République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D'APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 1 SECTION 2
ARRÊT DU 09/02/2023
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N° de MINUTE :
N° RG 21/04699 - N° Portalis DBVT-V-B7F-T2IF
Jugement (N° 20/01709)
rendu le 24 août 2021 par le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer
APPELANTE
La SARL Garage dépannauto
prise en la personne de son représentant légal
ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Anne-Laure Perrez, avocat au barreau de Douai, avocat constitué
assistée de Me Audrey Lesage, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, avocat plaidant
INTIMÉ
Monsieur [R] [V]
demeurant [Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Jean Aubron, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, avocat constitué
DÉBATS à l'audience publique du 12 décembre 2022 tenue par Jean-François Le Pouliquen magistrat chargé d'instruire le dossier qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Fabienne Dufossé
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Catherine Courteille, président de chambre
Bruno Poupet, président de chambre
Jean-François Le Pouliquen, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 février 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Catherine Courteille, président et Anaïs Millescamps, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 10 octobre 2022
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Vu le jugement du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer du 24 août 2021 ;
Vu la déclaration d'appel de la société Garage dépannauto reçue au greffe de la cour d'appel de Douai le 1er septembre 2021 ;
Vu les conclusions de la société Garage dépannauto déposées le 26 avril 2022 ;
Vu les conclusions de M. [R] [V] déposées le 08 février 2022 ;
Vu l'ordonnance de clôture du 10 octobre 2022.
EXPOSE DU LITIGE
M. [R] [V] est propriétaire d'un véhicule AUDI A3 immatriculé WW 776 ZP. Le 28 janvier 2019, suite à une panne sur l'autoroute, les services de police ont sollicité la société Garage Dépannauto pour prendre en charge le véhicule et ses occupants puis ont interpellé M. [R] [V] en raison d'une difficulté relative à l'immatriculation du véhicule.
Par la suite, lorsque M. [R] [V] a réclamé la restitution du véhicule, la société Garage Dépannauto a conditionné cette restitution au paiement des frais de gardiennage.
Par acte signifié le 15 juin 2020, M. [R] [V] a assigné la société Garage Dépannauto devant le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer.
Aux termes de ses dernières conclusions, M. [R] [V] a demandé au tribunal, au visa des articles 544, 1353 et 1917 du code civil et L. 111-1 du code de la consommation, de :
-débouter la société Garage Dépannauto de l'ensemble de ses demande reconventionnelles,
-condamner la société Garage Dépannauto à restituer le véhicule de Marque AUDI type A3 à M. [V] et ce sous astreinte d'un montant de 100 euros par jour de retard à compter du délai d'un mois suivant la signification de la décision à intervenir,
-la condamner à payer la somme de 5 000 euros au titre de la résistance abusive dont elle a fait preuve,
-la condamner à payer la somme de 1 l52 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-la condamner aux entiers dépens,
-assortir la décision à intervenir de l'exécution provisoire.
Aux termes de ses dernières conclusions, la société Garage Dépannauto a demandé au tribunal de :
-débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes,
-condamner M. [V] à payer à la société Garage Dépannauto la somme de 11 250 euros TTC arrêtée au 15 février 2021, avec intérêts au taux légal à compter de la dernière mise en demeure du 3 juin 2020 pour la période allant du 28 janvier 2019 au 15 février 2021,
-condamner M. [V] [R] à payer à la société Garage Dépannauto une somme de 15 euros TTC par jour à compter du jugement a intervenir jusqu'à reprise en charge de son véhicule,
-donner acte à la société Garage Dépannauto qu'elle exercera son droit de rétention sur le véhicule jusqu'à complet paiement de la dette en principal, intérêts et frais,
-condamner M. [V] à payer la société Garage Dépannauto la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
-le condamner aux entiers dépens.
Par jugement du 24 août 2021, le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer a :
-condamné la société Garage Dépannauto à restituer à M. [R] [V] son véhicule Audi A3 [Immatriculation 5] dans un délai d'un mois a compter de la présente décision,
-dit qu'à défaut de restitution dans le délai défini, la société Garage Dépannauto sera condamnée à une astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard pendant une durée de trois mois,
-débouté la société Garage Dépannauto de sa demande tendant à condamner M. [R] [V] a lui payer la somme de 11 250 euros TTC arrêtée au 15 février 2021, avec intérêts au taux légal,
-débouté M. [R] [V] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
-condamné la société Garage Dépannauto à payer à M. [R] [V] la somme de 1 152 euros au titre des frais irrépétibles,
-condamné la société Garage Dépannauto aux entiers dépens,
-rappelé que 1'exécution provisoire est de droit.
La société Garage dépannauto a formé appel de cette décision.
Aux termes de ses conclusions susvisées, elle demande à la cour d'appel de :
-infirmer le jugement rendu le 24 août 2021 par le tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer en ce qu'il a :
-débouté la société Garage dépannauto de sa demande tendant à condamner M. [V] à lui payer la somme de 11 250 euros TTC arrêtée au 15 février 2021, avec intérêts au taux légal
-condamné la société Garage dépannauto à payer à M. [R] [V] la somme de 1 152 euros au titre des frais irrépétibles
-condamné la société Garage dépannauto aux entiers dépens
-en conséquence, statuant à nouveau,
-condamner M. [R] [V] à payer à la société Garage dépannauto la somme de 14 985 euros pour la période du 28 janvier 2019 au 22 octobre 2021, date de restitution effective du véhicule avec intérêts au taux légal à compter de la dernière mise en demeure du 3 juin 2020
-condamner M. [V] à payer à la société Garage dépannauto la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile comprenant les frais de première instance et d'appel.
-le condamner aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions susvisées, M. [V] demande à la cour d'appel de :
-confirmer en toutes ses dispositions la décision du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer du 24 août 2021,
- débouter la société Garage dépannauto de ses demandes en ce compris sa demande actualisée,
-la condamner au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile , ainsi qu'aux entiers frais et dépens.
EXPOSE DES MOTIFS
I) Sur la demande en paiement formée par la société Garage dépannauto
La société Dépannauto demande à la cour d'appel de condamner M. [R] [V] à lui payer la somme de 14 985 euros pour la période du 28 janvier 2019 au 22 octobre 2021, date de restitution effective du véhicule avec intérêts au taux légal à compter de la dernière mise en demeure du 3 Juin 2020.
Aux termes des dispositions de l'article 1917 du code civil : « Le dépôt proprement dit est un contrat essentiellement gratuit. »
Aux termes des dispositions de l'article 1949 du code civil : Le dépôt nécessaire est celui qui a été forcé par quelque accident, tel qu'un incendie, une ruine, un pillage, un naufrage ou autre événement imprévu.
Aux termes des dispositions de l'article 1947 du code civil : « La personne qui a fait le dépôt est tenue de rembourser au dépositaire les dépenses qu'il a faites pour la conservation de la chose déposée, et de l'indemniser de toutes les pertes que le dépôt peut lui avoir occasionnées. »
Aux termes des dispositions de l'article 1948 du code civil : « Le dépositaire peut retenir le dépôt jusqu'à l'entier paiement de ce qui lui est dû à raison du dépôt. »
Le caractère essentiellement gratuit du contrat de dépôt s'applique au dépôt volontaire défini par les articles 1921 et suivants du code civil comme au dépôt nécessaire définit par les articles 1949 et suivants du code civil.
En conséquence l'existence d'un dépôt nécessaire ne fait pas présumer le caractère onéreux du dépôt.
Dans l'hypothèse où le dépôt n'est pas stipulé à titre onéreux, il appartient au dépositaire qui demande le paiement d'une somme au titre des dépenses faites et des pertes que le dépôt lui a occasionnées d'en justifier le principe et le montant.
Le contrat de dépôt d'un véhicule auprès d'un garagiste, accessoire à un contrat d'entreprise, est présumé fait à titre onéreux.
En l'espèce, le véhicule de M. [V] en panne sur l'autoroute a été remorqué le 28 janvier 2019, à la demande des services de police, par la société Dépannauto qui l'a emmené à son garage. M. [V] a été interpellé par les services de police.
Il existe en conséquence un dépôt nécessaire du véhicule au garage de la société Garage Dépannauto.
Le dépôt du véhicule au garage Dépannauto n'est pas l'accessoire d'un contrat d'entreprise confié à la société Dépannauto par M. [V]. En effet, la société Dépannauto n'a pas été sollicitée par M. [V] mais par les services de police. M. [V] interpellé par les services de police, n'a pas signé le bon d'intervention.
En conséquence le dépôt est à titre gratuit.
Le 26 février 2019, la société Garage dépannauto a établi un devis de 375 euros HT soit 450 euros TTC à l'intention de M. [R] [V], subordonnant la restitution du véhicule au paiement de cette somme.
Par courrier non daté, réceptionné le 07 mars 2019, M. [R] [V] a adressé un courrier à la société Garage dépannauto aux termes duquel il a indiqué « Je conteste ce devis étant donné que vous ne m'en avez jamais fait part avant cette date. Je conçois et j'accepte de vous payer les frais de gardiennage à partir du 27 février 2019 et non pour la période précédente. Merci de m'envoyer ce devis rectifié dans les 48H maximum afin de ne pas avoir un coût trop élevé de ces frais de gardiennage. »
Il n'est pas établi que la société Garage dépannauto ait adressé un nouveau devis à M. [V].
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception daté du 27 juin 2019, le conseil de M. [V] a mis en demeure la société Garage auto de procéder à l'annulation de la facture de 450 euros et de tenir le véhicule à sa disposition, ce à quoi la société Dépannauto s'est opposée par courrier du 08 juillet 2019 subordonnant la restitution du véhicule au paiement de la somme de 2 430 euros.
La société Garage dépannauto ne justifie pas des dépenses faites et des pertes causées par le dépôt.
Le contrat de dépôt étant présumé à titre gratuit, la société Dépannauto ne pouvait demander le paiement de frais de gardiennage d'un montant de 450 euros pour la période du 28 janvier au 26 février 2019.
De plus, la société Garage dépannauto n'a pas adressé de devis rectifié à M. [R] [V] postérieurement au courrier adressé par ce dernier le 07 mars 2019. En conséquence, il n'est pas établi que les parties aient convenu d'un dépôt à titre onéreux à compter du 27 février 2019.
En conséquence, la société Dépannauto ne pouvait subordonner, le 08 juillet 2019, la restitution du véhicule au paiement de la somme de 2 430 euros ou de la somme de 1 955 euros.
Il convient en conséquence de débouter la société Garage dépannauto de sa demande de paiement de la somme de 14 985 euros pour la période du 28 janvier 2019 au 22 octobre 2021.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Garage dépannauto de sa demande de paiement de la somme de 11 250 euros TTC arrêtée au 15 février 2021.
II) Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Succombant à l'appel, la société Garage dépannauto sera condamnée aux dépens et à payer à M. [V] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel.
PAR CES MOTIFS
-CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de Lille ;
y ajoutant,
-DÉBOUTE la société Garage dépannauto de sa demande de paiement de la somme de 3 735 euros pour la période comprise entre le 15 février 2021 et le 22 octobre 2021 ;
-CONDAMNE la société Garage dépannauto à payer à M. [R] [V] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel ;
-DÉBOUTE la société Garage dépannauto de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
-CONDAMNE la société Garage dépannauto aux dépens d'appel.
Le greffier
[Y] [L]
Le président
Catherine Courteille