République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 16/02/2023
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N° de MINUTE :
N° RG 21/02565 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TTHY
Ordonnance (N°19/03133) rendue le 10 Novembre 2020 par le juge commissaire du tribunal judiciaire de Béthune
Ordonnance (21/399) rendue le 16 décembre 2021 par la 2ème chambre de la cour d'appel de Douai
Ordonnance (22/227) rendue le 19 mai 2022 par la 2ème chambre de la cour d'appel de Douai
APPELANTE
SCI Les Troènes agissant en la personne de son gérant Monsieur [U] [P] domicilié en cette qualité audit siège
ayant son siège social [Adresse 2]
représentée par Me Cindy Denisselle-Gnilka, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué
INTIMÉS
SCI des Hauts d'Eleu - société placée en liquidation judiciaire -
ayant son siège social [Adresse 1]
représentée par Me Faten Boubziz, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
Maître [E] [B] pris en sa qualité de Mandataire à la liquidation judiciaire de la SCI des Hauts d'Eleu
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Xavier Brunet, avocat au barreau de Béthune, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 06 décembre 2022 tenue par Nadia Cordier magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Samuel Vitse, président de chambre
Nadia Cordier, conseiller
Agnès Fallenot, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 16 février 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Samuel Vitse, président et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 15 novembre 2022
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Par jugement du 29 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Béthune a ouvert une procédure de redressement judiciaire au profit de la SCI des Hauts d'Eleu, nommant la SELARL [B], prise en la personne de Me [B], en qualité de mandataire judiciaire.
La SCI Les troènes a déclaré au passif de la procédure collective de la SCI des Hauts d'Eleu plusieurs créances pour un montant total de 108 910 euros à titre chirographaire se décomposant comme suit :
- préjudice de jouissance : 26 910 euros au 31.12.2019
- provision sur préjudice de jouissance : 30 000 euros
- astreinte : 5000 euros (jugement du 17 janvier 2019)
- astreinte à liquider : 19 500 euros (jugement du 17 janvier 2019)
- travaux à réaliser : 10 000 euros.
-frais d'expertises, huissier de justice et avocat : 15 000 euros ;
- article 700 CPC : 2500 euros.
Par ordonnance contradictoire et en premier ressort en date du 10 novembre 2020, le juge commissaire du tribunal judiciaire de Béthune en charge de la procédure collective de la SCI des Hauts d'Eleu, a :
- accueilli partiellement la contestation formée ;
- rejeté en totalité les créances suivantes :
- provision sur préjudice de jouissance : 30 000 euros
- travaux à réaliser 10 000 euros ;
- admis la créance de la SCI Les troènes au passif de la procédure collective de la SCI des hauts d'Eleu à titre chirographaire pour les sommes suivantes :
- 26 460 euros au titre du préjudice de jouissance ;
- 5 000 euros au titre de l'astreinte (jugement du 17 janvier 2019)
- 442,55 euros au titre des frais d'expertise, d'huissier de justice et d'avocat ;
- 2 500 euros au titre de l'article 700 ;
- rejeté pour le surplus ;
- constaté que la contestation portant sur la créance de 19 500 euros afférente à l'astreinte à liquider en vertu du jugement du 17 janvier 2019 dépasse l'office juridictionnel du juge commissaire ;
-renvoyé en conséquence les parties à mieux se pourvoir ;
- invité la SCI Les troènes à saisir le juge compétent dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'ordonnance et de la réception de l'avis délivré à cette fin, à peine de forclusion ;
- renvoyé à l'audience du 27 janvier 2021 à 14 h pour examen de la saisine du juge compétent par la SCI Les troènes dans le délai imparti ;
- dit que la présente décision sera notifiée par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception par le greffe à la SCI Les troènes ainsi qu'à la SCI des Hauts d'Eleu et qu'avis en sera donné à Me [B] ;
- réservé les dépens.
Par acte en date du 7 mai 2021, la SCI les troènes a interjeté appel, rédigeant ainsi sa déclaration d'appel : « JUGER nulle la notification de l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 10 novembre 2020 JUGER recevable le présent recours en appel à l'encontre de l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 10 novembre 2020 INFIRMER l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 10 novembre 2020 en ce qu'il a rejeté partiellement la créance déclarée par la SCI LES TROENES relative à : - Travaux à réaliser : 10 000 euros - Frais d'expertise, huissiers de justice et avocat : 15 000 euros JUGER que le délai laissé à la SCI LES TROENES pour saisir le juge compétent aux fins de liquidation de la créance de 19 500 euros afférente à l'astreinte à liquider en vertu du jugement du 17 janvier 2019 n'a pas couru, EN CONSÉQUENCE, ADMETTRE la créance de la SCI LES TROENES à titre chirographaire pour les sommes suivantes : - 10 000 euros au titre des travaux à réaliser et subsidiairement à hauteur de 7 294,35 euros - 11 069,11 euros au titre des frais d'expertise, huissiers de justice et avocat STATUANT A NOUVEAU, ADMETTE au surplus la créance de la SCI LES TROENES à titre chirographaire pour les sommes suivantes : - 19 890 euros au titre de l'astreinte liquidée du 18 avril au 18 septembre 2019, - 1 200 euros au titre des frais irrépétibles - 124,57 au titre des dépens ».
Par jugement du 7 juillet 2021, la société des Hauts d'Eleu a été placée en liquidation judiciaire simplifiée, la SELURL [B], prise en la personne de Me [B], étant nommée en qualité de liquidateur judiciaire.
Par ordonnance en date du 16 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a :
- rejeté la demande d'irrecevabilité des conclusions d'incident de la société SCI des Hauts d'Eleu ;
- rejeté la demande de nullité de la déclaration d'appel de la SCI Les troènes en date du 7 mai 2021 ;
- rejeté la demande d'irrecevabilité de l'appel à raison de la nullité de la déclaration d'appel ;
- dit n'y avoir lieu à déclarer l'ordonnance à intervenir opposable à Me [B], ès qualités ;
- condamné la SCI des Hauts d'Eleu à payer à la SCI Les troènes la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la SCI des Hauts d'Eleu de sa demande d'indemnité procédurale ;
- condamné la SCI des Hauts d'Eleu aux dépens de l'incident.
Par ordonnance en date du 19 mai 2022, le conseiller de la mise en état a :
- déclaré irrecevables les conclusions de la SCI des Hauts d'Eleu, au titre de son droit propre, sur le fond en date du 23 septembre 2021 et portant appel incident ;
- condamné la SCI des Hauts d'Eleu à payer à la SCI des Troènes la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la SCI des Hauts d'Eleu de sa demande d'indemnité procédurale ;
- condamné la SCI des Hauts d'Eleu aux entiers dépens de l'incident.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Par conclusions remises au greffe et notifiées entre parties par voie électronique en date du 1er juillet 2021, la SCI des Troènes demande à la cour de :
« Vu les articles R 661-3 du code de commerce,
Vu les articles 112, 114, 558, 680, 693
- juger nulle la notification de l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 10 novembre 2020 ;
- juger recevable le présente recours en appel à l'encontre de l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 10 novembre 2020 ;
- infirmer l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 10 novembre 2020 en ce qu'il a rejeté partiellement la créance déclarée par la SCI les troènes relative à :
- travaux réaliser : 10 000 euros
- frais d'expertise, huissier de justice et avocat : 15 000 euros
- juger que le délai laissé à la SCI les Troènes pour saisir le juge compétence aux fins de liquidation de la créance de 19 500 euros afférente à l'astreinte à liquider en vertu du jugement du 17 janvier 2019 n'a pas couru ;
- en conséquence,
- admette la créance de la SCI les Troènes à titre chirographaire pour les sommes suivantes :
- 10 000 euros au titre des travaux à réaliser et subsidiairement à hauteur de 7 294,35 euros,
- 11 069,11 euros au titre des frais d'expertises, huissiers de justice et avocat
- statuant à nouveau,
- admette au surplus la créance de la SCI Les troènes à titre chirographaire pour les sommes suivantes :
- 19 890 euros au titre de l'astreinte liquidée du 18 avril au 18 septembre 2019 ;
- 1 200 euros au titre des frais irrépetibles
- 124,57 euros au titre des dépens.
- condamné la SCI des Hauts d'Eleu et Me [E] [B] ès qualités au paiement d'une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ».
Elle fait valoir que la nullité de la notification effectuée lui a fait grief puisqu'elle a saisi sur opposition le tribunal judiciaire et a vu sa demande déclarée irrecevable. Par jugement définitif, le tribunal de Béthune a déclaré la notification intervenue nulle.
Elle souligne que la SCI des Hauts d'Eleu ne s'est pas exécutée malgré l'astreinte fixée dans la décision dont l'exécution a été ordonnée. Les travaux n'ont pas été réalisés et elle a obtenu une décision du juge de l'exécution qui a liquidé l'astreinte, ce jugement étant définitif.
Elle conteste le rejet par le juge-commissaire de la créance au titre des travaux, lequel a concomitamment pris en considération le préjudice de jouissance ce qui prouve que les travaux n'ont pas été exécutés. Elle sollicite également la réformation de l'ordonnance sur les frais d'expert, d'huissier et d'avocat.
Sur l'astreinte, le juge commissaire ayant renvoyé les parties à mieux se pourvoir, la liquidation a été effectuée par le juge de l'exécution par jugement rendu le 15 avril 2021. En vertu du jugement du 24 mars 2020 et compte tenu de la nullité alléguée de la notification de l'ordonnance du juge commissaire, il est demandé à la cour de juger que le délai n'a pas couru. Au regard de son pouvoir d'évocation, la cour admettra la créance pour un montant de 19 890 euros au titre de l'astreinte définitive sur la période du 18 avril au 18 septembre 2019, outre 1200 euros au titre des frais irrépetibles et 124,57 euros au titre des dépens.
Par conclusions remises au greffe et notifiées entre parties par voie électronique en date du 23 septembre 2021, la SELURL [B], prise en la personne de Me [E] [B], en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI des Hauts d'Eleu, demande à la cour de :
« Dire mal appelé et bien jugé,
- Confirmer l'ordonnance rendue le 10 novembre 2020 par le juge commissaire du tribunal judiciaire de Béthune en ce qu'elle a :
- rejeté les créances déclarées pour les sommes de :
- 30 000 euros à titre de provision sur le préjudice de jouissance
- 10 000 euros au titre des travaux à réaliser
- admis la créance de la SCI LES TROËNES au passif de la SCI DES HAUTS d'ELEU à hauteur de la somme de 442,55 euros au titre des frais d'expertise, d'Huissiers de Justice et d'Avocat '
- rejeté pour le surplus
- Constatant que le jugement rendu le 15 avril 2021 par le Juge de l'Exécution du Tribunal Judiciaire de Béthune n'est pas définitif,
- En conséquence,
- Débouter l'Appelante de ses demandes tendant à l'admission de sa créance pour les sommes de 19 890 euros au titre de l'astreinte liquidée du 18 avril au 18 septembre 2019, 1 200 euros au titre des frais irrépétibles et enfin 124,57euros au titre des dépens ».
- Condamner la SCI DES TROENES au paiement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, au titre des frais irrépétibles occasionnés dans le cadre de la présente procédure ».
L'intimée plaide que concernant la demande d'admission au titre des travaux, la situation demeure inchangée en cause d'appel, l'appelant ne s'expliquant ni sur le fondement de sa créance ni sur la notion de travaux, ne produisant aucun justificatif au soutien de sa demande.
Concernant la demande au titre des frais, le premier juge avait retenu qu'il n'était produit, à l'exception des frais de signification du jugement, aucun justificatif des dépens et en particulier des frais d'expertise. Les frais d'expertise ne sont toujours pas justifiés en cause d'appel. S'agissant des frais d'avocat, l'appelante ne dispose d'aucun titre, les indemnités allouées en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ayant pour leur part fait l'objet d'une admission à hauteur de la somme de 2 500 euros.
Concernant l'astreinte, la décision rendue le 15 avril 2021 est frappée d'appel, de sorte qu'en l'absence de son caractère définitif, les sommes reprises aux termes de ce jugement ne peuvent faire l'objet d'une admission.
Faute pour la SCI des Hauts d'Eleu d'avoir conclu dans les délais impartis à l'article 909 du code de procédure civile et d'avoir formé appel incident recevable, la cour n'est valablement saisie d'aucun jeu d'écritures de sa part.
***
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 novembre 2022.
À l'audience du 6 décembre 2022, le dossier a été mis en délibéré au 16 février 2023.
Il a été sollicité, à l'audience, des observations sur les suites de l'appel formé contre la décision du juge de l'exécution du 15 avril 2021 et la communication de l'arrêt éventuellement rendu par la cour d'appel sur ce jugement.
La SCI Les troènes a communiqué en retour l'arrêt de la cour d'appel du 15 octobre 2021, intervenu sur l'appel formé contre la décision précitée.
Par message RPVA en date du 5 janvier 2023, la cour a invité les parties, concernant les condamnation à l'indemnité procédurale et aux dépens afférentes à la décision du juge de l'exécution du 15 avril 2021 et à l'arrêt de la cour d'appel du 15 octobre 2021, s'agissant de créances potérieures nées régulièrement mais non pour les besoins de la procédure collective, à présenter la déclaration de créance effectuée et présenter leurs observations, en tant que de besoin, en l'absence de déclaration de créance, sur l'irrecevabilité, relevée d'office, de la demande d'admission de créance formée devant la présente juridiction.
Par note en délibéré en date du 6 janvier 2023, la société SCI Les troènes indique produire en pièce 4 une première déclaration de créance effectuée le 28 janvier 2020, déclarant à titre chirographaire une somme de 15 000 euros à valoir sur les frais d'expertise, huissier de justice et avocat, auxquels se rapportent notamment les dépens et indemnité de procédure.
Elle précise avoir réitéré une déclaration de créances après ouverture de la liquidation judiciaire, qu'elle communique en pièce jointe, reprenant ces frais outre provision sur frais et dépens de 10 000 euros, l'article 700 du code de procédure civile et les dépens à hauteur de 360 euros auprès du mandataire.
MOTIVATION :
- Sur la nullité de la notification de l'ordonnance rendue et la recevabilité de l'appel
Aux termes des dispositions de l'article R 661-3 du code de commerce, le délai d'appel des parties est de 10 jours à compter de la notification qui leur est faite des décisions rendues par le juge commissaire en matière d'admission des créances.
L'article 680 du code de procédure civile dispose que l'acte de notification d'un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l'une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé.
Conformément aux dispositions de l'article 693 du même code, ces prescriptions le sont à peine de nullité.
L'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités, ne fait pas courir le délai de recours.
En contrariété avec les dispositions ci-dessus rappelées de l'article R 661-3 du code de commerce, la notification adressée par le greffe de l'ordonnance querellée envisage pour toute voie de recours une « opposition dans le délai de 10 jours à compter de la présente notification par simple déclaration au greffe du tribunal judiciaire de Béthune ».
Cette notification erronée n'a pu faire courir les délais d'appel et a nécessairement fait grief à l'appelant, ce dernier ayant régularisé une opposition devant le tribunal judiciaire de Béthune, lequel a, par jugement du 24 mars 2020, déclaré ledit recours irrecevable.
En conséquence, cette notification doit être annulée et l'appel de l'ordonnance querellée, régularisé le 7 mai 2021 doit être jugé recevable.
- Sur l'admission de créances
Aux termes des dispositions de l'article L 622-24 du code de commerce, à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leur créance au mandataire judiciaire.
Conformément aux dispositions de l'article R 622-23 du code de commerce, le créancier doit apporter les éléments de nature à prouver l'existence et le montant de sa créance, à défaut une évaluation de la créance si son montant n'a pas encore été fixé, ainsi que tous documents permettant d'en justifier.
L'appel de la SCI Les troènes porte uniquement sur le rejet de la créance au titre des travaux à réaliser, des frais de justice, limité à la somme de 442 euros, et des mentions relatives à l'astreinte.
- sur la créance de 10 000 euros au titre des travaux à réaliser
Par jugement du tribunal de grande instance de Béthune en date du 14 novembre 2017, il a été décidé que la SCI des Hauts d'Eleu s'engageait à réaliser les travaux nécessaires aux fins de déplacer le mur empiétant sur la servitude litigieuse dans la limite de celle-ci, ordonné le rétablissement de la servitude de passage visée dans l'acte notarié, ordonné la démolition des constructions édifiées par la société civile immobilière des Hauts d'Eleu qui empiètent sur l'assiette de cette servitude en procédant à la remise en état des lieux conformément aux préconisations de l'expert, condamné la société des Hauts d'Eleu à effectuer les travaux permettant d'assurer l'écoulement des eaux pluviales sans intrusion dans la propriété de la société civile immobilière les Troènes, condamné la société civile immobilière des Hauts d'Eleu à remettre en état le sol de la servitude.
Le jugement, qui n'a fait l'objet d'aucun appel, a été signifié le 6 décembre 2017, la SCI Les Troènes justifiant bien ainsi d'une créance de travaux certaine à l'encontre de la société des Hauts d'Eleu.
Les éléments versés aux débats établissent que cette dernière, en liquidation judiciaire, n'a pas exécuté lesdits travaux, ce qui justifie la demande indemnitaire formulée par la société SCI Les troènes au titre des travaux à effectuer.
Les pièces communiquées, et notamment l'expertise, permettent, au vu du chiffrage réalisé par l'expert dans le cadre de son rapport, au titre des travaux préconisés et mis à la charge de la SCI des Hauts d'Eleu, de retenir que le préjudice de la société Les Troènes est justifié pour le montant de 4 400 euros TTC au titre des travaux de reprise de la servitude (p11) et 1 080 euros TTC en ce qui concerne les « préjudices relatifs aux désordres sur la partie latérale arrière, pour mémoire impact sur le pilastre extérieur, éclats et impacts sur le couronnement du poteau » (p16).
Le montant de 1 814,35 euros relatif à des premiers travaux de réfection, déboursé par la SCI Les troènes, ne saurait être pris en compte, l'expert ayant expressément noté que ces travaux étaient provisoires, prématurés et n'étaient pas pertinents dans sa réponse aux dires (p14).
La SCI Les troènes ne formule aucune demande relative au poste principal correspondant à la démolition des ouvrages implantés sur la servitude et chiffré par l'expert à un montant de 8 800 euros TTC.
Aucune explication ni justificatif ne sont fournis à l'appui de sa demande portant sur la somme de 2 705, 65 euros, qui ne peut donc qu'être rejetée.
Au vu des éléments fournis, la créance au titre des travaux à réaliser est admise pour un montant de 5 480 euros TTC.
- sur la créance au titre des frais d'expert, huissier de justice et avocat :
Selon le jugement du tribunal de grande instance de Béthune en date du 14 novembre 2017, la SCI des Hauts d'Eleu a été condamnée aux dépens, en ce compris les frais d'expertise.
Contrairement à ce qu'affirme le liquidateur judiciaire de la SCI des Hauts d'Eleu, le justificatif des frais d'expertise se trouve bien versé désormais, en cause d'appel, l'ordonnance de taxe en date du 22 mars 2016 les ayant arrêtés à la somme de 1 946,30 euros.
La SCI Les troènes sollicite un montant de 1 071,81 euros au titre des frais d'huissier de justice, sans imputer les frais selon les différentes procédures menées à l'encontre de la SCI des Hauts d'Eleu. Elle produit des justificatifs et un certain nombre d'actes.
Aucune contestation n'est élevée par le liquidateur à l'encontre du montant réclamé, la cour constatant toutefois que les frais de l'assignation en redressement judiciaire (30 juillet 2019 pour 68,90 €) ne peuvent être inclus dans le décompte produit, le jugement puis l'arrêt confirmatif ayant ordonné l'emploi des dépens en frais de procédure collective.
Il est justifié du coût de l'assignation en date du 30 août 2018 ayant donné lieu au jugement du 17 janvier 2019 (68,85 €) ayant mis les dépens à la charge de la SCI des Hauts d'Eleu, de l'assignation en date du 10 juin 2016 ayant donné lieu au jugement du 14 novembre 2017 (67,26 €) et de signification dudit jugement (86,87 €), lequel a mis les dépens à la charge de la SCI des Hauts d'Eleu.
Il est en outre produit les justificatifs des frais afférents aux procédures d'exécution mises en 'uvre en 2018 et en 2019 pour obtenir l'exécution des jugements du 14 novembre 2017 et du jugement du 17 janvier 2019, pour un montant de 355,88 € et 424,05 €.
Ainsi, la somme de 1 002,91 € se trouve admise au titre des frais d'huissier.
S'agissant des frais d'avocat, à juste titre, le premier juge les a écartés, ces derniers étant pris en compte dans le cadre des montants déclarés au titre de l'article 700 du code de procédure civile, lesquels n'ont pas été déférés, au vu du caractère limité de l'appel formé, à la cour, laquelle ne reste donc saisie que des montants relatifs aux frais d'avocat non compris au titre des frais irrépétibles de la présente procédure et de ceux issus de la procédure en liquidation de l'astreinte, sur lesquels il sera statué à l'issue du présent arrêt.
- sur la liquidation de l'astreinte
À juste titre le premier juge a, usant des dispositions de l'article L 624-2 du code de commerce, invité la SCI Les troènes, à saisir la juridiction compétente en vue de liquider l'astreinte, faute de pouvoir juridictionnel lui permettant de le faire.
La demande d'infirmation de ce chef présentée par la SCI Les troènes ne peut qu'être rejetée.
L'argumentation de la société SCI Les troènes relative à l'irrégularité de la notification de l'ordonnance querellée et au fait que le délai d'un mois pour saisir le juge de l'exécution n'a pas couru est sans objet et inopérante, dès lors que ledit juge de l'exécution a statué et qu'il n'est opposé aucune forclusion à la SCI Les troènes.
La cour ne peut que constater que par jugement du 15 avril 2021, le juge de l'exécution a liquidé l'astreinte mise à la charge de la SCI des Hauts d'Eleu à hauteur de 19 890 euros et dit que cette somme sera inscrite au passif de la SCI des Hauts d'Eleu, fixé une nouvelle astreinte provisoire et condamné la SCI des Hauts d'Eleu assistée de son mandataire judiciaire Me [B] aux entiers dépens de l'instance ainsi qu'à une somme de 1 200 euros au titre des frais irrépétibles. Cette décision a fait l'objet d'un appel, la chambre 8 ayant rendu un arrêt en date du 21 octobre 2021, infirmant le jugement déféré uniquement en ce qu'il a fixé une nouvelle astreinte, le confirmant pour le surplus, déboutant la SCI Les troènes de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel, et condamnant la SCI des Hauts d'Eleu aux dépens d'appel.
Ainsi, au vu de l'évolution du litige et de la décision du juge de l'exécution confirmée par l'arrêt du 21 octobre 2021, la créance de liquidation d'astreinte à hauteur de 19 890 euros peut désormais être admise.
Les créances d'indemnité procédurale à hauteur de 1 200 euros et de dépens afférents au jugement et à l'arrêt précités, justifiés à hauteur de 124,57 euros, sont des créances postérieures nées régulièrement mais non pour les besoins de la procédure collective, devant donc faire l'objet d'une déclaration dans le délai de deux mois de la date d'exigibilité.
Interrogée par note en délibéré, la société SCI Les troènes ne produit aucune déclaration de créance en bonne et due forme dans les deux mois de l'exigibilité des créances précitées, fixées par l'arrêt de la cour d'appel, se contentant de produire la déclaration de créance qu'elle aurait actualisée à la suite du jugement de liquidation judiciaire simplifiée, ce qui est inopérant en l'espèce.
Faute pour la SCI Les troènes de justifier de la déclaration de ses créances postérieures nées régulièrement mais non pour les besoins de la procédure collective dans le délai de deux mois de leur exigibilité, la demande d'admission de ces chefs ne peut qu'être déclarée irrecevable.
- Sur les dépens et accessoires
En application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la SCI des Hauts d'Eleu, prise en la personne de son liquidateur judiciaire succombant en ses prétentions, il convient de la condamner aux dépens de première instance et d'appel.
Le sens du présent arrêt commande de condamner, dans les limites de la demande, la SCI des Hauts d'Eleu, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, à payer à la SCI Les Troènes la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
La cour,
FAIT droit à la demande de nullité de la notification de l'ordonnance du 10 novembre 2020 ;
INFIRME l'ordonnance du juge commissaire en date du 10 novembre 2020 en ce qu'elle a rejeté la créance de travaux à réaliser et la créance au titre des frais d'expertise ;
ADMET la créance de la SCI Les troènes à la procédure collective de la SCI des Hauts d'Eleu à titre chirographaire pour un montant de 5 480 euros TTC au titre des travaux à réaliser ;
ADMET la créance de la SCI Les troènes à la procédure collective de la SCI des Hauts d'Eleu à titre chirographaire pour un montant de 1 946,30 euros au titre des frais d'expertise ;
REJETTE pour le surplus les demandes ;
CONFIRME pour le surplus l'ordonnance déférée, sauf à porter le montant des frais d'huissier à la somme de 1 002,91 euros ;
Vu l'évolution du litige,
ADMET la créance de la SCI Les troènes à la procédure collective de la SCI des Hauts d'Eleu à hauteur de 19 890 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du 14 novembre 2017 ;
DECLARE irrecevable la demande d'admission de la créance d'indemnité procédurale à hauteur de 1 200 euros et des dépens justifiés à hauteur de 124,57 euros, afférents au jugement du 15 avril 2021 et à l'arrêt du 21 octobre 2021 ;
CONDAMNE la SELURL [B], prise en la personne de Me [B], en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI des Hauts d'Eleu, à payer à la SCI Les troènes la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SELURL [B], prise en la personne de Me [B], en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI des Hauts d'Eleu, aux dépens de première instance et d'appel.
Le greffier
Marlène Tocco
Le président
Samuel Vitse