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16/02/2023 | FRANCE | N°22/03574

France | France, Cour d'appel de Douai, Troisieme chambre, 16 février 2023, 22/03574


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



TROISIEME CHAMBRE



ARRÊT DU 16/02/2023





****





N° de MINUTE : 23/50

N° RG 22/03574 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UNA2



Ordonnance de référé (N° ) rendue le 12 Juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Saint Omer





APPELANT



Monsieur [H] [X]

(intimé dans le RG 22/04250)

né le [Date naissance 3] 1964 à [Localité 11]

de nationalité França

ise

[Adresse 4]

[Localité 9]



Représenté par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assisté de Me Frédérique Vuattier, avocat au barreau de Saint-Omer, avocat plaidant





INTIMÉES



M...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 16/02/2023

****

N° de MINUTE : 23/50

N° RG 22/03574 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UNA2

Ordonnance de référé (N° ) rendue le 12 Juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Saint Omer

APPELANT

Monsieur [H] [X]

(intimé dans le RG 22/04250)

né le [Date naissance 3] 1964 à [Localité 11]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représenté par Me Eric Laforce, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assisté de Me Frédérique Vuattier, avocat au barreau de Saint-Omer, avocat plaidant

INTIMÉES

Madame [F] [M]

née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 12]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représentée par Me Jérémie Chabe, avocat au barreau de Bethune, avocat constitué

SA Assurances du Credit Mutuel - ACM IARD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

appelante dans le RG 21/3718 et dans le RG 22/04250

[Adresse 6]

[Localité 10]

Représentée par Me Séverine Surmont, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Ludiwine Passe, avocat au barreau d'Arras, avocat plaidant

Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Artois agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Eric Dhorne, avocat au barreau de Saint-Omer, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 07 décembre 2022 tenue par Claire Bertin magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Harmony Poyteau

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Guillaume Salomon, président de chambre

Claire Bertin, conseiller

Yasmina Belkaid, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 16 février 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Guillaume Salomon, président et Harmony Poyteau, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 28 novembre 2022

****

EXPOSE DU LITIGE

1. Les faits et la procédure antérieure :

Mme [F] [M] a été victime, le 6 septembre 2020, d'un accident résultant de la chute d'un mur situé sur la propriété de M. [H] [X], lui occasionnant de multiples lésions, notamment un pneumothorax et un hémothorax à droite, des fractures de côtes, un emphysème de la paroi thoracique droite, une fracture de l'omoplate droite, une fissure au niveau du péroné gauche, une entorse du ligament du genou droit, une fracture du scaphoïde du pied et une fracture de la styloïde radiale du poignet.

Une réunion d'expertise amiable s'est déroulée le 5 mai 2021, à l'issue de laquelle l'assureur de M. [X], la société Assurances du crédit mutuel Iard (les ACM), a refusé de garantir le sinistre.

C'est dans ces conditions que Mme [M] a, par actes du 17, 22 et 23 février 2022, fait assigner en référé M. [X], les ACM, ainsi que la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Artois aux fins de voir, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, ordonner une mesure d'expertise médicale et d'obtenir une somme provisionnelle de 3 000 euros à valoir sur la liquidation ultérieure de son préjudice.

2. L'ordonnance dont appel :

Par ordonnance rendue le 12 juillet 2022, le président du tribunal judiciaire de Saint-Omer statuant en référé a notamment :

ordonné une mesure d'expertise médicale judiciaire au bénéfice de Mme [M] ;

désigné l'expert M. [P] [J] pour y procéder, lui confiant une mission d'expertise habituelle ;

dit l'ordonnance commune à la CPAM « Côte d'Opale » ;

condamné M. [X] et les ACM à payer à Mme [M] la somme de 1 500 euros à titre de provision ;

condamné M. [X] à payer à la CPAM de l'Artois la somme provisionnelle de 42 784,57 euros ;

débouté la CPAM de l'Artois de sa demande d'indemnité forfaitaire au titre des dispositions de l'ordonnance du 24 janvier 1996 ;

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

condamné M. [X] à payer à la CPAM de l'Artois la somme de 400 euros ;

condamné M. [X] aux dépens.

3. Les déclarations d'appel :

Par déclaration du 21 juillet 2022, M. [X] a formé appel, dans des conditions de forme et de délai non contestées, de l'ordonnance susvisée en toutes ses dispositions.

Cette procédure a été enrôlée sous le numéro n° RG 22-03574.

Par déclaration du 29 juillet 2022, les ACM ont formé appel, dans des conditions de forme et de délai non contestées, de l'ordonnance de référé en limitant leur contestation au seul chef du dispositif numéroté 4 ci-dessus.

Cette procédure a été enrôlée sous le numéro n° RG 22-03718.

Par déclaration du 6 septembre 2022, les ACM ont formé appel, dans des conditions de forme et de délai non contestées, de l'ordonnance en limitant la contestation du jugement critiqué au seul chef du dispositif numéroté 4 ci-dessus.

Cette procédure a été enrôlée sous le numéro n° RG 22-04250.

Par ordonnance du 14 septembre 2022, le président de la 3ème chambre civile a ordonné la jonction de la procédure n° RG 22-03718 à la procédure n° RG 22-3574.

Par ordonnance du 1er décembre 2022, le président de la 3ème chambre civile a ordonné la jonction de la procédure n° RG 22-04250 à la procédure n° RG 22-3574.

4. Les prétentions et moyens des parties :

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 8 novembre 2022, M. [X], appelant principal, demande à la cour, au visa des articles 455 et 145 du code de procédure civile, de :

- ordonner la jonction pour une bonne administration de la justice des affaires RG 22-03574 à la suite de la déclaration d'appel n°22-04110, et RG 22-04250 à la suite de la déclaration d'appel n°22-04831 ;

- infirmer l'ordonnance querellée ;

statuant à nouveau, à titre principal,

- constater l'existence de contestations sérieuses et l'incompétence du juge des référés ;

- débouter Mme [M] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouter la CPAM de ses demandes ;

à titre subsidiaire,

- débouter les ACM de leur argumentation quant à l'irrecevabilité de ses demandes à leur encontre ;

- prendre acte qu'il soulève réserves et protestations d'usage quant aux opérations d'expertise auxquelles il serait fait droit ;

- débouter Mme [M] de sa demande de provision à valoir sur son préjudice ;

- débouter la CPAM de toutes demandes ;

- à titre infiniment subsidiaire, en cas de condamnation prononcée à son encontre, condamner solidairement les ACM au titre du contrat les liant à toute somme qui serait mise à sa charge ;

- débouter les parties adverses de leur demande au titre des dépens.

A l'appui de ses prétentions, M. [X] fait valoir que :

- il existe des contestations sérieuses qui empêchent le juge des référés de pouvoir faire droit aux demandes de Mme [M] ;

- le premier juge admet qu'il n'appartient pas au juge des référés, juge de l'évidence, d'interpréter les clauses du contrat d'assurance ;

- il existe un débat sur le comportement de la victime, les circonstances de l'accident, et la prise en charge par l'assureur qui entend lui opposer une clause d'exclusion de garantie ;

- les conditions particulières du contrat d'assurance excluent la prise en charge des dommages corporels causés à un tiers en cas de dommages résultant de travaux de démolition touchant à l'ossature d'un immeuble ;

- il considère que la victime a commis une faute de nature à entraîner à tout le moins un débat sur un partage de responsabilité, dans la mesure où elle a pénétré sur sa propriété privée et s'est dirigée vers le mur en travaux malgré la barrière en interdisant l'accès ;

- une demande ne peut être formulée en application de l'article 145 du code de procédure civile, sans que l'interprétation et l'application de la règle de droit, ainsi que la qualification des faits ne soient au préalable déterminées ;

- il conteste formuler toute demande nouvelle à l'égard des ACM au sens de l'article 564 du code de procédure civile ; sa prétention n'est pas formulée pour la première fois en cause d'appel, dès lors qu'il s'agit de faire écarter les prétentions adverses ;

- la CPAM de l'Artois n'est pas recevable en sa demande tendant à obtenir paiement d'une provision, dans la mesure où le premier juge a déclaré l'ordonnance commune à la CPAM Côte d'Opale, et non à la CPAM de l'Artois.

Aux termes de leurs conclusions notifiées le 24 novembre 2022, les ACM, partie appelante, demandent à la cour, au visa des articles 145, 564, 834 du code de procédure civile, de :

- juger M. [X] irrecevable en ces demandes formulées à leur encontre ;

- vu l'existence de contestations sérieuses, les juger recevables en leur appel incident ;

- réformer l'ordonnance querellée en ce que le juge des référés les a condamnées à payer à Mme [M] la somme de 1 500 euros à titre de provision ;

statuant de nouveau,

- juger l'existence de multiples contestations sérieuses ;

- se déclarer incompétent ;

- débouter Mme [M] de toutes ses demandes formulées à leur encontre ;

- condamner Mme [M] ou tout succombant à payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [M] ou tout succombant aux entiers frais et dépens.

A l'appui de leurs prétentions, les ACM font valoir que :

- la demande de M. [X] tendant, en cas de condamnation prononcée à son encontre, à condamner solidairement son assureur au titre du contrat les liant à toute somme mise à sa charge, est irrecevable en application des dispositions de l'article 564 précité comme nouvelle en cause d'appel ;

- des propres déclarations de M. [X], il apparaît que le mur litigieux était en cours de démolition, ce qui explique sa chute ;

- les conditions générales du contrat assurance habitation souscrit par M. [X], qui reconnaît en avoir pris connaissance et les avoir acceptées, prévoient en page 10 que sont exclus de la garantie les dommages résultant de travaux notamment de réhabilitation, construction, démolition touchant à l'ossature de l'immeuble et effectués par les assurés, leurs aides bénévoles, et/ou leurs préposés occasionnels ;

- ces conditions générales ainsi que l'exclusion de garantie sont totalement opposables à M. [X] ;

- par courrier du 29 mars 2022, elles ont avisé M. [X] qu'elles refusaient de garantir le sinistre ;

- un tel débat de fond échappe à la compétence du juge des référés, et constitue un motif de contestation sérieuse qui doit conduire au débouté de la demande de provision ;

- en outre, Mme [M] a commis une faute de nature à exclure son droit à indemnisation ; elle a reconnu avoir forcé une barrière, et avoir gratté le mur avec un morceau de ferraille provoquant ainsi son effondrement ;

- en application de l'article 834 précité, l'existence d'une contestation sérieuse sur l'obligation à garantie de l'assureur fait obstacle à l'allocation d'une provision en référé ;

- le juge des référés n'est pas juge de l'interprétation du contrat ;

- la cour est incompétente pour statuer sur la demande de rectification d'erreur matérielle de la CPAM de l'Artois.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 29 septembre 2022, Mme [M], intimée, demande à la cour, au visa de l'article 145 du code de procédure civile, de confirmer l'ordonnance dont appel en toutes ses dispositions, de débouter M. [X] de l'ensemble de ses demandes, et de condamner M. [X] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

A l'appui de ses prétentions, Mme [M] fait valoir que :

- le mur en maçonnerie briques appartenant à M. [X] s'est effondré sur elle sans raison particulière ;

- elle souhaite engager une action en responsabilité civile contre le propriétaire du mur sur le fondement de l'article 1244 du code civil ;

- les dispositions de l'article 145 du code civil ne subordonnent pas la mise en 'uvre d'une mesure d'instruction à l'absence de contestation sérieuse ;

- l'argumentation concernant, d'une part, les dispositions générales et particulières du contrat d'assurance et, d'autre part, le comportement de la victime sont hors débat s'agissant de la demande d'expertise judiciaire ;

- son droit à indemnisation ne saurait être contesté, et elle souligne l'importance de son préjudice.

4.4. Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 7 novembre 2022, la CPAM de l'Artois, intimée et appelante incidente, demande à la cour de :

- rectifier l'ordonnance querellée ;

- remplacer la phrase contenue dans le dispositif « disons la présente ordonnance commune à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale », par la phrase suivante « disons la présente ordonnance commune à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois » ;

- confirmer l'ordonnance querellée en toutes ses dispositions ;

- juger que sa créance provisoire s'élève à 42 784,57 euros ;

- juger qu'elle ne s'oppose pas à la mesure d'expertise sollicitée ;

- condamner M. [X] à lui verser une indemnité de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, la CPAM de l'Artois expose que :

- en application de l'article 462 du code de procédure civile, elle sollicite la rectification de l'erreur purement matérielle figurant dans le dispositif de l'ordonnance, lequel mentionne la CPAM Côte d'Opale qui est étrangère à l'assignation en référé ;

- son relevé de débours provisoires établi le 5 juillet 2021 s'élève à la somme de 42 784,57 euros.

Pour un plus ample exposé des moyens de chacune des parties, il y a lieu de se référer aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 28 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il s'observe que la demande de M. [X] tendant à voir ordonner la jonction de la procédure n° RG 22-04250 à la procédure n° RG 22-03574 est devenue sans objet, le magistrat chargé de la mise en état ayant précédemment ordonné les jonctions par ordonnances du 14 septembre et 1er décembre 2022.

En application de l'article 954 du code de procédure civile, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les « dire et juger » et les « constater » qui ne sont pas des prétentions en ce qu'ils ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert dès lors qu'ils s'analysent en réalité comme le rappel des moyens invoqués, ou en ce qu'ils formulent exclusivement des réserves alors que la partie qui les exprime n'est pas privée de la possibilité d'exercer ultérieurement les droits en faisant l'objet.

Sur la recevabilité en appel de la demande formulée par M. [X] à l'égard des ACM

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenue ou de la révélation d'un fait.

Les ACM considèrent que la demande de M. [X] tendant, en cas de condamnation prononcée à son encontre, à les condamner solidairement au titre du contrat les liant à toute somme mise à sa charge, est irrecevable comme nouvelle en cause d'appel.

Dès lors que les ACM et M. [X] ont été assignés en référé par Mme [M], et que celle-ci a sollicité leur condamnation solidaire à lui payer une provision à valoir sur la liquidation ultérieure de son préjudice, M. [X] est recevable en sa prétention tendant, en cas de condamnation prononcée à son encontre, à le voir condamné solidairement avec les ACM au titre du contrat les liant à toute somme mise à sa charge, cette prétention ne constituant pas une demande nouvelle en cause d'appel, mais tendant à faire échec aux prétentions adverses.

La demande de M. [X] est recevable devant la cour.

Sur la mesure d'instruction

Selon l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Aucune condition relative à l'urgence ou à l'absence de contestation sérieuse n'est requise en la matière. Si les dispositions de l'article 146 du code de procédure civile ne sont par ailleurs pas applicables au référé-expertise, il appartient cependant au demandeur d'établir l'intérêt probatoire de la mesure d'instruction sollicitée, même en présence d'un motif légitime.

L'appréciation du motif légitime de nature à justifier l'organisation d'une mesure d'instruction doit être envisagée au regard de la pertinence des investigations demandées et de leur utilité à servir de fondement à l'action projetée qui ne doit pas manifestement être vouée à l'échec.

En l'espèce, Mme [M] verse au débat un certificat médical du centre hospitalier de [Localité 13] établi le 23 septembre 2020, dont il résulte qu'elle a été hospitalisée du 6 au 23 septembre 2020 par suite d'un polytraumatisme domestique lui occasionnant une fracture de l'omoplate droite, des fractures de côtes droites, un hémopneumothorax droit, une fissure du scaphoïde droit, des fractures des extrémités supérieures et inférieures du péroné gauche.

Elle produit également des certificats médicaux du 5 octobre et 18 novembre 2020 des docteurs [I] et [R], lesquels établissent qu'elle a été hospitalisée en soins de suite et de réadaptation au centre hospitalier de [Localité 13] du 23 septembre au 15 novembre 2020, date à laquelle elle a pu regagner son domicile ; il lui avait également été diagnostiqué une entorse au genou droit et une fracture bi-malléolaire gauche.

Elle produit le rapport technique d'expertise amiable diligentée le 10 juin 2021 à l'initiative de son propre assureur, la Macif, ainsi que le procès-verbal du 6 septembre 2020 de constatations relatives, aux causes et circonstances et à l'évaluation des dommages imputables au sinistre survenu le 6 septembre 2020, des photographies des lieux, et la déclaration d'accident corporel rédigée à l'intention des ACM le 1er octobre 2020 par M. [X] en ces termes : « le 6 septembre 2020 au[x] environ[s] de 11 heures 30, en passant le long d'un mur, celui-ci s'est décroché, en tombant il a entraîné Mme [M] qui s'est retrouvée au sol. »

Un voisin ayant porté assistance à la victime témoigne du fait suivant : « le 6 septembre 2020 aux environs de 11 heures 30, M. [X] [mon] voisin d'en face est venu [me] demand[er] de l'aide pour dégag[er] les jambes de Mme [M] prise sous les gravats. »

De l'ensemble de ces pièces et considérations, Mme [M] démontre suffisamment l'existence d'un motif légitime à voir ordonner une mesure d'expertise médicale judiciaire pour apprécier les lésions imputables à l'accident et apprécier l'ensemble de ses préjudices corporels.

Au regard d'un tel motif légitime, il convient de confirmer l'ordonnance critiquée ayant ordonné une mesure d'expertise.

L'ordonnance querellée sera confirmée en ce qu'elle a ordonné une mesure d'expertise médicale judiciaire, et désigné l'expert M. [P] [J] pour y procéder, avec mission habituelle.

Sur le référé-provision

Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

La preuve d'une telle contestation sérieuse repose sur le débiteur de cette obligation.

La condition de l'urgence n'est en revanche pas exigée.

L'appréciation du caractère sérieusement contestable porte à la fois sur le principe et le montant de la provision sollicitée.

Par ailleurs, lorsqu'il s'agit d'apprécier si les critères du référé sont réunis, la juridiction peut valablement porter une appréciation sur une question juridique, qui n'a toutefois aucune autorité de chose jugée à l'égard de la juridiction ultérieure éventuellement saisie au fond.

La cour rappelle qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du requérant n'apparaît pas immédiatement vain, et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond, qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point, si les parties entendaient saisir le juge du fond ; qu'en conséquence, la contestation sérieuse est celle qui paraît susceptible de prospérer au fond.

En l'espèce, l'appréciation du comportement inadapté de la victime à l'intérieur d'une propriété privée, lequel aurait concouru à la réalisation de son propre dommage, outre celle de la nature et de la gravité des fautes qu'elle aurait pu commettre, et enfin de la responsabilité pesant sur le propriétaire gardien, relève à l'évidence de la compétence du juge du fond.

Il n'appartient pas au juge des référés de trancher la contestation sérieuse relative au principe même et à l'étendue du droit à indemnisation de la victime, et donc de dire en l'espèce, comme l'a fait le premier juge, que le droit à indemnisation de Mme [M] n'est pas contestable, d'autant que les circonstances dans lesquelles les faits sont survenus ne permettent pas d'exclure l'hypothèse d'une exclusion totale du droit à indemnisation de la victime.

Au demeurant, le juge des référés, juge de l'évidence, n'est pas compétent pour interpréter les termes de la police d'assurance souscrite par M. [X] auprès des ACM, ni davantage pour apprécier l'étendue des stipulations contractuelles liant les parties.

Il s'ensuit que les demandes de provision, tant de Mme [M] que de la CPAM de l'Artois, se heurtent à une contestation sérieuse excédant manifestement la compétence du juge des référés.

Par conséquent, il y a lieu d'infirmer l'ordonnance querellée en ce qu'elle a condamné M. [X] et les ACM à payer à Mme [M] la somme de 1 500 euros à titre de provision, et condamné M. [X] à payer à la CPAM de l'Artois la somme provisionnelle de 42 784,57 euros, et de rejeter leurs demandes à ce titre.

Sur la rectification de l'erreur purement matérielle

Aux termes de l'article 462 du code de procédure civile, les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.

En application de ce texte, le jugement argué d'erreur est réputé déféré à la cour d'appel et ne peut plus être rectifié que par elle à compter de l'inscription de l'appel au rôle de la cour.

En l'espèce, il n'est pas contestable que seule la CPAM de l'Artois, et non la CPAM de la Côte d'Opale, a fait l'objet d'une assignation en référé comme partie intervenante et qu'elle est également la seule à avoir versé des prestations à Mme [M] à la suite du fait dommageable survenu le 6 septembre 2020.

Dans sa motivation en page quatre, le premier juge a indiqué : « la présente décision sera déclarée commune et opposable à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois ».

C'est manifestement par erreur qu'il a ensuite mentionné dans le dispositif « disons la présente ordonnance commune à la caisse primaire d'assurance maladie Côte d'Opale », alors que celle-ci n'était pas partie à l'instance.

L'ordonnance querellée sera donc rectifiée en ce sens.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sens de l'arrêt conduit à infirmer l'ordonnance querellée sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens exposés tant en première instance qu'en appel.

L'équité conduit la cour à débouter Mme [M], les ACM et la CPAM de leurs demandes au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare sans objet la demande tendant à voir ordonner la jonction de la procédure n° RG 22-04250 à la procédure n° RG 22-03574 ;

Déclare recevables les demandes formulées en cause d'appel par M. [H] [X] ;

Rectifie l'ordonnance rendue le 12 juillet 2022 par le président du tribunal judiciaire de Saint-Omer, et la déclare commune à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois, et non à la caisse primaire d'assurance maladie Côte d'Opale ;

Confirme en toutes ses autres dispositions l'ordonnance rendue le 12 juillet 2022 par le président du tribunal judiciaire de Saint-Omer, sauf en ce qu'elle a :

condamné M. [H] [X] et la société Assurances du crédit mutuel Iard à payer à Mme [F] [M] la somme de 1 500 euros à titre de provision ;

condamné M. [H] [X] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois la somme provisionnelle de 42 784,57 euros ;

condamné M. [H] [X] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois la somme de 400 euros ;

condamné M. [H] [X] aux dépens ;

L'infirme de ces chefs ;

Prononçant à nouveau des chefs infirmés, et y ajoutant,

Déboute Mme [F] [M] de sa demande de provision ;

Déboute la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois de sa demande de provision ;

Déboute les parties de leurs plus amples prétentions ;

Dit que chaque partie conservera à sa charge les frais et dépens qu'elle a exposés en première instance et en appel ;

Déboute Mme [F] [M], la société Assurances du crédit mutuel Iard, et la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier

Harmony Poyteau

Le Président

Guillaume Salomon


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Troisieme chambre
Numéro d'arrêt : 22/03574
Date de la décision : 16/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-16;22.03574 ?
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