COUR D'APPEL DE DOUAI
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 23/00188 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UW7S
N° de Minute : 193
Ordonnance du mardi 31 janvier 2023
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. [V] [L]
né le 21 Novembre 1993 à TRIPOLIE
de nationalité LYBIENNE
Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]
dûment avisé, comparant en personne par visioconférence
assisté de Me Patrick DELAHAY, avocat au barreau de DOUAI, avocat commis d'office et de M. [J] [K] interprète assermenté en langue arabe, tout au long de la procédure devant la cour,
INTIMÉ
M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS
dûment avisé, représenté par Me MOREL Béril, avocat au barreau de PARIS pour le Cabinet CENTAURE
PARTIE JOINTE
M. le procureur général près la cour d'appel de Douai : non comparant
MAGISTRAT DELEGUE : Bertrand DUEZ, conseiller à la cour d'appel de Douai désigné par ordonnance pour remplacer le premier président empêché assisté de Jean-Luc POULAIN, greffier
DÉBATS : à l'audience publique du mardi 31 janvier 2023 à 08 h 30
Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe
ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le mardi 31 janvier 2023 à 14 heures
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;
Vu l'aricle L 743-8 du CESEDA ;
Vu la demande de l'autorité administrative proposant que l'audience se déroule avec l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ;
Vu l'accord du magistrat délégué ;
Vu l'ordonnance rendue le 30 janvier 2023 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [V] [L] ;
Vu l'appel motivé interjeté par M. [V] [L] par déclaration reçue au greffe de la cour d'appel de ce siège le 30 janvier 2023 ;
Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;
Vu l'audition des parties, les moyens de la déclaration d'appel et les débats de l'audience ;
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [V] [L], de nationalité libyenne a fait l'objet d'un placement en rétention administrative ordonné par monsieur le Préfet du Pas-de-Calais le 28 janvier 2023 à 20h10 pour l'exécution d'un éloignement vers le pays de nationalité au titre d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire délivrée le 06 décembre 2022 par monsieur le Préfet du Pas-de-Calais.
Aucun recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative n'a été déposé au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
' Vu l'article 455 du code de procédure civile
' Vu l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-Mer en date du 30/01/2023 ( 10h33) ,ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l'appelant pour une durée de 28 jours.
' Vu la déclaration d'appel du 30/01/2023 à 15h50 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative et à laquelle il sera renvoyé pour l'exposé des moyens de
Au titre de sa déclaration d'appel monsieur [V] [L] expose que, sur le fondement de l'obligation de quitter le territoire français du 06/12/2022 il a fait l'objet d'un premier placement en rétention administrative puis d'une main-levée de cette mesure par décision du juge des libertés et de la détention de Boulogne-sur-Mer en date du 08/12/2022. Il précise avoir été placé en assignation à résidence administrative le 08/12/2022 avant le placement en rétention administrative actuel.
Monsieur [V] [L] soutient les moyens d'appel suivants :
Absence de nécessité du placement en rétention administrative pour absence de risque de fuite dans la mesure où il indique toujours disposer d'une domiciliation stable à laquelle il a été assigné à résidence par monsieur le Préfet du Pas-de-Calais le 08 décembre 2022 ([Adresse 1]) et que le fait de ne plus avoir émargé à compter du 12 janvier 2023 pour raison de santé de fait pas disparaître ces garanties de représentation.
Insuffisance des diligences de l'administration en ce que la mesure d'obligation de quitter le territoire français a été déférée au tribunal administratif de Lille et que l'autorité préfectorale ne justifie pas avoir averti le tribunal administratif d'un nouveau placement en rétention administrative le 28/01/2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur les moyens appréciés par le juge des libertés et de la détention
Le moyen , soulevé devant le juge des libertés et de la détention était irrecevable, au visa de l'article L 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'il a pour objet la critique d'un élément de légalité interne de l'arrêté de placement en rétention administrative (existence de garantie de représentation) et que l'étranger appelant n'a déposé aucun recours à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative.
2) Sur les moyens soulevés pour la première fois en cause d'appel
Le moyen tenant à l'absence de diligence de l'autorité préfectorale pour défaut d'information au tribunal administratif saisi du recours contre l'obligation de quitter le territoire français est recevable.
La diligence prévue par l'article L 614-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par laquelle il est fait obligation à l'autorité préfectorale d'informer le président du tribunal administratif, saisi d'un recours contre une obligation de quitter le territoire français antérieure au placement en rétention administrative du requérant, est une diligence dont le juge des libertés et de la détention doit s'assurer du respect au titre de l'article L 741-3 du même code.
Pour autant il ressort de l'article L 614-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que cette diligence d'information n'a d'objet que pour permettre au tribunal administratif, informé de ce que l'étranger détenu est susceptible d'être libéré avant que le juge administratif ne statue, d'audiencer la requête du tribunal administratif dans les 144 heures prévues par ce texte.
Or en l'espèce, monsieur [V] [L] ayant fait l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français délivrée le 06/12/2022 avec un placement en rétention administrative du même jour transformé en assignation à résidence le 08/12/2022, le tribunal administratif, saisi d'une requête en annulation de l'obligation de quitter le territoire français le 06/12/2022 à 18h48, concomitamment au premier placement en rétention administrative, se devait déjà de statuer dans les 96 heures de l'article L 614-9 al 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La levée du placement en rétention administrative le 08/12/2022 et la mise sous assignation à résidence de monsieur [V] [L] impliquait déjà pour le tribunal administratif l'obligation d'audiencer le recours contre l'obligation de quitter le territoire français dans les 144 heures de l'article L 614-9 al 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il s'ensuit que le défaut d'information du tribunal administratif du second placement en rétention administrative de monsieur [V] [L] le 28/01/2023 n'a pas pour objet de réduire les droits de monsieur [V] [L] à un audiencement rapide de sa requête en annulation de l'obligation de quitter le territoire français par le tribunal administratif de Lille.
Dés lors l'absence d'accomplissement de cette formalité ne cause pas grief à monsieur [V] [L] et n'est donc pas susceptible d'entraîner la main-levée de l'actuel placement en rétention administrative.
Le moyen sera rejeté.
Sur la notification de la décision à M. [V] [L]
En application de l'article R. 743-19 al 2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'ordonnance rendue par le premier président ou son délégué est communiquée au ministère public. Elle est notifiée sur place à l'étranger et à son conseil, s'il en a un, ainsi qu'à l'autorité qui a prononcé la rétention.
Les parties présentes en accusent réception. Le greffier la notifie par tout moyen et dans les meilleurs délais aux autres parties qui en accusent réception.
En l'absence de M. [V] [L] lors du prononcé de la décision, la présente ordonnance devra lui être notifiée par les soins du greffe du centre de rétention administrative et en tant que de besoin, par truchement d'un interprète.
PAR CES MOTIFS :
DÉCLARE l'appel recevable ;
CONFIRME l'ordonnance entreprise ;
DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [V] [L] par l'intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d'un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l'autorité administrative ;
LAISSE les dépens à la charge de l'État.
Jean-Luc POULAIN, greffier
Bertrand DUEZ, conseiller
A l'attention du centre de rétention, le mardi 31 janvier 2023
Bien vouloir procéder à la notification de l'ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l'interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : M. [J] [K]
Le greffier
N° RG 23/00188 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UW7S
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE 193 DU 31 Janvier 2023 ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l'intéressé au greffe de la cour d'appel de Douai par courriel - [Courriel 3]) :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le
- M. [V] [L]
- par truchement téléphonique d'un interprète en tant que de besoin
- nom de l'interprète (à renseigner) :
- décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [V] [L] le mardi 31 janvier 2023
- décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS et à Maître Patrick DELAHAY le mardi 31 janvier 2023
- décision communiquée au tribunal administratif de Lille
- décision communiquée à M. le procureur général
- copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER
Le greffier, le mardi 31 janvier 2023
N° RG 23/00188 - N° Portalis DBVT-V-B7H-UW7S