d'occupation pour la période intermédiaire entre l'expiration du bail, soit le 1er avril 2019, date de l'effet du congé avec refus de renouvellement, et le 28 septembre 2020.

Elle a épuisé alors sa saisine, nommant d'ailleurs le juge chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d'instruction et statuer sur tous incidents, avant de statuer sur l'ensemble des frais et dépens.

Ainsi, saisie sur appel d'une ordonnance de désignation d'expert, la cour, qui ne dispose pas de plus de pouvoirs que la juridiction des référés, laquelle n'a pas le pouvoir de fixer l'indemnité d'occupation, par l'arrêt du 10 décembre 2020, s'est immédiatement dessaisie du litige après désignation de l'expert.

Elle ne peut dès lors être, après dépôt du rapport de l'expert, ressaisie dans le cadre d'une même instance, sur l'appel initialement formé, pour trancher un quelconque litige subsistant, étant observé d'ailleurs que la société SCI des 1 et [Adresse 2] reprend aux termes de ces dernières écritures les mêmes demandes que celles figurant dans ses écritures avant expertise, lesquelles ont d'ores et déjà toutes été tranchées par l'arrêt précité.

Il convient de laisser les dépens à la charge du Trésor public et dire n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS 

La cour,

Vu l'appel limité,

Vu l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai section 2 chambre 2 en date du 10 décembre 2020 ;

CONSTATE que la cour a, par arrêt du 10 décembre 2020, tranché les points litigieux ;

CONSTATE le dessaisissement immédiat de la cour par l'arrêt du 10 décembre 2020 ;

DIT n'y avoir lieu à indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

MET les dépens à la charge du Trésor public.

Le greffier

Marlène Tocco

Le président

[I] [J]


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 2
Numéro d'arrêt : 19/06494
Date de la décision : 09/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-09;19.06494 ?
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