République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 09/02/2023
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N° de MINUTE :
N° RG 22/02700 - N° Portalis DBVT-V-B7G-UKAE
Jugement n° 2022006780 rendu le 12 mai 2022 par le tribunal de commerce de Lille Métropole
APPELANTE
SAS Laccs prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
ayant son siège social [Adresse 2]
représentée par Me Thierry Vandermeeren, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
INTIMÉE
SAS DPK Conseil prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
ayant son siège social [Adresse 1]
représentée par Me Gérald Malle, avocat au barreau de Lille, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 23 novembre 2022 tenue par Dominique Gilles magistrat chargé d'instruire le dossier qui, après rapport oral de l'affaire, a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Dominique Gilles, président de chambre
Pauline Mimiague, conseiller
Clotilde Vanhove, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 février 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 02 novembre 2022
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Faisant suite à une promesse synallagmatique de cession de titres du 15 octobre 2020 intitulée protocole d'accord (ci-après l'avant-contrat) et par acte sous seings privés du 30 décembre 2020, la SAS DPK Conseil a définitivement cédé 100 actions de la SAS DPK Pesage à la SASU Laccs, moyennant le prix provisoire de 764 724 euros. L'acte définitif définit le prix définitif en fonction de la variation des capitaux propres entre le 31 décembre 2019 et le 31 décembre 2020. Les parties ne s'étant pas entendues sur le prix définitif, la société DPK Conseil a obtenu, par voie de référé, l'organisation d'une expertise en vue d'être départagées, sur les deux points litigieux suivants : d'une part, l'inscription ou non en provision de la somme de 95 000 euros de subvention allouée au titre de la convention attributive d'aide au maintien de l'emploi, somme que la société cédante estime acquise au 31 décembre 2020, ce qui entraîne selon elle une réintégration de la provision, entraînant une augmentation des fonds propres au sens du contrat et donc un prix définitif plus élevé ; d'autre part, les modalités de la réintégration dans les comptes de la somme de 28 000 euros d'impôts sur les sociétés, générée par une reprise de provision de 106 430 euros sur le principe de laquelle les parties s'étaient déjà accordées. M. [I], expert désigné par ordonnance du 30 septembre 2021, a déposé son rapport le 11 février 2022. Néanmoins, le litige n'a pas été réglé pour autant et la société DPK Conseil a assigné la société Laccs en paiement de la somme en principal de 128 163,02 euros, au titre du prix définitif de cession. La société Laccs a soutenu que l'expert n'avait pas rempli sa mission et que le complément de prix devait être calculé non sur son rapport mais selon celui du commissaire aux comptes de la société DPK Pesage.
Vu le jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole du 12 mai 2022 ayant :
- condamné la SAS Laccs à payer au titre du complément de prix à la SASU DPK Conseil 128 163,02 euros, correspondant à l'évaluation de l'expert pour le cas où il ne faudrait pas tenir compte en charge de la provision de 95 000 euros ;
- débouté la société Laccs de sa demande d'expertise ;
- condamné la société Laccs à payer 5 000 euros à la société DPK Conseil au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus ;
Vu l'appel de ce jugement interjeté par la société Laccs, selon déclaration reçue au greffe le 3 juin 2022, déférant expressément à la cour chacun de ses chefs ;
Vu les dernières conclusions de la société Laccs déposées et notifiées par la voie électronique à la société DPK Conseil intimée le 28 octobre 2022, demandant à la cour, au visa des articles 1101,1103 et 1843-4 du code civil de :
- réformer le jugement entrepris ;
- au principal :
- débouter la société DPK de ses demandes ;
- dire que la concluante ne lui doit plus aucune somme ;
- à titre subsidiaire :
- désigner un expert (autre que M. [I]) avec pour mission de départager les parties sur le prix de cession ;
- en tout état de cause :
- lui allouer 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en plus de condamner la société DPK aux dépens ;
Vu les dernières conclusions de la société DPK Conseil déposées et notifiées par la voie électronique le 27 octobre 2022, demandant à la cour de confirmer le jugement entrepris et, y ajoutant, de condamner l'appelante à lui payer 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dépens en sus ;
Vu l'ordonnance de clôture du 2 novembre 2022 ;
SUR CE
LA COUR
L'acte définitif énonce que ce prix provisoire est « négocié au regard des capitaux propres existants au 30 septembre 2020 et intégrant une première variation de prix provisoire équivalente à la variation des capitaux propres, telle qu'elle était prévue au protocole ». Il est encore précisé dans l'acte définitif de cession que « le prix définitif des titres variera, à la hausse ou à la baisse, à l'euro-l'euro, à hauteur de la variation entre les capitaux propres au 31 décembre 2019 de 343 062 euros, majoré de 28 000 euros (au titre de l'impôt sur les sociétés généré par une reprise sur provision de 106 430 euros), soit 371 062 euros et les capitaux propres au 31 décembre 2020, hors reprise sur provisions ».
Les parties sont toujours opposées , d'une part, sur l'inscription ou non en provision de la somme de 95 000 euros de subvention allouée au titre de la convention attributive d'aide au maintien de l'emploi, somme que la société cédante estime acquise au 31 décembre 2020 ; d'autre part, sur les modalités de la réintégration dans les comptes de la somme de 28 000 euros d'impôts sur les sociétés, générée par une reprise de provision de 106 430 euros sur le principe de laquelle les parties sont accordées.
Le prix définitif de cession doit être déterminé selon la procédure ainsi définie dans l'acte définitif de cession :
« Aux fins de détermination du prix définitif de cession, le cédant notifiera, par tout moyen de communication écrite, y compris par e-mail, au plus tard le 31 mars 2021, au cessionnaire, le montant des capitaux propres ainsi que le montant du prix définitif, accompagné d'une copie du bilan de l'exercice clos le 31 décembre 2020.
Le bilan de l'exercice clos le 31 décembre 2020 devra être établi dans le respect des normes et méthodes comptables en vigueur en France et comportera l'intégralité des éléments passifs et actifs de la Société, selon les mêmes normes que celles ayant prévalues pour l'arrêté des comptes au 31 décembre 2019 et des exercices antérieurs, conformément aux normes et principes comptables en vigueur dans la profession.
Le cessionnaire disposera d'un délai de 20 jours à compter de la notification par le cédant pour lui notifier son accord ou son désaccord sur le calcul et le montant du prix définitif.
Chacune des parties déclare renoncer expressément à se prévaloir, concernant la variation du prix provisoire et du prix définitif, compte tenu de l'aléa qui y est nécessairement attaché, des dispositions de l'article 1195 du code civil et du régime de l'imprévision qui y est prévu et s'engager à assumer ses obligations même si l'équilibre contractuel se trouve bouleversé par des circonstances qui étaient imprévisibles lors de la conclusion des présentes, et ce en raison :
- de l'aléa que comporte nécessairement un complément de prix,
- de la période de négociations ayant précédé la conclusion des présentes, qui leur a permis de s'engager l'une et l'autre en toute connaissance de cause.
Le complément de prix ou la restitution du prix sera payable comptant, dès détermination du montant définitif du prix définitif, dans les formes et délais définis ci-dessous.
En cas de désaccord sur le montant du prix définitif, notifié par le cédant au cessionnaire dans un délai de 20 jours à compter de la notification du montant du prix définitif, celui-ci sera déterminé selon la procédure d'expertise suivante :
L'expert sera désigné d'un commun accord entre les Parties dans un délai de 6 jours ouvrables à compter de la constatation du désaccord sur le montant du prix définitif.
A défaut d'accord dans ce délai, l'expert sera désigné par ordonnance du président du tribunal de commerce de Lille statuant en la forme des référés, à la requête de la partie la plus diligente.
L'expert aura pour mission de trancher uniquement les points de désaccord entre les parties relatifs au calcul du prix définitif, et, une fois ces désaccords tranchés, de déterminer le montant définitif du prix de cession.
L'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions de l'article 1843-4 du code civil. Sa décision sera définitive et s'imposera aux parties, sans recours possible.
Pour réaliser sa mission, l'expert appliquera les stipulations de la présente promesse et devra exécuter sa mission dans un délai de 30 jours à compter de sa désignation.
Il notifiera aux parties son rapport d'expertise, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
Si l'expert demande une provision sur honoraires en début ou en cours de mission, celle-ci sera payée par moitié par le cessionnaire et pour l'autre moitié par le cédant. Les frais et honoraires d'expertise seront entièrement à la charge de la partie ayant proposé un montant de prix définitif le plus éloigné du montant arrêté par l'expert. Dans l'hypothèse où l'écart entre le montant proposé par chacune des parties et le montant arrêté par l'expert serait strictement égal, les frais et honoraires d'expertise seraient partagés par moitié entre le cessionnaire et le cédant. »
Si le juge ne peut se substituer aux parties pour la détermination du prix définitif de cession, il lui appartient en revanche de veiller au respect de la force obligatoire du contrat de cession, s'agissant en particulier de la mise en 'uvre des stipulations relatives à la détermination de ce prix définitif et au cas de désaccord sur les éléments de l'évaluation.
A cet égard, selon les énonciations de l'ordonnance du 30 septembre 2022 déjà mentionnée, le juge des référés a été saisi par la société DPK Conseil d'une demande de désignation d'un expert en vue de départager les parties sur les deux points litigieux déjà mentionnés.
La nullité du rapport d'expertise n'est nullement soutenue.
La mission confiée à l'expert de départager les parties sur les deux points litigieux constitue bien l'exécution même de la mission d'expertise prévue par les parties dans le contrat de cession, peu important que ces parties se soient entendues devant le juge des référés pour laisser celui-ci élargir la mission au-delà des prévisions contractuelles. Il importe peu, en effet, que le juge des référés ait également fait droit aux prétentions de la société Laccs formées sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile et exorbitantes des prévisions contractuelles déjà énoncées, impartissant à l'expert mission d'« examiner l'ensemble des comptes de la société DPK Pesage, de recueillir les observations des parties quant au prix de cession et sans se limiter uniquement aux demandes formulées par la société DPK Conseil dans son exploit introductif d'instance. »
Il importe peu, également, que les parties, en particulier la cédante, demanderesse à l'expertise, se soient également abstenues de demander au juge des référés de rappeler les termes de la mission de l'expert de tiers-estimateur du prix définitif de cession, au sens de l'article 1843-4 du code civil, telle qu'adoptée par les parties.
En effet, les conclusions de l'expert sont claires et il a formulé son avis sans aucune équivoque, la circonstance suivant laquelle il mentionne, à l'intention du tribunal, les incidences sur le calcul du montant du prix définitif de cession du choix de l'option contraire à son avis, n'enlevant rien à la nette expression de cet avis.
Il n'est pas valablement soutenu que l'expert n'est pas affirmatif et ne détermine pas le prix de cession.
En l'espèce, l'avis de l'expert dénué d'erreur grossière suffit à départager les parties ; d'ailleurs, la mission de les départager lui est expressément confiée.
Or, l'avis de l'expert est sans équivoque.
Il indique ainsi en conclusion de son rapport :
« A mon avis, la reprise sur provision au 31décembre 2020 doit s'accompagner d'une neutralisation de l'impôt sur les ....... qui y correspond, évalué à 28 000 euros dans ladite convention. Il en résulte que le prix définitif des titres de la SAS DPK Pesage est de 938 473 euros et que le solde de prix est de 173 749 euros. »
Ce résultat, seul conforme à son avis exprès, en particulier au traitement de la subvention de 95 000 euros qui a été réservée dans les comptes annuels de la société clos au 31 décembre 2020, où cette subvention figure en dette, comme dans les comptes de l'exercice clos le 31décembre 2019 ce qui interdit de la faire figurer en comptabilité parmi les capitaux propres comme s'il était acquis que l'administration n'en demanderait pas le remboursement.
Ainsi, l'avis de l'expert sur la question de la subvention de 95 000 euros en particulier est sans équivoque, dès lors qu'il a estimé qu'il ne devait pas augmenter les capitaux propres, au sens de l'acte de cession, du montant de cette subvention.
Il sera rappelé que l'acte définitif de cession est le dernier état de la volonté contractuelle et qu'il liait le tiers-estimateur dans les termes de la clause déjà reproduite qui a imposé que : « Le bilan de l'exercice clos le 31 décembre 2020 devra être établi dans le respect des normes et méthodes comptables en vigueur en France et comportera l'intégralité des éléments passifs et actifs de la Société, selon les mêmes normes que celles ayant prévalues pour l'arrêté des comptes au 31 décembre 2019 et des exercices antérieurs, conformément aux normes et principes comptables en vigueur dans la profession. »
Si la société DPK Conseil se prévaut dans le cadre du présent appel du fait que l'intégration du produit de cette subvention aux comptes de comparaison était anticipée par les deux parties, traitée en amont dans les discussions préalables à la signature, figurant dans les résultats d'un audit de la période précontractuelle et intégré au prix de cession, la pièce n°6 invoquée ne prouve rien en ce sens et il ne résulte pas davantage du courriel de M. [G] du 3 janvier 2022, connu de l'expert, la preuve que la subvention litigieuse était définitivement acquise au 31 décembre 2020 et que cet expert a commis une erreur grossière cet égard. Sauf à dénaturer le rapport d'expertise, la cour ne peut retenir que ce courriel est apparu suffisant à l'expert pour considérer que la provision inscrite n'était pas fondée.
Si la société DPK Conseil se prévaut d'un dire n°8 à l'expert du 11 février 2022, faisant état d'un échange de courriels entre M. [B] et M. [G] du 17 décembre 2021, concernant « l'évolution des effectifs durant la période de référence » il ne résulte pas non plus de ces éléments d'erreur grossière de l'expert qui a clôturé son rapport le 11 février 2022, mentionnant que le conseil de la SAS DPK Conseil avait fait un dernier dire le 4 février 2022 et que l'ultime dire pris en compte pour les opérations d'expertise datait du 9 février 2022 et avait été formé par le conseil de la société Laccs.
Il doit être observé que l'expert avait demandé au juge en charge de l'expertise la prolongation au 15 février 2022 du délai pour déposer son rapport.
De toutes manières, à supposer que l'expert ait dû tenir compte de cet échange de courriels malgré sa production tardive, son contenu n'établit pas d'erreur grossière de l'expert, qui a officiellement interrogé la préfecture, en la personne de M. [G], le 23 décembre 2021, par lettre à laquelle il ne lui avait pas été répondu à la clôture du rapport. Or, par cette lettre, qui ne comporte aucune erreur démontrée, l'expert demandait à l'administration si malgré l'insuffisance de 3 emplois en CDI au 31 décembre 2020, au regard des critères d'attribution de la convention, il pouvait lui être confirmé que la subvention de 95 000 euros serait maintenue. Or, le technicien écrit en conclusion de son rapport : « Pour ce qui concerne la subvention de 95 000 euros comptabilisée en dette dans les comptes annuels des exercices clos les 31 décembre 2019 et 31 décembre 2020, je n'ai pu obtenir de la préfecture du Pas-de-Calais une décision qui ne remettrait pas en cause l'attribution de cette subvention, l'effectif du personnel en contrat à durée indéterminée n'ayant pas été atteint au niveau prévu par la convention attributive de cette subvention. »
Si la société DPK Conseil mentionne un prétendu « quitus » donné par l'administration concernant la « subvention emploi » ou un engagement de l'Etat de ne pas demander le remboursement de la provision, cela n'est pas démontré.
La circonstance que, si le remboursement était demandé, la garantie de passif jouerait en la faveur du cessionnaire qui aurait payé un complément de prix excessif, est sans emport.
Il en va de même de l'action en répétition de l'indu dont, selon la société DPK Conseil, disposerait la société Laccs, au jour de la contrepassation de la provision, si elle obtenait que la subvention restât provisionnée.
En outre, il n'est nullement établi que la société Laccs soit sans intérêt financier pour s'opposer à l'intégration de cette subvention dans les capitaux propres pour la détermination du complément de prix de cession des titres.
Il résulte de ce qui précède que le premier juge ne peut être approuvé d'avoir considéré, contrairement à l'avis de l'expert ayant mission de départager les parties et en l'absence d'erreur grossière de cet expert ayant mission de tiers-estimateur du prix définitif de cession, que la subvention de 95 000 euros était définitivement acquise à la société DPK Pesage.
Le jugement entrepris doit, par conséquent, être réformé.
S'agissant de l'appel incident par lequel la société Laccs conteste le jugement entrepris sur la neutralisation de l'impôt sur les sociétés pour un montant de 28 000 euros, il est essentiellement fait valoir que le premier juge a laconiquement repris les termes du rapport d'expertise alors qu'il aurait fallu, selon le moyen, appliquer l'hypothèse n°3 de l'avant-contrat, avec un résultat de plus de 50 000 euros, l'exercice 2020 étant bénéficiaire de 166 903 euros.
La société Laccs considère en conséquence que le prix définitif, en application de l'avant-contrat, serait de 872 000 euros si le résultat avait été de 50 000 euros, mais que compte tenu du résultat bénéficiaire de 2020 il est de :
*capitaux propres : 343 062 euros + 28 000 euros de majoration pour l'impôt sur les sociétés = 371 062 euros
*résultat 2020 : 166 903 euros ' reprise de provision : 106 430 euros = 60 473 euros
*343 062 euros + 60 473 euros = 403 535 euros
*371 062 euros ' 403 535 euros = (-32 473) euros
*soit un prix définitif de : 850 000 euros + 32 473 euros = 882 473 euros.
L'expert a quant à lui retenu en définitive, pour estimer le prix définitif à 938 473 euros, que :
« La convention de détermination du prix définitif et du complément de prix au regard du prix provisoire arrêté à 764 724 euros est pour le moins confuse quant à la méthode retenue pour neutraliser l'impôt sur la constitution d'une provision de 106 430 euros.
En conséquence, son application à la lettre, qualifiée de volonté des parties par la société Laccs aboutit à une absurdité. En effet, la somme de 28 000 euros est ajoutée aux capitaux propres au 31 décembre 2019, alors qu'elle est motivée « au titre de l'impôt sur les sociétés généré par une reprise de provision de 106 430 euros » qui a été comptabilisée au 31 décembre 2020. C'est avec raison que la SAS DPK Conseil fait toute réserve sur la formule de calcul de la convention ».
Et l'expert de citer le conseil de la société DPK Conseil :
« Or, le calcul présenté par ma consoeur a le défaut de reprendre les capitaux propres calculés, IS compris, sur le résultat réel, donc avec un IS calculé sur le résultat non corrigé, puis de retrancher la provision et enfin d'augmenter les capitaux propres des comptes de comparaison (2019) de 28 000 euros. Ce faisant le calcul du prix « neutralise » deux fois l'impôt ce qui n'est évidemment pas convenu. »
L'expert a, de manière conséquente à cet avis qu'il a repris, procédé à plusieurs retraitements.
Il a d'abord « corrigé » le montant des capitaux propres au 31 décembre 2019. Ainsi, là où l'accord des parties exprimé dans l'acte définitif a retenu 343 062 euros au titre du montant de ces capitaux propres, il a annulé la provision pour risques de 106 430 tel que convenu par les parties, déduction faite de l'impôt correspondant convenu entre les parties pour un montant de 28 000 euros. Ainsi, les capitaux propres au 31 décembre 2019 sont retenus pour 421 492 euros (343 062 + 106 430 ' 28 000 = 421 492).
Il a ensuite retraité le résultat net 2020 de 166 903 euros tel qu'il résulte des comptes définitifs, qui font l'accord des parties, en annulant la reprise pour provision sur risque de 106 430 euros et en ajoutant l'impôt afférent à cette provision, soit un résultat net avant reprise de provision de 88 473 euros, qui constitue la variation positive des capitaux propres.
L'expert calcule ainsi le prix définitif à partir du premier prix provisoire de 850 000 euros contenu dans l'avant-contrat, pour aboutir à un prix définitif de 938 473 euros dont à déduire le prix provisoire de 764 724 euros soit un solde de prix de 173 749 euros (850 000 + 88 473 ' 764 724 = 173 749).
Sur ce, la cour observe que les parties s'accordent pour raisonner, afin de déterminer le prix définitif de cession, sur la variation des capitaux propres rapportées au prix de référence de 850 000 euros, qui apparaît non seulement dans l'avant-contrat mais encore dans chacune des hypothèses chiffrées qui figurent dans l'acte définitif de cession pour illustrer le mode de calcul du prix définitif.
Il est clair, à la lecture de cet acte, que les parties ont voulu imputer, au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2019, la neutralisation fiscale correspondant au montant de l'impôt sur les sociétés généré par le produit correspondant à la reprise de la provision de 106 430 euros. En effet, toutes choses par ailleurs étant tirées des comptes de la société DPK Pesage qui ne sont pas contestés, la volonté contractuelle des parties a consisté à majorer de 28 000 euros à ce titre les capitaux propres figurant au bilan du 30 septembre 2020, soit 343 062 euros, montant identique au 31décembre 2019.
Cependant, les comptes au 31 décembre 2019 et au 31décembre 2020 démontrent que la reprise de provision de 106 430 euros n'est intervenue qu'au cours de ce dernier exercice, ce qui a été le choix comptable de la société DPK Pesage, qui aurait pu le faire dès les comptes clos au 31décembre 2019, mais ce qui n'affecte pas le contenu de l'accord des parties figurant dans l'acte définitif de cession. Il importe de souligner que l'acte définitif de cession a été établi alors que les comptes définitifs au 31 décembre 2020 n'étaient pas disponibles.
Par conséquent, c'est sans erreur grossière et dans le respect de la volonté contractuelle des parties que l'expert a tiré les conséquences de ce décalage entre cette volonté contractuelle des parties formellement exprimée sur ce point ' neutraliser au 31 décembre 2019 l'incidence fiscale de la reprise de la provision - et la réalité issue des comptes clos le 31 décembre 2020 qui seuls font apparaître cette reprise de provision.
L'expert a donc pu ainsi :
- recalculer le résultat 2019 en intégrant de manière simultanée, d'une part, l'incidence fiscale de la reprise de la provision de 106 430 euros qui ne pouvait, sauf aberration, s'effectuer l'année précédant celle de sa reprise et, d'autre part, cette même reprise de provision ;
- retraiter le montant des capitaux propres au 31décembre 2019 à partir du compte de résultat, comme si la provision avait été reprise au 31 décembre 2019 (produit de 106 430 euros et charge de 28 000 euros) ;
- retraiter le montant des capitaux propres au 31décembre 2019 à partir du bilan (par retranchement du résultat net et substitution à celui-ci du résultat net rectifié), le résultat étant le même que par le compte de résultat, soit 421 492 euros ;
- retraiter le résultat net de 2020 par les comptes de résultat, pour enlever toute incidence de la reprise de provision et de la fiscalité y afférente, puisque ces éléments ont été imputés sur l'exercice 2019, conformément à la volonté contractuelle des parties, ce qui donne 88 473 euros
- retrouver le montant des capitaux propres corrigés au 31décembre 2020 intégrant le résultat net corrigé de 2020 avant reprise de provision ;
- identifier la variation des capitaux propres à 88 473 euros ;
- en déduire ainsi le prix de cession :
* prix de cession : 850 000 euros ;
* variation des capitaux propres : 88 473euros ;
* prix définitif : 938 473 euros ;
* prix provisoire : 764 724 euros ;
* solde de prix : 173 749 euros.
Sans besoin de plus ample expertise, la cour peut mettre fin au litige en rétablissant la portée de celle déjà réalisée, méconnue par le premier juge.
Cependant, les éléments de calcul retenus par le premier juge subsistent en dehors du montant du solde de prix erroné qu'il a retenu.
Le prix final de cession s'établit à 938 473 euros et le solde de prix à 173 749 euros.
Sur ce solde, le jugement entrepris établit qu'une somme de 117 749 euros a déjà été versée par la société Laccs. Il reste donc à payer 56 000 euros (173 749 ' 117 749 = 56 000) à la société DPK Conseil, au titre du solde de prix.
En application de la convention, cette somme sera mise à la charge de la société Laccs, outre le montant des frais d'expertise (3 738,37 euros) et des dépens de l'expertise (24,65 euros).
En définitive, la société Laccs sera condamnée à payer :
56 000 + 3 738,37 + 26,65 = 59 765,02 euros.
En équité, il ne sera pas alloué d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Vu l'acte définitif de cession,
Vu l'article1843-4 du code civil et la convention des parties,
Réforme le jugement entrepris, mais seulement en ce qu'il a fixé au vu du rapport d'expertise le solde de prix à 242 149 euros, en ce qu'il a condamné la société Laccs à payer 124 400 euros à ce titre à la société DPK Conseil et en ce qu'il a statué sur les dépens de première instance et l'article 700 du code de procédure civile ;
Pour le surplus, confirme le jugement entrepris ;
Statuant sur les chefs réformés et y ajoutant,
Dit que le solde de prix retenu par l'expert est de 173 749 euros ;
Condamne en conséquence la société Laccs à payer à la société DPK Conseil la somme de 59 765,02 euros ;
Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en première instance et en appel ;
Dit que chaque partie conservera la charge des dépens de première instance et d'appel par elle exposés
Le greffier
Valérie Roelofs
Le président
Dominique Gilles