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09/02/2023 | FRANCE | N°21/02994

France | France, Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 09 février 2023, 21/02994


République Française

Au nom du Peuple Français





COUR D'APPEL DE DOUAI



CHAMBRE 2 SECTION 1



ARRÊT DU 09/02/2023





****





N° de MINUTE :

N° RG 21/02994 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TU2H



Jugement n° 2020001055 rendu le 12 mai 2021 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance n° 21/303 rendue par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Douai







APPELANTE



SARL Calitherm agissant poursuites et d

iligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 2]

représentée par Me Martin Danel, avocat au barreau de Dunkerque, avocat constitué




...

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 09/02/2023

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/02994 - N° Portalis DBVT-V-B7F-TU2H

Jugement n° 2020001055 rendu le 12 mai 2021 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance n° 21/303 rendue par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Douai

APPELANTE

SARL Calitherm agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

ayant son siège social [Adresse 2]

représentée par Me Martin Danel, avocat au barreau de Dunkerque, avocat constitué

INTIMÉE

SAS Garage Eco

ayant son siège social [Adresse 3]

représentée par Me Thomas Minne, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

DÉBATS à l'audience publique du 30 novembre 2022 tenue par Clotilde Vanhove magistrat chargé d'instruire le dossier et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Dominique Gilles, président de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Clotilde Vanhove, conseiller

ARRÊT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 février 2023 après prorogation du délibéré du 2 février 2023 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 9 novembre 2023

****

EXPOSE DU LITIGE

Le 6 avril 2018, la SARL Garage Eco a vendu à la SARL Calitherm un véhicule d'occasion Peugeot Boxer, immatriculé [Immatriculation 1], comptabilisant 93703 kilomètres, au prix de 6 900 euros.

Se prévalant de désordres sur le véhicule, par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 mai 2019, la SARL Calitherm a sollicité l'annulation de la vente auprès de la SARL Garage Eco.

Par acte d'huissier de justice du 9 janvier 2020, la SARL Calitherm a fait assigner la SARL Garage Eco afin notamment d'obtenir sa condamnation à la restitution du prix de vente du véhicule, des frais d'immobilisation, de la perte d'exploitation et de dommages et intérêts pour résistance abusive et vexatoire.

Par jugement du 12 mai 2021, le tribunal de commerce de Lille Métropole a :

« déclaré les demandes de la SARL Calitherm irrecevables » et l'a « en conséquence déboutée de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SARL Garage Eco »,

débouté la SARL Garage Eco du surplus de ses demandes,

condamné la SARL Calitherm à verser à la SARL Garage Eco la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la SARL Calitherm aux dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 28 mai 2021, la SARL Calitherm a relevé appel du jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la SARL Garage Eco de ses demandes.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 27 août 2021, la SARL Calitherm demande à la cour de :

infirmer le jugement et statuer à nouveau,

avant dire-droit, désigner un expert avec pour mission principale d'examiner le véhicule, d'en déterminer les vices cachés ainsi que leurs conséquences en terme de réparations, avec évaluation de leur coût,

* à titre infiniment subsidiaire :

prononcer l'annulation de la vente du véhicule,

condamner la SARL Garage Eco à lui verser les sommes de 6 900 euros en restitution du prix de vente du véhicule, 4 380 euros au titre des frais d'immobilisation, soit 60 euros par jour représentant le coût de la location d'un véhicule équivalent, 2 000 euros au titre de la perte d'exploitation, 1 200 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et vexatoire,

condamner la SARL Garage Eco à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la SARL Garage Eco aux dépens.

Elle fait valoir que bien qu'elle ait fait établir une mesure d'expertise amiable à laquelle la SARL Garage Eco a participé, celle-ci la conteste désormais.

Elle estime donc nécessaire d'organiser une expertise judiciaire pour mettre un terme à toute discussion sur ce point.

Subsidiairement, elle soutient que la SARL Garage Eco conteste les conclusions de l'expert alors qu'elle n'avait pas formulé de contestations devant l'expert et que ces conclusions sont incontestables sur le fait que le véhicule était entaché d'un vice caché au moment de la vente. Elle ajoute que s'agissant d'un véhicule utilitaire, elle pouvait en attendre un usage de plusieurs dizaines de milliers de kilomètres, et que le fait que le véhicule ait parcouru une certaine distance avant la manifestation du vice caché préexistant ne la prive pas de son droit à se prévaloir de la garantie des vices cachés.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par la voie électronique le 4 novembre 2021, la SARL Garage Eco demande à la cour de :

à titre principal :

prononcer la recevabilité de son appel incident et le déclarer bien fondé,

confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de la SARL Calitherm, et ce faisant,

débouter la SARL Calitherm de toutes ses demandes tant principales que reconventionnelles, fins et conclusions,

prononcer l'irrecevabilité de la demande nouvelle formée par la SARL Calitherm consistant à solliciter la tenue d'une expertise judiciaire non valablement soutenue en première instance,

confirmer la condamnation de la SARL Calitherm à lui payer la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour infirmait la décision de première instance quant à l'existence d'un vice caché :

rejeter les demandes indemnitaires non fondées de la SARL Calitherm et, à titre infiniment subsidiaire sur ce point, revoir les montants à de plus justes proportions, le cas échéant,

infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts et, statuant à nouveau sur ce point, condamner la SARL Calitherm à lui payer la somme de 2 000 euros, sauf à parfaire, au titre des dommages et intérêts,

en tout état de cause :

condamner la SARL Calitherm à lui payer la somme de 3 000 euros, sauf à parfaire, au titre des frais irrépétibles,

condamner la SARL Calitherm aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Maître Minne.

Elle fait valoir, sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile, que la demande d'expertise, qui n'a pas été soutenue en première instance, est nouvelle et donc irrecevable.

Subsidiairement, elle estime la demande d'expertise injustifiée, la SARL Calitherm espérant obtenir de l'expert qu'il pallie sa carence dans l'administration de la preuve de l'existence d'un vice caché. Elle ajoute que le technicien ne pourra statuer sur une question purement juridique et qu'en outre, le véhicule a parcouru plus de 35 000 kilomètres en une année depuis son achat, aucun entretien n'a été effectué contrairement aux préconisations du constructeur, le véhicule a subi un choc important sur le carter qui a occasionné une casse en raison de la présence d'un corps étranger projeté dans la courroie, aucune indication quant aux conditions du stockage du véhicule depuis avril 2019 n'est fournie par la SARL Calitherm et un démontage non contradictoire de plusieurs parties du véhicule a été réalisé, ce qui ne permettra pas à l'expert de se positionner au jour de l'achat du véhicule.

Elle précise, sur le fondement de l'article 1641 du code civil, que l'acheteur doit établir la preuve de l'existence du vice caché et de ses différents caractères, en particulier de son antériorité à la vente. Elle ajoute que le contrôle technique ne comporte aucune mention d'anomalie avec obligation de contre-visite, ce qui signifie que le vice affectant la boîte de vitesse n'est manifestement pas antérieur à la vente du véhicule. Elle souligne que des réparations ont été effectuées sur le véhicule sans aucun lien avec la boîte de vitesse ou son support, dès lors seule une conduite inappropriée de la SARL Calitherm peut expliquer l'apparition du désordre et il est nécessairement postérieur à la vente. Elle estime également que le véhicule ne peut être atteint d'un vice caché dès lors qu'il n'est pas inapte à l'usage qu'on peut communément attendre d'un véhicule, notamment eu égard au kilométrage parcouru.

Sur le rapport d'expertise amiable, elle fait valoir que le rapport fait état de plusieurs interventions qui n'ont pas été contradictoirement constatées et qu'il est lacunaire. Elle ajoute qu'en tout état de cause, la cour de cassation considère que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande d'une des parties par un technicien de son choix, peu important que la partie adverse y ait été régulièrement appelée. Elle soutient encore que l'usage soutenu d'un véhicule est contraire à toute qualification de garantie des vices cachés.

Encore plus subsidiairement, si la cour d'appel retenait l'existence d'un vice caché, elle estime néanmoins que le véhicule a subi une dépréciation compte tenu du kilométrage parcouru et que les frais d'immobilisation et de perte d'exploitation ne sont pas justifiés.

Elle soutient n'avoir aucunement résisté abusivement aux demandes de la SARL Calitherm, ayant proposé, à titre purement commercial, un règlement amiable du dossier consistant dans la fourniture d'une boîte de vitesse d'occasion ainsi que de la visserie, ce qui a été refusé par la SARL Calitherm. En revanche, elle estime la SARL Calitherm de mauvaise foi en raison de ses demandes de dommages et intérêts fantaisistes, ce qui justifie que lui soient alloués des dommages et intérêts.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 novembre 2022. Plaidé à l'audience du 30 novembre 2022, le dossier a été mis en délibéré au 2 février 2023, prorogé au 9 février 2023.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de la demande d'expertise avant-dire droit

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité soulevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, la demande d'expertise formée avant-dire droit par la SARL Calitherm ne constitue pas une prétention nouvelle en appel qui serait irrecevable. En effet, cette demande de la SARL Calitherm fait partie de ses prétentions telles qu'énoncées par le premier juge, qui a statué sur ces prétentions en les déclarant irrecevables et l'en déboutant, au motif de son absence de comparution.

La demande de la SARL Calitherm est donc recevable.

Sur la demande de résolution de la vente pour vice caché et les demandes indemnitaires

Aux termes de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'article 1642 du même code ajoute que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

L'article 1643 précise qu'il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait été stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

Enfin, il résulte de l'article 1644 que dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de faire restituer, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

Il appartient à l'acquéreur d'établir la réunion des conditions découlant de l'article 1641 du code civil : existence d'un vice, gravité du vice et antériorité du vice par rapport à la vente.

En l'espèce, la SARL Calitherm produit un rapport d'expertise amiable réalisé par M. [T] suite à une visite du véhicule le 19 juin 2019 en présence des deux parties. Il convient en premier lieu de préciser que, contrairement à ce qu'affirme la SARL Garage Eco, tout rapport d'expertise amiable peut valoir à titre de preuve dès lors qu'il est soumis à la libre discussion des parties. Elle ne peut donc arguer de son inopposabilité à son égard.

Ce rapport rappelle, ce qui n'est pas contesté par les parties, que suite à sa vente le 6 avril 2018, alors qu'il comptabilisait 93 703 kilomètres, le véhicule a subi plusieurs pannes pour lesquelles la SARL Garage Eco a procédé à des réparations (remplacement de la poulie de vilebrequin et d'une courroie en août 2018, plus tard dans le mois, remplacement de la rampe injecteur, pannes intermittentes en septembre 2018, recherche des causes par la SARL Garage Eco qui remplace des pièces). Le 29 avril 2019, le véhicule n'a pas démarré après un arrêt, il a été transporté au garage Mercier par un dépanneur.

L'expert amiable a retenu les causes suivantes pour expliquer la panne : « le véhicule a présenté des pannes à répétition en circulation de même nature, 4 mois après la livraison du véhicule. Le vendeur a été sollicité à plusieurs reprises, il a effectué des recherches de panne, changé des pièces, mais la panne revenait rapidement après son intervention. La dernière panne s'est matérialisée au moment d'un essai de redémarrage du moteur après un arrêt. [..] à l'examen du véhicule, le garage Mercier a été intrigué par le positionnement du moteur qui semblait penché. Il a déposé le filtre à air, la batterie et constaté que la boîte de vitesse n'était plus retenue en position par son support. Ceci a engendré un problème de masse, empêchant le démarrage du moteur. ['] les taraudages des trois alésages du carter sont fortement dégradés, le quatrième n'est pas visible car le goujon s'est sectionné au ras du logement. Deux logements sont brisés sur leur partie avant. Ils sont maculés de saletés et sont gras, ces ruptures sont anciennes. Quand on examine le faciès de rupture du goujon sectionné, on peut relever un aspect caractéristique de rupture par phénomène de fatigue mécanique (zone de fissuration lente, lisse d'aspect avec une oxydation grise foncée, puis une zone de fissuration plus rapide grenue avec les lignes en arc de cercle, elle est d'aspect gris claire, zone de rupture finale). De toutes ces constations on peut dire que une ou des fixations du carter de boîte de vitesse ont fait l'objet d'une intervention d'un opérateur qui a remplacé une vis par une vis non conforme. On peut comprendre désormais pourquoi le véhicule présentait des pannes à répétition dont le garage Eco ne comprenait pas la nature. La fixation du carter de boîte était défaillante, de ce fait il y avait des phénomènes de masse qui mettaient en panne le véhicule. Cette partie là du compartiment moteur n'est pas directement visible ['] Il a fallu que le dernier point de fixation se rompe (goujon) pour mettre en panne définitivement le véhicule ».

Les constatations de l'expert amiable sur l'existence d'un vice caché et son antériorité par rapport à la vente sont corroborées par les circonstances de la cause. En effet, l'existence de pannes régulières survenues dès quatre mois après la vente, pour lesquelles la SARL Garage Eco est intervenue à chaque fois et a effectué des réparations qui n'ont néanmoins pas empêché la survenue de nouvelles pannes ultérieurement démontre qu'il existait une cause à ces nombreuses pannes qui n'était pas décelée et a fini par entraîner la panne d'avril 2019. Cette chronologie confirme qu'il existait dès la vente, un vice caché. L'ensemble des réparations ayant été effectuées par la SARL Garage Eco depuis la vente du véhicule, aucune intervention extérieure n'est démontrée, d'un autre garagiste par exemple, qui pourrait expliquer autrement le vice. La SARL Garage Eco ne peut valablement soutenir que le démontage par le garage Mercier du support de la boîte de vitesse a été fait non contradictoirement dès lors qu'il a constaté dès l'arrivée du véhicule dans ce garage que la boîte de vitesse n'était plus soutenue en position par son support. Il n'apparaît donc pas que le garage Mercier ait procédé au démontage du support de la boîte de vitesse. Quant au fait que l'expert ait mentionné la présence d'un frottement récent sur le carter, cela ne démontre pas, contrairement à ce que soutient la SARL Garage Eco, qu'il y ait eu un choc sur le carter qui a pu être à l'origine de la panne et sur lequel l'expert ne se serait pas prononcé. Enfin, l'absence de mention du vice lors du contrôle technique réalisé après la vente confirme également son caractère caché.

L'usage soutenu du véhicule dont se prévaut la SARL Garage Eco pour s'opposer à l'existence d'un vice caché, ne peut être retenu en l'espèce, dès lors qu'il est établi que le vice préexistait à la vente.

Il résulte de ces éléments que la SARL Calitherm démontre l'existence d'un vice du véhicule, qui existait lors de la vente et n'était pas apparent.

Ce vice a entraîné plusieurs pannes du véhicule ayant nécessité des réparations puis une panne l'immobilisant, ce qui démontre, peu important le nombre de kilomètres parcourus avant la dernière panne, que le vice diminue tellement l'usage auquel le véhicule est destiné que l'acheteur, s'il l'avait connu, ne l'aurait pas acquis ou en aurait donné un moindre prix. En outre, l'expert amiable a estimé le coût des réparations, confirmé par l'estimation de réparations établie par le garage Mercier, à la somme de 2 299,42 euros TTC, ce qui représente près du tiers du prix d'acquisition du véhicule s'élevant à 6 900 euros. Cela démontre également que l'usage du véhicule est tellement diminué que l'acquéreur n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il avait connu le vice.

Le jugement doit ainsi être infirmé en toutes ses dispositions.

Sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise judiciaire, l'annulation de la vente sera prononcée.

S'agissant de la restitution du prix de vente et de la dépréciation évoquée par la SARL Garage Eco dans ses conclusions, outre le fait qu'elle ne reprend pas cette demande dans le dispositif de ses conclusions qui seul saisit la Cour, en tout état de cause, en matière de vices cachés, lorsque l'acheteur exerce l'action rédhibitoire, le vendeur, tenu de restituer le prix qu'il a reçu, n'est pas fondé à obtenir une indemnité liée à l'utilisation de la chose vendue ou à l'usure résultant de cette utilisation. La SARL Garage Eco sera condamnée à restituer à la SARL Calitherm le prix de vente.

Bien que les parties n'aient pas évoqué la question de la restitution du véhicule, la nullité de la vente entraîne, sans qu'il soit besoin d'une demande de la part du vendeur, la restitution du bien objet de la vente annulée.

S'agissant de l'indemnisation de ses préjudices sollicitée par la SARL Calitherm, l'article 1645 du code civil prévoit que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur. L'article 1646 ajoute que si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu'à la restitution du prix, à et à rembourser à l'acquéreur les frais occasionnés par la vente.

En l'espèce, il n'est ni soutenu ni démontré par la SARL Calitherm que la SARL Garage Eco connaissant le vice et doit donc être tenue au paiement de dommages et intérêts. Outre la restitution du prix, elle ne peut donc être tenue qu'au remboursement des frais occasionnés par la vente. En outre, en tout état de cause, si la SARL Calitherm sollicite la somme de 4 380 euros au titre des frais d'immobilisation du véhicule (60 euros par jour représentant le coût de location d'un véhicule équivalent) et 2 000 euros au titre de la perte d'exploitation, elle ne s'explique aucunement sur ces préjudices qui sont seulement évoqués en ces termes dans le dispositif de ses conclusions et ne fournit aucun justificatif au soutien de ses demandes.

En conséquence, la SARL Calitherm sera déboutée de ses demandes.

Sur les autres demandes de dommages et intérêts

La SARL Calitherm sollicite la condamnation de la SARL Garage Eco à lui payer la somme de 1 200 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive et vexatoire. De son côté, la SARL Garage Eco sollicite la condamnation de la SARL Calitherm à lui payer la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts compte tenu de sa mauvaise foi.

L'issue du litige commande de débouter la SARL Garage Eco de sa demande de dommages et intérêts.

S'agissant de la demande de la SARL Calitherm, celle-ci ne démontre aucun abus dans la résistance de la SARL Garage Eco, qui avait d'ailleurs obtenu gain de cause en première instance et démontre avoir proposé une solution de prise en charge du remplacement de la boîte de vitesse à la SARL Calitherm, y compris devant l'expert amiable. Elle sera donc déboutée de sa demande.

Sur les prétentions annexes

La SARL Garage Eco, qui succombe, sera condamnée aux dépens et, en équité, à payer à la SARL Calitherm la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare recevable la demande d'expertise avant-dire droit formée par la SARL Calitherm ;

Réforme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute la SARL Calitherm de sa demande d'expertise avant-dire droit ;

Prononce la résolution du contrat de vente conclu entre la SARL Calitherm et la SARL Garage Eco le 6 avril 2018 et portant sur le véhicule Peugeot Boxer immatriculé [Immatriculation 1] ;

Ordonne le remboursement par la SARL Garage Eco du prix de vente du véhicule à la SARL Calitherm, soit la somme de 6 900 euros ;

Dit qu'il appartiendra à la SARL Garage Eco, dès la restitution du prix effectuée, de récupérer le véhicule à ses frais, au lieu désigné par la SARL Calitherm, à qui il appartiendra de mettre le véhicule à sa disposition ;

Déboute la SARL Calitherm du surplus de ses demandes ;

Déboute la SARL Garage Eco de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne la SARL Garage Eco aux dépens ;

Condamne la SARL Garage Eco à payer à la SARL Calitherm la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier Le président

Valérie Roelofs Dominiques Gilles


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Douai
Formation : Chambre 2 section 1
Numéro d'arrêt : 21/02994
Date de la décision : 09/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-09;21.02994 ?
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